Abondance de moyens n’est pas toujours bénéfique - Le Point Vétérinaire n° 293 du 01/03/2009
Le Point Vétérinaire n° 293 du 01/03/2009

Jugement contradictoire

Pratique

LÉGISLATION

Auteur(s) : Christian Diaz

Fonctions : 7, rue Saint-Jean, 31130 Balma

L’abondance de moyens juridiques invoqués par le demandeur n’est pas un facteur susceptible de favoriser l’issue d’une procédure judiciaire lorsque ces derniers ne sont pas fondés.

Les faits : cession d’un cheval qui se révèle être boiteux

MM. R. et M. sont copropriétaires d’un cheval cédé à M. B. après une visite vétérinaire. L’animal est confié à un cavalier professionnel pour des concours de sauts d’obstacles (CSO), mais il souffre rapidement de boiterie chronique.

M. B. assigne en résolution (demande au juge de prononcer la nullité du contrat).Les vendeurs sont condamnés en première instance.

MM. R. et M. font appel, la cour analyse les nombreux moyens juridiques ou les fondements de la cause du litige sur lesquels a reposé le premier jugement.

Le jugement : rejets des moyens présentés en première instance

Obligation de délivrer et de garantir la chose vendue

La vente concernait bien un cheval apte au CSO. Les juges notent que la demande fondée sur l’article 1603 du Code civil, relatif à l’obligation de délivrer et de garantir la chose vendue, ne peut s’appliquer à la cause, le cheval étant “plutôt peut-être atteint d’un vice caché”.

Garantie de conformité

Depuis février 2005, l’action en garantie dans les ventes et les échanges d’animaux domestiques peut être fondée sur les dispositions des articles L. 211-1 et suivants du Code de la consommation (garantie de conformité des biens meubles) lorsque le vendeur est un professionnel et l’acheteur un particulier(1).

En l’espèce, M. B. a visé le Code de la consommation, mais les vendeurs (grossistes en emballage et demandeurs d’emploi) ne peuvent être qualifiés de professionnels. L’article L. 211-1 ne peut donc trouver application.

Action en garantie des vices rédhibitoires

M. B. a visé aussi les vices rédhibitoires du Code rural (art. L. 213-1), mais ceux-ci ont été écartés par la cour, en raison du délai non respecté d’introduction de l’instance. En effet, en vertu des dispositions de l’article R. 213-5 du Code rural, le délai pour introduire l’action est de dix jours à compter de la livraison du bien, sauf cas particuliers qui ne s’appliquent pas en l’espèce.

Action en garantie des vices cachés

M. B. a visé encore l’article 1641 et suivants du Code civil pour garantie tacite, mais la cour ne possède aucun document démontrant l’antériorité du vice par rapport à la date de l’acquisition. De plus, les juges auraient également pu rejeter ce moyen en invoquant l’absence de convention contraire, explicitement prévue dans le contrat, nécessaire pour recourir aux dispositions du Code civil, conformément à une jurisprudence constante depuis 2001.

Vice du consentement

M. B. a également invoqué l’erreur, vice du consentement (art. 1109 et 1110 du Code civil). La cour a écarté ce moyen, considérant que le consentement n’avait pas été vicié par une erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue.

Rejetant l’ensemble des moyens présentés par B., la cour réforme la décision de première instance et déboute MM. M. et B.

Pédagogie du jugement : le choix des moyens invoqués est capital

L’abondance des moyens invoqués n’est pas un gage de succès lors d’une procédure judiciaire.

« Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens », cette formule prononcée lors du sac de Béziers au Moyen-Âge, n’est pas une règle de droit dans la justice contemporaine.

La possibilité de faire appel d’un premier jugement est une garantie du respect de la règle de droit pour le justiciable. À ce titre, les jugements rendus en premier et dernier ressorts (pas de possibilité d’appel) par la juridiction de proximité (litiges d’un montant inférieur à 4 000 €) ne manquent pas de susciter de légitimes interrogations, bien que cette procédure ait été créée pour désengorger les tribunaux.

  • (1) Voir l’article “Action en garantie lors de vente ou d’échange d’animaux domestiques” du même auteur paru dans le Point Vétérinaire n° 281.

  • Source : Cour d’appel de Douai du 21 janvier 2008.

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