Le scanner est-il la panacée en imagerie vétérinaire ? - Le Point Vétérinaire n° 270 du 01/11/2006
Le Point Vétérinaire n° 270 du 01/11/2006

IMAGERIE MÉDICALE CHEZ LE CHIEN ET LE CHAT

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NOUVEAUTÉS

Auteur(s) : Juliette Besso

Fonctions : Consultante itinérante
en imagerie médicale
Imagerie Médicale
Vétérinaire XV
10-12, rue Robert-de-Flers
75015 Paris

Depuis peu, les scanners à usage vétérinaire se multiplient en France. Cet examen ne saurait remplacer les autres méthodes d’imagerie médicale.

Le scanner a-t-il réponse à tout ? Non, évidemment : dans le cas contraire, les autres techniques d’imagerie n’auraient plus lieu d’exister. Après un rapide rappel du principe du scanner, des avantages, des qualités, des propriétés et des inconvénients de chacune des techniques d’imagerie disponibles en médecine vétérinaire en 2006, la place du scanner est évaluée dans l’examen des différentes parties du corps : tête (encéphale et structures péri-encéphaliques), colonne vertébrale, squelette appendiculaire, thorax et abdomen.

Principe du scanner

Un faisceau de rayons X tourne autour de l’animal et des capteurs permettent de quantifier l’atténuation du faisceau à travers le corps dans toutes les directions. L’analyse informatique des données reconstruit des images en coupe qui, notamment grâce à la technique “hélicoïdale”, peuvent être réalisées “après coup” dans n’importe quelle direction. Le fenêtrage (réglage de la luminosité et du contraste) des images permet de mettre en évidence un tissu de densité particulière et d’y détecter une variation de l’atténuation sous la forme d’une modification de texture ou de densité. L’acquisition des images doit se faire avec des filtres appropriés à la région recherchée (filtres osseux, tissus mous, ou intermédiaires pour les régions mixtes telles que le thorax ou les cavités nasales) sous peine de masquer techniquement d’éventuelles lésions.

La résolution spatiale est correcte (de l’ordre du millimètre, à comparer au 1/10e de millimètre en radiographie), mais son grand avantage est de pouvoir obtenir instantanément des coupes dans n’importe quelle direction. La résolution en densité est moyenne, meilleure que celle de la radiographie, moins bonne que celle de la résonance magnétique (IRM). L’inconvénient de cet examen est de nécessiter une anesthésie générale.

Les propriétés des différentes techniques d’imagerie, en particulier leurs avantages et leurs inconvénients, sont décrites dans le TABLEAU “Propriétés des différentes techniques d’imagerie”.

Utilisation du scanner selon la région étudiée

Squelette appendiculaire

Le scanner permet une évaluation osseuse fine d’articulations complexes (carpe, coude, tarse) (PHOTO 1). En revanche, le cartilage n’est pas identifié et les structures ligamentaires ou articulaires sont peu visualisées, à moins de modifications spectaculaires ; l’IRM et l’échographie sont plus intéressants dans ce cas. Le scanner ne permet pas une évaluation fonctionnelle, réalisable par scintigraphie.

Tête

Lors de l’examen de l’encéphale (PHOTO 2), le scanner permet une bonne évaluation du parenchyme et des ventricules, mais une évaluation moyenne des méninges et du parenchyme de la fosse postérieure, globalement très inférieure à l’IRM. Pour la boîte crânienne, le scanner est excellent pour l’évaluation tridimensionnelle de fractures et de l’articulation temporomandibulaire. Pour les bulles, les cavités nasales et l’orbite, l’IRM donne plus d’informations sur la texture et la nature des tissus mous anormaux, mais le gain obtenu dans le diagnostic est souvent faible par rapport à l’augmentation de la durée de l’examen et à la différence de prix (PHOTO 3). Dans l’étude des autres tissus mous autour de la boîte crânienne, lors de suspicion de lésions des nerfs crâniens ou de myosites, l’IRM est préférable au scanner. Pour l’évaluation de masses cervicales, l’échographie est souvent diagnostique et plus disponible que le scanner et l’IRM, et elle ne nécessite pas d’anesthésie.

Colonne vertébrale

Le scanner permet l’identification des compressions et des déformations de la moelle sans injection sous-arachnoïdienne de produit de contraste, contrairement à la radiographie qui nécessite une myélographie. Il identifie souvent la nature de l’élément qui comprime. Il permet une évaluation des racines nerveuses et une détection de variations significatives de leur diamètre ou d’infiltration engendrant une prise de contraste marquée (tumeur). Sa meilleure résolution spatiale par rapport à l’IRM rend parfois possible, bien que difficilement, l’évaluation de lésions intramédullaires. Il est également facile de reformater les coupes dans n’importe quel plan (après une acquisition unique, sans avoir besoin de l’animal sur place). La résolution et la caractérisation des tissus mous sont en revanche moins bonnes qu’en IRM.

Thorax

La très grande sensibilité du scanner permet une excellente évaluation de petits (2 à 4 mm) nodules pulmonaires (la sensibilité de détection pour la radiographie est supérieure à 8 mm), une objectivation de la fibrose pulmonaire et une meilleure appréciation de la localisation et de l’extension de lésions complexes radioopaques thoraciques (PHOTO 4). L’anesthésie rend cet examen à risque lors d’épanchement pleural important.

L’échographie est nettement moins risquée (pas d’anesthésie) et plus fiable en présence d’opacité pleurale car elle permet de distinguer facilement du liquide d’une masse et détermine le plus souvent la cause de l’épanchement (masse médiastinale, pleurale ou anomalie cardiaque). L’échographie permet éventuellement de prélever certaines lésions thoraciques (pulmonaires, pleurales, médiastinales) si elles sont suffisamment proches de la paroi thoracique.

Le scanner, à l’inverse de l’échographie, ne permet pas une évaluation morphodynamique, ni l’étude des flux cardiaques.

Abdomen

La radiographie et l’échographie sont les examens de base pour une évaluation satisfaisante de la plupart des affections de l’abdomen. Le scanner, comme l’IRM, permettent une excellente évaluation et éventuellement la caractérisation des tissus mous. Ils ne sont pas gênés par l’air digestif, mais ce sont des examens longs et pratiqués sous anesthésie, et les images figées ne permettent aucun diagnostic fonctionnel. Encore trop peu d’informations sont publiées sur l’aspect des lésions abdominales en médecine vétérinaire. Beaucoup ne sont pas spécifiques en médecine humaine et nécessitent des biopsies. La biopsie sous contrôle scanner est plus risquée que sous échographie car elle n’est pas guidée en temps réel.

Le scanner permet la recherche de nodules pancréatiques qui auraient pu être masqués par de l’air digestif en échographie, mais ces nodules restent non spécifiques (aspect identique de nodules d’hyperplasie et de tumeurs).

L’identification d’uretères ectopiques est facile et relativement rapide par le scanner. Un diagnostic peut cependant être obtenu à moindre coût (financier, pratique et anesthésique) par un échographiste expérimenté, quitte à y adjoindre, dans un deuxième temps un scanner ou une urographie intraveineuse (en fonction des disponibilités) si l’échographie n’est pas diagnostique.

Le scanner permet l’évaluation de l’ensemble des tissus du bassin, là où en général, l’échographie ne peut évaluer ni les tissus mous, ni les structures osseuses.

Tissu sous-cutané, fistules

Le scanner représente un très bon compromis temps d’examen-résultat pour l’évaluation de trajets fistuleux ou d’extension de tumeurs (fibrosarcome, liposarcome, etc.), même si l’échographie peut donner un résultat sans anesthésie ou si l’IRM (beaucoup plus fastidieuse) donne des images plus faciles d’interprétation et plus sensibles.

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