Sténose pulmonaire acquise chez un chien - Le Point Vétérinaire n° 302 du 01/01/2010
Le Point Vétérinaire n° 302 du 01/01/2010

Cardiologie canine

Cas clinique

Auteur(s) : François Serres

Fonctions : Oncovet, avenue Paul-Langevin, 59650 Villeneuve-d’Ascq

Un chien labrador mâle de 10 ans est présenté en consultation à la suite de trois épisodes de syncope, survenant lors de phases d’excitation ou d’effort important.

Aucun antécédent d’affection cardiovasculaire n’est rapporté. L’examen clinique montre un animal en bon état général. L’auscultation met en évidence une fréquence cardiaque normale (entre 100 et 140 bpm), associée à un souffle systolique médiothoracique entendu à gauche et à droite. Le pouls est relativement bien frappé. Un examen électrocardiographique (ECG) révèle une nette déviation axiale droite.

Diagnostic

L’association d’une anomalie à l’auscultation et d’une déviation axiale droite à des symptômes d’insuffisance cardiaque circulatoire motive la réalisation d’un examen échographique cardiaque. Une nette dilatation du ventricule droit (VD) associée à un écrasement du ventricule gauche (VG) est observée. Une masse de grande taille (entre 3 et 4 cm de diamètre), issue du septum interventriculaire et mobile, occupe une grande partie de la chambre de chasse du ventricule droit (photo 1).

En mode Doppler couleur, un flux turbulent systolique de très faible diamètre est visualisé entre le ventricule droit et le tronc pulmonaire (photo 2). Une insuffisance tricuspidienne de haute vélocité est également identifiée. L’examen en mode Doppler continu de ces deux flux indique un flux de haute vélocité (de 4,3 m/s correspondant à un gradient VD/tronc pulmonaire et VD/atrium droit de 74 mmHg). En l’absence de signe congestif, la pression atriale droite est estimée à 10 mmHg. La pression artérielle pulmonaire systolique peut donc être estimée à moins de 20 mmHg, excluant une hypertension artérielle pulmonaire secondaire.

Un diagnostic de sténose pulmonaire acquise, secondaire à la présence d’une masse intracardiaque droite, probablement de nature tumorale, est établi. Les symptômes sont ainsi expliqués, la sténose pouvant être majorée lors de stress et s’accompagner d’un collapsus cardiovasculaire. Le traitement proposé vise à diminuer la survenue de phases de tachycardie par l’emploi d’un β-bloquant (aténolol, Ténormine®(1), en dose croissante de 0,1 à 0,8 mg/kg/j administré le soir).

Discussion

Les tumeurs cardiaques sont relativement peu fréquentes chez le chien (avec une incidence annuelle entre 0,1 et 0,25 %) [1]. Les symptômes observés sont liés à un épanchement péricardique lors de tumeurs extracavitaires. Lors de tumeurs intracavitaires, souvent situées dans le ventricule droit et/ou l’atrium droit chez le chien, les symptômes sont liés à l’obstruction au flux ou sont la conséquence de thromboembolies pulmonaires [2, 3]. Dans le cas présenté, les symptômes découlent essentiellement d’une obstruction de la chambre de chasse du ventricule droit. Ce type de lésion est rarement décrit car les tumeurs cardiaques les plus fréquentes (hémangiosarcome et chémodectomes) sont rarement retrouvées dans cette localisation. Deux cas relativement similaires ont déjà été décrits, associés respectivement à un myxome et à un carcinome thyroïdien ectopique [3].

Le traitement de ces affections obstructives est délicat. Outre le traitement chirurgical, risqué mais potentiellement curatif, l’emploi d’un stent déployé au cours d’un cathétérisme intracardiaque peut être proposé face à une lésion obstructive de petite taille [3, 4]. Enfin, la lésion tumorale étant responsable d’une lésion sténotique, un traitement médical à l’aide d’un β-bloquant (similaire à celui prescrit lors de sténose congénitale) peut être proposé.

  • (1) Médicament humain.

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