Toux et rythme cardiaque irregulier chez deux chiens - Le Point Vétérinaire n° 271 du 01/12/2006
Le Point Vétérinaire n° 271 du 01/12/2006

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CARDIOLOGIE

Auteur(s) : François Serres*, Carolina Carlos Sampedrano**, Vassiliki Gouni***, Valérie Chetboul****, Jean-Louis Pouchelon*****

Fonctions :
*Unité de cardiologie, ENVA.
**Unité de cardiologie, ENVA.
***Unité de cardiologie, ENVA.
****Unité de cardiologie, ENVA.
*****UMR Inserm-ENVA U 660
******Unité de cardiologie, ENVA.
*******UMR Inserm-ENVA U 660

Deux chiens yorkshire terriers, mâles entiers, âgés de neuf et onze ans, sont présentés à la consultation de médecine pour une toux chronique.

Dans les deux cas, cette toux est sèche, quinteuse et non productive. Elle survient essentiellement à l’effort et lors d’excitation chez le chien1. Chez le chien 2, elle est incessante.

Les deux animaux présentent un état général satisfaisant. L’auscultation révèle chez les deux animaux une fréquence cardiaque normale (90 à 140 battements par minute) associée à un rythme irrégulier et à un pouls bien frappé et synchrone. Elle indique également la présence d’un souffle systolique apexien gauche, d’intensité 4/6 chez les deux animaux. L’auscultation pulmonaire révèle des sifflements inspiratoires et expiratoires, plus marqués chez le chien 1.

Examens complémentaires

Un examen électrocardiographique est décidé dans un premier temps afin d’explorer l’irrégularité du rythme. Le tracé montre une fréquence cardiaque normale et un rythme sinusal chez les deux animaux. Dans les deux cas, une irrégularité identique du rythme est observée.

Chez le chien 1 (TRACÉ 1), l’irrégularité est liée à une succession régulière d’accélérations et de ralentissements de la fréquence cardiaque, qui évoque une arythmie sinusale respiratoire. Une variation de l’amplitude de l’onde P est aussi observée, cette onde étant plus ample lorsque l’espace R-R est court. Ce wandering pacemaker confirme la présence d’une hypertonie vagale, peu compatible avec l’évolution d’une cardiopathie gauche décompensée.

À l’inverse, chez le chien 2 (TRACÉ 2), l’irrégularité est liée à de fréquentes dépolarisations précoces, suivies d’un repos compen­sateur. Ces complexes de morphologie ventriculaire présentent un atriogramme positif et d’amplitude augmentée, ce qui indique une origine atriale pour ces extrasystoles. L’évolution d’une affection cardiaque plus avancée ne peut être exclue chez cet animal.

Un examen radiographique du thorax ainsi qu’un examen échocardiographique sont entrepris chez les deux animaux afin de confirmer l’origine suspectée de la toux.

Chez le chien 1, un collapsus trachéal marqué, qui explique les symptômes observés, est mis en évidence. Le souffle est expliqué par un reflux mitral sans dilatation atriale associée. Un traitement de théophylline est instauré.

Chez le chien 2, l’échocardiographie montre une maladie valvu­laire mitrale beaucoup plus avancée, avec une dilatation atriale gauche nette. La présence d’un œdème péri-hilaire à l’examen radio­graphique confirme la décompensation de la cardiopathie. Un traitement avec un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (bénazepril, Fortekor® : 0,25 mg/kg) et un diurétique (furosémide, Dimazon® : 2 mg/kg/j en deux prises) est mis en place.

Discussion

Le diagnostic et le traitement des deux cas présentés sont nettement différents, malgré des manifestations cliniques et des tracés électrocardiographiques relativement similaires. L’association entre une toux et un souffle cardiaque est une présentation clinique classique chez le chien âgé de petite race, en raison notamment de la fréquence des affections mitrales chez ces animaux (touchant plus de 20 % des yorkshire terriers de plus de 12 ans) [2]. La présence d’une hypertonie vagale, fréquente chez les animaux qui présentent une atteinte respiratoire, est responsable de l’association entre une arythmie sinusale et un wandering pacemaker observée chez le chien 1 [1]. Cette combi­naison d’affections est peu compatible avec l’évolution d’une cardiopathie décompensée, car le système parasympathique est par définition inhibé à ce stade. En revanche, les extrasystoles supraventriculaires telles que celles observées chez le chien 2 traduisent la plupart du temps une distension atriale ou, au moins, une augmentation de la pression atriale gauche.

  • 1 - Fox PR, Sisson D, Moïse NS. Acquired valvular heart disease in dogs and cats. In : Textbook of Canine and Feline Cardiology. WB Saunders, Philadelphia. 1999:536-565.
  • 2 - Serfass P, Chetboul V, Carlos Sampedrano C et coll. Retrospective study of 942 small-size dogs : prevalence of left apical systolic heart murmur and left-sided heart failure, critical effects of breed, and sex. J. Vet. Cardiol. 2006;8:1-8.
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