La consultation comportementale du furet - Le Point Vétérinaire n° 262 du 01/01/2006
Le Point Vétérinaire n° 262 du 01/01/2006

NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE

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COURS

Auteur(s) : Dominique Autier-Dérian*, Danielle Marien**

Fonctions :
*20, boulevard de l’Yzeron,
69600 Oullins
**50, rue Paul-Lafargue,
69100 Villeurbanne

Chez le furet, de nombreux troubles comportementaux sont dus à des conditions de vie inadaptées. L’analyse de l’environnement de l’animal est le préalable indispensable à toute consultation comportementale.

Il n’existe pas de nosographie des troubles comportementaux pour les furets, et les croyances populaires ou les idées reçues (comme celles selon lesquelles lorsque le furet mord il se nourrit de sang, qu’une alimentation à base de viande rouge le rend agressif, etc.) à propos de cet animal sont tenaces. Il est recommandé de bien connaître le répertoire comportemental de cet animal (1) avant de proposer toute consultation. Les principales demandes des propriétaires concernent :

- les morsures ;

- la malpropreté ;

- les difficultés de cohabitation avec les congénères et parfois avec les autres espèces ;

- un comportement de peur, d’apathie ou, à l’inverse, d’hyperactivité ;

- les destructions : le furet mâchouille le linge, les jouets, gratte les plantes et les tapis ;

- les troubles de comportement liés à la reproduction.

Un milieu ou un mode de vie inadaptés sont à l’origine de nombreux troubles comportementaux. L’analyse précise et détaillée de l’environnement de l’animal est donc le préliminaire indispensable à toute consultation comportementale. Le milieu doit correspondre aux besoins du furet en termes de dimensions, de paramètres d’ambiance mais surtout de structuration de l’espace.

Commémoratifs et examen clinique

1. Commémoratifs

Les animaux maintenus pendant longtemps en isolement ou dans un milieu pauvre peuvent manifester des troubles comportementaux comparables au syndrome de privation décrit chez d’autres espèces (chien, chat, primates). Celui-ci se caractérise par de la peur, une anxiété associée à une agressivité exacerbée et une malpropreté, ou une dépression. Cette situation est rencontrée chez des individus restés trop longtemps en animalerie, laissés en cage par des propriétaires démotivés par des premiers contacts difficiles, placés dans de mauvaises conditions ou séparés trop tôt de leur mère et de leur fratrie. D’une manière générale, peu de cas sont irréversibles et il suffit souvent de replacer l’animal dans des conditions adaptées pour que les troubles disparaissent. Le traitement, qui peut durer plusieurs mois, utilise principalement le jeu et ses manipulations douces mais franches.

2. Examen clinique

L’examen clinique est essentiel (voir le TABLEAU “Paramètres physiologiques chez le furet”) puisque certains troubles organiques ont des répercussions sur le comportement de l’animal. La manipulation est alors délicate car celui-ci peut mordre pour se soustraire à la douleur.

Comportement en consultation

• Le furet présente un comportement exploratoire marqué en consultation. S’il a peur, il longe les murs, il a le pelage de la queue hérissé, et il cherche à se cacher et à mordre si le contact est forcé. Lors de dépression, quelle qu’en soit l’origine, l’animal cesse d’explorer et de jouer, il passe son temps à dormir et n’interagit plus.

• Un test de portage peut être effectué à tout âge pour juger de la stabilité émotionnelle de l’animal. Celui-ci est soulevé d’une main sous les omoplates. Un furet anxieux contracte ses muscles, les membres antérieurs recroquevillés sous lui et les membres postérieurs tendus vers l’avant (PHOTO 1A). Il ne cherche pas forcément à mordre. Un furet confiant reste détendu, les membres ballants (PHOTO 1B).

Recherche d’une douleur

Toute douleur peut entraîner des morsures.

Il peut s’agir d’une douleur organique, notamment abdominale :

- gastrite, entérite, occlusion intestinale par corps étranger ;

- cystite lors de calculs urinaires ;

- tumeur abdominale.

Lorsqu’il souffre de douleurs abdominales, le furet se couche, les membres allongés en position sterno-abdominale.

Il peut s’agir d’une douleur d’origine traumatique, consécutive à un choc ou à une chute.

Lors de détresse respiratoire marquée (pneumonie, œdème pulmonaire, etc.), l’animal est particulièrement irritable.

Recherche de troubles endocriniens

Deux affections entraînent des variations hormonales responsables d’excitation et d’agressivité [4] : le syndrome hypoglycémique lors d’insulinome et la tumeur surrénalienne ou maladie adrénocorticale. Dans cette dernière, la ou les glandes atteintes sécrètent des hormones sexuelles (œstrogènes) en excès : elles provoquent un état d’excitation intense, d’hypervigilance, d’irritabilité excessive et l’apparition d’un comportement sexuel chez des individus stérilisés. Cette maladie spécifique du furet pourrait être due à une stérilisation précoce (avant l’âge de six mois) et être déclenchée par la photopériode, mais la cause précise est à l’heure actuelle encore inconnue [7]. Il a toutefois été montré une corrélation significative entre l’âge de la stérilisation et l’âge d’apparition des symptômes d’hypercorticisme chez le furet [12].

3. Manifestations organiques

Manifestations organiques directes

Les principales manifestations organiques directes rencontrées sont :

- des vomissements de stress ou d’excitation, surtout chez les individus jeunes ;

- des diarrhées de stress lors de sorties à l’extérieur, de voyage, de visite chez le vétérinaire, de changement de milieu ;

- la vidange des sacs anaux au cours du sommeil, lors de stress intense (combat, peur, douleur) ou associée à une émotion positive (caresse) ;

- les mictions émotionnelles qui surviennent en cas de stress intense (combat, peur, douleur) et sont souvent associées à la vidange des sacs anaux ;

- le hérissement des poils de la queue appelé “en sapin de noël” survient lors de toute émotion négative ;

- la salivation est rarement observée mais elle peut précéder une crise d’hypoglycémie, elle-même provoquée par un stress. L’hypersalivation traduit un état “nauséeux” chez le furet [6], lequel est d’ailleurs un modèle pour l’étude des vomissements chez l’homme [13] ;

- les grincements de dents sont pathognomoniques de la présence d’ulcères gastriques.

Les signes habituellement observés chez le chien tels que les bâillements et les tremblements ne sont pas forcément à prendre en considération dans la sémiologie comportementale. Les bâillements (PHOTO 2) sont observés au réveil, dès qu’un furet est maintenu par la peau du cou ou s’il est gratté dans la région de la tête. C’est un phénomène réflexe et normal. Les tremblements sont fréquents et permettent au furet d’élever sa température corporelle après avoir dormi. Ils traduisent également une excitation intense (pendant qu’il mange un aliment appétent par exemple). La forme et la taille de la pupille rendent difficile la mise en évidence d’une mydriase ou d’un myosis, et ces éléments ne sont pas pris en compte dans l’étude du comportement.

Manifestations organiques indirectes

Le poids d’un furet peut varier physiologiquement selon la saison (jusqu’à 40 %) en fonction de la photopériode [10], même lorsqu’il vit en appartement. Cette modification fait l’objet de nombreuses consultations au printemps (amaigrissement) et à l’automne (prise de poids par accumulation de graisse sous-cutanée, associée à une baisse d’activité). La prise de poids la plus spectaculaire survient lors du premier automne de la vie de l’animal.

• Certaines manifestations substitutives peuvent être observées :

- le mâchouillement de tissus et d’objets a pour cause principale des douleurs d’estomac, lors d’ulcères, ou un défaut de stimulations lors d’enfermement excessif, d’absence de jeu social ou interspécifique, d’exploration ou de contacts ;

- le mordillement des barreaux de la cage peut générer des fractures dentaires et survient lorsque le furet est maintenu enfermé trop longtemps ;

- les dermatites de léchage ou lésions cutanées auto-infligées sont rarement observées chez le furet.

Étude des comportements

1. Comportement alimentaire et dipsique

Une distribution de nourriture mal adaptée aux besoins peut engendrer un comportement d’hypervigilance et d’irritabilité à l’origine d’agressivité. La nourriture doit être disponible ad libitum ou donnée au minimum quatre fois par jour, en quantité et qualité suffisantes en raison d’une durée de transit courte (trois heures). Le furet est très sensible au jeûne :

- des phénomènes inflammatoires suivis d’ulcérations apparaissent très rapidement (dès 24 heures de jeûne). À la différence des autres carnivores, le tube digestif du furet sécrète en permanence de l’acide chlorhydrique et des enzymes protéolytiques [8]. L’inflammation digestive se traduit par la production d’un mucus verdâtre ;

- une lipidose hépatique s’installe dans les 48 heures [9] ;

- des signes d’hypoglycémie peuvent survenir en moins de douze heures. Ils sont caractérisés par un état de faiblesse, une démarche chaloupée, de l’hypersalivation et des tremblements, puis une déshydratation et de l’hypothermie, et enfin de l’inconscience et un coma [6].

Comme pour le chien, il est possible d’apprendre au furet dès son plus jeune âge à accepter de rendre les aliments sans mordre. Cela présente un intérêt chez cet animal dont la tendance à l’exploration orale persiste à l’âge adulte.

• Les variations du comportement dipsique sont, comme chez le chien et le chat, en relation avec des affections organiques (fièvre, insuffisance rénale ou hépatique, diabète). Les phénomènes de potomanie d’origine comportementale ne sont pas décrits chez le furet. Certains individus peuvent épisodiquement boire leur urine. Ce phénomène n’est actuellement pas expliqué.

2. Comportement somesthésique

La mue, au printemps et à l’automne, provoque chez le furet une augmentation du toilettage et notamment du prurit. Il est nécessaire d’épiler ou de brosser son animal tous les jours pendant la mue. Cela permet de limiter la formation de trichobézoards, pourtant rares chez le furet, et les irritations digestives dues à l’absorption de poils.

3. Sommeil

Le sommeil a été peu étudié chez le furet. Cependant, l’augmentation ou la diminution du temps de sommeil sont à considérer.

• L’augmentation du temps global de sommeil journalier est liée, en dehors d’une maladie organique, au vieillissement et à l’entrée en période hivernale. Elle peut toutefois aussi être un signe de dépression.

• La diminution du temps global de sommeil est observable chez certains individus qui sont parfois beaucoup plus actifs que la normale. Ils deviennent irritables et sont en alerte au moindre stimulus. Il est important de les placer régulièrement au calme total afin qu’ils régulent leur sommeil. Un manque de lieux de couchage confortables qui permettent l’enfouissement de l’animal peut également conduire à un état anxieux et générer des troubles du sommeil.

Les augmentations et les diminutions du temps de sommeil sont difficilement quantifiables : c’est le changement dans le rythme habituel qui alerte le propriétaire.

Le furet dort entre seize et dix-huit heures par vingt-quatre heures, par périodes plus ou moins longues, séparées de phases d’éveil très actives. Le sommeil peut être si profond qu’il ressemble à un coma ce qui motive de nombreux appels d’urgence.

4. Comportement éliminatoire et de marquages urinaire et fécal

L’apprentissage de la propreté consiste à exploiter la préférence “naturelle” du furet à faire ses déjections dans les coins. Il suffit d’y placer des litières pour chat ou du simple papier journal. Contrairement au chat, le furet défèque dans l’angle le plus proche de lui sans rechercher spécifiquement sa litière. Il est donc prudent au départ de placer des litières au moins à deux angles opposés de l’espace mis à disposition. Tous les furets d’un même groupe utilisent les mêmes coins : il est donc inutile de multiplier le nombre de bacs en fonction du nombre d’individus.

En raison d’un transit digestif court, le furet défèque quatre à dix fois par jour : dans les quinze minutes qui suivent son réveil, avant ou après chaque repas et après une heure de jeux environ [4]. Pour tenter un travail d’éducation, il convient de repérer ces moments, de placer le furet dans la litière, d’attendre qu’il y urine ou défèque, de le féliciter et, éventuellement, de distribuer une récompense (attention cependant car un furet est capable de simuler l’élimination) [12]. Certains propriétaires préfèrent apprendre à leur animal à faire leurs déjections uniquement dans leur cage. Dans ce cas, il convient de maintenir le furet dans sa cage jusqu’à ce qu’il défèque. Il y est replacé régulièrement pendant les sorties. Par la suite, l’espace de sortie est agrandi petit à petit jusqu’à ce que le jeune furet ait pris l’habitude de retourner dans sa cage pour faire ses besoins [3].

Le résultat obtenu reste fragile et cet apprentissage est facilement remis en cause par le moindre événement. Chaque fois que la propreté est perdue, l’apprentissage doit être repris et il convient de multiplier les litières au moins temporairement. Si l’endroit choisi par le furet ne permet pas de placer un bac (derrière une porte par exemple, sous le lit ou le canapé, etc.), des linges dans lesquels il a dormi ou encore des gamelles de nourriture et d’eau sont disposés dans cet endroit car il n’urine ou ne défèque pas sur ces substrats.

D’après un sondage réalisé sur le “Forum du Club français des amateurs de furet”, qui comprend un effectif de 70 furets, le pourcentage de propreté est de 71,5 % avec des valeurs allant de 0 % à 100 % [4].

Les causes d’échec de l’apprentissage de la propreté peuvent être les suivantes :

- le furet, qui n’enfouit pas ses besoins comme le chat, n’apprécie pas de poser les pattes dans ses excréments. Il se détourne d’une litière saturée et préfère uriner à côté de celle-ci [3] ;

- l’animal peut refuser d’uriner dans une litière aux bords trop hauts pour lui [2] ;

- les litières d’angle vendues dans les magasins spécialisés ne sont pas toujours adaptées à la taille du furet : elles ne lui permettent pas de reculer correctement pour viser le coin ;

- certains furets utilisent la litière seulement pour gratter et jouer ;

- un furet mal intégré dans un groupe social, stressé, anxieux, se soulage au plus vite (parfois au milieu de la pièce) et retourne se cacher rapidement ;

- l’arrivée d’un nouvel individu, d’un nouveau meuble ou un changement de lieu peut perturber le comportement du furet ;

- le mâle en rut, même parfaitement propre, perd cet apprentissage en raison d’un marquage exacerbé. Il disperse urines et selles pendant la saison de reproduction (sept mois de l’année en moyenne) ;

- l’usage excessif de désodorisants ou de nettoyants ménagers peut provoquer un marquage réactionnel (moins fréquemment que chez le chat) et compromettre ainsi la propreté.

5. Comportement antagoniste

Le furet mord fréquemment sans que cela soit forcément pathologique (PHOTO 3). Cependant, il convient de caractériser les différents types de morsures et leur contexte d’apparition afin de les limiter et d’éviter une mauvaise communication interspécifique avec le propriétaire. Dans de nombreux cas, les morsures sont causées par de mauvaises manipulations de celui-ci : gestes hésitants ou de retrait qui renforcent les comportements agressifs de l’animal. Ces situations représentent plus de la moitié des motifs de consultations pour morsures.

Les différents types d’agression

• L’agression par peur survient lorsque le furet est surpris ou stressé par un environnement qu’il ne connaît pas encore. C’est souvent le cas les premiers jours de son arrivée dans un nouveau foyer, ou si l’animal a été mal socialisé pendant les premières semaines de sa vie : séparé trop tôt de la mère et de sa fratrie, ou laissé dans un environnement pauvre et peu stimulant (séjours trop longs en animalerie).

• L’agression par irritation est déclenchée par une douleur, ou une frustration, par exemple si l’environnement est inadapté (cage trop petite, enfermement trop long, solitude, manque de stimulations), par une privation (de nourriture, d’exploration, de jeux), ou par une contrainte physique (bain, coupe d’ongles, caresses prolongées).

• L’attraction de certaines zones corporelles de l’homme peut conduire un furet, même parfaitement éduqué, à mordre ces parties du corps humain.

• Les agressions territoriale et maternelle sont des comportements de protection. La femelle qui allaite est en état d’alerte permanent. Elle peut devenir agressive et le cannibalisme est possible. Une femelle correctement socialisée accepte que le propriétaire participe au nettoyage du nid et approche sa progéniture dès la naissance [4].

• L’agression prédatrice est dirigée vers les animaux que le furet considère comme des proies (lapins, rongeurs, oiseaux), mais rarement vers l’homme. Des attaques contre des enfants en bas âge ont cependant été rapportées aux États-Unis, où le furet est un animal de compagnie très courant. Elles ont lieu le plus souvent lorsque l’enfant est allongé. Le furet attaque en général au visage [1]. Les morsures de furet ne sont pas plus fréquentes que celles de chat. Des faits divers violents, mais anecdotiques, continuent d’être véhiculés par les médias et faussent l’appréciation de la dangerosité de cet animal. Il est cependant déconseillé d’acquérir un furet dans un foyer où vit un enfant âgé de moins de trois ans. Celui-ci peut en effet avoir des comportements imprévisibles, des vocalises stridentes, des gestes brusques et une façon particulière de se mouvoir susceptibles de déclencher des agressions.

Mauvais contrôle de la morsure chez le jeune

Un jeune furet a tendance à mordre pendant les premiers mois de sa vie. Il est brutal, maladroit et inexpérimenté. Dans la portée, lorsqu’un jeune veut attirer l’attention d’un autre pour jouer, il le mord au niveau du cou puis s’enfuit en courant. Il reproduit la même séquence avec l’homme dont la peau, moins épaisse, est plus sensible [5]. Le furet peut également mordre plus franchement, par excitation lors du jeu ou face à un geste hésitant ou de retrait. La mère et les congénères participent à l’apprentissage de l’inhibition de la morsure. Comme pour la propreté, celui-ci est rarement parfait.

Des techniques, qui peuvent être associées, permettent de corriger la morsure [4] :

- prendre l’animal par la peau du cou et le secouer ou le plaquer au sol (en position indifférente) : punition dite “éthologique” ;

- lui dire “non” fermement au cours de la manœuvre précédente ;

- émettre un son aigu comme le font les jeunes furets entre eux ou souffler sur le museau de l’animal : punition dite “éthologique” ;

- lui enfoncer le doigt mordu dans la gueule ;

- le confiner dans sa cage ;

- arrêter le jeu et l’ignorer ;

- se recouvrir les doigts d’une substance amère (aloès, moutarde, oignon, bitter spray) ;

- lui faire mordre un oignon.

Ces méthodes sont à réserver aux animaux chez lesquels aucun trouble du comportement n’a été observé. Dans le cas contraire, ces manœuvres, pour la plupart punitives, peuvent provoquer une aggravation des symptômes. Des gants peuvent être utilisés dans un premier temps pour rétablir le contact, mais cette solution est temporaire. Le maître mot est la patience. Les efforts d’éducation doivent être constants et réalisés dès le plus jeune âge pour que le jeune furet les intègre correctement et durablement [4].

La stérilisation, vivement conseillée chez le furet pour limiter les odeurs et éviter les risques d’aplasie médullaire chez la femelle, diminue également la fréquence des comportements agonistiques, surtout chez le mâle.

6. Comportement exploratoire

Même malade, un animal continue à explorer tout environnement nouveau tel que la salle de consultation du vétérinaire. La diminution ou la disparition de ce comportement est significative d’une dépression sévère, quelle qu’en soit l’origine (organique ou comportementale).

Les perturbations “en hyper” du comportement exploratoire sont plus fréquentes et se manifestent par une agitation exacerbée, accélérée et désordonnée. Elles se produisent dans certains contextes algiques ou d’anxiété.

Quant à l’exploration orale, la persistance ou l’apparition du “mâchouillement” de tissus au-delà de l’âge de six mois peut mettre en évidence une inadéquation des conditions environnementales par manque de stimulations. C’est un motif de consultation fréquent.

La promenade avec laisse et harnais (PHOTO 4) doit faire l’objet d’un apprentissage. Il est préférable de commencer les sorties dans un milieu couvert tel une forêt, où l’animal se sent beaucoup plus à l’aise. La marche en laisse n’est toutefois jamais parfaite, elle n’est utile que pour éviter d’égarer son furet.

7. Comportement de jeu

Chez le furet adulte, le jeu reste une activité prépondérante. Chez le jeune, il permet l’apprentissage de l’inhibition de la morsure et du contrôle de l’excitation. Le jeu permet également de rétablir un contact avec un animal mal socialisé, maintenu dans de mauvaises conditions ou puni trop brutalement.

La disparition du comportement ludique peut traduire un état dépressif sévère. Dans des états anxieux, chez certains individus dont les comportements d’exploration et de sommeil sont déjà perturbés, le jeu peut à l’inverse être exacerbé. Il convient alors d’arrêter la séquence de jeu dès que l’excitation s’élève et d’isoler l’animal au calme.

Contrairement au chat, les jeux avec les mains sont recommandés et structurent le développement de l’animal. C’est la manière de les effectuer (gestes doux mais fermes) qui conditionne la qualité de l’attachement à l’homme.

8. Interactions intraspécifiques

Les furets vivent volontiers en groupe, le jeu étant leur activité commune principale. Ils dorment les uns contre les autres, se lèchent et s’épouillent mutuellement (PHOTO 5). Lorsque deux furets se rencontrent, ils se reniflent au niveau de la région anale, du dos et du cou. À ce jour, aucune étude n’a vérifié s’il s’agit ou non d’un allomarquage. L’entraide entre femelles pour les soins aux jeunes est souvent observée. La disparition d’un compagnon peut entraîner une dépression chez le furet resté seul.

En général, l’introduction d’un nouvel individu ne génère pas de troubles comportementaux. Dans certains cas cependant, des troubles de la cohabitation peuvent être observés [4]. Ils sont dus à une mauvaise socialisation intraspécifique, à une imprégnation à l’homme, ou correspondent à des contextes particuliers.

Présentation d’un nouvel individu à un furet installé depuis longtemps dans son milieu

La présentation d’un jeune ou d’un adulte à un furet entraîne parfois une cohabitation difficile, voire impossible. C’est ce qui peut arriver lorsque l’animal, même correctement socialisé à son espèce, est resté séparé de ses congénères pendant plusieurs années. Dans ce cas, des combats sont à craindre. Ils peuvent générer des blessures. Lors de l’introduction d’un jeune, il convient de renouveler les présentations quotidiennement, sous surveillance, jusqu’à ce que le jeune furet ait pris suffisamment d’assurance pour se défendre.

Présentation de deux mâles entiers

La cohabitation de deux mâles entiers est très difficile à obtenir, surtout pendant la saison de reproduction. Il existe des exemples de cohabitation réussie, mais ce sont généralement des mâles élevés ensemble et qui bénéficient d’un grand espace.

Présentation de deux adultes castrés

Dans le cas de la présentation de deux adultes castrés, même s’il y a conflit, les relations se stabilisent souvent après quelques jours et les deux furets s’acceptent mutuellement. Entre animaux stérilisés, toutes les cohabitations sont envisageables (plusieurs mâles, plusieurs femelles ou les deux).

Présentation d’un furet à un groupe déjà constitué

Il est souvent délicat d’introduire un nouveau dans un groupe constitué depuis un certain temps. Il existe alors un effet de coalition. Dans ce cas, il convient de présenter les furets un par un au nouveau venu, jusqu’à ce que ce dernier fasse partie intégrante du groupe reconstitué.

Pour favoriser la cohabitation, les présentations entre individus doivent avoir lieu dans un environnement nouveau pour chacun. Il est également recommandé de laisser le nouvel individu quelques jours dans une cage proche de celle du groupe. Au début, les sorties du nouveau furet et de ses congénères sont alternées. Il est possible de préconiser de laver les furets avant les présentations, afin de diminuer leurs odeurs respectives, ou d’échanger les linges dans lesquels ils dorment.

Il arrive cependant que deux furets ne s’entendent jamais alors qu’ils cohabitent très bien avec un autre. Dans le cas de groupes reproducteurs, il est conseillé de tenir le mâle éloigné des femelles pendant la période de rut.

9. Interactions interspécifiques

Avec l’homme

Les interactions entre l’homme et le furet sont encore peu étudiées. En pratique, les troubles de la communication semblent être à l’origine de nombreux abandons. Une mauvaise connaissance des comportements de l’animal peut générer des interactions insuffisantes ou maladroites et des punitions excessives ou inappropriées. Pourtant, le furet s’attache facilement à l’homme. Le degré d’attachement dépend de son tempérament, certains sont affectueux, d’autres plus indépendants. Les uns ne présentent aucune agressivité, quelle que soit la personne qu’ils rencontrent, d’autres ne sont attachés qu’à leur propriétaire et refusent tout contact avec un inconnu. Les interactions avec l’homme se manifestent de différentes façons : le furet recherche des caresses, dort sur son propriétaire ou dans ses affaires, l’invite au jeu, le suit, le lèche ou l’épouille. En cas de stress, il recherche sa présence. Un furet peut même refuser de s’alimenter en l’absence de son propriétaire [4].

Même si le furet peut représenter un danger envers des enfants très jeunes et turbulents (risque de morsures), il n’en reste pas moins un excellent compagnon pour les enfants plus âgés envers lesquels il manifeste une grande tolérance [1].

Outre l’acquisition de la propreté et de la morsure inhibée, d’autres apprentissages qui permettent une meilleure cohabitation avec l’homme peuvent être envisagés (acceptation du harnais, rituels, etc). Ils restent cependant difficiles à obtenir et sont facilement remis en question à la moindre perturbation. Les punitions doivent être utilisées avec parcimonie. Il est préférable d’avoir recours aux récompenses, dont la plus efficace est le jeu.

Avec les autres espèces

Même en l’absence de socialisation interspécifique, un furet recherche spontanément le contact avec d’autres carnivores, chiens ou chats (PHOTOS 6A et 6B), qui peuvent être des partenaires de jeu. Les présentations doivent avoir lieu progressivement et sous surveillance, car l’appel au jeu par la morsure n’est pas toujours bien perçu par les autres espèces. Un certain temps est nécessaire pour que le furet apprenne à décrypter le langage des autres espèces, notamment la menace. C’est souvent lui qui est en danger lors des premiers contacts. La cohabitation avec un lapin, un rongeur ou un oiseau est difficile car l’instinct de prédation persiste.

10. Comportement sexuel

Le comportement de marquage exacerbé du mâle (avec des selles et des urines), son attitude harcelante vis-à-vis des congénères, et éventuellement du propriétaire, peuvent motiver une consultation.

11. Comportement maternel

Une femelle qui allaite (PHOTO 7) a un comportement de protection susceptible d’engendrer des morsures. Placée dans de mauvaises conditions, trop souvent dérangée, elle devient anxieuse, peut négliger les soins maternels et être agressive envers ses petits. Lors de pseudogestation, une femelle peut manifester de l’agressivité envers ses congénères ou son propriétaire.

Les troubles comportementaux du furet sont fréquents mais relativement faciles à corriger grâce à une thérapie comportementale adaptée à chaque individu. L’utilisation des psychotropes prescrits chez le chat et le chien (exemple : chlorydrate de séléginine, mais également les autres psychotropes) est envisageable, mais elle n’est pas documentée.

  • (1) Voir l’article « Le comportement du furet », des mêmes auteurs, dans Le Point Vétérinaire n° 261, p. 18 à 24.

Points forts

Un milieu et un mode de vie inadaptés sont à l’origine de nombreux troubles du comportement chez le furet.

Une consultation comportementale commence toujours par un examen clinique car certains troubles organiques ont des répercussions sur le comportement de l’animal qui peut mordre pour se soustraire à la douleur.

Le sommeil, l’activité exploratoire et le jeu sont les comportements les plus exprimés par le furet.

La morsure et la malpropreté sont des motifs de consultation fréquents.

La stérilisation est conseillée chez le furet pour limiter les odeurs, éviter les risques d’aplasie médullaire chez la femelle et diminuer l’agressivité.

  • 1 - Applegate JA, Walhout MF. Childhood risks from the Ferret. J. Emerg. Med. 1998 ; 16(3) : 425-427.
  • 2 - Avanzi M. Le furet. Ed de Vichy, Milan. 2001 : 95 p.
  • 3 - Bertrand GJ. Le furet, un NAC à la mode : impact sur la filière animal de compagnie. Thèse de doctorat vétérinaire, Maisons-Alfort. 2002 : 90 p.
  • 4 - Blancher C. Le fureton, de la conception à la puberté. Thèse de doctorat vétérinaire, Lyon. Thèse n° 150.2003 : 171 p.
  • 5 - Boyce SW, Zingg BM, Lightfoot TL. Behavior of Mustela putorius furo. Vet. Clin. North Am. Exotic Anim. Pract. 2001 ; 4(3) : 697-711.
  • 6 - Fayoux I. Entretien et pathologie médicale du furet domestique comme nouvel animal de compagnie. Thèse de doctorat vétérinaire, Nantes. 1999 : 192 p.
  • 7 - Fox JG, Marini RP. Diseases of the endocrine system. In Fox JG. Biology and diseases of the ferret. Second Edition, Lippincott Williams et Wilkins.1998 : 291-305.
  • 8 - Kouvtanovitch E. Mise au point sur les médicaments anti-infectieux chez le furet : indications et précautions d’emploi des antibiotiques, des antiparasitaires et des antifongiques. Thèse de doctorat vétérinaire, Maisons-Alfort. 2001 : 149 p.
  • 9 - Quinton JF. Nouveaux animaux de compagnie. Petits mammifères. Masson, Paris. 2003 : 222 p.
  • 10 - Ryland LM, Gorham JR. The ferret and its diseases. J. Amer. Vet. Med. Assoc. 1971 ; 173(9) : 1154-1151.
  • 11 - Schoemaker NJ, Schuurmans M, Moorman JT et coll. Correlation between age at neutering and age at onset of hyperadrenocorticism in ferrets. J. Amer. Vet. Med. Assoc. 2000 ; 216 : 195-197.
  • 12 - Tremblay M. Le furet. Le Jour Éditeur (collection : nos amis les animaux). Québec. 2000 : 149 p.
  • 13 - Whary MT, Andrews PLR. Physiology of the ferret. In : Fox JG, Biology and Diseases of the Ferret. Lippincott Williams et Wilkins, Philadelphia. 1998 : 103-148.
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