Syncopes neurogéniques chez un chien - Le Point Vétérinaire n° 272 du 01/01/2007
Le Point Vétérinaire n° 272 du 01/01/2007

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CARDIOLOGIE

Auteur(s) : ÉLODIE LEROY,

Fonctions : Secteur vétérinaire de Sissonne, Camp national, Quartier de La Malmaison, 02151 Sissonne Cedex

Un chien berger belge malinois, âgé de 17 mois, est présenté pour des épisodes de syncopes qui surviennent au cours des exercices de mordant.

L’entraînement militaire de ce chien nécessite la réalisation de nombreux exercices (courses, sauts, etc.). Des syncopes surviennent exclusivement lors du travail au mordant. Elles sont de courte durée, mais les réveils sont “violents” puisque le chien a mordu son maître. Le chien a déjà fait plusieurs syncopes et n’est plus très motivé au mordant.

 Le jour de la consultation, l’examen clinique se révèle normal. L’examen de la fonction cardiovasculaire (temps de recoloration capillaire, coloration des muqueuses, auscultation cardiaque) ne présente pas d’anomalie. Celui de la cavité buccale ne révèle aucun élément qui puisse être à l’origine d’une douleur (gingivite, croc cassé) responsable de la réticence au travail de mordant.

Examens complémentaires

 Un électrocardiogramme est réalisé au repos puis après effort (12 km de course avec le maître). Aucun trouble spécifique du rythme n’est décelé. Les complexes QRS ont une morphologie normale et ne présentent pas d’anomalie de la repolarisation.

 Les radiographies du thorax de face et de profil ne révèlent aucune image anormale.

 En vue d’exclure des causes métaboliques (hyperkaliémie et hypothyroïdie), des analyses sanguines sont réalisées. Les résultats sont tous situés dans l’intervalle des valeurs usuelles de référence.

 Devant l’impasse diagnostique, les commémoratifs sont revus avec le maître-chien. Les syncopes ont lieu exclusivement lors de la cessation du mordant (c’est-à-dire lorsque le chien est décroché du costume d’attaque). Elles se produisent lorsque le maître travaille au collier chaînette (collier étrangleur). Un autre électrocardiogramme est alors réalisé avec pratique de manœuvres vagales douces. Le rythme diminue en deçà de 40 battements par minute avec des pauses de plusieurs secondes. Le bloc atrioventriculaire normalement obtenu après une compression forte et prolongée apparaît lors de la compression douce (TRACÉ 1). Afin de confirmer l’origine des syncopes, une injection de glycopyrrolate par voie intraveineuse à la dose de 10 µg/kg est réalisée pour “atropiniser” le chien. Les mêmes manœuvres, plus prononcées, ne produisent plus les mêmes effets.

 Une hypersensibilité des sinus carotidiens stimulés par le collier chaînette lors du mordant paraît être la cause des syncopes du chien.

Traitement

Certains auteurs conseillent l’utilisation du métoprolol à la dose de 0,2 à 1 mg/kg en deux ou trois fois par jour pour traiter les syncopes vagales, bien qu’aucune étude d’efficacité n’ait été réalisée chez le chien [3]. L’efficacité du métoprolol est, en revanche, fortement remise en doute chez l’homme dans le traitement de ce type de syncopes [4]. Le chien pèse 30 kg et reçoit alors 3 mg de métoprolol matin et soir. Le traitement est bien supporté. Des électro-cardiogrammes au repos, puis après 12 km de course, sont réalisés quinze jours après la mise en place du traitement. Rien d’anormal n’est mis en évidence. Les manœuvres vagales réalisées pendant l’électrocardiogramme ne provoquent pas non plus d’anomalie du tracé (TRACÉ 2). Le chien est de nouveau entraîné progressivement au collier normal puis au collier chaînette. Il est revu régulièrement en contrôle : aucune syncope n’est observée depuis la mise en place du traitement (un an et demi).

Discussion

Ce syndrome est décrit dans la littérature chez des chiens qui présentent des tumeurs ou des phénomènes inflammatoires dans la région des sinus carotidiens ou qui portent un collier trop serré [1, 2]. La stimulation des sinus carotidiens provoque une hypertonie vagale (ou stimulation parasympathique) à l’origine d’une rupture de l’équilibre entre les systèmes ortho- et parasympathique en faveur du parasympathique. La bradycardie ainsi produite entraîne une chute du débit sanguin cérébral.

  • 1. Ettinger SJ. Weakness and syncope. In : Ettinger SJ, Feldman EC. Textbook of veterinary internal medecine. WB Saunders eds, Philadelphia. 2000 : 10-16.
  • 2. Pariaut R, Keroack S, Troncy E. Cardiologie du chien et du chat : quelle est la démarche diagnostique lors de syncope ? Point Vet. 2003 ; 34(239) : 50-51.
  • 3. Rush JE. Syncope and episodic weakness. In : Foxs PR, Sisson D, Moise NS. Canine and feline cardiology. Principles and clinical practice. 2nd ed. WB Saunders Eds, Philadelphia. 1999 ; 445-454.
  • 4. Sheldon R, Connoly S, Rose S et coll. Prevention of syncope trial (POST) : a randomized placebo-controlled study of metoprolol in the prevention of vasovagal syncope. Circulation. 2006 ; 113(3) : 1164-1170.
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