Examen échographique des structures musculaires du chien - Le Point Vétérinaire n° 276 du 01/06/2007
Le Point Vétérinaire n° 276 du 01/06/2007

Imagerie médicale chez le chien

Mise à jour

LE POINT SUR…

Auteur(s) : Giuseppe Spinella*, Simona Valentini**, Roberto Tamburro***, Ombretta Capitani****

Fonctions :
*Université Magna Graecia de Catanzaro
Viale Europa, Germaneto (CZ),
Italie
**Département clinique vétérinaire
Section de chirurgie Université de Bologne
Via Tolara di Sopra,50
40064 Ozzano dell’Emilia
(Bologne), Italie
***Département clinique vétérinaire
Section de chirurgie Université de Bologne
Via Tolara di Sopra,50
40064 Ozzano dell’Emilia
(Bologne), Italie
****Département clinique vétérinaire
Section de chirurgie Université de Bologne
Via Tolara di Sopra,50
40064 Ozzano dell’Emilia
(Bologne), Italie

L’examen échographique est très souvent utilisé chez le cheval lors d’affections musculo-tendineuses. Il donne aussi de précieux renseignements en médecine canine.

Les premières applications de l’ultrasonographie dans le domaine orthopédique chez le chien ont concerné l’examen de l’écho-anatomie et des maladies affectant les régions de la hanche et de l’épaule [5, 14].

Récemment toutefois, le champ d’application de cette méthode de diagnostic a été étendu à d’autres régions anatomiques et à d’autres types de lésions.

En traumatologie, l’examen échographique constitue un outil fiable pour l’évaluation immédiate des dommages et de leur évolution.

Cet article décrit les caractéristiques échographiques du muscle normal et le rôle que peut avoir l’ultrasonographie dans le diagnostic et le contrôle de l’évolution des affections musculaires chez le chien.

Réalisation des images

Pour obtenir une bonne résolution de l’image, des sondes à haute fréquence (7,5 à 10 MHz) de type linéaire ou convexe ont été utilisées.

L’examen des structures les plus superficielles a été réalisé avec des fréquences supérieures et/ou avec un espaceur.

Une sédation (médétomidine chlorhydrate, 20 µg/kg par voie intramusculaire et tartrate de butorphanol, 0,11 mg/kg par voie intraveineuse) s’est avérée nécessaire pour les chiens agités ainsi que dans les cas où l’examen nécessite la manipulation d’une région particulièrement douloureuse. Le plus souvent, une contention de l’animal est suffisante.

Des coupes transversales, longitudinales et obliques ont été effectuées.

Il convient d’examiner également par voie échographique les structures contiguës (tissus durs et mous) pour vérifier une éventuelle extension du processus pathologique.

Images normales

Sur la coupe longitudinale, le muscle est hypoéchogène et fait apparaître dans sa partie interne de fines lignes ininterrompues hyperéchogènes qui correspondent au périmysium, qui relie les fibres musculaires en faisceaux secondaires (photo 1).

En fonction de l’angle d’attaque de la coupe, de petits vaisseaux sanguins musculaires sont visibles. Ils sont particulièrement développés chez les animaux qui sollicitent beaucoup ces muscles et apparaissent en coupe comme deux lignes parallèles hyperéchogènes séparées par un “canal” anéchogène [7]. La coupe transversale confirme l’hypoéchogénicité de la structure, tandis que les faisceaux conjonctifs apparaissent comme des échos ponctiformes hyperéchogènes [6, 9, 11, 16].

Sur cette coupe, les faisceaux musculaires se présentent sous la forme de zones arrondies hypoéchogènes de dimensions variables, délimitées par des stries hyperéchogènes. L’épimysium, qui enveloppe tout lemuscle, a l’aspect d’une structure linéaire hyperéchogène (photo 2).

La coupe longitudinale de certains muscles présente un aspect caractéristique ; ainsi, le biceps brachial se présente comme une “arête de poisson” [6, 10, 13].

La jonction muscle-tendon est bien définie. L’hypoéchogénicité des fibres musculaires tend à pénétrer de quelques millimètres à l’intérieur de la structure ligamentaire plus échogène [11].

L’aspect échographique du muscle varie en fonction de l’angulation du faisceau d’ultrasons. En effet, dans le cas où ces derniers ne sont pas perpendiculaires à la structure, le tissu conjonctif, hautement réfléchissant et intercalé entre les faisceaux, peut être à l’origine de zones d’hypoéchogénicité simulant la présence d’une lésion à l’intérieur du tissu musculaire [10].

Principales images pathologiques

1. Amas liquides

Hématome musculaire

L’hématome musculaire peut avoir deux formes : l’une plutôt arrondie, à l’intérieur du muscle, l’autre laminaire, entre les faisceaux intra-aponévrotiques [9].

Quand il est récent, il se présente à l’échographie comme un amas arrondi ou laminaire anéchogène homogène bien délimité, avec un léger épaississement de la paroi postérieure ; il est parfois possible d’apercevoir des particules fluctuantes qui correspondent à des caillots de fibrine (photo 3).

En phase d’organisation, le coagulat se présente comme une structure semi-solide hétérogène qui tend à l’hyperéchogénicité (photo 4). La pression de la sonde ne fait apparaître aucune modification. La durée de cette phase est variable.

La lyse du caillot donne une image échographique d’aspect mixte, à la fois solide et liquide, et qui devient anéchogène avec un épaississement important de la paroi [3].

Les différents stades qui viennent d’être décrits ne sont pas toujours visibles ; ainsi, la phase solide n’est visible que si l’animal est ensuite soumis à des contrôles.

Par ailleurs, certains hématomes peuvent se calcifier. Les zones de calcification sont identifiées comme des zones hyperéchogènes suivies d’un cône d’ombre, qui peuvent être isolées ou agencées en chapelets [12].

Abcès

Lors d’abcès, l’aspect échographique se modifie en fonction de la viscosité du liquide. Généralement, un abcès mûr se caractérise par la présence d’un amas anéchogène ou hypoéchogène non homogène accompagné d’échos mobiles internes et délimité par une capsule hyperéchogène. Les trajets fistuleux apparaissent comme des zones anéchogènes à l’intérieur du muscle. L’examen échographique permet parfois d’établir la cause du trajet fistuleux et de l’amas purulent en mettant en évidence des éventuels corps étrangers.

Infiltrations liquides

L’œdème et le phlegmon, très semblables au niveau échographique, ont un aspect uniformément hypoéchogène (photo 5).

2. Lésions traumatiques

• L’examen échographique permet de localiser les lésions et d’en établir l’ampleur, aux fins d’une classification plus rigoureuse comparée à la seule observation des symptômes [2, 7]. La classification de Lefebvre , en médecine humaine, distingue trois stades de gravité des lésions musculaires sur la base de données échographiques : lésions bénignes (1er stade), lésions moyennement graves (2e stade) et lésions graves (3e stade) (tableau) [12]. Cette classification peut être utile et recouper les données cliniques en traumatologie musculaire chez le chien. Elle fournit des informations utiles sur le pronostic.

• Une rupture partielle du muscle se caractérise en général par une hémorragie d’ampleur variable et une augmentation du volume total par l’hématome et l’œdème, qui s’accompagnent d’une réduction du volume du tissu musculaire d’autant plus importante que les fibres discontinues sont nombreuses (photos 6 et 7) [4].

Les formes anciennes permettent d’observer le processus de cicatrisation et l’éventuel alignement des fibres. Lors de cicatrisation irrégulière ou en présence de nodules cicatriciels, l’aspect échographique de la lésion est une zone hyperéchogène à contour irrégulier au sein du tissu musculaire sain.

• En cas de rupture complète, l’image du muscle disparaît et est remplacée par l’hématome anéchogène ou hypoéchogène. Le moignon musculaire peut être visualisé comme une structure épaissie, hétérogène et plus échogène que les tissus environnants en raison des phénomènes phlogistiques secondaires au traumatisme. Cette image hyperéchogène et allongée, en coupe longitudinale, a l’aspect d’une massue à l’intérieur de l’hématome.

• L’examen dynamique aide à faire apparaître la séparation des extrémités musculaires, mais la distinction entre ruptures complète et partielle peut être difficile. Les ruptures anciennes sont souvent hétérogènes et varient d’hyperéchogène à anéchogène.

• Les contractures sont souvent causées par des défauts chimiques et physiques qui provoquent la contraction réflexe, permanente et douloureuse d’un muscle. Étant liée à des troubles histochimiques, la contraction ne donne lieu à aucune altération anatomopathologique particulière : l’image échographique ne subit pas de variations notables, parfois une légère augmentation de l’échogénicité.

Dans ce cas, l’aspect clinique (plus grande consistance à la palpation) apporte un soutien à l’examen échographique [13]. Le muscle conserve ses caractéristiques fibrillaires et des zones hyperéchogènes peu significatives peuvent apparaître (photo 8). Dans de rares cas seulement, ces caractéristiques échographiques sont perdues en raison de la fibrose [1].

3. Myosites

Les inflammations aiguës se caractérisent en général par une exsudation séreuse, qui entraîne une hypoéchogénicité uniforme et une diminution plus ou moins localisée de la trame fibrillaire normale. Les formes chroniques évoluent le plus souvent en fibrose : l’aspect échographique classique est celui d’une hyperéchogénicité de la zone touchée.

4. Corps étrangers

Les corps étrangers (CE), fréquents chez le chien, peuvent apparaître dans les muscles si leur longueur est supérieure à 2 mm [10]. De nombreux corps étrangers se présentent comme des structures hautement réfléchissantes, parfois suivies d’un cône d’ombre et souvent entourées de zones réactives hyperéchogènes distinctes (photo 9). Il est essentiel de recourir à toutes les coupes standards puisqu’une seule coupe pourrait, selon l’angle d’attaque du faisceau, conduire à sous-estimer les dimensions du corps étranger. Une localisation précise et une bonne estimation de la taille de l’objet sont en effet deux informations essentielles pour l’approche chirurgicale.

5. Néoplasies

L’aspect échographique est extrêmement variable. Les formes bénignes (rhabdomyome et myxome) sont souvent bien délimitées et caractérisées par une échostructure homogène. Les formes malignes (rhabdomyosarcome, fibrosarcome, hémagio-sarcome) sont en revanche mal délimitées et hétérogènes. Dans certains cas, comme pour le fibro­sarcome, les limites de la néoplasie sont plus évidentes. La vascularisation, étudiée par le biais d’un écho-Doppler, peut fournir des indications utiles sur le pronostic, car lors de néoplasie maligne, une riche vascularisation et des formes dites “lacunaires” sont souvent observées (photo 10). Bien que l’image échographique des tumeurs ne présente pas de caractéristiques, l’échographie peut néanmoins constituer un outil diagnostique efficace, puisqu’elle permet d’effectuer des mesures, d’évaluer les limites et les extensions, de prendre en compte les rapports avec les tissus contigus et, surtout, de guider les prélèvements de tissu afin d’éviter les zones nécrotiques ou hémorragiques, conditions nécessaires à l’obtention d’un échantillon intéressant. En phase postopératoire, l’examen échographique est très efficace pour déterminer le début d’une éventuelle récidive et pour examiner les ganglions lymphatiques satellites. Il reste cependant nettement moins sensible que la tomodensitométrie ou l’imagerie par résonance magnétique car les variations discrètes de texture ne sont parfois pas visualisées.

La présence de métastases musculaires reste très rare (photo 11).

L’échographie représente un examen très utile en myologie clinique. Les ultrasons fournissent des informations sur le diagnostic, la thérapeutique et le pronostic à un coût minime comparés aux autres techniques d’imagerie (résonance magnétique et tomodensitométrie). De plus, elle ne nécessite ni anesthésie, ni injection d’un produit de contraste, et permet de décrire les caractéristiques des lésions.

La possibilité de répéter les contrôles sans aucune contre-indication pour l’animal permet en outre de formuler des pronostics pour le rétablissement fonctionnel de la région concernée et, par conséquent, d’indiquer la durée d’inactivité physique nécessaire à la guérison.

POINTS FORTS

• L'examen échographique du muscle se réalise au moyen de sondes de fréquence 7,5 à 10 MHz, chez un animal éventuellement tranquillisé.

• En coupe longitudinale, le muscle est hypoéchogène et présente des lignes hyperéchogènes délimitant les faisceaux.

• En coupe transversale, le muscle est hypoéchogène, pontué de zones hyperéchogènes.

Références

  • 1 - Bennet RA. Contracture of the infraspinatus muscle in dogs : a review of 12 cases. J. Am. Vet. Med. Assoc. 1996;22:481-487.
  • 2 - Breur GJ, Blevins WE. Traumatic injury of the iliopsosas muscle J. Am. Vet. Med. Assoc. 1997;210:1631-1634.
  • 3 - Camurri GB, Monetti G, Dall’Oglio S, Tartaglia I. L’ecografia nello studio dell’ematoma post-traumatico. Atti Sertot. 1997;XIX:73-75.
  • 4 - Craychee TJ. Ultrasonographic evaluation of equine musculoskeletal injury. Vet. Diagn. Ultrasound. Nyland TG, Mattoon JS. Saunders Company.1995.
  • 5 - De Nicola T, Monetti G, Pacchiele L, Bonivento G, Moda J, Lucidi GM. L’ecografia nelle lesioni della spalla. In : Ecografia muscolo tendinea e dei tessuti molli. Monetti G. Ed. Solei. 1989;7:1-6.
  • 6 - Engelke A, Gassner G. Limbs and Spine. An atlas and textbook of diagnostic ultrasonography of dog and cat. 2001:329-365.
  • 7 - Fitch RD, Jaffe MH, Montgomery RD. Muscle injuries in dogs. Compend. Contin. Educ. Pract. Vet. 1997;19:947-957.
  • 8 - Ghigi G, Canini, Valentino M, Pelotti P, Ciminari R. L’ecotomografia nella traumatologia muscoloscheletrica. In : Diagnostica per immagini in traumatologia. Ed. Albisi U, Aulo Gaggi. 1990:72-76.
  • 9 - Giannini S, Lipparini M, Della Villa S, Sartoni Galloni S, Calzolai F. Reperti ecografici in patologia muscolare, tendinea ed articolare. Giot. 1998:XIII:263-270.
  • 10 - Kramer M, Gerwing M, Hack V, Schimke E. Sonography of the musculoskeletal system in dogs and cats. Vet. Radiol. Ultrasound. 1997;38(2):139-149.
  • 11 - Kramer M, Gerwing M, Sheppard C, Schimke E. Ultrasonography for the diagnosis of tendon and tendon sheat of the biceps brachii muscle. Vet. Surg. 2001;30:64-71.
  • 12 - Lefebvre E, Pour ce lot L. Patologia Muscolare. In : Ecografia muscolo-tendinea. Ed. Masson. 1991:61-90.
  • 13 - Long CD, Nyland TG. Ultrasonographic evaluation of the canine shoulder. Vet. Radiol. Ultrasound.1999:40:371-379.
  • 14 - Pettit GD. Infraspinatus muscle contracture in dogs. Mod. Vet. Pract. 1980;61:451-452.
  • 15 - Rivers BJ, Wallace L, Jonston GR. Biceps tenosynovitis in the dog : radiographic and sonographic findings. Vet. Comp. Orthop. Traumat. 1992;5:51-57.
  • 16 - Siems JJ, Breur GJ, Blevins WE, Cornell KK. Use of two-dimensional real time ultrasonography for diagnosis contracture and strain of infraspinatus muscle in a dog. J. Am. Vet. Med. Assoc. 1998;212(1):77-80.
Abonné au Point Vétérinaire, retrouvez votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr