La cefquinome s’élargit aux équidés par voie IV ou IM - Le Point Vétérinaire n° 266 du 01/06/2006
Le Point Vétérinaire n° 266 du 01/06/2006

ANTIBIOTHÉRAPIE CHEZ LES ÉQUIDÉS

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NOUVEAUTÉS

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : 4, square de Tourville
44470 Carquefou

Une poudre injectable de cefquinome (Cobactan® IV IM 4,5 %) est destinée au traitement des infections respiratoires des chevaux et des septicémies des poulains.

Les nouveaux produits en matière d’antibiothérapie équine sont si rares que la commercialisation d’une forme spécifique aux équidés d’un antibiotique lancé pour la première fois en 1995 chez les bovins élargit réellement l’arsenal des antibiotiques approuvés dans cette espèce mineure.

La gamme cefquinome

La cefquinome est une cépha­losporine récente dite de troisième ou de quatrième génération selon les publications. Elle constitue la gamme Cobactan® d’Intervet bien connue des praticiens qui exercent en productions animales (bovins, porcins). La nouvelle poudre pour solution injectable élargit les indications de cette céphalosporine aux équidés d’une part, et à la voie intraveineuse d’autre part. Cette voie mérite d’être privilégié pour une intervention rapide, voire d’urgence — aucune autre voie n’assure une biodisponibilité de l’antibiotique aussi rapide et complète — lors de septicémie, et également lors d’infection respiratoire. L’intraveineuse est en effet la « voie locale » des poumons. La circulation sanguine conduit immédiatement le sang veineux vers le cœur droit, puisversles poumons, avant que l’antibiotique atteigne le ventricule gaucheetlacirculation générale.

Deux indications, deux posologies, deux voies

La nouvelle poudre pour solution injectable, Cobactan® IV IM 4,5 %, s’administre donc par voie intraveineuse ou intramusculaire et bénéficie d’une double indication :

- « Le traitement des maladies respiratoires des chevaux dues à Streptococcus equi subsp zooepidemicus à la posologie de1 mg/kg/j pendant 5 à 10jours » en poursuivant le traitement pendant 2 jours aprèsl’arrêtdes signes cliniques ;

- « Chez les poulains, le traitement des infections sévères à haut risque de septicémie dans lesquelles E. coli est impliquée, à la posologie de 1 mg/kg/12 heures pendant 6 à 14 jours », avec un traitement poursuivi pendant trois jours aprèsl’arrêtdessignes cliniques.

La spécialité se présente en deux flacons : un petit flacon de 30 ml contenant 1,35 g de poudre et un grand flacon de 100 ml avec 4,5 g. Le petit flacon traite un poulain de 50 kg pendant presque 14 jours (13,5 jours) deux fois par jour pour un prix centrale HT de 30 à 35 euros. Le grand flacon de 100 ml est davantage adapté aux adultes puisqu’il permet de traiter un animal de 600 kg pendant 7 jours pour un prix centrale HT aux alentours de 85 euros.

La reconstitution doit toujours être faîte avec le solvant aqueux fourni avec le flacon de poudre, et non avec de l’eau ppi. En effet, ce solvantest tam­ponné pour maintenir, après dilution, un pH neutre (6,5). La solution ainsi reconstituée est stable pendant dix joursauréfrigérateur. Les flacons de poudre non diluée peuventseconserveràtempérature ambiante.

La comparaison avec le ceftiofur.

Une autre céphalosporine, de troisième génération, le ceftiofur (Excenel®) est indiquée depuis 1999 chez les chevaux et présentée sous forme de lyophylisat à reconstituer en solutioninjectable. Les spectres d’activité sont proches (voir le TABLEAU “Les études de CMI de la cefquinome et du ceftiofur”).

Lanotion de quatrième génération est autant un atout marketing que technique. La structure chimique d’une céphalosporine dite de quatrième génération (structure de Zwitterion entre autres) lui confère une rapidité de pénétration bactérienne et une activité élargie à certaines souches qui seraient résistantes aux générations précédentes. Des résistances croisées ne sont toutefois pas à exclure.

Les atouts de la cefquinome

Pour une activité antibactérienne similaire, la comparaison des résumés officiels des caractéristiques de produit (RCP) donne toutefois quelques atouts technico-réglementaires à la cefquinome, pour un coût par injection légèrement inférieur.

Les indications « légales » du RCP sont plus larges pour la cefquinome en incluant aussi les septicémies des poulains et non les seules infections respiratoires à S.zooepidemicus. Même, si la solution injectable reconstituée de ceftiofur peut être administrée sans risque par voie intraveineuse, seule la voie intramusculaire est « enregistrée » pour Excenel®. La cefquinome bénéficie de LMR fixées dans la viande chevaline, ce qui permet à la nouvelle spécialité d’être indiqué sans restriction à tous les équidés (avec un temps d’attente de 4 jours) et non pas réservée aux seuls chevaux non destinés à la consommation humaine. Le volume à injecter des solutions reconstituées est plus faible avec Cobactan®, 2,2 ml/100 kg pour une dose “AMM” de 1 mg/kg, qu’avec Excenel®, 4 ml/100 kg, avec une dose recommandée aussi plus élevée de 2,2 mg/kg.

Des différences de profils pharmacocinétiques

Les différences entre les deux céphalosporines portent donc essentiellement sur les doses d’emploi, mais aussi sur les profils cinétiques, bien qu’il n’existe pas d’étude pharmacocinétique comparative. Le ceftiofur, avec son métabolite actif, le desfuroylceftiofur, présente une demi-vie d’élimination généralement assez longue, due entre autres à la présence d’un atome de soufre dans la structure et à la formation de ponts disulfure avec les protéines tissulaires ou plasmatiques. Les concentrations plasmatiques persistent ainsi pendant plus de 24 heures au-dessus de la CMI de I, selon le RCP d’Excenel®.

La cefquinome présente, à l’inverse, un très faible taux de liaison aux protéines plasmatiques (< 5 %). L’antibiotique, sous une forme libre, est donc en quasi-totalité sous une forme active dans l’organisme, ce qui constitue sans doute un atout. Son élimination, exclusivement rénale, est aussi plus rapide avec des demi-vies d’élimination de deux heures chez le cheval adulte et 1,4 heure chez le poulain. Vis-à-vis de S. zooepidemicus, la persistance de la cefquinome au-dessus de la CMI90 (0,032 µmg/ml) est d’environ 12 heures (voir la FIGURE “Profils pharmacocinétiques”).

Contrairement à la cefquinome, le ceftiofur est, en partie éliminé par la bile. Cette élimination digestive pourrait être à l’origine de la mention de diarrhées (colites) chez des chevaux soumis à un stress dans la rubrique « effets indésirables » dans le RCP d’Excenel®. Toutefois, dans la pratique, cet antibiotique fait partie de ceux considérés comme bien tolérés chez les équidés.

Une activité bactéricide temps-dépendante

Les deux céphalosporines agissent sur la synthèse de la paroi bactérienne comme des antibiotiques bactéricides non concentration-dépendants (ou, en pratique, temps-dépendants). Les nouvelles études de pharmacodynamie sur la cefquinome montre, vis-à-vis de plusieurs souches de S. zooepidemicus, un effet post-antibiotique de l’ordre de 3 à 10 heures. Cet effet n’est toutefois pas observé vis-à-vis des souches d’E. coli, ce qui justifie aussi la fréquence d’injection toutes les douze heures dans les septicémies souvent colibacillaires.

Infections respiratoires

Un essai clinique multicentrique comparatif lors d’infections respiratoires, a inclus 75 chevaux, 41 traités avec la cefquinome par voie intra­musculaire, 34 avec le ceftiofur. L’essai était randomisé sans être réalisé à l’aveugle compte tenu des caractéristiques différentes entre les deux médicaments. S. zooepidemicus a été le germe pathogène le plus fréquemment isolé dans cet essai, sans être le seul : Actinobacillus equuli, E. coli, S. equi subsp equi ont parfois été retrouvés. Les traitements symptomatiques respiratoires ont été autorisés dans les deux groupes.

L’essai conclut à un léger avantage, non significatif, en faveur de la cefquinome. La guérison, évaluée sur la base des scores cliniques, a été obtenue chez les 41 chevaux (100 %) du lot cefquinome et sur 32 des 34 animaux du lot ceftiofur (94,1 %). La durée moyenne du traitement est de 6,6 jours pour la cefquinome, contre 7,2 jours pour le ceftiofur.

Septicémies

Les infections sévères des poulains, à risque septicémique, sont toujours difficiles à traiter. Aucun antibiotique récent n’étant jusqu’à présent officiellement validé dans cette indication, l’essai présenté par Intervet sur 39 poulains âgés de 8,4 jours en moyenne n’est pas comparatif. Pendant les trois premiers jours de traitement, les poulains sont traités à 1 mg/kg toutes les 12 heures par voie IV puis par voie IM. Dans cet essai, les omphalites et les infections digestives représentent les cas d’infections sévères les plus fréquents, devant les pneumonies ou les arthrites. Parmi les germes isolés en hémoculture ou dans les prélèvements locaux, E. coli est le germe dominant. Il n’est toutefois pas le seul : des staphylocoques et Cl. perfringens ont aussi été retrouvés.

Dans ce type d’infections graves, le taux de guérison a été de 87 % soit 34 poulains sur les 39 inclus à la fin de la période de traitement. Dans 82 % des cas (32/39), l’état général redevient normal après trois jours d’antibiothérapie. Toutefois, sur les cinq cas d’échec, la cefquinome n’a pas pu empêcher une évolution fatale pour quatre d’entre eux, atteints d’arthrite, de péritonite ou d’ulcères gastriques.

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