Comment estimer la capacité cardiaque chez le cheval athlète ? - Pratique Vétérinaire Equine n° 169 du 01/01/2011
Pratique Vétérinaire Equine n° 169 du 01/01/2011

Article de synthèse

Auteur(s) : Emmanuelle van Erck-Westergren

Fonctions : DMV, PhD, Dipl. ECEIM
13, avenue de l’Équinoxe
1200 Bruxelles, Belgique

Il existe chez le cheval une corrélation entre les performances athlétiques et la capacité cardiaque. L’évaluation de cette dernière permet donc, dans une certaine mesure, d’envisager la qualité d’un athlète.

L’homme de cheval décrit souvent un cheval exceptionnel en disant qu’il “a du cœur”. Si cette qualité se rapporte initialement à son aptitude particulière et à son courage en compétition, cette qualité ne pourrait-elle pas également être prise au pied de la lettre ? Est-il vrai que les meilleurs athlètes équins ont un cœur de taille exceptionnelle ? Pouvoir prédire l’aptitude à la performance a toujours été un des objectifs majeurs des investigations en physiologie sportive.

Le cheval : un athlète hors normes

Consommation d’oxygène

L’extraordinaire potentiel athlétique inné des chevaux est inhérent à des adaptations physiologiques naturellement sélectionnées pour favoriser la vitesse. Le cheval a une capacité à consommer l’oxygène (par kg de poids vif) supérieure à toute autre espèce de mammifère [4]. Chez les pur-sang de galop, la consommation maximale en oxygène (VO2max), un paramètre reflétant la capacité aérobie des chevaux, est directement corrélée aux performances : plus la VO2max est élevée, meilleures sont les performances en course. Cette VO2max est, par définition, déterminée par le fonctionnement des différents systèmes transportant l’oxygène dans l’organisme, à savoir les systèmes musculaire, cardiovasculaire et respiratoire. Chez un cheval, la masse musculaire peut représenter jusqu’à 55 % du poids, ce qui est exceptionnellement élevé [32]. À l’effort, face à une spectaculaire augmentation du métabolisme musculaire, la demande en O2 devient proportionnellement considérable et le niveau de VO2max atteint chez les athlètes équins est inhabituel. Un galopeur peut atteindre une VO2max de l’ordre de 180 ml/kg/min alors qu’elle est en moyenne de seulement 70 ml/kg/min chez les athlètes humains d’élite.

Système cardiovasculaire

L’adaptation du système cardiovasculaire à la réalisation d’un effort intense est phénoménale chez le cheval. Tout d’abord au niveau vasculaire et sous l’influence des catécholamines larguées dans la circulation au moment de l’effort, la contraction splénique déclenche le largage d’une réserve importante d’érythrocytes [24]. Par rapport à d’autres espèces de mammifères, le poids relatif de la rate est élevé chez le cheval (1,1 % du poids vif contre 0,3 % chez l’homme et le chien) [32]. Ce phénomène physiologique permet d’augmenter le contenu artériel en oxygène et d’en optimiser le transport jusqu’aux muscles.

La fréquence cardiaque maximale peut atteindre des valeurs huit fois supérieures à celle de repos, soit 240 battements par minute, ce qui est très élevé pour un animal de cette taille. Elle dépend de chaque individu et n’est pas en relation avec ses capacités sportives. Chez le cheval adulte, elle n’est pas influencée par le niveau d’entraînement et l’est peu par l’âge [11].

Par rapport aux autres espèces, la capacité cardiaque exceptionnelle des chevaux est également liée à un cœur de taille proportionnellement plus large, et par sa capacité à battre à des fréquences cardiaques particulièrement élevées à l’effort [15]. Le débit cardiaque (Qc) est déterminé par la fréquence cardiaque (FC) et le volume d’éjection systolique (VES) :

Qc (l/min) = VES (l) × FC (min-1)

Le débit sanguin augmente en réponse à une demande métabolique croissante. Chez le cheval, le débit cardiaque au repos est de l’ordre de 25 l/min et peut augmenter jusqu’à 300 l/min à l’effort chez le pur-sang à l’effort maximal [7].

À l’effort maximal, le volume d’éjection systolique est le déterminant principal du débit cardiaque.

Dimensions cardiaques et performances

Dans la filière des courses de galop, en particulier aux États-Unis, les propriétaires ou entraîneurs ont souvent recours à l’échocardiographie pour obtenir une estimation de la capacité cardiaque. Ces pratiques ont été nourries par les résultats d’autopsie réalisées chez des pur-sang d’exception morts naturellement, chez lesquels un cœur de dimension ou de poids exceptionnel a été trouvé. Cela a été le cas de chevaux comme Secrétariat, qui avait un cœur estimé (non pesé) à plus de 10 kg, soit le double du poids d’un cœur équin “normal”. Les cœurs de chevaux ayant eu des performances records en course, comme Eclipse ou Phar Lap étaient aussi exceptionnellement grands [19]. La masse cardiaque représente 0,9 à 1,1 % du poids corporel chez le cheval, ce qui est supérieur aux autres espèces de mammifères [38].

Mais outre ces rapports anecdotiques, des études plus récentes ont démontré qu’il existe une relation entre les performances et les dimensions cardiaques. Il a été clairement établi que la VO2max est étroitement corrélée à la masse myocardique ventriculaire gauche (MMGV) et au débit cardiaque (figure 1). Une corrélation a pu être démontrée entre les résultats en course et cet indice de MMVG, qui peut être calculé à partir de mesures échocardiographiques.

Une étude menée chez 200 chevaux de steeple a permis de démontrer qu’il existe une relation linéaire entre les dimensions cardiaques et les paramètres officiels de performance (timeform ratings) enregistrés en course [43]. Chez les chevaux de plat, qui courent sur des distances plus courtes, ce ne sont pas les paramètres de dimensions cardiaques, mais les estimations de la masse ventriculaire gauche qui sont les plus étroitement corrélées aux performances à l’effort [41]. Parce que les dimensions cardiaques déterminent à la fois le volume d’éjection systolique et la VO2max, une estimation de la morphologie et des dimensions cardiaques est une appréciation indirecte des capacités athlétiques. Une étude menée sur 482 chevaux de course de plat ou de steeple et courant sur des distances variables a permis de montrer que les chevaux courant sur des distances plus longues ont des cœurs plus volumineux. Ces résultats suggèrent que des différences même subtiles en termes de type d’entraînement ou de compétition induisent des adaptations morphologiques en rapport avec le degré d’endurance, c’est-à-dire de capacité aérobie, requis. Chez les chevaux plus âgés ou courant sur des distances plus longues, la fraction d’éjection ventriculaire gauche et de la MMVG a été positivement corrélée aux résultats en course. Par extrapolation, ces paramètres ont pu expliquer à eux seuls 25 à 35 % des variations en performance [44].

Adaptations à l’entraînement et conséquences fonctionnelles

Hypertrophie cardiaque

Chez l’homme, de très nombreuses études ont permis de démontrer qu’il existe des adaptations spécifiques de la morphologie cardiaque en fonction des différents types d’entraînement et de compétitions [39]. Lors d’efforts d’endurance, un débit cardiaque élevé pendant une période prolongée sans modification significative des pressions artérielles induit une augmentation de la charge diastolique et stimule une dilatation excentrique [13]. À l’inverse, des efforts de puissance de courte durée sont associés à une augmentation de la pression artérielle et de la postcharge, et s’accompagnent d’une adaptation de type hypertrophie concentrique [27]. Chez le cheval, l’entraînement a également un effet démontré sur les dimensions cardiaques telles qu’évaluées par l’examen échocardiographique. La plupart des études ont été menées chez des chevaux de course [2, 18, 42-45]. L’entraînement chez les chevaux de course induit une augmentation de l’épaisseur du myocarde, ainsi qu’une augmentation de la largeur des cavités ventriculaires. Chez des jeunes pur-sang de 2 ans, une augmentation de plus de 30 % de la masse cardiaque (estimée par échocardiographie) a pu être mise en évidence après 3 mois d’entraînement [45].

Conséquences de l’hypertrophie cardiaque

Cette hypertrophie semble être aussi associée au développement d’insuffisances valvulaires atrio-ventriculaires. En effet, comme chez l’homme, la prévalence des souffles de régurgitation augmente avec l’âge et le niveau d’entraînement [6]. Une étude relate que cette prévalence peut atteindre une valeur de 54 % pour les insuffisances tricuspides et 21 % pour les insuffisances mitrales chez les chevaux de steeple [43]. Ces insuffisances ne sont généralement pas associées à des anomalies structurelles des valvules. Le développement de pressions artérielles extrêmes, chez le cheval à l’effort maximal, est un facteur reconnu de l’hémorragie pulmonaire induite à l’exercice. Cette hypertension artérielle pulmonaire pourrait également contribuer de manière significative à l’apparition de régurgitations au niveau des valvules tricuspides chez les chevaux de différentes disciplines [29, 40].

Ces insuffisances valvulaires atrio-ventriculaires secondaires au travail d’entraînement progressent en général lentement et ne semblent pas avoir de conséquences majeures sur les performances de la plupart des chevaux de sport et de course. Néanmoins, dans une étude menée chez les chevaux de steeple, ceux qui ont obtenu les meilleurs records n’ont pas eu de souffle d’insuffisance atrio-ventriculaire malgré une forte prévalence dans cette population [44]. Ainsi, même des insuffisances subtiles auraient des répercussions sur les performances, en tout cas chez les chevaux pratiquant ce type de compétitions.

Enfin, les insuffisances atrio-ventriculaires qui peuvent avoir pour conséquence la surcharge volumique chronique au niveau des oreillettes prédisposent à la fibrillation atriale. Celle-ci est la première cause de contre-performance d’origine cardiovasculaire chez les chevaux de course [39]. Une prévalence de fibrillation atriale de l’ordre de 2,5 % a été rapportée dans une population de chevaux de races variées [8].

Paramètres d’estimation de la capacité cardiaque

Mesures des dimensions cardiaques par échocardiographie

La visualisation de l’ensemble du cœur et la réalisation de mesures des dimensions cardiaques par cette méthode requiert l’utilisation d’une sonde phased-array de 2,5 MHz. Elle permet l’obtention d’images jusqu’à 30 cm de profondeur. Le mode bidimensionnel et temps-mouvement (TM) permet d’obtenir des images standardisées à partir desquelles des mesures fiables peuvent être réalisées. Lors de l’examen échocardiographique au repos, le cheval ne doit pas être tranquillisé et ses fréquences cardiaques devraient être stabilisées à une valeur de repos usuelle.

Paramètres bidimensionnels

Une appréciation globale des dimensions cardiaques peut être obtenue à partir d’images échocardiographiques. La réalisation de mesures des parois et des cavités ventriculaires en systole et en diastole permet d’apprécier indirectement la capacité volumique cardiaque, les mouvements des parois du myocarde et d’obtenir des paramètres simples de fonction cardiaque. Les mesures ventriculaires gauches sont celles qui présentent le plus d’intérêt, qui sont les plus faciles à obtenir et les plus répétables. Une bonne connaissance de l’anatomie cardiaque est nécessaire ainsi que suffisamment d’expérience pour obtenir des coupes standardisées. Quelques valeurs de référence ont cependant été proposées selon les disciplines [1, 2, 30]. Les variations entre les opérateurs sont reconnues comme pouvant être importantes. À partir d’une image parasternale droite, en coupe transversale, au niveau des cordages tendineux des valvules mitrales, une image en mode TM est analysée afin d’obtenir les paramètres suivants :

– le diamètre interne du ventricule gauche en diastole (DIVGd) et en systole (DIVGs);

– l’épaisseur du septum interventriculaire en diastole (SIVd) et en systole (SIVs);

– l’épaisseur de la paroi libre du ventricule gauche en diastole (PLVGd) et en systole (PLVGs) (photos 1a et 1b).

Les mesures obtenues peuvent s’interpréter correctement seulement après un examen préalable de la morphologie générale du cœur (photos 2a et 2b). En effet, en cas d’hypertrophie excentrique liée à l’entraînement, l’apex du ventricule gauche conserve un aspect normal en forme de “V” alors qu’en cas d’hypertrophie pathologique son apex devient globuleux.

Ces mesures sont aussi évaluées lors d’une échocardiographie de stress. L’objectif est d’obtenir des images en mode TM lorsque les FC sont élevées et représentatives de l’effort. Les FC doivent dépasser 100 bpm. Pour ce faire, le cheval doit être évalué soit à l’effort soit après une stimulation pharmacologique à la dobutamine associée à de l’atropine [33]. Du fait de la diminution très rapide de la FC après un effort, les échocardiographies de stress à l’effort se réalisent obligatoirement sur tapis roulant. Le cheval est arrêté après un effort intense, et les images TM standardisées sont obtenues en plaçant la sonde sur le thorax immédiatement après l’arrêt du cheval. Cette technique permet surtout de détecter des troubles de la motilité à l’effort chez les chevaux présentant des pathologies cardiaques. Si la comparaison des mesures au repos et à l’effort a déjà été effectuée, aucune étude n’a actuellement été réalisée sur une éventuelle corrélation entre ces mesures et la performance [34].

Estimation de la masse myocardique

La MMVG représente un pourcentage du poids du cœur. Son calcul est estimé à partie des mesures échographiques. La formule suivante est appliquée pour estimer sa valeur [5] :

MMVG = 1,5 × (SIVd + PLVGd + DIVGd)3 – (DIVGd)3.

La valeur moyenne de la MMVG est de l’ordre de 3 200 g chez le cheval et sa valeur évolue avec l’âge et l’état d’entraînement [24]. Elle est corrélée positivement aux performances en course [42].

Paramètres fonctionnels

Fraction d’éjection systolique

Parmi les paramètres fonctionnels qui peuvent être dérivés des mesures échocardiographiques précitées, la fraction de raccourcissement (FR) est souvent retrouvée. Il s’agit de la mesure de la capacité contractile du cœur. Elle se calcule selon la formule suivante :

FR (%) = 100 * (DIVGd-DIVGs)/DIVGd.

Sa valeur est dépendante de la race et de l’âge du cheval et a été démontrée comme étant un facteur prédictif de la performance chez les chevaux de course de plus de 2 ans [1, 44]. Elle augmente en cas de stress, d’évaluation après un effort ou d’insuffisances valvulaires atrio-ventriculaires [26]. Elle diminue en cas d’anomalies de la contractilité pathologiques (myocardites ou cardiomyopathies) ou lors de la sédation.

Fréquence cardiaque

Chez les athlètes humains, l’entraînement induisant une dilatation excentrique physiologique s’accompagne à terme d’une bradycardie relative, la fréquence cardiaque de ces athlètes prise au repos étant inférieure à celle d’individus sédentaires.

Chez le cheval, la fréquence cardiaque au repos n’est pas un indicateur fiable de la capacité cardiaque pour diverses raisons et, en particulier, du fait que la seule présence d’un individu à proximité augmente cette fréquence cardiaque de repos. À une intensité de travail donnée, la fréquence cardiaque d’un cheval entraîné, ou avec une capacité cardiaque plus élevée, est inférieure à celle d’un cheval non entraîné. Cette observation n’est valable que si les chevaux sont d’âge comparable et en bonne santé. La comparaison du comportement de la fréquence cardiaque intra- ou interindividuelle peut se réaliser en utilisant la comparaison des vitesses à une fréquence cardiaque donnée telles que la V180 ou la V200, vitesses auxquelles le cheval atteint une FC de 180 ou 200 bpm respectivement. Cela requiert de pouvoir enregistrer simultanément la fréquence cardiaque et la vitesse, ce qui est possible grâce à plusieurs dispositifs portables commercialisés (photos 3 et 4). Chez les trotteurs et les galopeurs, la V200 est positivement corrélée au niveau d’entraînement, aux performances et à l’état de santé du cheval [3, 21, 33]. Chez les chevaux d’endurance, la V160 est plus fiable [12].

La récupération cardiaque après effort est également un paramètre corrélé à la capacité cardiaque. Elle est plus rapide chez l’individu entraîné par rapport à un cheval de même race et de même âge non entraîné. Ces observations justifient l’utilisation d’un cardiofréquencemètre pendant le travail, ou la prise de pouls après un travail, comme un moyen simple de suivre l’amélioration de la condition physique du cheval au cours d’une phase de préparation physique ou pour identifier précocement de jeunes chevaux ayant un bon potentiel athlétique. L’amélioration de la récupération cardiaque est inhérente à la dilatation physiologique induite par l’entraînement mais aussi à une augmentation du tonus parasympathique s’exerçant après l’effort.

Score cardiaque

Dans l’optique d’obtenir des paramètres permettant d’estimer les dimensions cardiaques chez le cheval par des méthodes simples et non invasives, la fiabilité du score cardiaque a été évaluée. Il correspond à une mesure de durée moyenne de l’intervalle QRS à partir des dérivations I, II et III d’un électrocardiogramme (ECG) (figure 2). La durée du QRS correspond au temps nécessaire pour que l’onde électrique parcourt la masse ventriculaire et aboutisse à sa dépolarisation complète [28]. En théorie, plus la masse ventriculaire augmente, plus la durée de cet intervalle est longue. Les premières études réalisées par Steel en 1963 ont montré une corrélation positive et significative entre le score cardiaque, les performances et la masse cardiaque (post-mortem) [36, 37]. Toutes les autres études effectuées n’ont pas permis de confirmer ces résultats, et ont conclu que par rapport aux mesures échocardiographiques, plus précises, le score cardiaque ne permet pas d’estimer les dimensions cardiaques de manière fiable, dans cette espèce [14, 20, 22, 26]. Chez le cheval, en raison d’une répartition large, profonde et disparate des fibres du réseau de Purkinje au sein du myocarde, il est possible que le début et la fin du complexe QRS ne correspondent pas au début et à la fin de l’onde de dépolarisation ventriculaire. Certains courants peuvent rester indétectables en superficie ou certaines ondes s’annuler ou emprunter des chemins variables. Ainsi, l’évaluation de la durée du QRS ne peut pas être représentative de la masse musculaire cardiaque dans cette espèce.

Variabilité du rythme cardiaque

La variabilité du rythme cardiaque (VRC ou heart rate variability, HRV) est une mesure des variations de la fréquence cardiaque. Elle est influencée par l’équilibre entre les tonus sympathique et parasympathique et varie en fonction de leurs degrés respectifs d’activation. Chez l’homme, le VRC est corrélé à l’état d’entraînement, de fatigue et au surentraînement. Après un effort, la VRC augmente en raison de la réactivation du tonus parasympathique, ce qui se traduit par un ECG plus arythmique au cours de cette période de récupération.

La VRS est habituellement déterminée par une analyse chronologique des intervalles de battement à battement ou intervalles R-R, par exemple à partir d’un ECG. Chez le cheval, l’obtention de mesures permettant un calcul fiable de la VRC n’est pas toujours facile à réaliser. Les mesures obtenues avec des cardiofréquencemètres simples sont parfois peu répétables. Des facteurs environnementaux (stress, activité autour du cheval, etc.) peuvent influencer les résultats et sont importants à prendre en considération. L’obtention d’intervalles R-R à partir d’un ECG permet de mieux contrôler la qualité des enregistrements et d’éviter d’y intégrer des arythmies indésirables (telles que des blocs occasionnels).

Les études menées chez le cheval indiquent que la VRC est influencée par des conditions de stress lors de l’équitation ou des phases critiques de l’entraînement [25, 35]. Son évolution est inversement corrélée à l’évolution de la VO2max [16].

L’application de la VRC est encore peu étendue chez le cheval. Ce paramètre pourrait être plus sensible que la FC pour évaluer le degré de récupération des chevaux en compétition, en particulier des chevaux d’endurance [5].

Les arythmies après effort seraient plus fréquentes et plus marquées chez les chevaux de course et pourraient être associées à la contre-performance [17, 31]. En analysant les tracés ECG de trotteurs, Evans et coll. ont également démontré qu’il existe davantage de variabilité des ondes T en récupération après effort chez les performants par rapport aux individus ayant des résultats moyens en course [9]. L’interprétation reste hypothétique et serait mise en relation avec les modifications de la morphologie cardiaque (en particulier de l’épaisseur du myocarde) observées avec l’entraînement. L’utilité de ces observations dans l’évaluation des capacités athlétiques reste limitée. Ces observations sont importantes à connaître dans le cadre de l’interprétation des ECG en médecine sportive et ne doivent pas être surinterprétées dans les cas de contre-performance.

Conclusion

Chez le cheval, une relation étroite existe entre la capacité cardiaque, reflétée à la fois par la morphologie et la fonction du cœur, et les performances athlétiques. L’adaptation de la morphologie cardiaque à l’entraînement est dépendante du type d’effort, et principalement de la part prise par le métabolisme aérobie dans cet effort. Il est possible que les capacités cardiaques aient un déterminisme génétique et que les meilleurs athlètes équins possèdent un phénotype cardiaque spécifique. Les entraîneurs ont, depuis des années, effectué la sélection de leurs chevaux sur la base des résultats en compétition et du pedigree des chevaux. Ils ont donc participé à la sélection de ces chevaux au phénotype cardiaque exceptionnel. Le décryptage complet du génome équin et le formidable essor que connaît la génétique, en particulier dans la recherche des gènes de la performance chez le cheval, peuvent laisser penser que des réponses vont être prochainement apportées aux interrogations des vétérinaires et des entraîneurs. Le choix des meilleurs athlètes sera guidé, dans l’avenir, par des marqueurs bien plus précis que ceux décrits dans cet article, à partir d’une simple prise de sang ou de l’analyse de crins.

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Éléments à retenir

→ La capacité aérobie et les performances sont corrélées aux dimensions cardiaques chez le cheval athlète.

→ L’échocardiographie (bidimensionnelle et temps-mouvement) est la technique de choix pour estimer les paramètres de dimension cardiaque.

→ L’analyse de la fréquence cardiaque à l’effort permet d’évaluer la capacité fonctionnelle cardiaque et indirectement les capacités athlétiques du cheval.

→ Le score cardiaque n’est pas une technique fiable pour estimer la capacité cardiaque.

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L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

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