Étude de l’efficacité de la thérapie laser dans la gestion des dorsalgies du cheval de sport - Pratique Vétérinaire Equine n° 191 du 01/07/2016
Pratique Vétérinaire Equine n° 191 du 01/07/2016

Médecines complémentaires

Dossier

Le laser thérapeutique chez le cheval

Auteur(s) : Sacha Brevault*, Émilie Dallongeville**, Olivier Geffroy***

Fonctions :
* Oniris Nantes
Service de chirurgie
des équidés
Atlanpôle La Chantrerie
route de Gachet
CS 40706
44307 Nantes Cedex 3
** Oniris Nantes
Service de chirurgie
des équidés
Atlanpôle La Chantrerie
route de Gachet
CS 40706
44307 Nantes Cedex 3
*** Oniris Nantes
Service de chirurgie
des équidés
Atlanpôle La Chantrerie
route de Gachet
CS 40706
44307 Nantes Cedex 3

Pour la première fois, une étude prospective de l’efficacité de la thérapie laser de faible intensité lors de dorsalgie du cheval de sport a été réalisée, afin d’évaluer scientifiquement et cliniquement ce nouvel outil thérapeutique.

Les dorsalgies font partie des affections majeures en orthopédie équine, et notamment chez les chevaux de sport (concours complet d’équitation [CCE] et concours de saut d’obstacles [CSO]) [1, 4]. Leur gestion repose actuellement sur l’utilisation de techniques thérapeutiques à l’efficacité avérée (infiltrations, mésothérapie, biphosphonates, etc.), mais présentant l’inconvénient d’être invasives et/ou dopantes [11].

La thérapie laser se positionne comme une méthode thérapeutique alternative. De nombreux travaux décrivent une réelle valence analgésique et anti-inflammatoire de cette thérapie tant en médecine humaine que lors d’expérimentation animale [3, 13]. Cela a amené à envisager l’emploi de cet outil thérapeutique dans la gestion des dorsalgies du cheval de sport.

Le postulat de cette étude est que la pratique intensive du sport s’accompagne très fréquemment de douleurs dorsales subcliniques, quelle que soit leur base lésionnelle. Il nous a paru intéressant de mettre en évidence la réalité de ces dorsalgies sur un effectif de chevaux au travail et d’évaluer l’intérêt du laser comme un traitement non invasif et non dopant de cette affection.

L’objectif de ce travail était donc d’évaluer de façon prospective, randomisée et en double aveugle l’effet du laser thérapeutique de faible intensité sur les douleurs dorsales du cheval de sport.

Matériel et méthode

Recrutement des chevaux

L’étude a pris en compte les dorsalgies cliniques et/ou subcliniques d’individus en activité, en période d’entraînement ou de compétition. La qualité de l’entraînement pouvant créer un biais, seules des écuries de niveaux professionnel national et/ou international ont été retenues, qu’elles soient de CSO ou de CCE.

S’inspirant d’études validées par la communauté scientifique, les critères d’inclusion des chevaux de l’étude ont été les suivants : âge supérieur ou égal à 5 ans, absence de boiterie, de période de repos complet prévue durant l’essai, d’administration systémique d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) dans les 15 jours ou de corticostéroïdes dans les 30 jours précédant l’évaluation initiale, et absence de traitement local (injection péri-épineuse, paravertébrale profonde, mésothérapie) par des AINS ou des corticostéroïdes dans les 60 jours précédant l’évaluation initiale [5]. Le critère d’inclusion principal a été l’objectivation d’une dorsalgie par un examen vétérinaire qui est présenté ultérieurement.

Les critères d’exclusion ont été les suivants : transaction financière et disparition du cheval en cours d’étude, accident ou repos forcé, ou réalisation d’un traitement anti-inflammatoire (systémique ou local) durant la période de l’essai.

Quarante-sept chevaux ont répondu aux critères d’inclusion. Cependant, à la suite des exclusions, seuls 32 ont pu compléter l’étude.

Laser thérapeutique utilisé

Le laser utilisé au sein de cette étude appartient à la classe IV des lasers, d’après la norme européenne NF EN 60825-1/A2. De par sa puissance, une protection oculaire est nécessaire. Il s’agit d’un laser à diode délivrant des longueurs d’onde de 660 nm, de 800 nm et de 970 nm selon des modes d’émission continu, pulsé et/ou superpulsé. Le modèle employé est le Klaser cube 3 12 W.

Chaque traitement a consisté en un balayage longitudinal dans le sens cranio-caudal du rachis thoraco-lombaire et des muscles associés, sur une période de 6 minutes et 12 secondes, délivrant 2 604 J pour une puissance de 7 W. La sonde du laser est positionnée à une distance de 1 cm de la peau. Chaque côté du dos a donc été traité pendant 3 minutes et 6 secondes. Le traitement placebo réalisé sur le lot témoin n’a délivré que 35 J, correspondant à l’émission à la fois sonore et visuelle (lumière rouge sans énergie significative) nécessaire pour simuler un réel traitement (les cavaliers étant à proximité lors du traitement).

Déroulement de l’étude

L’objectif de cet essai étant d’évaluer l’efficacité de la thérapie laser dans la gestion des dorsalgies, la période d’étude se devait de permettre une modification de l’état musculaire et nociceptif. Une durée de 6 semaines a donc été fixée, bien supérieure à celle nécessaire pour observer, par exemple, une modification visuelle de la musculature (environ 2 semaines).

Afin de ne pas passer outre une évaluation à court terme (c’est-à-dire inférieure à 6 semaines), un examen intermédiaire a été réalisé 3 semaines après le traitement initial. Ainsi, les examinateurs sont intervenus à J0, lors de l’examen initial, à J21, pour l’examen intermédiaire, et à J42, pour l’examen final de l’étude.

À l’instigation de l’expérience des cliniciens du Centre international de santé du cheval d’Oniris (Cisco) et du caractère subclinique des dorsalgies rencontrées, la fréquence des traitements au laser a été fixée à une séance quotidienne durant 3 jours consécutifs, la première à J0, une fois l’examen vétérinaire initial réalisé, et les suivantes à J1 et à J2.

Examen vétérinaire

De façon identique à une consultation orthopédique réalisée au Cisco, l’examen vétérinaire a été décomposé en deux évaluations : l’une statique (au box) et l’autre dynamique (en extérieur).

Deux vétérinaires cliniciens au Cisco ont pris part à cette étude, de façon indépendante (sans concertation).

Examen statique

L’examen statique a consisté en des évaluations de la musculature dorsale, de la mobilité dorsale passive, et des sensibilités superficielle et profonde.

• Musculature dorsale : observation et palpation du profil des muscles épi-axiaux des régions thoracique moyenne, thoracique caudale et thoraco-lombaire, et lombaire.

• Mobilité dorsale : réalisation des six tests suivants : flexion thoraco-lombaire, extension thoracique, extension thoraco-lombaire, extension lomb-sacrée, flexion complète thoraco-lombaire et lombo-sacrée, et latéroflexions thoraco-lombaires.

• Sensibilité superficielle : stimulation de façon aiguë et précise de la nociception dorsale, par actions digitées ponctiformes de part et d’autre de l’axe médian thoraco-lombaire (à environ 5 à 10 cm latéralement aux processus épineux), répétées du garrot aux vertèbres caudales.

• Sensibilité profonde : stimulation des fibres protopathiques, présentes dans ou à proximité des masses musculaires dorsales, par action digitée continue et profonde suivant un déplacement cranio-caudal paramédian, du garrot à la pointe de l’ischium (tableau 1).

Examen dynamique

Après avoir réalisé un aller-retour au pas en main (sur une distance d’environ 20 m) afin de familiariser le cheval avec son environnement, les quatre déplacements suivants ont été évalués :

– trot en ligne droite sur sol dur (en main) ;

– trot en cercle sur sol dur (en longe) ;

– trot en cercle sur sol souple (en longe) ;

– galop en cercle sur sol souple (en longe).

Au cours de ces quatre examens dynamiques, les équidés chez lesquels des anomalies ont été relevées présentaient une ou plusieurs des anomalies suivantes :

– une rigidité dorsale, donc une diminution de la mobilité du dos ;

– une latéroflexion inverse sur le cercle (c’est-à-dire une contre-incurvation) ;

– une absence de latéroflexion/incurvation sur le cercle ;

– une moindre propulsion postérieure au galop (associée ou non à une diminution de la phase antérieure des membres postérieurs) ;

– une inclinaison de l’ensemble du corps vers l’intérieur du cercle, au trot ou au galop en longe.

Une évaluation de la locomotion du cheval a été réalisée à la suite de chacun des quatre déplacements, et ce par chacun des examinateurs.

Les qualificatifs attribués ont été les suivants : “très souple”, “reste souple”, “raide” et “très raide” (tableau 2).

Examen des cavaliers

Complétant l’examen vétérinaire, l’évaluation réalisée par les cavaliers a permis de prendre en compte leurs observations et leur ressenti.

Les critères analysés ont été scindés en trois catégories : ceux relatifs au comportement à l’écurie et au travail monté, et ceux qui ont trait aux performances et à la musculature dorsale (tableau 3).

Afin de faciliter le traitement des données, les cavaliers ont été interrogés à partir de questions fermées, à choix multiples.

Établissement de scores

Afin de comparer de façon quantifiable les dorsalgies des différents chevaux, ainsi que leur évolution au cours du temps, trois scores dorsalgiques ont été créés :

– le score dorsalgique statique (quatre critères statiques) ;

– le score dorsalgique dynamique (quatre critères dynamiques) ;

– le score dorsalgique cavaliers (neuf critères cavaliers).

Chaque critère présente une amplitude de note comprise entre 0 et 3, menant ainsi à un score compris entre 0 et 12 (somme de quatre critères pour les scores vétérinaires). Les notes ont été attribuées de la façon suivante :

– pour les deux premiers critères statiques et les quatre critères dynamiques (présentant chacun quatre qualificatifs possibles), une note de 0 correspond à un état physiologique de l’individu (absence d’altération de la condition normale attendue). La note de 3 représente une altération maximale du critère évalué (amyotrophie sévère, défense violente lors de la mobilisation passive, individu très raide). Les notes intermédiaires de 1 et de 2 correspondent aux évaluations intermédiaires entre l’état physiologique et l’altération maximale ;

– pour les sensibilités superficielle et profonde, la note de 0 est associée à une sensibilité physiologique. Le “cold back” et la sensibilité augmentée sont tous deux des états pathologiques, d’importance égale, et se voient attribuer la note de 3, afin de donner une même puissance à chacun des huit critères dans l’élaboration des scores dorsalgiques statique et dynamique ;

– des notes intermédiaires (0,5, 1,5 et 2,5 pour les quatre qualificatifs possibles, et 1,5 pour les sensibilités superficielle et profonde) ont été acceptées.

Le score dorsalgique cavaliers est, quant à lui, compris entre 0 et 30, 3 points étant attribués à chaque critère, de la même façon.

Caractéristiques de l’étude

Comme évoqué précédemment, le choix a été fait de réaliser cette étude de manière randomisée en double aveugle. Ainsi, la répartition des 32 individus au sein des lots témoin et traité s’est effectuée de façon aléatoire. De plus, aucun des employés des différentes écuries (grooms, palefreniers, cavaliers, propriétaires) ni aucun des examinateurs vétérinaires n’a été en mesure de connaître l’identité des chevaux composant chacun des deux lots avant la fin de l’étude (J42). Les deux examinateurs ont été amenés à attribuer leurs notes de façon indépendante. Les chevaux ont été examinés par chacun des vétérinaires à tour de rôle pour l’examen statique en laissant une pause à l’équidé. En ce qui concerne l’examen dynamique, les deux examinateurs ont regardé le cheval se déplacer en même temps, mais n’ont pas pu communiquer lors du remplissage de leur grille d’évaluation.

Analyse statistique

Les trois scores créés (dorsalgiques statique et dynamique, et cavaliers) correspondent à des variables quantitatives discrètes.

Afin d’apprécier les évolutions au cours du temps (entre J0 et J21, entre J21 et J42 et entre J0 et J42), de nouvelles variables quantitatives discrètes ont été établies :

– le Diff score statique J0-J21 : différence entre les scores dorsalgiques statiques à J21 et à J0. Selon le même procédé ont été créés le Diff score statique J21-J42 et le Diff score statique J0-J42 ;

– le Diff score dynamique J0-J21 : différence relative aux scores dorsalgiques dynamiques à J21 et à J0. De la même façon, le Diff score dynamique J21-J42 et le Diff score dynamique J0-J42 ont été créés ;

– le Diff score cavaliers J0-J21, le Diff score cavaliers J21-J42 et le Diff score cavaliers J0-J42.

Une valeur négative de ces différences révèle une diminution du score dorsalgique au cours du temps, et ainsi une amélioration de l’individu. À l’inverse, une valeur positive témoigne d’une dégradation au cours du temps, par augmentation du score dorsalgique.

La variable d’étude étant de type qualitatif (à deux groupes indépendants) et les variables de réponses quantitatives discrètes, les tests de Wilcoxon et de Student ont été utilisés, le choix dépendant de la répartition des groupes et des égalités des variances. L’absence de répartition normale d’un groupe ou celle d’égalité des variances a conduit à l’utilisation du test de Wilcoxon.

La loi normale a été évaluée grâce au test de Shapiro-Wilk, avec un seuil pour comparer la valeur p fixé à 5 %, soit un seuil de 0,05. L’égalité des variances a été étudiée par le test de Fisher Snedecor. Un seuil de 0,05 a également été fixé. Pour l’ensemble des tests de Fisher, de Wilcoxon et de Student, l’hypothèse nulle H0 a été la suivante : “Proportion des sous-groupes respectée dans les deux populations – absence de différence dans la répartition des deux populations comparées”. De la même façon que pour les tests de Shapiro-Wilk et de Fisher Snedecor, la valeur seuil de p a été fixée à 0,05. L’obtention d’une différence significative des répartitions des deux populations étudiées nécessitait donc une valeur p inférieure à 0,05.

Résultats

Scores dorsalgiques initiaux : J0

Les 32 individus de l’étude se répartissent de manière différente selon le score statique ou dynamique.

Le second présente une répartition gaussienne des notes attribuées avec 94 % de la population comprise entre 2,5 et 8/12. Le score statique présente, quant à lui, une répartition non gaussienne et étalée de 0 à 10,5/12. Le score statique semble donc plus discriminant que son équivalent dynamique (figures 1 et 2).

Évolution des scores dorsalgiques : J0-J21

Cette évolution a lieu au cours des 3 premières semaines suivant le traitement par laserthérapie. Une amélioration globale (caractérisée par un Diff score négatif) est observée à la fois pour le score statique et pour le score dynamique, et ce quel que soit le statut du cheval (traité ou témoin). L’amélioration apparaît néanmoins plus marquée pour le score statique, sur l’ensemble de la population (figures 3 et 4).

Aucune différence statistiquement significative n’existe entre les lots traité et témoin (score statique : p = 0,355 ; score dynamique : p = 0,107) sur la période J0-J21.

Évolution des scores dorsalgiques : J21-J42

Les 3 dernières semaines de l’étude mettent en évidence une moindre amélioration du score statique et une absence d’évolution globale du score dynamique (figures 5 et 6).

La comparaison des chevaux traités et témoins met une nouvelle fois en avant une absence de différence significative malgré une tendance à une amélioration significative. En effet, une valeur p très proche du seuil est notée en ce qui concerne le score statique (statique : p = 0,052 ; dynamique : p = 0,162).

Évolution des scores dorsalgiques : J0-J42

Cette période J0-J42 englobe la totalité de la durée de l’étude, à savoir 6 semaines. Il s’agit ainsi d’une somme des évolutions de J0-J21 et de J21-J42.

Bien que présentant une moyenne générale inférieure à celle du lot témoin (c’est-à-dire une meilleure amélioration par diminution du score de dorsalgie) (- 1,64 versus - 1,29), le lot traité n’est statistiquement pas plus amendé que le lot témoin concernant le score dynamique (figures 7 et 8).

Cependant, le score statique met en exergue une amélioration statistiquement significative du lot traité, comparativement au lot témoin (tableaux 4 et 5).

Résultats connexes

• Score cavaliers : l’établissement du score cavaliers n’a pas mis en évidence de différence significative entre les lots témoin et traité.

• Âge : sans tenir compte du statut traité ou témoin des chevaux, il ressort de l’étude que les individus de 7 ans et plus présentent des scores statique et dynamique significativement supérieurs à ceux des équidés de 5 et 6 ans (statique : p = 0,015 ; dynamique : p = 0,034). Cette différence disparaît dès J21, témoignant d’une amélioration plus importante chez les individus plus âgés au cours de l’étude. De plus, au cours des 3 dernières semaines d’étude, les chevaux de plus de 7 ans appartenant au lot traité ont présenté une évolution significativement différente, par rapport à ceux du lot témoin (p = 0,04). Ces derniers ont subi une dégradation de leur dorsalgie, contre une stabilisation pour les équidés traités (traités : - 0,5 ; témoins : + 2,8 – score statique).

• Écurie d’appartenance : bien qu’aucune différence n’ait été initialement observée entre les quatre écuries qui ont pris part à l’étude, des variations statistiquement plus marquées pour certaines d’entre elles sont observées tant pour le score statique que pour le score dynamique, au cours des 6 semaines de l’étude, tous lots confondus.

Discussion

Protocole du traitement laser

Fréquence des traitements

Un des points majeurs entrant dans l’élaboration du protocole est le nombre et la fréquence des traitements au laser réalisés chez chaque cheval. Du simple traitement ponctuel à des séances quotidiennes s’étalant sur plusieurs jours, voire sur plusieurs semaines, en passant par toutes les solutions alternatives existantes, le champ des possibles en ce qui concerne le protocole est large.

Cette étude a consisté en la réalisation de trois traitements quotidiens. Aucun autre traitement n’a été administré, ni la première semaine ni au cours des 42 jours d’étude. Ce compromis découle de la prise en compte du caractère subclinique des dorsalgies, de l’expérience acquise au Cisco (Nantes) et des contraintes des écuries hôtes.

Énergie délivrée

À partir de revues systématiques, Bjordal et coll. ont conclu à la nécessité d’utiliser une fluence comprise entre 0,6 J/cm2 et 9,6 J/cm2 en moyenne pour le traitement d’une douleur due à des affections profondes [2]. La fluence mise en œuvre dans l’étude a été d’environ 1 J/cm2, la positionnant dans la gamme basse des fluences conseillées. Ainsi, l’emploi d’une fluence supérieure pourrait potentialiser les résultats prometteurs déjà obtenus.

Concernant le traitement placebo, l’énergie délivrée (35 J) nécessaire à simuler un traitement normal (identique extérieurement) a fourni une fluence de 0,009 J/cm2. Cette si faible fluence ne semble pas, à la lumière des différentes études et méta-analyses publiées, suffisante pour être à l’origine d’un quelconque effet cliniquement visible [2]. L’hypothèse de l’absence d’un réel traitement placebo semble donc non recevable.

Protocole d’évaluation

Examen vétérinaire

L’examen vétérinaire, bien que standardisé et issu de l’expérience des praticiens du Cisco ainsi que de certaines études publiées, n’a pu être strictement identique pour chacun des individus évalués [5].

Tout d’abord, les surfaces d’examen n’ont pas été les mêmes pour chaque écurie. En effet, bien que les critères du score dorsalgique statique ne dépendent en rien du type de sol sur lequel l’examen est réalisé, ceux du score dorsalgique dynamique sont en partie conditionnés par ce paramètre. Ainsi, certaines écuries ont fourni des sols durs et souples plus ou moins pénétrants et plus ou moins réactifs.

Examen cavaliers

La perception par les cavaliers de l’état physique de leurs pensionnaires étant par définition subjective, il convient d’établir des critères afin de qualifier certains comportements observables au cours de l’entraînement ou bien à l’écurie. Cependant, l’utilisation de questions ouvertes compliquant l’analyse des réponses, le choix a été fait de faire uniquement appel à des questions fermées à destination des cavaliers.

Néanmoins, bien que de multiples choix aient été proposés pour chaque critère, les cavaliers ont souvent été confrontés à l’incapacité de répondre à chaque question par une unique réponse, obligeant ainsi à opter pour deux réponses ou à préciser ou modifier la réponse choisie, limitant de ce fait le poids, donc la valeur scientifique des réponses obtenues.

Résultats obtenus

Les scores dorsalgiques, statiques ou dynamiques, ont présenté une différence significative en fonction de la classe d’âge des individus étudiés, les chevaux de 7 ans et plus étant statistiquement davantage dorsalgiques que ceux âgés de 5 et 6 ans à J0.

La dorsalgie des chevaux de sport tend ainsi à croître avec l’âge. Johnston et coll. ont également confirmé cette conclusion en mettant en évidence une diminution de la flexion/extension avec l’âge croissant du cheval [12].

Cette différence présente lors de l’examen à J0 a disparu dès J21. Ainsi, la classe d’âge de plus de 7 ans a vu sa dorsalgie considérablement diminuée dans les 3 premières semaines de l’étude, entraînant une disparition de la différence qui existe entre les jeunes équidés et leurs ainés. Cela peut éventuellement s’expliquer par la période d’investigation, l’hiver, correspondant à la reprise de l’activité sportive et, ainsi, à l’augmentation progressive de l’entraînement, qui, s’il est adapté et de bonne qualité, permet, le cas échéant, aux chevaux initialement dorsalgiques de travailler avec leurs affections tout en évitant une augmentation de leur douleur et en améliorant leur confort.

Au vu des résultats obtenus concernant le score dorsalgique statique, l’hypothèse suivante peut être émise : la plupart des individus sortant d’une période de repos lors du début de l’étude, l’amélioration générale des chevaux traités et non traités pourrait être attribuée à l’entraînement permettant une augmentation de leurs qualités sportives par diminution de leur dorsalgie. Cependant, le temps faisant réapparaître les dorsalgies à la suite de plusieurs semaines de travail, le laser semble prévenir la dégradation de la maladie, comme objectivée entre J21 et J42.

Les scores statique et dynamique ont différé sur un point principal : leur type de répartition (englobant la gamme de notes et la ventilation des équidés).

Le score statique présente des valeurs de 0 à 10,5 (sur 12) sans répartition normale des chevaux (suivant une loi normale). Le score dynamique présente, quant à lui, des valeurs comprises entre 0,5 et 12, mais 94 % des individus se situent entre 2,5 et 8 avec une répartition selon une loi normale. Les notes du score dynamique sont donc regroupées autour de la valeur de 5 à 5,5.

Cependant, différentes études ont mis en évidence la grande variation d’amplitude dorsale interindividuelle et de dorsalgie (notamment en fonction de la conformation du cheval) [7-9]. Ainsi, obtenir des notes dorsalgiques étalées sur une large gamme de valeurs serait en accord avec ces travaux publiés. Par conséquent, le score statique semble répondre positivement à cette condition, à l’inverse du score dynamique.

À la différence du score statique, le score dynamique est constitué de quatre critères corrélés les uns aux autres : le trot en ligne droite, le trot sur le cercle dur, le trot sur le cercle souple et le galop sur le cercle souple (le score dorsalgique statique évalue quatre critères moins corrélés les uns aux autres : la musculature, les sensibilités et la mobilisation).

Les examens dynamiques évaluent à chaque reprise la mobilité dorsale du même individu qui, bien que les surfaces de contact et les exercices demandés changent (trot/galop, ligne droite/cercle, sol dur/sol souple), ne présente pas dans la plupart des cas d’importantes variations des notes entre chaque condition d’examen. Ce score dorsalgique dynamique n’est donc pas un critère assez discriminant pour notre étude, bien qu’il ait fourni des conclusions sur les types de répartition de la population d’étude.

Une seconde explication envisageable concernant l’absence de caractère discriminant du score dynamique est le fait qu’il s’agisse d’un examen adapté à des individus présentant une boiterie, ou du moins un défaut locomoteur. Cependant, il s’agit de compétiteurs de haut niveau dont les capacités intrinsèques sont supérieures et qui présentent, de ce fait, une meilleure tolérance dynamique aux dorsalgies, qui ne se révèlent bien souvent que dans certaines conditions précises de travail (par exemple, quand ils sont montés, à l’abord de l’obstacle, épaule en dedans à main droite, etc.). Il serait alors peut-être plus adéquat de mettre en place des examens dans des conditions de travail plus techniques, donc plus propices à l’évaluation des défauts mineurs présents.

Qui plus est, cette étude est la première qui note les dorsalgies de chevaux de sport en compétition. Elle a permis de mettre en évidence une forte prévalence d’individus dorsalgiques, légèrement, modérément ou substantiellement atteints. Il aurait ainsi pu être intéressant d’augmenter la dureté des critères d’inclusion (par exemple, en n’incluant dans l’étude que des individus au fort score statique), pour s’affranchir des équidés peu dorsalgiques, afin d’être en mesure de quantifier plus significativement des évolutions notables. Cependant, de telles contraintes nécessiteraient une plus grande population, afin de conserver la recevabilité scientifique et statistique de l’étude.

Conclusion

Notre étude supporte l’idée que la pratique intensive du sport s’accompagne très fréquemment de douleurs dorsales subcliniques, quelle que soit leur base lésionnelle.

Le score dorsalgique statique est le score le plus recevable dans notre étude pour suivre l’évolution d’une dorsalgie subclinique chez le cheval athlète. Ainsi, une différence significative est observée entre les deux lots de l’étude.

À l’échelle de la durée totale de l’étude (soit 42 jours), le lot des chevaux traités présente une diminution des dorsalgies significativement supérieure à celle du lot témoin.

Le laser thérapeutique de faible intensité semble donc présenter une efficacité statistiquement mesurable lors du traitement des dorsalgies du cheval de sport.

Qui plus est, cette étude a fourni d’autres résultats concernant l’évolution de la dorsalgie des individus sélectionnés, tels qu’une amélioration plus importante des équidés de plus de 7 ans dans les 3 premières semaines et des différences d’évolution entre les écuries.

Une étude corollaire sélectionnant des chevaux très dorsalgiques permettrait d’augmenter la puissance statistique des résultats, et probablement de mieux comprendre et d’objectiver l’effet analgésique et anti-inflammatoire de la thérapie laser sur les dorsalgies.

  • 1. Bathe AP. Lameness in the three day event horse. In: Diagnosis and management of lameness in the horse. 2nd ed. Saunders. 2011:1123-1137.
  • 2. Bjordal JM, Couppé C et coll. A systematic review of low level laser therapy with location-specific doses for pain from chronic joint disorders. Aust. J. Physiother. 2003;49(2):107-116.
  • 3. Bjordal JM, Lopes-Martins RAB. The anti-inflammatory mechanism of low level laser therapy and its relevance for clinical use in physiotherapy. Phys. Ther. Rev. 2010;15(4):286-293.
  • 4. Boswell RP, Mitchell RD et coll. Lameness in the show hunter and show jumper. In: Diagnosis and management of lameness in the horse. 2nd ed. Saunders. 2011:1096-1112.
  • 5. Coudry V, Thibaud D et coll. Efficacy of tiludronate in the treatment of horses with signs of pain associated with osteoarthritic lesions of the thoracolumbar vertebral column. Am. J. Vet. Res. 2007;68(3):329-337.
  • 6. El Sayed SO, Dyson M. Effect of laser pulse repetition rate and pulse duration on mast cell number and degranulation. Lasers Surg. Med. 1996;19(4):433-437.
  • 7. Faber M, Johnston C et coll. Three-dimensional kinematics of the equine spine during canter. Equine Vet. J. Suppl. 2001;(33):145-149.
  • 8. Faber M, Johnston C et coll. Basic three-dimensional kinematics of the vertebral column of horses trotting on a treadmill. Am. J. Vet. Res. 2001;62(5):757-764.
  • 9. Faber M, Schamhardt H † et coll. Basic three-dimensional kinematics of the vertebral column of horses walking on a treadmill. Am. J. Vet. Res. 2000;61(4):399-406.
  • 10. Haussler KK. Back problems. Chiropractic evaluation and management. Vet. Clin. North Am. Equine Pract. 1999;15(1):195-209.
  • 11. Henson FMD. Miscellaneous osseous conditions. In: Equine back pathology, diagnosis and treatment. 2009:157-167.
  • 12. Johnston C, Holm KR et coll. Kinematic evaluation of the back in fully functioning riding horses. Equine Vet. J. 2004;36 (6):495-498.
  • 13. Walsh LJ, Trinchieri G et coll. Human dermal mast cells contain and release tumor necrosis factor alpha, which induces endothelial leukocyte adhesion molecule 1. Proc. Nat. Acad. Sci. USA. 1991;88(10):4220-4224.

CONFLIT D’INTÉRÊTS : AUCUN

Éléments à retenir

• Une étude prospective, randomisée en double aveugle a été lancée à Oniris pour étudier la dorsalgie subclinique du cheval de sport et sa prise en charge par un protocole de laser thérapeutique.

• Cette étude souligne l’existence d’une dorsalgie subclinique chez le cheval de saut d’obstacles et de concours complet de niveaux national et international, s’accentuant plutôt avec l’âge.

• Elle met en évidence l’efficacité du protocole de thérapie laser proposé dans la prise en charge de ce type de dorsalgie sur une période allant de 21 à 45 jours après le traitement.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à notre Newsletter

Découvrez en avant-première chaque mois le sommaire du Pratique Vétérinaire Equine.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à Pratique Vétérinaire Equine, retrouvez votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr