Cas d’ un shunt portosystémique extrahépatique - Le Point Vétérinaire n° 291 du 01/12/2008
Le Point Vétérinaire n° 291 du 01/12/2008

Médecine interne du chien

Pratique

CAS CLINIQUE

Auteur(s) : Annie-Claude Legrêle*, Éric Bomassi**, Stéphane Libermann***

Fonctions :
*CHV
29, avenue du Maréchal-Joffre
77100 Meaux
**CHV
29, avenue du Maréchal-Joffre
77100 Meaux
***CHV
29, avenue du Maréchal-Joffre
77100 Meaux

Le dosage des acides biliaires pré- et postprandiaux est le test de choix lors de shunt portosystémique. L’ examen échographique permet de le caractériser et de détecter une hypertension portale.

Les shunts portosystémiques (SPS) sont des communications vasculaires anormales entre la circulation porte et la circulation systémique, qui court-circuitent partiellement ou complètement la vascularisation hépatique. Les SPS peuvent être congénitaux ou acquis, intra- ou extrahépatiques, simples ou multiples.

Un chien croisé yorkshire âgé d’ un an, correctement vacciné et vermifugé, est référé en consultation pour une suspicion de shunt portosystémique.

Cas clinique

1. Anamnèse

Les propriétaires rapportent des selles molles et décolorées ainsi que des troubles neurologiques (pousser au mur, convulsions), surtout après les repas. Une numération et une formule sanguines et un bilan biochimique ont été réalisés par le vétérinaire traitant ( ). Ils révèlent une leucocytose avec neutrophilie, une diminution de l’ urémie et une augmentation des paramètres hépatiques. L’ albumine et les protéines totales sont dans les valeurs usuelles basses. Les acides biliaires sont normaux à jeun mais très augmentés après le repas (supérieurs à 50 µmol/l). Ces dernières analyses, corrélées aux signes cliniques, sont en faveur d’ un shunt portosystémique.

Un traitement médical par voie orale à base de lactulose (Duphalac®(1), 0,5 ml/kg trois fois par jour) et de métronidazole et de spiramycine (Buccoval®, 7,5 mg/kg deux fois par jour), puis de métronidazole (Flagyl®(1), 7,5 mg/kg deux fois par jour) est mis en place. Le chien est alors référé pour un examen échographique afin de caractériser le shunt et pour une prise en charge chirurgicale si nécessaire.

2. Examen clinique

Le chien présente un léger retard de croissance. Les muqueuses sont roses et l’ auscultation cardiorespiratoire ne révèle aucune anomalie. La palpation abdominale est souple mais le foie n’ est pas palpable.

3. Examens complémentaires

La consultation de référé a lieu plusieurs semaines après celle du vétérinaire traitant, un bilan complet est donc de nouveau pratiqué et les examens complémentaires sont approfondis. Une numération et une formule sanguines, ainsi qu’ un bilan biochimique sont effectués. Un ionogramme est également réalisé pour évaluer les désordres hydro-électrolytiques éventuels.

Une leucocytose modérée persiste, qui peut être due à l’ absorption intestinale de bactéries. La protéinémie et l’ albuminémie sont inférieures aux normes, ce qui constitue un facteur pronostique en général péjoratif. L’ urémie est légèrement diminuée alors que l’ ammoniémie à jeun et six heures après le repas est augmentée. Cela traduit l’ incapacité du foie à synthétiser l’ urée à partir de l’ ammoniac. L’ ionogramme est normal.

À l’ examen échographique, le foie est de très petite taille et peu vascularisé (). Un discret épanchement abdominal et des cristaux en suspension dans la vessie sont observés ().

Le shunt est d’ abord visualisé en mode bidimensionnel (2D). Il constitue une large lacune hypoéchogène extrahépatique dans la continuité de la veine porte et qui s’ abouche à la veine cave caudale ().

Son anatomie et son trajet sont précisés à l’ aide d’ un examen Doppler couleur (). Il s’ agit d’ un shunt porto-cave. Des turbulences en regard de son abouchement dans la veine cave caudale sont visibles (photo 5). L’ examen Doppler pulsé permet les mesures du flux sanguin portal et du flux du shunt. Le premier flux est fluctuant et sa vitesse est augmentée (0,2 m/s, valeurs moyennes chez le chien situées entre 0,12 et 0,17 m/s), le second est typiquement en plateau, antérograde et de haute vélocité (0,87 m/s) ( ).

4. Traitement

Le traitement médical, à base de Duphalac®(1) et de Flagyl®(1), est poursuivi en attente d’ une intervention chirurgicale qui consiste à ligaturer le shunt.

La prémédication comprend une antibioprophylaxie à l’ aide de céphalexine (Rilexine®, 15 mg/kg par voie intraveineuse et 15 mg/kg par voie sous-cutanée à résorption plus lente) et une analgésie à base de morphine (0,2 mg/kg par voie intraveineuse).

L’ anesthésie est réalisée par voie gazeuse. L’ isoflurane est privilégié en raison de sa faible métabolisation hépatique. L’ induction est pratiquée au masque, puis l’ animal est intubé. L’ anesthésie est ensuite maintenue grâce à un mélange d’ isoflurane et d’ oxygène pur en ventilation assistée. En phase peropératoire, la fluidothérapie est assurée par une perfusion de chlorure de sodium (20 ml/kg/h). Le monitorage comprend la mise en place d’ un oxymètre de pouls, d’ un capnographe, d’ un électrocardiographe et la mesure de la température.

Une laparotomie médiane est réalisée. Le shunt est visualisé et les tissus qui l’ entourent sont disséqués (). Une ligature partielle avec un fil irrésorbable (éthicrin®, décimale 2) est posée autour du shunt et d’ une broche de 2 mm de diamètre. Une fois la ligature serrée, la broche est retirée. Les viscères sont observées attentivement pendant une quinzaine de minutes. Aucun signe d’ hypertension portale n’ est constaté (hyperpéristaltisme, organes congestionnés, voire cyanosés) pendant ce laps de temps. Le shunt reste donc ligaturé à 2 mm de diamètre. Les sutures des plans musculaires, cutanés et sous-cutanés sont alors réalisées.

5. Phase postopératoire

L’ absence de signe d’ hypertension portale est confirmée par un examen échographique en mode Doppler, qui indique une pression portale normale. Le chien est surveillé lors de la phase de réveil et il est placé sur un tapis chauffant afin de prévenir toute hypothermie. Un suivi de température toutes les heures ainsi qu’ une surveillance des signes de convulsion sont pratiqués. Des dosages de la glycémie sont réalisés à l’ aide d’ un glucomètre et une perfusion de chlorure de sodium et de glucose est administrée afin de prévenir toute hypoglycémie (les réserves hépatiques en glycogène étant pauvres). Un nouveau bilan biochimique est prévu 24 heures après l’ opération. La glycémie et l’ ammoniémie sont de nouveau dans les normes.

Un examen échographique abdominal permet de mesurer le degré de fermeture du shunt. Il est proche de 2 mm ().

6. Suivi

Un mois après l’ intervention chirurgicale, un contrôle est réalisé. Le chien ne présente plus aucun trouble nerveux. À l’ examen échographique, le foie est de taille normale. Les vaisseaux hépatiques sont bien visualisés et le flux de shunt a disparu. Le flux porte est de nouveau dans les normes sans aucune hypertension portale (vitesse de 0,15 m/s), souvent à l’ origine de shunts multiples. Le pronostic est favorable.

Discussion

1. Physiopathologie et épidémiologie

Les shunts portosystémiques peuvent être congénitaux ou acquis, intra- ou extrahépatiques, simples ou multiples (). Les shunts congénitaux représentent environ 70 % des cas chez le chien et sont majoritaire chez le chat [2]. Aucune prédisposition de sexe n’ est notée, bien qu’ une étude récente relate que les femelles semblent plus affectées dans la race bichon frisé [9, 19, 32].

Les shunts congénitaux extrahépatiques atteignent les chiens de petite taille et la plupart des chats contrairement aux shunts congénitaux intrahépatiques qui se retrouvent plutôt chez les individus de grande taille. Plus d’ une trentaine de races sont prédisposées : yorkshire-terrier pour une grande majorité des cas, bichon maltais ou frisé, caniche, teckel, schnauzer nain, lhassa apso, shi-tzu, cairn-terrier et jack russel chez le chien, himalayen et persan chez le chat [2, 9, 21, 27]. Des caractères héréditaires sont démontrés chez le cairn-terrier et le yorkshire [9, 26, 29]. Ces shunts extrahépatiques proviennent de la veine porte ou de l’ un de ses afférents : veines gastrique gauche, splénique, mésentérique craniale ou caudale, gastro-duodénale. En général, ils se jettent dans la veine cave caudale, mais également dans la veine azygos ou plus rarement dans la veine thoracique interne, voire la veine rénale ou colique [2, 4, 15, 21, 28].

2. Signes cliniques

Les signes cliniques sont variés. Les troubles nerveux liés à l’ encéphalose sont fréquents, mais ils ne sont pas obligatoirement aggravés après les repas comme dans le cas décrit. Une léthargie et une dépression sont observées [31]. Des changements de comportement peuvent être évocateurs d’ un SPS. Les autres signes sont un déficit proprioceptif, une ataxie, un pousser au mur, des tremblements, des convulsions réfractaires au diazépam (Valium®(1)) et une amaurose. En général, des troubles digestifs surviennent, dominés par des vomissements et de la diarrhée. L’ hypersalivation est fréquente chez le chat. Parfois, une polyuro-polydipsie, dont la cause n’ est pas clairement identifiée, est présente. Des calculs d’ urate d’ ammonium peuvent être présents, secondaires aux perturbations de la transformation de l’ ammoniac en urée dans le foie, et entraîner des cystites à répétition [2, 7, 8, 25, 28, 31].

Lors d’ hypoprotéinémie sévère ou d’ hypertension portale, une ascite de type transsudat pur ou modifié apparaît [32]. Certains animaux ont un retard de croissance. D’ autres anomalies congénitales sont parfois associées telles qu’ une cryptorchidie chez les mâles [19, 32]. Un réveil prolongé à la suite d’ une anesthésie peut être un signe d’ appel. En cas de shunt, le foie n’ assure pas les fonctions de métabolisation des agents anesthésiques.

3. Diagnostic

L’ établissement du diagnostic repose sur les signes cliniques évocateurs et les examens complémentaires.

Numération et formule sanguines

La numération et la formule sanguines peuvent être modifiées. Une leucocytose est parfois présente, secondaire à l’ absorption intestinale de bactéries. De même, une légère anémie microcytaire est souvent observée. Elle serait due à une altération du métabolisme du fer, des lipides ou à des pertes sanguines chroniques [7, 31]. Les temps de coagulation peuvent être augmentés légèrement, sans processus hémorragique, en raison de l’ incapacité du foie à synthétiser des facteurs de coagulation. Lors de biopsie, il convient de les mesurer au préalable [28, 31].

Analyses biochimiques

L’ urée est diminuée car l’ ammoniac n’ est pas dégradé par le foie et la capacité du cycle de l’ urée est réduite. Ce paramètre pourrait être un facteur pronostique de la taille du shunt. En effet, un shunt sévère limite davantage la dégradation d’ ammoniac par le foie, et l’ urée est d’ autant plus basse [32]. Cependant, d’ autres facteurs (fluidothérapie, anorexie, polydipsie) peuvent intervenir.

L’ ammoniémie est souvent augmentée en cas de SPS.

L’ hypoprotéinémie et l’ hypoalbuminémie sont la conséquence de l’ insuffisance hépatique, des pertes intestinales et de la mauvaise absorption digestive. Ce sont des facteurs pronostiques défavorables à court terme [2, 18].

En général, les paramètres hépatiques (phosphatases alcalines ou PAL, alanine aminotransférases ou ALAT) sont normaux à légèrement augmentés selon l’ altération de l’ activité hépatocellulaire. Cependant, chez les jeunes de moins de six mois, les PAL sont augmentées par la production d’ une isoenzyme d’ origine osseuse [32].

Une hypoglycémie est souvent présente car les stocks de glycogène hépatique sont réduits et le métabolisme de l’ insuline, du glucagon et des corticostéroïdes est perturbé.

L’ hypocholestérolémie résulte d’ une perturbation de la synthèse du cholestérol, des triglycérides et des lipoprotéines.

Les acides biliaires sont normaux ou augmentés à jeun et très augmentés dans la phase postprandiale. En cas de SPS, la concentration des acides biliaires postprandiaux est supérieure à 50 µmol/l chez le chien et à 20 µmol/l chez le chat. La concentration des acides biliaires à jeun est augmentée dans 76 % des cas de SPS et dans 100 % des cas pour les acides biliaires postprandiaux [2]. Ce test est le plus sensible pour apprécier la fonction hépatique. Les valeurs ne sont toutefois pas corrélées à la gravité du shunt et une augmentation des acides biliaires n’ est pas obligatoirement spécifique d’ un SPS.

Une hypokaliémie peut survenir, notamment en cas de diarrhées [7].

Examens d’ imagerie

Certaines méthodes d’ imagerie sont très utiles mais peu abordables en clientèle, et allongent le temps anesthésique. Il s’ agit des techniques de portographie mésentérique, d’ angiographie de l’ artère mésentérique craniale, de la splénoportographie, de la cathétérisation de la veine porte par voie transplénique et de la scintigraphie par voie transrectale [2, 20, 21, 28].

L’ examen échographique reste la méthode de choix. Il permet de visualiser le shunt, de préciser son anatomie (intra- ou extrahépatique) et son trajet (ce qui facilite l’ abord chirurgical) son type (simple, multiple) et ses caractéristiques hémodynamiques (aspect et vitesse du flux) à l’ aide du mode Doppler. Il révèle un foie de petite taille, hypovasculaire, avec des vaisseaux porte ou hépatiques peu reconnaissables [1, 2, 7]. Des calculs vésicaux et une néphromégalie peuvent être observés. [5]

La sensibilité et la spécificité de cet examen sont variables selon les études (respectivement 47 à 95 % et 67 à 100 %, en fonction de l’ opérateur). L’ utilisation du Doppler permet d’ améliorer ces paramètres. Ainsi, la sensibilité peut atteindre 92 à 95 % et la spécificité 98 %, avec des valeurs plus élevées pour les SPS intrahépatiques (sensibilité et spécificité de 100 %) que pour les SPS extrahépatiques (sensibilité de 90 % et spécificité de 97 %) [2, 5, 14, 17, 21, 23, 25].

Lors de SPS extrahépatique, le diamètre de la veine porte à l’ entrée du foie est inférieur à celui de la veine cave postérieure. De plus, des turbulences sont présentes à la jonction de la veine cave car le flux est influencé par les changements dans l’ atrium droit et les variations de pression pleurale pendant la respiration [2, 5, 13, 21, 23].

4. Traitement

Traitement diététique et médical

L’ objectif du traitement diététique et médical est de réduire les toxines et les bactéries dans la circulation systémique, ainsi que la cristallurie, tout en assurant un apport de nutriments essentiels [1, 2, 3, 19, 28, 31, 32].

L’ alimentation est sélectionnée afin de maintenir un poids satisfaisant et de prévenir le développement d’ une encéphalose hépatique. Le régime doit être hypoprotéiné, avec des protéines d’ excellente qualité pour limiter la production de déchets azotés, et fractionné (quatre à six repas par jour).

En complément des mesures diététiques, un traitement médical est instauré. Le lactulose (Duphalac®(1), 0,2 à 0,5 ml/kg par voie orale, trois ou quatre fois par jour) permet l’ acidification du côlon et diminue l’ activité de la flore, ainsi que la quantité d’ ammoniac réabsorbée par sa conversion en ions ammonium. Un traitement antibiotique à base d’ acide clavulanique-amoxicilline (Synulox®, 20 mg/kg par voie orale, deux fois par jour), de néomycine (Neomydiar®, 20 mg/kg par voie orale, deux fois par jour), de métronidazole (Flagyl®(1), 7,5 mg/kg par voie orale, deux fois par jour), réduit la flore colique et prévient les épisodes de bactériémie.

Lors de troubles gastro-intestinaux tels que des saignements, des antiacides et des pansements digestifs sont prescrits.

Des diurétiques sont administrés en cas d’ ascite. Les troubles hydro-électrolytiques, acidobasiques et ioniques doivent être corrigés.

Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical permet la visualisation du shunt portosystémique et de sa ligature afin de réorienter le flux sanguin de la circulation porte vers le foie. Seuls les shunts congénitaux sont traités de manière chirurgicale. En effet, une ligature n’ est pas indiquée dans le cas de shunt acquis.

Ces vaisseaux ont une fonction de “valve d’ échappement” à l’ hypertension portale et leur ligature entraînerait une aggravation de l’ hypertension [11, 12, 20].

Le protocole anesthésique doit être choisi avec précaution et les substances métabolisées par le foie sont déconseillées. Dans le cas décrit, une induction au masque et une anesthésie volatile à l’ isoflurane sont mises en place [22].

Plusieurs techniques de fermeture des shunts existent : la pose d’ un fil de soie, d’ une bande de cellophane (bandes de 4 mm de large constituées de trois couches) ou d’ un anneau améroïde, formé d’ un anneau interne de caséine (propriété d’ expansion dans les fluides) et entouré d’ un anneau externe en acier inoxydable. Ce dernier n’ est plus disponible en France car il est composé en partie d’ une protéine d’ origine bovine, la caséine [12]. Des procédures intravasculaires comme la bobine thrombogène existent également [28]. Le degré d’ atténuation du shunt (ligature partielle ou totale, diamètre interne de l’ anneau améroïde ou des bandes de cellophane) est choisi en fonction de la présence ou non d’ une hypertension portale. Lors d’ hypoplasie de la veine porte cranialement au shunt, seule une fermeture partielle est possible [11].

Lors de la pose d’ un anneau améroïde (qui n’ est plus disponible en France), la fermeture requiert de sept jours à quelques semaines (60 jours pour des veines spléniques de beagle avec un anneau de 3,5 mm de diamètre) [16, 30]. La fermeture progressive s’ effectue par la réduction du diamètre externe du vaisseau grâce à la constriction de l’ anneau, mais surtout par la réaction fibroblastique intraluminale et la formation d’ un thrombus [12,16].

Avec un fil, si la ligature est partielle, l’ occlusion totale peut se produire dans un second temps par la réaction inflammatoire engendrée sur la paroi du vaisseau par le fil de suture [28, 31]. Elle se produit en un à six mois avec un fil [28]. Dans le cas présenté, cette option a été choisie, mais le résultat définitif d’ une occlusion partielle reste néanmoins incertain.

Une dernière technique consiste à utiliser des bandes de cellophane. Elle présente le double intérêt d’ être progressive et de produire dans la plupart des cas une occlusion complète, ce qui prévient de prévenir le risque d’ hypertension portale et de récidive des signes cliniques. Dans une étude de Hunt et Youmans en 1998, la fermeture se réalise en deux mois pour une ligature de 2,5 mm de diamètre et en 11 mois pour un diamètre de 3 mm [34]. Selon une étude récente, il ne serait pas nécessaire d’ utiliser des bandes inférieures à 3 mm de diamètre pour obtenir de bons résultats [6].

Le monitorage per- et postopératoire est très important. Le tracé de l’ électrocardiogramme doit être suivi avec attention. Des mesures des pressions portale, artérielle et veineuse centrale peuvent être effectuées en phase peropératoire grâce à une colonne d’ eau ou à l’ aide d’ un examen échographique en mode Doppler [24]. Elles sont plus fiables qu’ un simple examen des viscères. En cas d’ hypertension portale, la pression après occlusion augmente de plus de 10 cm d’ eau, la pression veineuse centrale diminue de plus de 1 mm Hg et les battements cardiaques augmentent de plus de 10 par minute [12, 22, 28, 34]. La pression portale après ligature ne doit pas excéder 20 cm d’ eau.

La température et la glycémie sont monitorées, certains animaux sont maigres et leurs stocks en glycogène sont donc réduits.

5. Évolution

À court terme, les risques majeurs sont l’ hypertension portale, l’ hypothermie, une hypoglycémie, pour un méléna ou un syndrome convulsif réfractaire au traitement anticonvulsivant [33]. Ainsi, les premières 72 heures postopératoires sont “critiques” [33].

Les risques à moyen et long termes sont l’ apparition de shunts acquis multiples dus à l’ hypertension et les risques de récidive [10, 22, 33]. En général, le pronostic après l’ intervention chirurgicale est bon lors de shunt portosystémique extrahépatique. Les ligatures partielles présentent moins de risque d’ hypertension portale et de mortalité en postopératoire que les ligatures totales, mais les récidives sont plus fréquentes [10, 11]. Selon Hunt et coll., un résultat clinique satisfaisant après quatre ans de surveillance est observé chez seulement 50 % des chiens dont le shunt a été ligaturé partiellement [10, 11, 34].

Lors de troubles nerveux et digestifs, voire urinaires chez un jeune chien, la présence d’ un shunt portosystémique est à rechercher. Les examens complémentaires tels que le dosage très sensible d’ acides biliaires pré- et postprandiaux viennent conforter l’ hypothèse. Le diagnostic définitif reste essentiellement fondé sur l’ examen échographique, qui permet de visualiser le shunt et de détecter une éventuelle hypertension portale. Un traitement médical pour stabiliser l’ animal doit être envisagé avant toute opération. Il convient de réaliser un suivi postopératoire à court et long termes pour détecter d’ éventuelles récidives.

  • (1) Médicament humain.

POINTS FORTS

• Les shunts portosystémiques congénitaux sont le plus souvent extrahépatiques chez les chats et les chiens de petite taille et intrahépatiques chez les chiens de grande taille.

• Les signes nerveux sont fréquents, mais ils ne sont pas toujours aggravés après une prise alimentaire.

• L’ augmentation des acides biliaires pré- et surtout postprandiaux évoque la présence d’ un shunt portosystémique.

• Le traitement médical vise à limiter le développement d’ une encéphalose hépatique.

• Les examens échographique et Doppler permettent de préciser l’ anatomie du shunt, ses caractéristiques hémodynamiques, donc d’ orienter la procédure chirurgicale.

Référence

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