Fourbure, obésité et troubles endocriniens chez le cheval et le poney : rappels d'endocrinologie - Pratique Vétérinaire Equine n° 141 du 01/01/2004
Pratique Vétérinaire Equine n° 141 du 01/01/2004

Auteur(s) : X. d'Ablon

Fonctions : Clinique vétérinaire
34, avenue Hocquart-de-Turtot
14800 Deauville

Des liens entre la fourbure, l'obésité et les troubles endocriniens sont décrits : une bonne connaissance de ces derniers et des moyens de diagnostic peut permettre de prendre des mesures efficaces afin de contrôler les symptômes.

Le développement de la médecine des équidés “de compagnie” et le nombre croissant de chevaux âgés amènent fréquemment le vétérinaire à soigner des cas de fourbures chez des chevaux ou des poneys plus ou moins obèses. Chez ces chevaux âgés, la maladie de Cushing est un trouble endocrinien connu de longue date, mais l'hypothyroïdie a également été évoquée. Il est nécessaire de bien comprendre l'endocrinologie du cheval et de disposer d'outils diagnostiques adaptés pour bien gérer ces situations.

Les spécificités de la maladie de Cushing chez le poney et chez le cheval, ainsi que les connaissances récentes en matière de diagnostic sont développées dans cette première partie. L'hypothyroïdie et le diabète sont ensuite évoqués.

La maladie de Cushing

Contrairement à l'homme et au chien, cette maladie chez le cheval est d'origine quasi-exclusivement hypophysaire. C'est pourquoi les auteurs anglophones parlent plus volontiers de “Equine Cushing-like disease” [4], d'adénome hypophysaire, ou plus largement de dysfonctionnement hypophysaire [1, 4, 10, 12, ].

En théorie, l'hypercorticisme surrénalien primaire est possible, mais il n'a jamais été décrit en l'absence d'un adénome hypophysaire. Quelques rares cas de phéochromocytome (tumeur de la medulla surrénalienne) ont été rapportés [10, 12, 14].

Pathogénie

Le Cushing du cheval est dû à une hypertrophie, une hyperplasie, ou plus rarement, à un adénome de l'hypophyse, et précisément de son lobe intermédiaire. C'est pourquoi l'appellation la plus rigoureuse de ce syndrome est sans doute “dysfonctionnement du lobe intermédiaire de l'hypophyse” (DLIH) [4, 14, 15].

Toutefois, la lésion initiale ne se situe pas à ce niveau : pour des raisons inconnues, il y a diminution ou perte de l'innervation dopaminergique du lobe intermédiaire, qui correspond à une perte du contrôle inhibiteur normal d'origine hypothalamique (ceci aura des implications thérapeutiques). Cette perte d'inhibition entraîne une hypersécrétion des différentes hormones produites dans le lobe intermédiaire : ACTH (adrenocorticotrophic hormone), CLIP (corticotrophin-like intermediate lobe peptide), MSH (melanocyte stimulating hormone), et β-endorphines. Ces différentes substances sont responsables des signes cliniques observés chez le cheval. Contrairement à ce qui pourrait être supposé, ce n'est pas l'augmentation de l'ACTH qui est la plus importante, mais elle est suffisante pour stimuler l'activité surrénalienne.

Épidémiologie

La maladie de Cushing est décrite depuis des décennies chez le cheval. Elle affecterait de 0,075 % à 0,50 % des individus selon les études [10, 14]. Les poneys semblent plus touchés que les chevaux. Il n'y a pas de prédisposition de sexe.

Signes cliniques

Les signes cliniques sont variés (voir l'encadré “Signes cliniques de dysfonctionnement du lobe intermédiaire de l'hypophyse chez le cheval”). La maladie de Cushing affecte des chevaux âgés : vingt ans en moyenne et jamais avant sept ans [4, 14].

L'hirsutisme

L'hirsutisme se rencontre dans 85 % des cas [2, 12]. Le cheval ou le poney présente des poils anormalement longs, épais, et frisés. La mue estivale ne se produit plus (photo ).

Ces symptômes peuvent être précédés dans les premiers stades de la maladie par des signes plus discrets : mue estivale retardée ou incomplète (longs poils persistants sur les jambes ou au poitrail, ou par plaques sur le corps), réapparition précoce du poil d'hiver [2, 14].

Il s'agit d'un signe d'appel car il n'existe aucune autre cause d'hirsutisme chez le cheval [10].

La fourbure chronique récidivante

La fourbure chronique est fréquemment observée (24 à 38 % des cas [14]), sous forme de crises récidivant sans raison, et réfractaires aux traitements habituels [2].

L'hyperhydrose

D'origine inexpliquée, l'hyperhydrose se manifeste, de façon intermittente, par une sudation anormale [4, 12, 14]. Ce symptôme peut concerner jusqu'à deux tiers des chevaux atteints. Il pourrait simplement être attribuée à la présence de poils anormalement longs en saison chaude [14], mais vraisemblablement aussi à une altération du centre de thermorégulation hypothalamique [10].

L'état général

L'état général est souvent bon, du moins tant qu'il n'y a pas de maladie intercurrente sévère [4] ;des cas d'obésité peuvent être rencontrés [2, 4], d'autant qu'une polyphagie est souvent présente. Un gonflement de la fosse supra-orbitaire et du fourreau par de la graisse est fréquemment observé [10, 14, 16], de même qu'une répartition anormale des masses graisseuses.

L'amaigrissement qui se produit en cas de Cushing n'est pas toujours évident en début d'évolution, car la distension de la sangle abdominale peut maintenir l'apparence de “rondeur” [14] sur un cheval qui en outre a un excès de masses adipeuses [4]. La perte de poids est due à la fonte musculaire (photo ). Outre la maladie et la faiblesse musculaire, des infections secondaires et des troubles buccodentaires se produisent qui participent finalement à un réel amaigrissement [10].

La polyuro-polydipsie

Rencontrée chez un tiers des chevaux, la polyuro-polydipsie est la conséquence de l'hyperglycémie (ou plus exactement de la glycosurie), ainsi que d'une augmentation de la filtration glomérulaire provoquée par l'hypercorticisme lui-même [11]. C'est l'un des signes du diabète sucré non insulino-dépendant (hyperglycémie et hyperinsulinémie) fréquemment associé au DLIH [4, 10, 14]. Ce peut être le symptôme d'un diabète insipide, également possible (par expansion de la pars intermedia et compression de la pars distalis de l'hypophyse produisant l'ADH, ou aussi, en raison d'une stimulation centrale de la soif par l'hypercortisolisme) [11, 14].

Symptômes mineurs

Des symptômes tels que la léthargie, une mauvaise cicatrisation, des infections secondaires de tous types, un parasitisme augmenté et, plus rarement, des signes d'ostéopathie hypertrophique et des troubles de la vision (compression du chiasma optique par la tumeur hypophysaire), voire même des troubles neurologiques centraux, peuvent être rencontrés.

Chez la jument, des signes d'infertilité et de pseudolactation sont parfois observés.

Diagnostic biochimique

Dans les cas avancés, chez le cheval âgé, le diagnostic du DLIH peut être fait avec une quasi-certitude par les seuls signes cliniques [10, 14].

En l'absence de signe caractéristique ou en début d'évolution, l'apport du laboratoire est nécessaire (voir le tableau “Intérêt diagnostique des différents dosages biologiques dans le dysfonctionnement du lobe intermédiaire de l'hypophyse (“Cushing”) chez le cheval”) [1].

Biochimie sanguine

• Cortisolémie : un prélèvement sanguin unique n'a aucune valeur diagnostique [4, 14, 15]. La cortisolémie est rarement élevée chez le cheval en cas de DLIM. Elle est parfois normale, mais généralement basse, même si le rythme nycthéméral est perturbé [14].

• Glycémie : une hyperglycémie persistante est présente chez beaucoup de chevaux atteints (environ 85 %) [10, 12, 14]. La glycémie peut varier sous l'influence de nombreux facteurs exogènes et endogènes, et il convient de répéter les dosages. Il s'agit souvent d'un signe tardif.

• Insulinémie : la cause la plus courante d'hyperglycémie et d'hyperinsulinémie (diabète sucré non insulino-dépendant) chez le cheval est le DLIH [12, 14]. Ce type de diabète peut être confirmé par des tests spécifiques ;dans ce cas, une forte présomption de DLIH est établie [2, 6, 10, 12].

Dans une étude déjà ancienne, la totalité d'un lot de chevaux atteints de Cushing était hyperinsulinémique et présentait un test de tolérance au glucose anormal [6]. Compte tenu du test clinique utilisé à l'époque pour sélectionner les cas de Cushing, il est toutefois envisageable que tous ne souffraient pas de DLIH. En effet, l'étude du “Michigan Cushing's project”[15] montre que chez des chevaux qui présentent des signes cliniques de DLIH et un test à la dexaméthasone positif, 29 % ne montrent pas une insulinémie anormalement élevée. Tous les chevaux atteints de DLIH n'ont pas non plus de perturbation de la régulation de la glycémie [2]. Un cas d'hyperglycémie sans augmentation de l'insulinémie a même été décrit chez un cheval qui souffrait d'une tumeur hypophysaire [2].

A contrario, l'hyperinsulinémie se rencontre également sur des poneys (ou chevaux) obèses et “fourbus”, qui ne souffrent pas de Cushing [15].

• Dosage de l'ACTH plasmatique :en théorie, il s'agit du dosage simple le plus sensible et le plus spécifique du DLIH [2, 12, 14]. Une étude rapporte une sensibilité et une spécificité proches de 100 % chez le cheval et chez le poney (concentration supérieure à 27 pg/ml chez le poney et 50 pg/ml chez le cheval) [3].

Des contraintes pratiques limitent son utilisation sur le terrain [2, 3, 12] :

- utilisation de tubes plastiques ;

- centrifugation et séparation rapide du plasma (dans les trois heures) ;

- congélation (- 20° C).

Une étude récente a cependant remis en cause la valeur de ce dosage par rapport aux tests endocriniens dynamiques : réalisée sur un échantillon de soixante-dix-sept cas de Cushing équins, des faux négatifs et des faux positifs ont été mis en évidence [15].

Des concentrations intermédiaires d'ACTH peuvent dans tous les cas être équivoques et difficiles à interpréter [2, 12].

Ratio cortisol urinaire/créatinine urinaire

Les prélèvements sont pratiqués le matin. Le calcul du ratio cortisol urinaire/créatinine urinaire est un indicateur sensible (de 70 % [15] à 100 % [14]), mais non spécifique, qui peut s'avérer un test de dépistage utile en pratique (ratio >20 x 10-6) [12, 14].

Les tests endocriniens dynamiques

Il n'existe finalement aucun dosage biologique simple pour diagnostiquer le DLIH du cheval [2, 4, 12, 14, 16].

• Test de stimulation à l'ACTH :il est utilisé chez l'homme et le chien pour différencier la maladie de Cushing d'origine hypophysaire de celle d'origine surrénalienne. Il peut également servir à diagnostiquer un hypocorticisme (maladie d'Addison) [12, 15].

Donné par certains auteurs comme un test sensible [14] (il peut mettre en évidence l'hyperadrénocorticisme hypophysodépendant), il n'est pas considéré comme diagnostique du DLIH [4, 10, 12, 15]. Le test combiné (stimulation à l'ACTH/freinage à la dexaméthasone), parfois conseillé, n'est pas plus utile [10, 12, 14, 15, 16].

• Test de stimulation à la TRH :il a d'abord été décrit comme un test de bonnes sensibilité et spécificité, et a été développé afin d'éviter les risques liés à l'injection de dexaméthasone chez les chevaux qui présentent une fourbure [10, 14, 16].

L'injection de TRH provoque chez le cheval normal une augmentation non significative du cortisol alors que les chevaux ayant un DLIH montrent une hausse significative (de 50 à 100 %) de la cortisolémie dès trente minutes. La spécificité et la sensibilité exactes de ce test ne sont en fait pas validées [2, 14, 15, 16]. Il a été montré par ailleurs qu'il posait des difficultés d'interprétation en raison de la variabilité de la cortisolémie basale (en particulier quand la cortisolémie du cheval atteint de Cushing était normale et non basse, ce qui peut se produire [1, 5]).

• Test de freinage à la dexaméthasone(voir l'encadré “Test de freinage à la dexaméthasone”) : ce test est reconnu comme fiable. La majorité des auteurs lui ont accordé près de 100 % de spécificité et de sensibilité [2, 14, 15, 16]. Une réserve pourrait être émise sur l'utilisation de dexaméthasone chez un cheval sujet à la fourbure : ce risque semble toutefois faible en pratique [2, 4, 16].

Il a été montré récemment que dans certains cas de Cushing débutant, notamment lorsque la cortisolémie basale est normale ou élevée, l'interprétation du test peut être équivoque [1, 13]. En outre, la différence entre une suppression partielle et complète n'est pas interprétable [14].

Ce test n'est donc pas parfait, mais il reste en pratique le plus simple et le plus utile, combiné à l'examen clinique, pour établir le diagnostic de DLIH [4, 16].

• Test combiné, freinage à la dexaméthasone/ stimulation à la TRH(voir l'encadré “Test combiné freinage à la dexaméthasone/stimulation à la TRH”) : Eiler et coll. [1, 5] ont montré que la résistance au freinage n'est pas une constante, mais que tous les chevaux (sains et atteints de DLIH) présentent une phase de freinage trois heures après l'injection de dexaméthasone.

À partir de cette constatation, et pour essayer de pallier aux insuffisances des deux tests décrits ci-dessus, un test combiné a été évalué : l'hypothèse de départ était que l'injection de dexaméthasone donnerait une concentration identique de cortisol chez tous les chevaux, avant l'administration de TRH (trois heures plus tard).

Chez les chevaux sains, la dexaméthasone bloque complètement l'effet de la stimulation par la TRH. En revanche, chez les chevaux atteints de DLIH, la stimulation par la TRH est supérieure au freinage et il y a une augmentation significative de la cortisolémie [1, 5].

Ce test pourrait être très utile pour le diagnostic du DLIH, mais les données pour le valider définitivement sont encore insuffisantes [16], puisqu'il s'agit d'une étude unique.

Plus récemment, ce test a été utilisé pour diagnostiquer et suivre des cas de DLIH, dans une étude sur un nouveau traitement [15]. Vingt chevaux (âge moyen de vingt et un ans), qui présentaient au moins trois des symptômes de Cushing les plus souvent décrits, dont l'hirsutisme, ont été sélectionnés : 100 % de ces chevaux ont montré un “test combiné”anormal.

Plus coûteux et moins pratique que le test de freinage à la dexaméthasone, il est moins largement utilisé [14].

Le diabète sucré

Le diabète insulinodépendant

Également nommé diabète de type 1, il est très rare chez le cheval [4, 12, 16], au même titre que toute affection d'origine pancréatique. Il se caractérise par des signes classiques de polyuro-polydipsie, de polyphagie, et d'amaigrissement.

Les analyses révèlent une hyperglycémie persistante, une glycosurie, et une hypo-insulinémie [12]. Le diagnostic peut être confirmé par le test de tolérance au glucose : pas d'augmentation de l'insuline et la glycémie reste élevée longtemps (voir l'encadré “Tests de tolérance au glucose et à l'insuline”) [12, 16].

Le diabète non-insulinodépendant

Le diabète de type 2, également appelé insulinorésistant, ou “diabète gras”, est décrit fréquemment chez l'homme et le chien, associé à l'obésité. Contrairement au précédent, il est caractérisé par une hyperinsulinémie. Le syndrome de Cushing en est la cause la plus commune [2, 4, 12, 16]. Une étude a révélé que chez 77 chevaux qui montraient des signes cliniques de DLIH et un test de freinage à la dexaméthasone positif, 53 présentaient une hyperinsulinémie [15].

Le phaéochromocytome (hypercorticisme par tumeur médullosurrénalienne) est une cause beaucoup plus rare de diabète de type 2 [10, 12]. Dans ce cas, il se produit le même phénomène que chez l'homme, le chien et le chat : l'effet “diabétogène”du cortisol se manifeste, par inhibition des récepteurs périphériques à l'insuline [10]. L'insulino-résistance associe à l'obésité a été décrite et il y a déjà longtemps chez des poneys fourbus, sans qu'on ait établi à l'époque de liens pathogéniques clairs.

Le diabète non-insulinodépendant est maintenant bien décrit chez des chevaux qui ne souffrent pas de DLIH. Ces cas d'insulinorésistance “pure”sont diagnostiqués par exclusion des autres causes. Les poneys semblent plus prédisposés que les chevaux.

Le test de tolérance au glucose montre une augmentation nette et prolongée de la glycémie et une hyperinsulinémie persistante.

Le test de tolérance à l'insuline démontre une résistance à l'insuline : l'injection d'insuline ne provoque pas de baisse significative de la glycémie (voir l'encadré “Tests de tolérance au glucose et à l'insuline”). Un autre test, utilisé actuellement dans des protocoles expérimentaux, existe : le “challenge hyperinsulinémique-euglycémique”. Il est plus fiable et rigoureux, mais également beaucoup plus contraignant [17].

Le phénomène d'insulinorésistance et d'intolérance au glucose est largement développé dans la deuxième partie.

L'hypothyroïdie

Signes cliniques

Chez l'adulte, des troubles musculaires et cardiaques sont rencontrés (bradycardie, augmentation du temps de conduction à l'électrocardiogramme), qui conduisent à une intolérance à l'effort. L'hypothermie est un symptôme fréquent [12]. Les chevaux thyroïdectomisés montrent une perte d'appétit, de la frilosité, une mue retardée, de la léthargie. Ils développent également de l'anémie, une leucopénie, et une hypercholestérolémie, mais ne deviennent pas obèses et ne sont pas atteints de fourbure.

Diagnostic

Contrairement au cas du Cushing, des tests diagnostiques fiables sont disponibles [16], en particulier le test de stimulation à la TRH avec dosage de T3 : l'injection d'un milligramme de TRH par voie intraveineuse provoque un doublement de la concentration de T3 après deux heures chez les chevaux normaux [12, 16].

Discussion

L'hypothyroïdie a été incriminée dans les cas de fourbures associés à l'obésité. Cette hypothèse se fonde sur des concentrations d'hormones thyroïdiennes assez basses chez ces chevaux [7, 8] et la supplémentation en hormones thyroïdienne a pu être recommandée avec certains succès.

Toutefois, les tests de stimulation de la thyroïde sont normaux chez ces chevaux et la fourbure n'est pas observée chez les chevaux thyroïdectomisés : l'hypothyroïdie n'est pas un facteur de risque pour la fourbure [7, 8]. Ceci est confirmé par une étude récente [7] qui porte sur des chevaux fourbus et obèses ne souffrant pas de DH, et soumis à un test de stimulation à la TRH (dosage de T3) : aucune différence n'a été trouvée avec les chevaux du groupe de contrôle.

La question reste néanmoins posée de savoir pourquoi l'administration d'hormones thyroïdiennes peut être un traitement d'appoint efficace dans les cas de fourbure associée à l'obésité. En théorie, ces hormones, en augmentant le métabolisme de base, favorisent la perte de poids, mais aucune étude ne l'a confirmé chez le cheval.

Considérée jusque-là comme inoffensive chez le cheval normothyroïdien, il convient de noter qu'une supplémentation excessive a, chez l'homme, des effets néfastes [7].

Conclusion

Détecter les premiers signes de dysfonctionnement hypophysaire, sur un cheval âgé, peut permettre de prendre des mesures hygiéniques (prévention des infections secondaires et du parasitisme, prévention de la fourbure, soins dentaires, rationnement alimentaire adapté, etc.), pour ralentir le développement des symptômes du Cushing, dont la fourbure est certainement le plus handicapant. Le diagnostic n'est pas toujours aisé, en particulier lors des premiers stades de la maladie, mais il permet, quand l'état du cheval ou du poney se dégrade, d'instaurer un traitement spécifique et efficace. Le diagnostic de certitude de ce syndrome passe par l'utilisation de tests endocriniens dynamiques (en pratique, le test de freinage à la dexaméthasone).

Il existe toutefois des chevaux dit “cushingoïdes”chez lesquels des symptômes évocateurs d'une maladie de Cushing ne sont pas confirmés par les tests endocriniens. Des études récentes, par comparaison avec l'obésité (centrale) chez l'homme, ont permis d'induire les notions de “Cushing périphérique”ou de “syndrome métabolique équin”, associées au phénomène d'insulinorésistance chez ces chevaux. Ces études et ces notions sont présentées dans un deuxième article.

Éléments à retenir

• Chez le cheval, la maladie de Cushing est d'origine quasi-exclusivement hypophysaire : aucun hypercorticisme surrénalien primaire n'a jamais été décrit.

• L'hirsutisme est observé chez la plupart des chevaux qui souffrent d'unemaladiede Cushing. Il n'existe pas d'autre cause connue pour ce symptôme, qui constitue donc un signe d'appel de cette affection.

• L'apport du laboratoire est souvent nécessaire pour établir un diagnostic de certitude de dysfonctionnement hypophysaire. En pratique courante, le test de freinage à la dexaméthasone constitue actuellement l'examen de choix.

• Chez le cheval, le diabète sucré de type 1 est rare. Le diabète sucré non-insulinodépendant est en revanche bien décrit, souvent associé à un syndrome de Cushing et plus généralement à l'obésité et à la fourbure.

• Un lien direct entre la fourbure, l'obésité et l'hypothyroïdie a été suspecté. Cette hypothèse est abandonnée.

Signes cliniques de dysfonctionnement du lobe intermédiairede l'hypophyse

• Hirsutisme, absence de mue estivale.

• Fourbure chronique.

• Hyperhydrose.

• Amyotrophie, baisse du tonus musculaire, puis réel amaigrissement.

• Polyuro-polydipsie, infections secondaires, léthargie, polyphagie, répartition anormale des masses graisseuses, gonflement de la fosse supra-orbitaire, abcès de pied, mauvaise cicatrisation, infertilité, cécité, convulsions.

Test de freinage à la dexaméthasone

(1) Prise de sang (entre 16 h et 18 h) pour dosage du cortisol.

(2) Injectiondedexaméthasone : 40μg/kg, soit 20 mg pour un cheval de 500 kg, par voie intramusculaire.

(3) Prise de sang entre 10 h et 12 h, le lendemain.

Interprétation des résultats

Chez le cheval normal la cortisolémie baisse de 50 à 80 % (valeurs inférieures à 1 μg/dl) dès une heure après l'injection de dexaméthasone et reste basse pendant vingt-quatre heures. Certains auteurs préconisent un suivi du cortisol à :

T0 + 2 h, + 4h, + 6 h, + 20 h.

Lors de DLIH, le “feedback” de la dexaméthasone ne se produit pas, et il n'y a pas de baisse du cortisol plasmatique.

D'après [4, 12, 16].

Test combiné freinage à la dexaméthasone/stimulation à la TRH

• T0 : Prise de sang pour dosage de cortisol ;injection de dexaméthasone (40 μg/kg par voie intramusculaire).

• T0 + 3 h : Prise de sang pour dosage de cortisol ;injection TRH (1 mg, par voie intraveineuse).

• T0 + 3 h 30 à 5 h : Prise de sang pour dosage de cortisol.

• T0 + 24 h : Prise de sang pour dosage de cortisol.

Interprétation

- ;Le cheval normal présente une baisse du cortisol plasmatique après l'injection de dexaméthasone (au moins 50 % après trois heures), mais pas d'élévation après celle de TRH.

- ;Lors de DLIH, une baisse identique du cortisol après la dexaméthasone est constatée, suivie d'une augmentation significative (jusqu'à 100 %) dès 30 mn après l'injection de TRH, qui persiste pendant une vingtaine d'heures.

D'après [1, 5].

Tests de tolérance au glucose et à l'insuline

◊ Tolérance au glucose

• Diète non nécessaire.

• T0 : injection par voie intraveineuse de glucose 50 % à la dose de 0,5 g/kg.

• Glycémies (+/- insulinémie) à T0, puis toutes les trente minutes pendant quatre à six heures.

◊ Interprétation

Chez un cheval normal, l'injection de glucose entraîne une nette augmentation de la glycémie (x 3 au minimum) dès quinze à trente minutes, puis une baisse rapide au bout d'une heure, avec un retour à la normale en moins de trois heures. De même, l'insulinémie augmente nettement, pour revenir à la normale après trois à cinq heures.

En cas d'intolérance au glucose, le pic de glycémie se produit de façon similaire, mais la glycémie reste élevée anormalement longtemps. L'insulinémie, souvent élevée au départ chez les chevaux anormaux, n'augmente pas. Chez les chevaux malades, le ratio insuline/glucose diminue donc.

◊ Tolérance à l'insuline

• Diète

• T0 : injection par voie intraveineuse de 0,4 UI/Kg d'insuline protamine Zn, ou de 0,05 UI/Kg d'insuline cristalline.

• Glycémie à T0, puis toutes les 30minutes pendant quatre heures ou deux heures et demi, suivant le type d'insuline.

◊ Interprétation

Chez un cheval sain, une diminution de la glycémie (50 % minimum) est observée, plus ou moins intense et rapide en fonction du type d'insuline. Lors d'insulino-résistance, la glycémie n'est pas modifiée. Ce test est particulièrement intéressant pour différencier la résistance à l'insuline (lors de maladie de Cushing, par exemple), du diabète de type 1.

D'après [6, 10, 12]

Références

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