Affections et anomalies héréditaires monogéniques et polygéniques non respiratoires - Pratique Vétérinaire Equine n° 161 du 01/01/2009
Pratique Vétérinaire Equine n° 161 du 01/01/2009

Article de synthèse

Auteur(s) : Christine Meuwly*, Caroline Tessier**, Mirjam Mele***, Tosso Leeb****, Stefan Rieder*****, Vincent Gerber******

Fonctions :
*Clinique équine, Hôpital vétérinaire, Faculté Vetsuisse de l’université de Berne, Suisse
**Clinique équine, Hôpital vétérinaire, Faculté Vetsuisse de l’université de Berne, Suisse
***Clinique équine, Hôpital vétérinaire, Faculté Vetsuisse de l’université de Berne, Suisse
Haras national suisse, Avenches, Suisse
**** Institut de génétique de la Faculté Vetsuisse de l’université de Berne, Suisse
*****Haute École suisse d’agronomie, Zollikofen, Suisse
******Clinique équine, Hôpital vétérinaire, Faculté Vetsuisse de l’université de Berne, Suisse

Les dernières avancées de la recherche sur le génome équin vont permettre de développer l’identification de marqueurs génétiques et d’améliorer le dépistage des affections héréditaires.

Les maladies et anomalies héréditaires monogéniques sont relativement rares chez le cheval. Cependant, la recherche de leur déterminisme moléculaire est récente et en réalité, plus nombreuses.

Pour ces affections, il existe une corrélation de presque 100 % entre le génotype et le phénotype (encadré 1). Dans ce cas, le phénotype suit clairement les lois de Mendel et n’est que très peu influencé par des facteurs environnementaux.

Pour les maladies polygéniques multifactorielles, des interactions interviennent entre le génotype et l’environnement et influencent l’expression phénotypique d’un caractère. C’est également le cas pour la plupart des caractères d’intérêt en élevage équin (performance, caractère, santé), qui sont déterminés par des facteurs aussi bien génétiques, zootechniques qu’environnementaux. Il est ainsi difficile d’estimer les risques pour un individu d’exprimer ou non ce caractère.

Dans un futur proche, la puce SNP équine étant déjà disponible, les connaissances et les outils issus du projet de génome équin devraient entraîner des avancées essentielles, en particulier la possibilité d’identifier des milliers de marqueurs génétiques de type single nucleotide polymorphisms (SNP), marqueurs spécifiques régulièrement distribués sur tous les chromosomes d’un individu (encadrés 2 et 3). Le génotypage de ces SNP permet d’associer à grande échelle des allèles à un phénotype et devrait donc modifier la pratique de l’élevage animal. Il sera également appliqué à l’étude du déterminisme moléculaire des affections monogéniques et polygéniques du cheval.

Maladies héréditaires monogéniques

Immunodéficience sévère combinée du pur-sang arabe

L’immunodéficience sévère combinée (severe combined immunodeficiency ou SCID) du pur-sang arabe est caractérisée par l’incapacité du poulain nouveau-né à produire des lymphocytes B et T fonctionnels (tableau 1). La mutation causale est identifiée [25].

Les poulains atteints meurent dans les premiers mois suivant la naissance en raison de leur incapacité immunitaire à se défendre contre les infections. La transmission est autosomale récessive (encadré 4). Les individus hétérozygotes pour cette mutation sont des porteurs sains. Le développement d’un test ADN décelant la mutation prévient les croisements à risques entre deux porteurs sains [25].

Paralysie périodique hyperkaliémique

La paralysie périodique hyperkaliémique (hyperkalaemic periodic paralysis ou HYPP) touche principalement les quarter horses (QH). Dans cette race, un effet fondateur a été mis en évidence car les individus atteints descendent de l’étalon Impressive.

La transmission est autosomale codominante. Les porteurs homozygotes présentent une symptomalogie nettement plus sévère que les hétérozygotes. La mutation est identifiée et a été localisée sur un gène des canaux sodiques, qui régule le flux de sodium dans les muscles [24].

Les symptômes consistent en des accès de tremblement musculaire, de faiblesse et/ou de collapsus, qui persistent plus ou moins longtemps. Des attaques sévères peuvent conduire à une insuffisance cardiaque et à des déficiences respiratoires mortelles. Un régime pauvre en potassium peut faire régresser la symptomatologie. Un test ADN pour le diagnostic de cette maladie existe également [24].

Déficience en enzyme branchante du glycogène

La déficience en enzyme branchante du glycogène (glycogen branching enzyme deficiency ou GBED) est due à la transmission autosomale récessive du gène codant pour cette enzyme et touche les races quarter horse et paint.

Elle est caractérisée par des avortements, la mise bas de poulains mort-nés ou faibles, hypoglycémiques, leucopéniques et septiques, présentant des valeurs élevées des enzymes du foie et de la créatine kinase. La maladie est létale dans tous les cas. Un test génétique a été développé.

Syndrome létal du poulain blanc

Le syndrome létal du poulain blanc (lethal white foal syndrome ou LWFS) est une anomalie congénitale mortelle, autosomale récessive qui touche les poulains issus d’un croisement entre deux chevaux pie overo.

Les poulains naissent blancs et présentent une obstruction intestinale fatale.

Cette malformation est due à une mutation des récepteurs de l’endothéline B, qui est responsable du développement normal des mélanocytes et des nœuds lymphatiques entériques. Les hétérozygotes sont sains et présentent la robe pie overo. Les croisements entre deux chevaux pie overo sont donc proscrits. Un test ADN a également été mis au point.

Hyperélastose cutanée

L’hyperélastose cutanée (hyperelastosis cutis ou HC), ou l’asthénie dermique régionale héréditaire équine (hereditary equine regional dermal asthenia ou HERDA), est caractérisée par des zones bien définies de peau lâche, fragile, anormalement extensible, qui se déchire facilement et guérit difficilement. Cette anomalie est souvent diagnostiquée tardivement, quand les chevaux sont mis au travail et que la selle exerce une pression sur les zones fragilisées.

Diverses études chez les chevaux de race quarter horse mettent en avant une transmission autosomale récessive [28]. La mutation responsable a été déterminée chez les quarter horses et un test ADN est maintenant disponible [27, 29]. Une mutation différente pour ce phénomène a été cependant établie chez le demi-sang suisse (Rüfenacht et Gerber, résultats non publiés).

Blanc dominant

Le blanc dominant est une variante de robe caractérisée par un pelage blanc dès la naissance et une dépigmentation de la peau. Cette anomalie ne doit pas être confondue avec l’albinisme, dans lequel les poulains ont les yeux rouges. La transmission de cette robe est autosomale dominante [14]. Tous ces chevaux blancs sont hétérozygotes pour une mutation du gène KIT.

La mutation est différente selon la race, mais elle se situe toujours sur ce même gène [14]. Si l’embryon est homozygote, cette mutation est létale, sauf dans de rares cas connus sous le nom de “sabino”. Il est donc fortement déconseillé de croiser deux chevaux blancs.

Épidermolyse jonctionnelle bulleuse

L’épidermolyse jonctionnelle bulleuse (junctional epidermolysis bullosa ou JEB) est une maladie génétique néonatale dont la transmission est autosomale récessive. Elle se manifeste par la formation possible de cloques sur la peau et les muqueuses, ainsi que par des lésions de la boîte cornée, pouvant entraîner la perte du sabot chez les poulains nouveau-nés.

Les hétérozygotes sont des porteurs sains. Les homozygotes naissent normaux, mais, rapidement, des lésions cutanées apparaissent sur les zones de friction. L’évolution est rapide et les poulains meurent de complications septiques des plaies ou doivent être euthanasiés. La mutation causale a été localisée sur le gène codant pour la laminine 5 et n’a été identifiée que chez des chevaux de trait belges et des races apparentées [29]. Un test ADN pour la recherche de cette mutation est disponible. La mutation causale de cette affection est différente chez les chevaux de selle américains [4]. Il existe aussi un test ADN spécifique pour cette mutation [4].

Dysgénésie de la chambre antérieure

La dysgénésie de la chambre antérieure (anterior segment dysgenesis ou ASD) est une cause d’anomalies oculaires. Elle se traduit par des kystes du corps ciliaire temporal ou de la rétine périphérique, ainsi que par de multiples anomalies de la chambre antérieure de l’œil, voire des anomalies de l’iris, de la cornée, du cristallin ou de la paupière.

Cette affection touche principalement les chevaux de race rocky mountain horse et présente une transmission monogénique autosomale dominante avec une pénétrance incomplète [12]. Le gène responsable a récemment été localisé sur le chromosome 6 du cheval, sans avoir été identifié cependant (un des candidats est le gène PMEL17) [3].

Hémophilie A

L’hémophilie A est due à un manque ou à une dysfonction du facteur VIII de la chaîne de coagulation. Il n’existe pas de test ADN pour cette maladie, mais les porteurs sont relativement faciles à identifier en raison de la transmission gonosomale (chromosome X) récessive.

Cette affection est extrêmement rare chez le cheval, les mâles reproducteurs n’atteignant presque jamais l’âge adulte.

Hyperthermie maligne

L’hyperthermie maligne (HM) est due à une mutation du gène codant pour le récepteur de la ryanodine (RyR1) à l’origine des anomalies du métabolisme du calcium.

Les symptômes sont une augmentation rapide de la température corporelle, une rigidité des muscles squelettiques, une tachycardie, une acidose et parfois une nécrose musculaire.

La transmission est autosomale dominante [1, 2]. Un test ADN est maintenant disponible [29]. Il est fondé sur la mise en évidence de la mutation génétique trouvée chez deux quarter horses [1, 2]. En revanche, cette mutation n’est pas validée dans les autres populations équines [10]. L’hyperthermie maligne reste très rare en Europe.

Abiotrophie cérébelleuse

L’abiotrophie cérébelleuse (AC) s’observe principalement chez les poulains pur-sang arabes et oldenburg de moins d’un an. Elle est due à la dégénérescence des neurones du cervelet.

Les symptômes apparaissent souvent entre un et six mois et comprennent des tremblements intentionnels, une ataxie, une démarche avec les membres écartés, dissymétrique et/ou hypermétrique et une spasticité musculaire. Ces symptômes progressent par crises jusqu’à la maturité, et parfois se stabilisent ou régressent légèrement ensuite [11].

Une transmission récessive a été démontrée. La plupart de ces chevaux sont euthanasiés car les crises fréquentes présentent un danger pour l’homme et l’animal. Très récemment, des marqueurs génétiques ont été identifiés dans une région chromosomique candidate et un test ADN de détection de ces marqueurs a donc pu être développé(1).

Malformation atlanto-occipitale

La malformation atlanto-occipitale (MAO) se manifeste par une fusion atlanto-occipitale, une hypoplasie de l’atlas, une malformation de l’axis et/ou une modification de l’articulation atlanto-axoïdienne. Son caractère familial a été démontré. Cette anomalie touche uniquement les chevaux arabes. Les symptômes sont une ataxie, une hypermétrie, une tétraparésie ou une tétraplégie dues à la compression progressive de la moelle épinière.

Affections héréditaires polygéniques

Affections du système locomoteur

Ostéochondrose

En plus de facteurs alimentaires, hormonaux, traumatiques et biomécaniques, des données génétiques jouent un rôle important dans le développement de l’ostéochondrose (OC) (tableau 2) [7, 13]. La prévalence des signes radiolographiques d’OC varie sensiblement entre les populations de descendants de différents étalons. L’héritabilité varie très fortement selon les bases de données et les modèles statistiques, entre 0,01 et 0,52 (encadré 5) [13]. Elle dépend de l’articulation considérée, avec, par exemple, des différences nettes entre les lésions du boulet et celles du tarse (photo 1) [24]. La prévalence de l’OC diffère également selon les races et les populations. Les lésions d’OC sont beaucoup plus rares chez les poneys et les chevaux sauvages que dans les populations de chevaux de selle et de trotteurs examinées. La prédisposition sexuelle n’est pas claire.

Syndrome podotrochléaire

Une composante familiale du syndrome podotrochléaire, cause fréquente de boiteries chroniques de l’avant-main, a pu être démontrée.

L’estimation de l’héritabilité de cette affection varie, selon les études, de 0,02 - 0,06 à 0,25 - 0,3 [8]. Des différences de fréquence entre les races ont également été énoncées. Les quarter horses et les chevaux de selle sont les plus touchés. Des allèles portés par les chromosomes 2 et 10 semblent avoir une influence sur la gravité des lésions de l’os naviculaire [9].

Éparvin

Toutes les races de chevaux sont touchées par l’éparvin, une ostéo-arthrose de la partie distale de l’articulation du jarret, qui entraîne une boiterie. Il existe une relation étroite entre l’apparition de l’éparvin et des défauts de conformation.

L’héritabilité de cette maladie a été estimée avec une étonnante concordance de 0,2 à 0,35 chez des chevaux de selle danois, à 0,2 chez des animaux hollandais et de 0,28 à 0,39 chez des individus hanovriens [8, 26].

Myopathies

La myopathie par stockage de polysaccharides (polysaccharide storage myopathy ou PSSM) se rencontre le plus souvent chez des chevaux de races apparentées au quarter horse, mais également chez d’autres races de selle comme de trait [19]. Chez le quarter horse et le trait belge, cette myopathie est à l’origine d’une mutation du gène codant pour l’enzyme synthase du glycogène (le gène GYS1). Mais cette mutation n’explique que 78 % des cas de PSSM [19, 20]. Elle a aussi été identifiée chez les cobs normands [15]. Chez le demi-sang suisse, elle est à l’origine seulement d’une petite partie des cas de PSSM [Johlig et Gerber, résultats non publiés].

Cette maladie peut être asymptomatique. Lors des crises, elle s’exprime par une raideur et une faiblesse musculaires, une intolérance au travail et une boiterie. Les biopsies des muscles squelettiques des chevaux atteints révèlent une accumulation d’inclusions anormales de polysaccharides. Une alimentation riche en glucides, un entraînement mal géré et un travail irrégulier jouent un rôle important dans le déclenchement des crises. Le mode de transmission de cette myopathie a longtemps été considéré de type autosomal récessif.

Mais une étude récente laisse supposer que la transmission de cette mutation est autosomale dominante, du moins chez le cob normand [15]. Ce mode de transmission serait également observé chez le quarter horse et les races apparentées et chez les chevaux de trait belges [19]. La PSSM pourrait donc être comptée dans les maladies monogéniques pour ces races. Il n’existe pas encore de test ADN pour la détection de cette mutation.

Les symptômes cliniques du coup de sang (tying up) des pur-sang sont semblables à ceux de la PSSM. Le gène responsable est inconnu, mais, contrairement à la PSSM, une transmission autosomale dominante à expression variable est soupçonnée. L’héritabilité a été estimée à environ 0,42.

Syndrome de Wobbler

Le syndrome de Wobbler (instabilité cervicale) affecte de nombreuses races, mais touche principalement les mâles pur-sang et se manifeste par des difficultés locomotrices, une faiblesse, une spasticité musculaire, une ataxie et une incoordination pouvant provoquer des chutes.

Ces symptômes sont dus à des malformations cervico-vertébrales qui compressent la moelle épinière. La race, le sexe, la croissance, la taille au garrot et certains traumatismes sont des facteurs de risque.

Myéloencéphalopathie dégénérative équine

La myéloencéphalopathie dégénérative équine est une maladie nerveuse rare des jeunes chevaux dont les symptômes vont de l’ataxie à une para- ou quadriplégie. Elle est due à la dégénérescence des axones dans la moelle épinière et le tronc cérébral. Il existe des prédispositions familiales et une carence en vitamine E peut jouer un rôle dans sa pathogénie.

Troubles du comportement

Le tic à l’appui est une stéréotypie lors de laquelle le cheval contracte la musculature de l’encolure, ce qui ouvre le pharynx et provoque l’émission d’un bruit caractéristique. Les facteurs qui contribuent au développement de ce tic sont l’ennui, un manque de contact social [6], mais aussi une stimulation trop forte. Des différences entre les races ont été démontrées, les pur-sang présentant, par exemple, une tendance accrue à tiquer par rapport aux chevaux de selle, eux-mêmes plus sensibles que les franches-montagnes [5, 17]. Une prédisposition a été démontrée pour certaines lignées. Une composante génétique est donc supposée entrer en jeu dans le développement de cette stéréotypie. Sa transmission génétique serait de type autosomal récessif [17].

Affections ophtalmologiques

L’uvéite récidivante équine (URE) est la première cause de cécité chez le cheval. Cette maladie, due à des mécanismes auto-immuns, est caractérisée par des phases récurrentes d’inflammation de l’uvée. Des prédispositions raciales (trotteur, chevaux de selle, appaloosa) ont été décrites. Une forte association avec les antigènes leucocytaires d’histo-compatibilité MHC-dépendants (equine leucocyte antigene ou ELA) a été démontrée.

Affections dermatologiques

Dermite estivale récidivante

La dermite estivale récidivante (DER) est une affection cutanée saisonnière provoquée par une hypersensibilité de type 1, induite par l’immunoglobuline E (IgE), aux piqûres d’insectes, en particulier à celles des Culicidés. La DER s’observe dans plusieurs races de chevaux à travers le monde, à l’exception de régions comme l’Islande où les Culicidés sont absents. Les chevaux islandais ne semblent pas plus touchés que les autres races, pour autant qu’ils sont nés dans une région où ces moustiques sont présents. En revanche, les chevaux islandais exportés, souvent à l’âge adulte, sont pour la première fois en contact avec ces moustiques lorsque leur système immunitaire est mature. Ce défaut d’exposition aux moustiques durant la phase de la vie où la production endogène d’IgE est très basse et peut-être le changement d’environnement lié à l’exportation prédisposent-ils les chevaux islandais exportés à la DER, qui peut alors atteindre une prévalence de 30 % pour cette race [21]. L’administration non systématique de vermifuges aux chevaux islandais dans leur pays d’origine et l’absence de virus comme EHV-1, EHV-4 et Influenza en Islande pourraient favoriser l’hypersensibilité aux piqûres d’insectes des animaux exportés [21]. Les premiers symptômes apparaissent en général deux à trois ans après l’exportation [21]. L’incidence augmente avec la durée d’exposition aux moustiques [21]. Les zones de prédilection sont la crinière et la queue, ainsi que la ligne blanche dans une moindre mesure. L’apparition de DER est influencée aussi bien par l’environnement (présence de moustiques) que par l’ascendance. Une base génétique de la prédisposition à la DER a été démontrée [16, 18].

Sarcoïde

Le sarcoïde équin est la tumeur cutanée la plus fréquente chez les équidés. Les papillomavirus bovins de types 1 et 2 sont responsables de la maladie et la transmission du virus s’effectue vraisemblablement par des insectes. Le plus souvent, ce sont de jeunes animaux qui sont atteints. La tumeur peut régresser spontanément, mais parfois elle prolifère soudainement (photo 2). Une défense immunitaire défaillante, vraisemblablement en raison de composants héréditaires, semble être responsable de la prolifération tumorale. Des différences selon les races et des prédispositions familiales sont observées [16]. Les quarter horses, les appaloosas et les chevaux arabes sont plus souvent atteints que les pur-sang, et ces derniers davantage que les chevaux de selle. L’inactivation du gène suppresseur de tumeur p53 pourrait jouer un rôle dans la pathogénie.

Mélanome

Le mélanome représente environ 6 à 15 % des tumeurs de la peau chez le cheval. Indépendamment de la race et du sexe, presque tous les vieux chevaux gris sont atteints de ce cancer de la peau. La mutation du gène ASIP (agouti signaling protein) et/ou du gène STX17 entraîne le grisonnement progressif des poils des chevaux gris, tout en induisant une prolifération de mélanocytes [23]. La valeur estimée de l’héritabilité du développement de la tumeur se situe entre 0,36 et 0,40 [22].

Les maladies héréditaires monogéniques, souvent très graves pour l’individu, sont d’importance moindre pour l’élevage, en comparaison des affections polygéniques. Elles sont rares, concernent souvent des races spécifiques, et leur mode de transmission est pour la plupart connu. C’est pourquoi il existe pour beaucoup d’entre elles un test ADN de détection des animaux porteurs de la mutation causale ou du marqueur génétique, ce qui facilite grandement la prévention par le diagnostic précoce ou les croisements raisonnés. Le séquençage complet et l’annotation du génome équin(2) laissent présager des progrès rapides dans la détection, l’identification et l’explication moléculaire de la pathogénie de ces maladies héréditaires monogéniques et le développement de tests ADN.

Ces affections sont surtout connues et présentes chez le quarter horse car cette race est très répandue, avec des phénotypes très différents (reining, pleasure, halter, etc.), et sélectionnée pour des caractères morphologiques ciblés à partir d’un noyau de fondateurs restreint. De plus, la recherche génétique équine est, depuis de nombreuses années, très active et correctement financée en Amérique du Nord, ce qui peut expliquer que les races locales sont davantage étudiées.

Les maladies polygéniques et multifactorielles, qui ont des composantes génétiques tout en étant influencées par divers facteurs environnementaux, sont bien plus graves et préoccupantes pour l’élevage que les affections héréditaires monogéniques. De plus, leur mode de transmission génétique est encore largement inconnu. De façon isolée, exclure de l’élevage les chevaux atteints d’un syndrome podotrochléaire ou d’une dermite estivale, par exemple, peut paraître justifié. En effet, sans connaissances plus précises de la génétique de ces syndromes, il est impossible de réaliser une sélection efficace, ou de prévenir la maladie par un dépistage des individus menacés ou porteurs. Des recherches supplémentaires, avec les plus récentes avancées de la génétique moléculaire, clarifieront la situation et permettront la prévention individuelle et collective de ces maladies héréditaires.

Références

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Éléments à retenir

- Les maladies monogéniques sont rares mais graves et un test ADN existe pour beaucoup d’entre elles.

- Le mode de transmission et les gènes responsables des maladies polygéniques sont inconnus.

- Exclure de l’élevage les chevaux atteints d’un syndrome naviculaire ou d’une dermite estivale peut paraître justifié.

- L’identification des gènes ou des marqueurs génétiques responsables permettrait d’identifier les poulains présentant des prédispositions à certaines maladies et de modifier les facteurs de l’environnement influençant l’expression phénotypique de l’affection.

Encadré 1 : Glossaire

Maladie monogénique : due à une ou à plusieurs mutations d’un seul gène.

Maladie polygénique : due à une ou à plusieurs mutations de plusieurs gènes en même temps.

Prédisposition génétique à une maladie multifactorielle : l’affection survient chez les individus prédisposés génétiquement, c’est-à-dire qui ont hérité d’un ou de plusieurs gènes les rendant plus sensibles à ce trouble, et exposés aux facteurs environnementaux la favorisant.

Pénétrance : lorsqu’un gène dominant n’entraîne aucune manifestation, il est dit non pénétrant. La pénétrance se calcule en divisant le nombre d’individus phénotypiquement atteints par le nombre de porteurs du gène. Le coefficient de pénétrance est la probabilité de manifestation du gène. Lors de maladie à pénétrance variable, des sauts de génération sont possibles.

Encadré 2 : Découverte d’une mutation causale ou d’un marqueur génétique

- Il existe deux techniques pour identifier les gènes responsables d’un phénotype particulier. La première est le clonage positionnel. Dans cette méthode, l’arbre généalogique (lignée) est d’abord analysé afin d’estimer dans quelle région du génome le gène mutant pourrait se trouver. Ensuite, la zone est cartographiée. Plusieurs sous-régions se superposant sont séquencées pour différents individus et la comparaison de ces séquences peut permettre l’identification d’une région qui diffère entre les individus sains et malades. Ainsi, le gène mutant peut être localisé.

- La seconde méthode utilisée pour l’identification des gènes responsables d’un phénotype s’appelle “candidate gene mapping”. Il s’agit d’une approche d’identification fondée sur la corrélation entre la cartographie génétique d’un syndrome particulier et un gène associé à un phénotype similaire dans une autre espèce.

- Les marqueurs génétiques sont utilisés pour cartographier le génome. Ils permettent d’associer des séquences d’ADN à un gène à l’origine d’un phénotype particulier. Il existe différents types de marqueurs moléculaires : SNP, EST, microsatellite. Les marqueurs moléculaires sont très utiles pour la découverte des gènes associés à différents phénotypes importants dans la race équine, ayant des conséquences pour la santé, la résistance aux maladies, la reproduction, la fertilité, la performance athlétique et d’autres caractéristiques phénotypiques.

- Afin d’identifier les éventuels porteurs d’une mutation, il est possible de développer un test moléculaire dès que les marqueurs adjacents à celle-ci, qui sont transmis de façon concomitante, sont repérés ou que la mutation est connue et/ou localisée sur le génome.

- Ce test peut ensuite être mis en œuvre pour éliminer de l’élevage les individus porteurs ou atteints, ou pour éviter certains croisements lors d’hérédités récessives.

Encadré 3 : Intérêt des puces SNP

- Les SNP (single nucleotide polymorphism) désignent des variations génétiques d’une seule paire de bases dans le génome. Les SNP sont uniformément distribués dans tout le génome et sont utilisés comme marqueurs moléculaires en génétique. Le génome entier du cheval a été récemment séquencé et le développement de nouveaux outils comme les puces à SNP permet une analyse globale du génome d’une espèce.

- Les puces à SNP sont des outils précieux pour l’identification des marqueurs moléculaires associés à des phénotypes. Elles représentent une technique d’hybridation permettant une analyse génomique comparative. Des centaines de milliers d’oligonucléotides spécifiques aux SNP sont immobilisés sur un support solide et servent de sondes pour l’identification d’une séquence complémentaire dans un échantillon donné. L’étude des profils de SNP associés à un phénotype particulier permettrait de déterminer les gènes à l’origine d’une maladie et ainsi d’identifier de nouveaux marqueurs de susceptibilité.

Encadré 4 : Différents modes de transmission

Transmission autosomale : liée aux chromosomes non sexuels.

Transmission allosomale/gonosomale : liée aux chromosomes sexuels (X et Y).

Encadré 5 : Héritabilité

L’héritabilité (H2) est la proportion du génotype dans le phénotype d’une population, c’est-à-dire la part de variance phénotypique due à la variance génotypique :

H2 = variance génétique/variance phénotypique = S2g/S2p = (écart type génétique)2/(écart type phénotypique)2.

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