À quand la besnoitiose au nord de la Loire ? - Le Point Vétérinaire n° 301 du 01/12/2009
Le Point Vétérinaire n° 301 du 01/12/2009

MALADIES PARASITAIRES DES BOVINS

Infos

QUESTION DE LECTEUR

Auteur(s) : Philippe Jacquiet*, Jean-Pierre Alzieu**

Fonctions :
*Service de parasitologie, ENV de Toulouse 23, chemin des Capelles, 31076 Toulouse Cedex 3
**Laboratoire vétérinaire départemental de l’Ariège Rue de Las Escoumes, 09008 Foix CDIS.

Cette région qui semble encore indemne doit se prémunir contre la maladie par des contrôles sérologiques.

La Loire serait-elle “la ligne Maginot” de la besnoitiose ? Assurément pas. La Garonne, le Rhône et le Rhin ne sont pas parvenus à limiter la progression de la maladie, comme en témoignent les foyers alpins et de Bavière liés à l’importation de bovins du sud-ouest de la France. Plus sérieusement, le cycle monoxène de la besnoitiose, de bovin contaminé à bovin sain, semble actuellement prépondérant. Après l’achat d’un bovin porteur latent de kystes à bradyzoïtes (viables 10 ans), il suffit aux insectes vecteurs (stomoxes en stabulation, taons et stomoxes au pré) d’assurer la transmission mécanique du parasite Besnoitia besnoiti. C’est ainsi que la maladie va arriver (si ce n’est déjà fait) au nord de la Loire et impacter la ceinture laitière française. Le silence clinique apparent dans cette zone est-il lié à une insuffisance de diagnostic de cette maladie à laquelle les éleveurs et, à un degré moindre, les vétérinaires n’ont jamais été confrontés ou bien ce périmètre est-il vraiment indemne ?

Le diagnostic clinique est peu aisé en phase fébrile. Il doit écarter les affections respiratoires, le coryza gangreneux et la fièvre catarrhale ovine (FCO). Il reste délicat à la phase d’oedèmes avec la FCO et l’ehrlichiose granulocytaire bovine (EGB) à Anaplasma phagocytophilum,mais devient presque univoque à la phase de sclérodermie car les gales invasives sont écartées après raclage cutané. Trop de suspicions initiales de FCO et de besnoitiose ont été attribuées à tort à des photosensibilisations.

Le diagnostic expérimental fait appel actuellement à la sérologie. Un test Elisa spécifique et sensible a été validé(1). Il permet la détection des anticorps sériques spécifiques de B. besnoiti dès 3 à 4 semaines après l’infection, à la fois chez les animaux malades et chez les porteurs latents asymptomatiques, véritables réservoirs du parasite dans les cheptels infectés. Une confirmation par Western Blot est parfois nécessaire pour des cas douteux. D’un coût modéré, cette technique Elisa permet désormais un dépistage sérologique large, voire exhaustif du cheptel. Une méthode PCR (polymerase chain reaction)en développement va permettre de dépister des animaux contaminés très récemment, en phase fébrile ou d’oedèmes. Il serait judicieux de contrôler par la sérologie tous les bovins suspects et tous les individus provenant du sud de la diagonale Nantes-Lyon. En cas d’infection très récente dans un cheptel ou de diffusion modérée, la séroprévalence peut se révéler très faible (par exemple inférieure à 10 %) et être compatible avec l’élimination sélective des individus positifs.

Ne pas procéder à cette élimination, c’est s’exposer à une montée en puissance des contaminations (avec des séroprévalences supérieures à 30 ou 40 %) qui ne seraient découvertes qu’à la faveur d’un premier cas clinique. Alors, il est souvent trop tard pour une prophylaxie sanitaire, et le passage vers un état enzootique est irréversible, avec des impacts économiques identifiés. Ainsi, la systématisation du contrôle sérologique Besnoitia à l’achat paraît désormais incontournable.

L’enjeu économique est d’autant plus important pour une région fortement “exportatrice” de génétique et de primipares laitières.

  • (1) Voir l’article “Actualités sur la transmission et le diagnostic de la besnoitiose bovine”, des mêmes auteurs, dans ce numéro.

Abonné au Point Vétérinaire, retrouvez votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr