Prise en charge des plaies articulaires - Pratique Vétérinaire Equine n° 171 du 01/07/2011
Pratique Vétérinaire Equine n° 171 du 01/07/2011

Article de synthèse

Auteur(s) : Antoine Lechartier*, Céline Mespoulhès-Rivière**

Fonctions :
*Clinique équine,
École nationale vétérinaire d’Alfort
7, avenue du Général-de-Gaulle,
94704 Maisons-Alfort Cedex
**Clinique équine,
École nationale vétérinaire d’Alfort
7, avenue du Général-de-Gaulle,
94704 Maisons-Alfort Cedex

Toute plaie qui concerne une articulation doit être considérée comme articulaire tant que le contraire n’a pas été démontré. La gestion doit donc en être rapide et agressive.

Le cheval, animal craintif par essence, s’écarte des dangers potentiels par la fuite, souvent de manière désordonnée et brutale, ce qui favorise la création de plaies plus ou moins étendues à divers endroits du corps. La conformation épurée de ses membres adaptés à la course donne peu de protection aux articulations. L’atteinte d’une structure synoviale complique sérieusement la cicatrisation et le retour à la fonction initiale, et augmente significativement le coût de la prise en charge. La rapidité et l’agressivité d’intervention lors d’une atteinte synoviale influencent considérablement le pronostic vital et sportif.

Il convient de distinguer les plaies articulaires récentes (datant de moins de 6 à 8 heures) des plaies anciennes ou chroniques (photo 1). Dans le premier cas, les bactéries ont contaminé la structure synoviale, mais n’ont pas eu le temps de proliférer suffisamment pour causer des dommages irréversibles aux tissus. Dans le second cas, l’organisme a réagi à l’infection en modifiant les propriétés histologiques des tissus atteints. Ces modifications entraînent une douleur liée à l’inflammation généralisée de la zone et un défaut de mobilité de l’articulation par l’accumulation de fibrine puis de tissu fibreux.

Dans ce genre de cas, le cheval n’est pas nécessairement douloureux au tout début, surtout si la structure synoviale est ouverte. En effet, la douleur est souvent liée à une augmentation de pression du liquide synovial sur la membrane. La plaie est parfois très petite et/ou déjà fermée lorsque le cheval montre une boiterie marquée. Ainsi, une atteinte articulaire n’est pas toujours certaine. Il convient d’adopter une approche systématique face à ces plaies et de postuler le pire jusqu’à preuve du contraire. Le propriétaire doit être impliqué dans l’enquête, afin qu’il comprenne les enjeux et qu’il prenne la bonne décision.

Dans cet article, nous présentons les étapes de la démarche diagnostique et thérapeutique décrite dans les publications en nous focalisant sur ce que le praticien peut faire sur le terrain. À chacun par la suite de développer sa propre conduite en fonction de son expérience et de ses convictions.

Anamnèse

Même si la plupart du temps le propriétaire est incapable de décrire les circonstances de l’accident, il est nécessaire d’évaluer le délai depuis l’apparition de la plaie, le degré de douleur associée, les traitements éventuellement mis en place et l’évolution clinique. La période des 6 heures, dite “golden period”, permet une intervention sur un tissu souillé mais non encore colonisé. Les plaies articulaires prises en charge dans les 24 heures après leur apparition ont significativement moins de risque de développer une arthrite septique [4]. Cependant, 53 % des cas traités dans les 24 heures ont développé des signes d’arthrite septique et seulement 65 % des chevaux traités ont survécu. Des études plus récentes n’ont pas permis de mettre en évidence de lien entre la rapidité d’intervention et le taux de succès [2]. D’autres paramètres influencent le pronostic, comme le degré de souillure de la plaie ou la virulence des bactéries retrouvées. Dans le cas d’une plaie ancienne, le pronostic fonctionnel est toutefois toujours engagé et le propriétaire doit en être informé.

Examen clinique

Examen général

Classiquement, avant même d’inspecter une plaie, il convient d’examiner le cheval dans son ensemble, d’évaluer son caractère, sa condition cardiovasculaire, sa température, son statut digestif. Apprécier le caractère du cheval permet de déterminer quels moyens de contention seront potentiellement nécessaires : un simple tord-nez, une sédation, une sédation et une anesthésie locale, ou une anesthésie générale. Si l’animal présente une fréquence cardiaque et/ou respiratoire élevée, un temps de recoloration capillaire prolongé et des muqueuses pâles, il a peut-être perdu beaucoup de sang. Des examens complémentaires et les traitements adaptés doivent être mis en place avant même de s’intéresser à la plaie. Ainsi, pendant que la plaie est inspectée, le cheval peut être stabilisé en vue d’une éventuelle intervention chirurgicale sous anesthésie générale.

Examen spécifique de la plaie

L’examen doit être réalisé dans un endroit propre, sec, bien éclairé, et dans un environnement calme. Afin d’identifier les structures potentiellement atteintes, le clinicien doit examiner les structures anatomiques sous-jacentes, que la plaie soit fraîche et bien définie ou déjà partiellement fermée et de la taille d’une tête d’épingle. Le degré de boiterie est variable selon le poids de l’animal, la durée de l’infection et la pathogénicité de l’organisme. De plus, un cheval dont la plaie articulaire draine par la lacération est souvent moins douloureux qu’un animal dont la plaie a guéri et chez lequel l’infection est emprisonnée dans la structure synoviale. La distension articulaire est presque toujours présente. En revanche, il peut parfois être difficile de détecter une quantité accrue de liquide synovial si l’articulation est protégée par plusieurs couches de tissus mous (par exemple l’épaule) ou si elle possède une capsule articulaire très petite (par exemple les articulations distales du tarse). À la palpation, le membre est œdémateux, chaud, et la manipulation est souvent douloureuse. Les plaies articulaires ne présentent pas toujours un écoulement franc de liquide synovial. A contrario, un liquide inflammatoire séro-hémorragique et plus ou moins visqueux est présent dans la plupart des plaies de plus de 6 à 8 heures chez le cheval, sans pour autant qu’il s’agisse d’une atteinte synoviale (photo 2). L’examen raisonné de la région atteinte, la palpation/pression des récessus synoviaux et la mise en contrainte du membre peuvent faciliter un écoulement synovial clairement identifiable.

Examen radiographique

L’articulation potentiellement atteinte doit être radiographiée (au minimum deux incidences orthogonales). Cela permet d’identifier une éventuelle fracture, la présence d’un corps étranger métallique ou encore des traces d’air dans les récessus proximaux, ce qui est pathognomonique d’une pénétration articulaire. Si la plaie est ancienne, des signes d’ostéite ou d’ostéomyélite à court terme et d’arthrose à plus long terme peuvent apparaître, mais la sensibilité de la radiographie pour ce type de lésion est faible.

Examen échographique

L’échographie est complémentaire de la radiographie. Elle permet de mettre en évidence une lésion ligamentaire, une fragmentation osseuse, une prolifération des villosités synoviales (cas plus chroniques). Elle peut aussi localiser et caractériser le liquide synovial, avec ou sans présence de fibrine par exemple, et aider à son prélèvement. L’examen est parfois limité si de l’air a pénétré dans l’articulation ou le tissu sous-cutané. L’échographie est également plus sensible que la radiographie pour repérer les corps étrangers (photo 3) [3].

Préparation

Avant d’inspecter l’intérieur de la plaie, il convient de tondre largement la zone en évitant la pénétration de poils dans la plaie, et de raser les marges de celle-ci. Pour cela, elle peut être recouverte d’un gel stérile sur lequel les poils se collent et qu’il est facile de retirer, ou des compresses humides sont utilisées. Si la plaie est proche du pied, un parage complet de la sole et de la fourchette ainsi qu’un râpage du sabot permettent de limiter la contamination potentielle de la zone lors des examens et pour la suite de la prise en charge.

La peau autour de la plaie est nettoyée puis préparée aseptiquement (savon antiseptique). La plaie est lavée avec une solution diluée d’antiseptiques (povidone iodée 0,1 %, soit 10 ml de solution à 10 % dans 1 l de NaCl ou de lactate de Ringer stérile, ou encore chlorhexidine diluée à 0,05 %). L’inspection en profondeur de la plaie s’effectue très délicatement avec des gants stériles. Une petite sonde stérile peut aussi être utile lors de petites plaies. Afin de garantir l’immobilité du cheval pendant l’exploration, une anesthésie tronculaire de la région peut être réalisée sans hésitation.

Prélèvement et analyse du liquide synovial

Si aucune trace de liquide synovial n’a été mise en évidence jusque-là, cela ne signifie pas que l’articulation n’a pas été atteinte avant de se refermer. Toutes les structures synoviales en rapport potentiel avec la plaie doivent être prélevées de manière stérile. Le choix du site de ponction est très important. Il doit être éloigné de la plaie et facile d’accès. Une partie du prélèvement sert à réaliser une culture microbiologique avec antibiogramme sur les germes potentiellement isolés, l’autre partie à quantifier les protéines ou solides totaux du liquide synovial, le nombre de leucocytes et le pourcentage de neutrophiles. Un taux de protéines supérieur à 35 g/l, un nombre de leucocytes supérieur à 30 000 cellules/µl, mais surtout un pourcentage de neutrophiles supérieur à 85 % sont pathognomoniques d’un phénomène septique. Tout comptage cellulaire supérieur à 15 000 cellules/µl peut laisser suspecter une infection (tableau) [11]. Si l’articulation est ouverte, le liquide synovial n’est plus sous pression et ces prélèvements sont souvent difficiles à obtenir. Si le liquide ne peut être récupéré pur, injecter un peu de solution stérile dans l’articulation avant d’aspirer un échantillon peut permettre de faire une lame afin d’observer d’éventuels agents pathogènes et d’envoyer un échantillon pour la culture [10].

Le conditionnement du liquide synovial pour l’analyse microbiologique influence considérablement les résultats. D’une manière générale, un germe pathogène est isolé dans environ 30 à 79 % des cas. Le transport en hémoculture a montré les meilleurs résultats [2]. La biopsie synoviale ne semble pas améliorer le résultat [8]. La mise en culture en milieu anaérobie et/ou de Sabouraud (levure, mycose) permet d’élargir le spectre des agents pathogènes potentiels. Les plus fréquemment isolés dans le liquide synovial lors de lacérations sont des bactéries de l’environnement (Enterobacter spp., Streptococcus spp., Staphylococcus spp., Pseudomonas spp.) ou des anaérobies [9, 10]. Les contaminations étant larges, il n’est pas rare d’isoler plusieurs micro-organismes à la fois. Il convient de répéter la recherche des agents pathogènes avec l’antibiogramme quand le cheval a été traité ou que la plaie est fermée. Cela permet d’identifier les éventuelles bactéries résistantes au traitement mis en place [11]. Ce second prélèvement a également une valeur pronostique. Le taux de retour au niveau d’activité antérieur est significativement plus faible chez les chevaux pour lesquels la culture est positive [12]. L’isolement d’un germe multirésistant peut motiver l’arrêt des traitements en raison d’un pronostic vital réservé et/ou d’un dépassement du budget espéré.

Distension de l’articulation

Après cette première étape, l’articulation est distendue avec une solution de chlorure de sodium à 0,9 % ou de lactate de Ringer, à raison de 5 à 50 ml en fonction de l’articulation concernée. La distension peut être suspendue de temps en temps pour vérifier que le liquide revient dans la seringue. Cela signifie que l’injection est bien réalisée en voie intra-articulaire. Si l’injection ne s’accompagne pas d’une distension des récessus, deux options existent :

– l’injection est périarticulaire (surveiller un éventuellement gonflement sous-cutané) ;

– l’articulation est ouverte et le liquide s’écoule par la plaie (photo 4).

Dans certains cas, il peut être nécessaire de mobiliser le membre pour obtenir l’écoulement de liquide. En effet, lors d’un traumatisme comme un couronnement du carpe, les plans tissulaires coulissent les uns par rapport aux autres et la voie de communication entre la plaie et l’articulation peut ainsi être virtuellement fermée. Le fait de remettre le membre dans la position du traumatisme (flexion du carpe dans ce cas) permet de mettre en évidence cette communication. Travailler dans un endroit bien éclairé est aussi très important car le liquide s’écoule parfois en nappe et ne se voit pas facilement. L’injection d’un antibiotique de couleur blanche (pénicilline procaïnée, triméthoprime-sulfamides) ou d’un produit de contraste dans l’articulation peut aider à la localisation respectivement macroscopique ou radiographique d’un trajet entre la plaie et l’articulation [11].

Tous ces actes peuvent être réalisés sur le terrain et permettent dans la plupart des cas d’établir un diagnostic assez fiable. Seule l’analyse du liquide synovial doit être effectuée au cabinet ou à la clinique. Si ces examens n’ont pas pu être réalisés dans de bonnes conditions, le diagnostic reste fondé sur une suspicion clinique qui doit être expliquée au propriétaire. En cas de doute, il est préférable de prendre des précautions et de proposer de référer le cheval, compte tenu des potentielles conséquences d’une sous-estimation des lésions présentes [11].

Traitement des plaies synoviales

Les procédures décrites ci-dessous correspondent au traitement standard appliqué et décrit par la plupart des manuels en cas de plaie articulaire. La plaie doit être débridée le plus rapidement possible de l’extérieur et de l’intérieur afin d’éviter la colonisation des bactéries et leur éventuelle multiplication jusqu’au nombre magique de 106 bactéries par gramme de tissu qui se traduit systématiquement par une infection.

Traitement chirurgical

Débridement et lavage de l’articulation

Cette étape doit être réalisée de manière aseptique. L’utilisation de l’arthroscopie est fortement recommandée car cela permet de mieux évaluer les dégâts causés à l’articulation, de débrider celle-ci sous contrôle visuel direct et, à l’aide d’instruments, de retirer les dépôts de fibrine, les souillures et éventuellement les corps étrangers (photos 5a et 5b). De plus, le volume du liquide passé dans l’articulation étant plus important, l’élimination des bactéries et des facteurs de l’inflammation est plus efficace. Classiquement, une articulation est lavée avec 10 à 15 l d’une solution de chlorure de sodium ou de lactate de Ringer. L’ajout d’antiseptiques ou d’antibiotiques dans le liquide de lavage est inutile, [11]. L’utilisation de l’arthroscopie n’est pas toujours nécessaire. Si la plaie est récente (moins de 6 heures et peu contaminée), que l’examen du liquide synovial est peu inflammatoire, que l’échographie révèle un liquide synovial anéchogène et que les tissus mous (capsule articulaire, villosités, ligaments, etc.) sont peu modifiés, un lavage à l’aiguille sous neuroleptanalgésie est envisageable. Pour cela, il convient d’utiliser des aiguilles de 14G (intrapéritonéales) et de changer régulièrement le sens de circulation du liquide et le degré de flexion de l’articulation (photo 6). L’avantage de ce type de lavage est qu’il ne nécessite pas toujours d’anesthésie générale, qu’il est moins cher et peut être répété à la demande. Cependant, il ne permet pas un bon débridement ni une évaluation complète des lésions. Le volume passé dans l’articulation est souvent proche de 3 l sur cheval debout, il peut être plus important sur cheval couché.

Parage et fermeture de la plaie

Le parage de la plaie, de la peau vers l’articulation à la lame de scalpel permet de retirer les tissus nécrotiques et les souillures de la manière la plus atraumatique possible. Retirer les souillures en frottant les tissus agressivement à la compresse n’est pas recommandé. Il est préférable par exemple de disséquer délicatement le plan superficiel des tissus à l’aide de ciseaux de Metzenbaum. Cette étape doit être effectuée avec des instruments séparés. Un rinçage de la plaie doit être effectué à l’aide de liquide isotonique stérile, et un léger curetage peut y être associé si nécessaire (cette étape ne doit pas être excessive car un œdème tissulaire se développe rapidement) (photo 7). Si le parage de la plaie permet une fermeture sans tension, les marges sont refermées classiquement en utilisant du fil monofilament non résorbable (polyéthylène, nylon) avec des points séparés en “U” par exemple. Le tissu sous-cutané n’est généralement pas refermé afin de limiter la quantité de matériel présent dans une plaie a minima contaminée. Il est préférable de limiter la cicatrisation par seconde intention sur les plaies synoviales car l’articulation est plus à risque de contamination rétrograde depuis le bandage dans ces conditions [11]. Cependant, la fermeture d’une plaie fortement contaminée aggrave le risque de sepsis dans l’articulation et la fermeture par première intention retardée peut être envisagée après un drainage sur 2 à 4 jours. Un cheval avec une plaie articulaire doit être plâtré pour améliorer son confort et limiter les tensions sur les marges de la plaie [5]. Ce plâtre peut être coupé en deux une fois sec ou après le réveil afin de permettre une inspection facile de la plaie aussi souvent que nécessaire.

Suivi

La plaie est inspectée le jour suivant. Un prélèvement du liquide synovial peut être réalisé dès le lendemain du lavage pour évaluer la diminution du phé nomène inflammatoire, mais nous préférons attendre 3 à 5 jours car les paramètres du liquide synovial mettent un certain temps à revenir vers des valeurs usuelles [9-11]. Certains auteurs préfèrent répéter plus souvent ces mesures pour intervenir plus précocement en cas de réponse insatisfaisante au traitement. Nous préférons nous fonder sur la clinique (degré de confort du cheval et aspect de la plaie), car toute ponction synoviale présente un risque infectieux et entretient le phénomène inflammatoire. Cependant, une étude récente n’a pas mis en évidence de modification de la concentration synoviale en SAA (sérum amyloïde A) lors d’arthrocentèses répétées. Selon les écoulements de la plaie, le pansement est changé tous les jours ou tous les 2 jours pendant la période de traitement antibiotique par voie locale, puis tous les 4 jours. Cet aspect du traitement représente un poste financier non négligeable.

Antibiothérapie

Une fois les prélèvements synoviaux réalisés, le cheval peut recevoir des antibiotiques par voies générale et locale. Il est recommandé d’administrer des antibiotiques à large spectre jusqu’à l’obtention d’un antibiogramme. Une association d’aminoglycoside (gentamicine 6,6 mg/kg par voie intraveineuse 1 fois/j) et de pénicilline (22 000 UI/kg par voie intramusculaire 2 fois/j) permet de couvrir l’ensemble du spectre incluant les anaérobies alors que l’emploi des céphalosporines (cefquinome ou ceftiofur) ne le garantit pas [6, 13].

Ces mêmes antibiotiques sont administrés par voie locale intra-articulaire ou sous forme de perfusion locorégionale. L’opération est généralement réalisée deux à trois fois après le premier lavage à 24 ou 48 heures d’intervalle. L’injection intra-articulaire permet d’atteindre la plus forte concentration intra-articulaire d’antibiotique (supérieure à 300 fois la concentration minimale inhibitrice ou CMI) et une perfusion locorégionale, 55 fois la CMI pendant 24 heures. Les antibiotiques couramment utilisés étant concentration-dépendants, leur utilisation locale permet d’en augmenter l’efficacité sans affecter l’organisme. Injecter les antibiotiques toutes les 24 heures permet de maintenir leur concentration bien au-dessus de la CMI. Les administrer toutes les 48 heures suffit à maintenir une concentration en antibiotiques efficace pendant au moins 24 heures, à ne pas réaliser des actes invasifs tous les jours, et réduit le coût du traitement [11]. Dans tous les cas, il est indispensable de prolonger l’antibiothérapie systémique bien au-delà de la disparition des signes cliniques, au minimum pendant 3 semaines, voire plus longtemps en cas de cicatrisation tardive [6, 13].

Anti-inflammatoires non stéroïdiens

L’inflammation initiale doit être contrôlée. L’objectif est de limiter la formation anarchique de fibrine et de prostaglandines (qui endommagent le cartilage articulaire) et de contrôler la douleur. Plusieurs molécules sont utilisables : le méloxicam, la flunixine méglumine, la phénylbutazone ou le kétoprofène. Il convient de réduire au minimum la durée d’administration (3 à 5 jours à pleine dose) et de diminuer progressivement les doses (3 à 5 jours à demi-dose) afin de réduire les risques d’ulcère gastrique et de colite.

Analgésie

Une fois le phénomène septique installé, l’inflammation et la douleur associée peuvent être très intenses et se prolonger au-delà de la phase inflammatoire. La gestion de la douleur chez le cheval est indispensable en raison des risques de fourbure sur le membre controlatéral, mais également pour ses effets sur l’appareil digestif par exemple. Si l’utilisation d’anti-inflammatoires est incontournable afin de limiter les effets nocifs du processus inflammatoire sur le cartilage, l’analgésie doit être complétée par l’administration d’opioïdes (par voies générale, intra-articulaire ou épidurale) ou d’anesthésiques locaux. Un support en fourchette est placé sur le pied opposé à la lésion et le box doit être le plus confortable possible (augmenter la litière ou placer un tapis en caoutchouc sous la litière) [7].

Coût et pronostic

Les plaies articulaires prises en charge rapidement à la suite de l’accident (dans les 6 à 12 heures) s’accompagnent d’un taux de retour à l’activité antérieure avoisinant les 50 % avec un taux de survie d’environ 80 % [12]. Néanmoins, le coût associé à ce résultat avoisine les 3 000 € et peut facilement doubler, voire tripler. Un traitement moins agressif au départ est plus attractif pour le propriétaire et s’accompagne parfois de bons résultats. En revanche, si le traitement n’a pas été suffisamment agressif au début, les récidives du trouble initial sont plus lourdes à gérer et s’accompagnent d’un pronostic beaucoup plus sombre.

Conclusion

Une plaie en regard d’une articulation, qu’elle soit large ou de la taille d’une tête d’épingle, doit toujours être examinée à travers le prisme de la suspicion et il convient de déterminer si l’articulation a ou non été atteinte.

Ce travail peut généralement être réalisé sur le terrain. La gestion de la plaie nécessite ensuite des soins plus ou moins lourds. Adopter une démarche cohérente et facilement explicable étape par étape à l’entourage du cheval permet de prendre la décision la mieux adaptée à la situation, à savoir traiter référer ou parfois euthanasier l’animal.

Références

  • 1. Blickslager A. Role of NSAIDS in pain management in horses. In: Proceeding of AAEP focus on the foot. Am. Assoc. Eq. Pract., Ohio. 2009;218-223.
  • 2. Dumoulin M, Pille F, Van Den Abeele AM et coll. Use of blood culture medium enrichment for synovial fluid culture in horses: A comparison of different culture methods. Equine Vet. J. 2010;42 (6)541-546.
  • 3. Farr AC, Hawkins JF, Baird DK, Moore GE. Wooden, metallic, hair, bone, and plant foreign bodies in horses: 37 cases (1990-2005). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2010;237:1173-1179.
  • 4. Gibson KT, McIlwraith CW, Turner AS et coll. Open joint injuries in horses:58 cases (1980-1986). J. Am. Vet. Med. Assoc. 1989;194:398-404.
  • 5. Ketzner KM, Stewart AA, Byron CR, Stewart M, et coll. Wounds of the pastern and foot region managed with phalangeal casts: 50 cases in 49 horses (1995-2006). Aust. Vet. J. 2009;87(9):363-368.
  • 6. Launois T. Mise au point sur les techniques d’antibiothérapie locale. Prat. Vét. Equine. 2008;158.
  • 7. Matthews NS, Carroll GL. Review of equine analgesics and pain management. In: 53rd Annual convention of the american association of equine practitioners. AAEP, Orlando, FL, USA Orlando, FL. 2007.
  • 8. Montgomery RD, Long IR, Milton JL et coll. Comparison of aerobic wounds involving synovial structures 213 culturette, synovial membrane biopsy, and blood culture medium in the detection of canine bacterial arthritis. Vet. Surg. 1989;18:300-303.
  • 9. Moore RM, Schneider RK, Kowalski J et coll. Antimicrobial susceptibility of bacterial isolates from 233 horses with musculoskeletal infection during 1979-1989. Equine Vet. J. 1992;24:450-456.
  • 10. Schneider RK. Synovial and osseous infections. In: Auer JA and Stick JA. Equine Surg. 3rd ed. Elsevier. 2006:1121-1130.
  • 11. Stashak TS. Diagnosis and management of wound involving synovial structures. In: Stashak TS and Theoret CL. Equine wound management. 2nd ed. Blackwell Publishing. 2008:463-489.
  • 12. Taylor AH, Mair TS, Smith LJ, Perkins JD. Bacterial culture of septic synovial structures of horses: does a positive bacterial culture influence prognosis? Equine Vet. J. 2010;42(3):213-218.
  • 13. Tenedos S. Application raisonnée de l’antibiothérapie en pratique équine. Prat. Vét. Equine. 2009;161.

Éléments à retenir

→ Une plaie articulaire doit être prise en charge le plus rapidement possible (idéalement dans les 6 heures qui suivent la contamination).

→ Une analyse du liquide synovial et une mise sous pression de l’articulation permettent d’objectiver la contamination de l’articulation.

→ Un traitement agressif est nécessaire mais pas suffisant à l’obtention de bons résultats. Le délai d’intervention et les germes isolés dans le liquide synovial influencent fortement le pronostic.

→ Un lavage et un débridement associé à une antibiothérapie par voies locale et générale sont à la base du traitement et s’accompagnent de soins de plaie en respectant scrupuleusement l’asepsie.

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