L’obligation de sécurité ne s’applique pas à l’animal - Le Point Vétérinaire expert rural n° 335 du 01/05/2013
Le Point Vétérinaire expert rural n° 335 du 01/05/2013

OBLIGATIONS DU PRATICIEN

Juridique

Auteur(s) : Christian Diaz

Fonctions : 7, rue Saint-Jean
31130 Balma

Depuis 1941, la responsabilité du vétérinaire est calquée sur celle du médecin. Le statut juridique de l’animal est cependant susceptible de nuancer cette conception, au sujet de l’obligation de sécurité due par le praticien.

Un arrêt récent de la cour d’appel de Paris vient nuancer la conception de l’obligation de sécurité en pratique vétérinaire, considérant que celle-ci ne peut s’appliquer à l’animal.

L’obligation de sécurité du médecin envers son patient

Les obligations d’un médecin recouvrent trois domaines :

– obligation de faire : donner des soins consciencieux, attentifs, conformes aux données acquises de la science (arrêt Mercier) ;

– obligation de donner une information claire, loyale et appropriée. Il s’agit d’une obligation de résultat, autonome du contrat de soins depuis 2010 après avoir longtemps été considérée comme accessoire de l’obligation principale ;

– obligation de ne pas faire, dite de sécurité de résultat, qui impose de ne pas aggraver l’état du malade, même en l’absence de faute. Il s’agit notamment des infections nosocomiales, des accidents liés au matériel utilisé ou ayant pour origine un acte non fautif, même si la Cour de cassation a aménagé cette disposition en excluant les conséquences de l’aléa thérapeutique du domaine de l’indemnisation. Elle est un accessoire du contrat de soins.

L’arrêt du 19 octobre 2012

Un entraîneur avait en charge un cheval de compétition. Alors qu’il devait monter dans un van le menant à une séance de travail, ce dernier s’est échappé et s’est gravement blessé. Le propriétaire demande réparation du préjudice consistant, entre autres, en l’achèvement prématuré de la carrière de compétiteur de l’animal, en invoquant le manquement à une obligation de sécurité. Il est débouté en première instance par le tribunal qui met à sa charge la preuve du manquement de cette obligation. La cour d’appel rejette cette analyse, en invoquant la responsabilité du dépositaire, lequel doit prouver que la détérioration de la chose ne résulte pas d’une inexécution fautive. Cette conception est classique, mais la cour ajoute en outre que l’obligation de sécurité ne saurait être « admise pour un animal, qui est juridiquement une chose ».

Pédagogie du jugement

Selon la cour d’appel, l’obligation de sécurité est une obligation accessoire à une obligation principale de sorte qu’il est inapproprié d’évoquer une obligation de sécurité lorsque l’intégrité de l’animal est déjà l’objet de l’obligation principale du contrat. Le domaine de l’obligation est délimité par le dommage corporel, et, par conséquent, elle ne s’adresse qu’à la personne et pas aux biens dont elle est propriétaire.

Si cette conception est appliquée de façon extensive au contrat de soins qui lie le vétérinaire à son client, le praticien se trouve confronté au respect de l’obligation de soins, conformément aux dispositions originelles de l’arrêt Mercier étendu en 1941 à la profession vétérinaire, et à celui de l’obligation d’information qui a pris depuis quelques mois son autonomie. Cependant, il n’est pas assujetti à l’obligation de sécurité de résultat, ce qui représente une différence notable avec le médecin.

Cette différence, liée au statut juridique de l’animal, bien meuble au sens du Code civil, est cependant susceptible d’être modifiée selon l’évolution de ce statut, par voie légale ou jurisprudentielle, l’animal, sans être pour autant le créancier de l’obligation, devenant alors objet de l’obligation de sécurité.

  • Source : F. Marchadier. Revue semestrielle du droit animalier. Faculté de droit et des sciences économiques de Limoges, février 2012.

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