Tachycardie d’aspect ventriculaire chez une chienne - Le Point Vétérinaire n° 269 du 01/10/2006
Le Point Vétérinaire n° 269 du 01/10/2006

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CARDIOLOGIE

Auteur(s) : François Serres*, Carolina Carlos Sampedrano**, Vassiliki Gouni***, Valérie Chetboul****, Jean-Louis Pouchelon*****

Fonctions :
*Unité de cardiologie, ENVA
**Unité de cardiologie, ENVA
***Unité de cardiologie, ENVA
****Unité de cardiologie, ENVA
*****UMR Inserm-ENVA U660
******Unité de cardiologie, ENVA
*******UMR Inserm-ENVA U660

Une chienne de race boxer, stérilisée, âgée de douze ans, est présentée à la consultation spécialisée de cardiologie à la suite d’un bilan gériatrique. Aucun antécédent pathologique n’est rapporté.

Au cours de l’examen clinique, l’animal se montre particulièrement agité. Ses muqueuses sont roses et son temps de recoloration capillaire est dans les normes.

Une polypnée marquée (fréquence respiratoire = 60 mouvements par minute) est observée.

L’examen cardiovasculaire révèle une fréquence cardiaque élevée (180 à 200 battements par minute), associée à un rythme régulier. Le pouls, synchrone, est bien frappé. Lors de l’auscultation, rendue difficile en raison de la polypnée de l’animal, aucun bruit supplémentaire n’est détecté.

Examens complémentaires

• Un examen électrocardiographique est effectué dans un premier temps, afin d’explorer la tachycardie (TRACÉ 1). Une tachycardie régulière (200 battements par minute) est observée, aucune onde P nette n’est visualisée, et les ventriculogrammes sont de morphologie ventriculaire.

Ce tracé étant fortement évocateur de la présence d’une tachycardie ventriculaire, un examen échocardiographique est réalisé, afin de chercher une modification cardiaque structurelle qui explique cette arythmie.

• L’examen échocardiographique ne montre aucune lésion macroscopique cardiaque ou péricardique ; une diminution progressive de la fréquence cardiaque, liée à l’acclimatation de l’animal à la salle d’examen, est constatée.

• Un second tracé électrocardiographique est alors enregistré (TRACÉ 2). La fréquence cardiaque est normale, les ventriculogrammes sont toujours de morphologie ventriculaire, mais une onde P est nettement visualisée avant chaque ventriculogramme, indiquant un rythme sinusal.

• Un bloc de branche gauche est diagnostiqué. Cette anomalie de conduction n’est associée à aucune atteinte cardiaque macroscopique, donc aucun traitement n’est instauré, mais des contrôles réguliers sont conseillés.

Discussion

• Les blocs de conduction qui atteignent les branches droite ou gauche du faisceau de His sont à l’origine d’un ralentissement de la conduction intraventriculaire. La dépolarisation ventriculaire s’effectue alors de proche en proche, à partir du faisceau de His intact, avec une propagation de l’influx électrique moins rapide [1]. Ce ralentissement se traduit par une augmentation de la durée du ventriculogramme.

• Lors de bloc de branche gauche, la dépolarisation se produisant à partir du ventricule droit, une onde R, dont l’aspect évoque celui d’une extrasystole ventriculaire droite de forte amplitude, est observé [2]. Le caractère sinusal du bloc de branche permet le plus souvent de le distinguer des rythmes d’origine ventriculaire.

• La confusion peut cependant survenir lors d’association d’un bloc de branche avec une autre anomalie qui rend les ondes P invisibles (fibrillation atriale, tachycardie sinusale, etc.). La distinction est parfois très difficile lorsqu’un seul tracé a été réalisé. Dans ce cas, la suspicion d’un épisode de tachycardie ventriculaire en début d’examen a été rapidement levée, en raison de la diminution progressive de la fréquence cardiaque. Lors de cas douteux, la réalisation d’une manœuvre vagale permet le plus souvent de conclure, car elle ralentit uniquement les rythmes d’origine supraventriculaire.

L’apparition d’un bloc de branche gauche est généralement liée au développement d’une lésion cardiaque. Il est notamment décrit lors de cardiomyopathie, de sténose aortique, d’intoxication par l’adriamycine, etc. [1]. Les blocs de branche idiopathiques sont rares et ce type de trouble du rythme nécessite d’examiner régulièrement l’animal.

  • 1 - Fox PR, Sisson D, Moïse NS. Electrocardiography. In : Textbook of canine and feline cardiology. 2nd ed. WB Saunders, Philadelphia. 1999 : 67-105.
  • 2 - Kittleson MD, Kienle RD. Electrocardiography : Basic concepts, diagnosis of chamber enlargement and intraventricular conduction disurbances. In : Small animal cardiovascular medicine. Mosby, St Louis. 1998 : 72-94.
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