Communication interventriculaire chez un chien - Le Point Vétérinaire n° 267 du 01/07/2006
Le Point Vétérinaire n° 267 du 01/07/2006

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CARDIOLOGIE

Auteur(s) : François Serres*, Carolina Carlos Sampedrano**, Vassiliki Gouni***, Valérie Chetboul****, Jean-Louis Pouchelon*****

Fonctions :
*Unité de Cardiologie, ENV Alfort
**Unité de Cardiologie, ENV Alfort
***Unité de Cardiologie, ENV Alfort
****Unité de Cardiologie, ENV Alfort
UMR Inserm-ENVA U660
*****Unité de Cardiologie, ENV Alfort
UMR Inserm-ENVA U660

Une chienne croisée berger belge non stérilisée, âgée de deux ans, est présentée en consultation de cardiologie pour l’exploration d’un souffle détecté par le vétérinaire traitant.

Aucun antécédent pathologique n’est rapporté par les propriétaires. L’examen clinique ne montre aucune anomalie de coloration ou de perfusion des muqueuses. La fréquence et l’amplitude des mouvements respiratoires sont normales.

L’examen cardiovasculaire révèle une fréquence cardiaque normale (100 à 110 battements/min) associée à un rythme régulier. Le pouls, synchrone, est bien frappé.

Lors de l’auscultation, l’intensité des bruits cardiaques est normale. Un souffle systolique, avec un maximum d’intensité (5/6) sur l’aire médiothoracique droite, est audible.

Les deux hypothèses principales sont une communication interventriculaire et une insuffisance tricuspidienne.

Examens complémentaires

Un examen échocardiographique met en évidence une anomalie du septum sous-aortique (présence d’un défaut tissulaire) en mode bidimensionnel (PHOTO 1). La suspicion de communication interventriculaire est confirmée en mode Doppler couleur (PHOTO 2), et un flux turbulent reliant les deux cavités ventriculaires est mis en évidence. La largeur maximale de la communication est de 4,5 mm. L’examen du flux interventriculaire au mode Doppler continu montre un shunt gauche-droit de haute vélocité systolique (Vmax = 4,9 m/s). Une insuffisance aortique mineure (ne dépassant pas le plan de l’anneau aortique) est identifiée en mode Doppler couleur. Le rapport des débits systémiques et pulmonaires est de 1,1, ce qui reste dans les intervalles de référence établis chez l’homme (( 1,5) [1].

Un diagnostic de communication interventriculaire avec insuffisance aortique associée est ainsi établi. Cette anomalie congénitale étant bien compensée, aucun traitement n’est instauré.

Discussion

Les communications interventriculaires constitueraient 2 à 10 % des malformations congénitales chez le chien et 15 % chez le chat [2, 3]. L’épagneul springer anglais, le bulldog anglais et le west highland white terrier sont prédisposés [4].

La majorité des shunts concerne le septum interventriculaire périmembraneux, situé immédiatement sous l’anneau aortique. Une communication de petit diamètre ne laissant passer qu’une faible quantité de sang du ventricule gauche vers le ventricule droit est le plus souvent très bien tolérée. Lors de shunt de grand diamètre n’offrant que peu de résistance au flux systolique, le débit pulmonaire augmente. Il peut atteindre jusqu’à cinq fois le débit systémique. Cette élévation du débit pulmonaire est à l’origine d’une hypertension pulmonaire secondaire, qui peut entraîner une insuffisance cardiaque droite et, dans certains cas, une inversion du shunt (complexe d’Eisenmenger) [2, 4].

Les communications interventriculaires sont, avec les sténoses aortiques et les endocardites, une des principales causes d’insuffisance aortique. Cette dernière survient lorsque l’anomalie septale s’accompagne d’une mauvaise implantation primitive d’une des sigmoïdes aortiques. Elle peut aussi se développer secondairement aux lésions sigmoïdiennes aortiques, elles-mêmes dues aux turbulences de haute vélocité issues du shunt. Une insuffisance aortique marquée peut être à l’origine d’un souffle diastolique (le souffle devenant alors systolo-diastolique) et surtout d’une surcharge volumique gauche aggravant le pronostic.

Dans les cas de communication de grande taille avec augmentation excessive du débit pulmonaire, une fermeture du shunt peut être envisagée. Elle est en revanche contre-indiquée lors d’inversion du shunt. Deux techniques principales sont décrites :

- la fermeture par suture : la communication est abordée par le ventricule droit [2, 4] ;

- l’occlusion par différents implants (“coils” ou “occluder”), réalisée au cours d’un cathétérisme interventionnel, méthode beaucoup moins invasive que la précédente [5].

La gravité de la malformation étant directement liée au diamètre de la communication, celui-ci doit donc être systématiquement calculé par examen Doppler couleur. Les débits systémique et pulmonaire, les conséquences cavitaires et les complications associées doivent être évalués afin d’affiner le pronostic et de proposer le traitement le mieux adapté.

  • (1) Paralysie du cœur.

  • 1 - Bozio A, Di Filippo S, Sermiond B et coll. Shunts. In : Échocardiographie clinique de l’adulte. ESTEM De Boeck, Issy-les-Moulineaux. 2003:1287-1299.
  • 3 - Chetboul V, Charles V, Nicolle A et coll. Retrospective study of 156 atrial septal defect in dogs and cats (2001-2005). J. Vet. Med. A. 2006;53:1-6.
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