La castration chimique chez le chien - Le Point Vétérinaire n° 299 du 01/10/2009
Le Point Vétérinaire n° 299 du 01/10/2009

Reproduction canine

Pratique

SUR ORDONNANCE

Auteur(s) : Anne Gogny*, Marc Gogny**, Hervé Pouliquen***

Fonctions :
*Reproduction des animaux de compagnie, centre hospitalier vétérinaire
**Unité de pharmacologie et toxicologie
ENV de Nantes, Atlanpôle/La Chantrerie, 44307 Nantes Cedex 03
***Auteur-coordinateur

La desloréline, analogue du GnRH, est proposée pour inhiber les fonctions testiculaires et la libido. Constitue-t-elle une solution alternative aux antiandrogènes ?

Un chien mâle âgé de 2 ans, non castré, de race schnauzer géant est présenté en consultation. Il vit avec sa mère, femelle reproductrice, et a déjà fugué. Le propriétaire ne souhaite pas d’accouplement entre ses deux chiens et voudrait aussi limiter le risque de fugue.

Cependant, le chien est destiné à une reproduction ultérieure et une castration chirurgicale est exclue. L’examen clinique ne révèle pas d’anomalie. Après avoir expliqué au propriétaire les solutions possibles, il est décidé de poser un implant à base de desloréline.

Inhibition médicale de la fonction testiculaire

Chez le chien, la castration non chirurgicale a pour objet :

– de provoquer une infertilité réversible chez un mâle ;

– de traiter une affection liée à la testostérone (circumanalome, affection prostatique, etc.) si l’animal ne peut pas subir une intervention chirurgicale ;

– d’évaluer les effets de la castration sur une affection ou un comportement dont la cause hormonale n’est pas clairement établie (agressivité, fugues, etc.) ;

– de provoquer une infertilité définitive sans retentissement morphologique ni esthétique, et sans passer par une intervention chirurgicale ressentie comme une mutilation par certains propriétaires.

Dans ce cadre, 3 substances sont utilisables chez le chien mâle : la delmadinone (Tardak®) en suspension injectable, l’osatérone (Ypozane®) en comprimés et la desloréline (Suprelorin®) présentée sous forme d’implant. Les indications définies par les autorisations de mise sur le marché sont :

– l’hypertrophie de la prostate et l’hypersexualité pour Tardak® ;

– l’hyperplasie bénigne de la prostate pour Ypozane® ;

– l’induction d’une infertilité temporaire chez les chiens mâles arrivés à maturité sexuelle, non castrés et en bonne santé pour Suprelorin®.

La delmadinone et l’osatérone sont des antiandrogènes : leur mode d’action repose sur un antagonisme compétitif vis-à-vis des récepteurs à certaines hormones stéroïdes, dont la testostérone.

La desloréline est un agoniste de la GnRH. Chez le mâle, la GnRH, sécrétée de façon pulsatile par l’hypothalamus, stimule la sécrétion de :

– l’hormone lutéinisante (LH) qui induit la sécrétion de testostérone par les cellules de Leydig ;

– l’hormone folliculostimulante (FSH) impliquée avec la testostérone dans la spermatogenèse, au niveau des cellules de Sertoli.

L’administration continue d’un agoniste de la GnRH conduit à la désensibilisation des récepteurs à la GnRH endogène, ce qui inhibe la sécrétion des gonadotrophines LH et FSH et des hormones testiculaires. C’est le principe de l’implant de Suprelorin® qui, une fois inséré sous la peau par injection sous-cutanée, libère de la desloréline en continu et à dose faible.

Suprelorin®

Une castration chimique complète et réversible

Suprelorin® est le médicament qui répond le mieux au motif de consultation présenté dans ce cas. Après implantation, une diminution de la production de spermatozoïdes et une atténuation de l’expression des comportements sexuels sont attendues. En effet, chez 95 % des chiens traités, le traitement provoque une baisse de la spermatogenèse et de la libido pendant au moins 6 mois. L’infertilité induite par l’implant est réversible, avec une restauration de la capacité à éjaculer du sperme de qualité normale environ un an après la dernière implantation. Cependant, l’infertilité ne devenant effective que 6semaines après la pose de l’implant, il convient de séparer le mâle traité de la femelle avec laquelle il vit si celle-ci entre en proœstrus au cours de cette période.

Il convient de prévenir le propriétaire que la taille des testicules diminue pendant le traitement et qu’une réaction cutanée locale de type œdème peut apparaître au point d’implantation.

Il est possible que les fugues diminuent avec le traitement, à la condition qu’elles aient pour unique support un comportement sexuel.

Une ordonnance obligatoire

Une ordonnance est obligatoire pour toute administration d’un médi-cament sur prescription par le vétérinaire lui-même, fût-ce un implant posé chez un chien (article 5141-111 du Code de la santé publique). Cette formalité est d’autant plus importante qu’il s’agit ici d’un traitement dont l’effet n’est pas immédiat, et dont la longue durée d’action expose au risque d’oublier la date de la pose de l’implant. L’ordonnance permet ainsi de prévenir ces écueils.

  • Les fiches DMV des médicaments vétérinaires : Suprelorin®, Tardak®, Ypozane® sont consultables sur le site www.WK-Vet.fr, rubrique DMV/Roy.

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