Un cas d’hypercorticisme chez une furette - Le Point Vétérinaire n° 257 du 01/07/2005
Le Point Vétérinaire n° 257 du 01/07/2005

ENDOCRINOLOGIE DU FURET

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CAS CLINIQUE

Auteur(s) : William Bordeau

Fonctions : Consultant en dermatologie
vétérinaire
Clinique vétérinaire
3, avenue Foch
94700 Maisons-Alfort

Un hypercorticisme est diagnostiqué chez une furette stérilisée, âgée de cinq ans, qui présente une alopécie et un œdème vulvaire. La guérison est obtenue après l’ablation de la glande surrénale hypertrophiée.

L’hypercorticisme du furet (mustela putorius furo) est une affection connue depuis 1987 [4] et constitue actuellement l’un des principaux motifs de consultation aux États-Unis pour cette espèce.

Il reste toutefois anecdotique en Europe et notamment en France, parce que le furet y est peu répandu, à la différence des États-Unis où il constitue le troisième animal de compagnie après le chien et le chat [4].

Cas clinique

1. Commémoratifs

Une furette est présentée en consultation en raison d’une perte progressive de poils depuis quelques mois.

Elle vit en appartement et ne côtoie pas d’autres animaux (chiens, chats ou autres furets). Aucune contagion humaine n’est relatée.

L’animal part quelquefois en voyage avec sa propriétaire. Les déplacements réalisés dernièrement n’ont pas amélioré, ni détérioré les signes dermatologiques.

Aucun traitement prophylactique antipuces de l’animal ou dans l’environnement n’est mis en place.

Il mange des croquettes pour furet importées des États-Unis et a également droit à des petits “à-côté” : biscuits, pain et fruits.

La furette n’est pas vaccinée. Précédemment, elle a reçu une injection d’ivermectine et plusieurs applications d’amitraz qui n’ont permis qu’une légère amélioration.

2. Anamnèse

La dermatose est apparue cinq mois auparavant. Elle s’est manifestée initialement par une alopécie de l’ensemble de la queue qui a progressivement atteint la région dorsolombaire, pour finalement s’étendre à la région interscapulaire et au niveau du poitrail. Pour toutes ses localisations, l’alopécie, initialement diffuse, est devenue complète. Aucune repousse n’est survenue sur ces zones totalement glabres. Au début, cette dermatose n’était pas prurigineuse. Par la suite, un léger prurit secondaire est apparu. Il a accompagné une pyodermite superficielle secondaire qui s’est progressivement installée.

Aucun symptôme général n’est relaté par la propriétaire, seulement un possible amaigrissement. La furette pèse 700 g le jour de la consultation.

3. Examen dermatologique

Examen à distance

La dermatose est localisée à la queue, à la région dorsolombaire, à l’encolure, au crâne, à la région interscapulaire, au poitrail, aux ars, à l’abdomen et à l’arrière des pattes postérieures.

Examen rapproché

Sur ces différentes localisations, une alopécie bilatérale et symétrique diffuse à complète, sans érythème, est notée. De nombreux comédons sont présents sur la queue et en région dorsolombaire (PHOTOS 1 à 4). La vulve apparaît gonflée (PHOTO 5).

4. Hypothèses diagnostiques

Les hypothèses diagnostiques les plus probables après le recueil de l’anamnèse, des commémoratifs et la réalisation de l’examen clinique sont :

- un hypercorticisme ;

- une dysendocrinie due à un reliquat ovarien ;

- une démodécie.

5. Examens complémentaires

• Des raclages cutanés sont effectués sur diverses régions du corps jusqu’à la rosée sanguine. Les prélèvements sont ensuite déposés dans du lactophénol et examinés à l’aide d’un microscope (objectifs 4 et 10). Aucun Demodex n’est mis en évidence.

• Un trichogramme est ensuite réalisé. Des poils prélevés sur les lésions et à leur périphérie sont déposés dans du lactophénol, avant d’être observés au microscope (objectifs 4, 10 et 40). La majorité d’entre eux sont en phase télogène.

• À l’échographie abdominale, les dimensions de la glande surrénale gauche apparaissent augmentées : 9,4 mm de longueur et 5,2 mm d’épaisseur (PHOTO 6). Elle présente une lésion évocatrice d’un adénome ou d’un adénocarcinome. Aucune anomalie n’est notée sur la surrénale droite qui mesure 2,2 mm d’épaisseur. Des kystes du rein gauche et des kystes hépatiques sont également observés, mais sans manifestation clinique associée. Les nœuds lymphatiques mésentériques et gastriques sont visibles ; une adénomégalie modérée est suspectée.

Une hyperplasie kystique de l’utérus est associée à une probable hypersécrétion d’hormones sexuelles d’origine surrénalienne.

6. Traitement

En raison de l’hypothèse d’hypercorticisme lié à une tumeur de la surrénale gauche, une surrénalectomie gauche est décidée.

• L’induction anesthésique est réalisée avec une association de tilétamine et de zolazépam (Zoletil®, par voie intramusculaire), puis un relais gazeux par de l’halothane (Fluothane®) est effectué.

• Une incision xiphopubienne est pratiquée sur la ligne blanche, en débutant 2 cm en arrière du processus xiphoïde. La rate et l’intestin grêle sont réclinés afin d’accéder à la glande surrénale gauche qui est repérée visuellement et par palpation. Celle-ci est cranio-médiale par rapport au rein gauche, à 1 cm de la veine cave caudale. Une dissection minutieuse de la graisse périrénale permet alors de la dégager et de vérifier que sa taille est effectivement augmentée (PHOTOS 7 et 8). Après ligature des vaisseaux, elle est retirée.

La glande surrénale droite, qui est située en arrière du foie, crânialement au rein droit, se révèle de taille et d’aspect normales.

Un examen de la cavité abdominale ne met pas d’autres anomalies en évidence.

La cavité abdominale est refermée de manière classique : points simples au niveau de la ligne blanche, surjet en position sous-cutanée et points simples cutanés. Le réveil de la furette s’effectue normalement.

Le traitement postopératoire fait appel à de l’enrofloxacine(1) (Baytril®) administrée pendant dix jours, à la dose de 5 mg/j par voie orale.

• À l’examen histopathologique de la surrénale, le parenchyme surrénalien apparaît presque totalement remplacé par une plage relativement homogène de cellules néoplasiques. Seul un mince liseré du cortex surrénalien est épargné. Les cellules néoplasiques sont légèrement pléomorphes, plutôt polyédriques, avec un cytoplasme acidophile abondant ou finement vacuolaire. Les noyaux sont généralement petits, ronds et vésiculeux, et l’index mitotique est élevé. Aucune image d’embolisation vasculaire tumorale n’est observée sur le plan de section examiné.

Ces lésions permettent de conclure à un adénocarcinome corticosurrénalien gauche, probablement responsable d’un hypercorticisme chez cette furette.

Le dosage des hormones sexuelles n’a pas été réalisé.

7. Suivi

Lors du retrait des points, quinze jours plus tard, l’animal est en bon état général et la vulve a retrouvé une taille normale.

Trois mois plus tard, l’état général est bon, le pelage a presque entièrement repoussé et retrouvé une densité normale.

À ce jour, soit deux ans après l’intervention chirurgicale, aucune rechute n’est survenue.

Discussion

1. Étiologie

La prévalence de l’hypercorticisme a été évaluée à 0,55 % des furets présentés en consultation dans une structure vétérinaire aux Pays-Bas [9] et à 25 % aux États-Unis [8]. La prévalence n’est pas connue en France.

L’hypercorticisme concerne essentiellement des furets adultes, âgés de trois à cinq ans [8, 9]. Cependant, des animaux de tous âges peuvent être atteints.

Il n’y a pas de prédisposition sexuelle, mais 94 % des animaux atteints sont stérilisés [12]. Le délai moyen entre la stérilisation de l’animal et l’apparition des premiers signes cliniques est de trois ans et demi [9].

2. Pathogénie

À l’inverse de ce qui est observé chez le chien et chez le chat, l’hypercorticisme du furet ne correspond pas à un hypercortisolisme, mais à une hyperproduction d’hormones sexuelles d’origine surrénalienne, notamment de 17-hydroxyprogestérone, d’androstènedione, d’œstradiol et de déhydro-épiandrostérone [8]. Il ne s’agit donc pas d’un “syndrome de Cushing” [7].

Cette augmentation de la concentration en hormones sexuelles résulte d’une hyperplasie surrénalienne bilatérale ou d’une tumeur (bénigne ou maligne), unilatérale ou bilatérale [1]. Aucune origine hypophysaire ni aucune augmentation des concentrations plasmatiques en ACTH (adrenocorticotrophic hormone) n’a été décrite à ce jour [10].

Les mécanismes physiopathologiques sont mal connus. Cet hypercorticisme ferait suite à une stérilisation précoce, qui entraînerait une stimulation chronique et prononcée du cortex surrénalien par la FSH (follicle stimulating hormone) et l’hormone LH (Luteinizing hormone), en raison de l’absence de rétrocontrôle négatif par la testostérone et l’œstradiol. Un éclairage anormalement prolongé dans les habitations, par rapport aux conditions de vie à l’état sauvage, favoriserait en outre la libération de gnRH (gonadotropin releasing hormone) et, ainsi, la stimulation corticosurrénalienne par la FSH et la LH [2]. Cet hypercorticisme pourrait avoir une origine génétique, ce qui expliquerait la forte prévalence aux États-Unis.

3. Symptômes

L’hypercorticisme chez le furet est associé à des symptômes généraux et cutanés.

• Une perte de poids, une amyotrophie et un abattement sont parfois présents.

La palpation met en évidence une masse surrénalienne dans un tiers des cas, et une splénomégalie [8].

• Cet hypercorticisme étant à l’origine d’une hyperproduction en hormones sexuelles, des modifications de l’appareil reproducteur sont également observées :

- chez les femelles stérilisées, un œdème vulvaire est presque toujours présent. Un écoulement muqueux et une hyperplasie mammaire sont parfois observés ;

- chez les mâles, la reprise d’un comportement sexuel, une exacerbation de l’agressivité, la présence d’abcès prostatiques et une obstruction urétrale peuvent être notées.

• Exceptionnellement, une polyuropolydipsie d’origine inconnue est présente. Lorsque cet hypercorticisme est avancé, et donc que l’imprégnation œstrogénique est forte et chronique, une anémie due à la myélotoxicité apparaît.

• Une alopécie bilatérale et symétrique est quasi systématique (plus de 80 % des cas). Elle débute au niveau de la queue, pour s’étendre vers l’avant du corps, se développant progressivement en région dorsolombaire, au niveau des flancs et de l’abdomen [5]. Elle épargne généralement la face et les pattes. Dans un premier temps, cette alopécie peut être intermittente : elle apparaît au printemps et disparaît en automne [3]. Au fil des années, elle s’accentue toutefois pour devenir permanente.

L’absence d’alopécie ne permet pas d’écarter l’hypothèse d’un hypercorticisme. Chez certains animaux, un gonflement vulvaire peut être le seul signe clinique [12].

• Un prurit, qui est parfois la seule manifestation de l’hypercorticisme, est présent dans près d’un tiers des cas [5]. Il ne répond à aucun traitement antiprurigineux et seul le contrôle de l’hypercorticisme permet sa disparition.

Il est rare d’observer une distension abdominale, un pelage terne ou une finesse cutanée comme lors de syndrome de Cushing chez le chien, puisque les corticoïdes ne sont pas impliqués.

4. Diagnostic

• Le diagnostic est essentiellement clinique. L’hypercorticisme doit être suspecté chez une femelle stérilisée qui présente un œstrus ou une vulve gonflée, et chez un mâle castré qui présente à nouveau un comportement sexuel.

Le diagnostic différentiel inclut :

- un hyperœstrogénisme chez une femelle non stérilisée ou lors de reliquat ovarien ;

- une alopécie due à une tumeur testiculaire (d’autant plus rare que la plupart des mâles sont stérilisés) ;

- un lymphome cutané ;

- un effluvium télogène ;

- une démodécie.

• Le diagnostic différentiel entre un hyperœstrogénisme et un hypercorticisme est souvent difficile à établir, en particulier lorsque les lésions cutanées sont discrètes et que le tableau clinique est limité à une vulve gonflée. Pour les différencier, 100 UI d’HCG(2) (human chorionic gonadotropin) sont injectées par voie intramusculaire, deux fois à quinze jours d’intervalle. Dans le cas d’hyperœstrogénisme, une ovulation est induite et le gonflement vulvaire diminue en quelques jours, ce qui n’est pas constaté lors d’hypercorticisme [7].

Une exploration endocrinienne (dosage des hormones sexuelles) est également possible : androstènedione, œstradiol et 17-hydroxyprogestérone. Une élévation isolée de la concentration plasmatique en œstradiol est notée lors de reliquat ovarien ou chez une femelle non stérilisée. Lors d’hypercorticisme, au moins une de ces hormones est augmentée dans près de 96 % des cas et le taux des trois est significativement en hausse dans 22 % des cas [1, 6]. En France, ces dosages peuvent être effectués au laboratoire des dosages hormonaux de l’École nationale vétérinaire de Nantes.

Seule une laparotomie exploratrice permet d’établir un diagnostic de certitude.

• Les modifications biochimiques et hématologiques sont rares et non spécifiques. Il est possible d’observer une augmentation de l’activité des transaminases hépatiques, une anémie, une thrombopénie, une éosinopénie et une lymphopénie.

• L’imagerie peut être une aide intéressante.

L’hypertrophie surrénalienne est difficilement observable radiographiquement : à la différence de celles du chien, les surrénales du furet sont rarement calcifiées et leur repérage nécessite un matériel de bonne qualité et de l’expérience. L’échographie abdominale à l’aide d’une sonde de 7,5 mHz permet de mettre en évidence une hypertrophie surrénalienne dans près de 50 % des cas [8], à condition, également, d’avoir un matériel performant et de l’expérience. Les surrénales se trouvent dans la région crâniale aux reins, et apparaissent comme de petites masses triangulaires, aplaties et d’échogénicité moyenne. Elles sont souvent plus faciles à visualiser que chez le chien ou chez le chat, en raison de la présence d’un sac graisseux périrénal épais qui crée un fond hyperéchogène et améliore le contraste. Une variation d’échogénicité (hyper- ou hypo-échogénicité) ne doit toutefois pas nécessairement être considérée comme anormale et elle ne permet pas de différencier une simple hyperplasie d’une tumeur, qu’elle soit bénigne ou maligne.

Il convient donc de rechercher une modification de la taille et de la forme d’une ou des deux surrénales, ainsi que l’éventuel envahissement de la veine cave caudale. Les glandes surrénales ont une épaisseur inférieure à 5,5 mm, généralement de l’ordre de 2 mm, et une longueur qui est fonction du sexe et de la localisation abdominale (généralement entre 5 et 13,5 mm).

Lors d’hypercorticisme, une augmentation de l’épaisseur (supérieure à 5,5 mm), qui donne un aspect arrondi à la glande, une majoration générale de la taille et une modification des contours (nodules, envahissement des tissus environnants) sont recherchées. À la différence de ce qui est observé chez le chien lors de tumeur surrénale unilatérale, il n’existe pas d’atrophie de la glande surrénale controlatérale [8]. Lorsque la surrénale a une taille supérieure à 1 cm de diamètre, l’hypertrophie est due dans la quasi-totalité des cas à un adénocarcinome [12]. La surrénale gauche est principalement affectée et une atteinte bilatérale est présente dans près de 16 % des cas [12]. L’examen échographique permet en outre d’effectuer un bilan d’extension abdominal (veine cave, foie, rate, prostate et pancréas).

• La tomodensitométrie et la résonance magnétique nucléaire constituent des examens complémentaires intéressants [4]. Cependant, leur coût et la nécessité d’effectuer une anesthésie en limitent l’utilisation.

• Si l’analyse histopathologique de biopsies cutanées ne présente que peu d’intérêt en raison de son manque de spécificité, l’examen de la surrénale affectée révèle en revanche une hyperplasie dans près de 56 % des cas, un adénocarcinome dans près de 27 % des cas et un adénome dans plus de 15 % des cas. Lors d’atteinte bilatérale, le type lésionnel est différent dans 47 % des cas [12].

5. Traitement et pronostic

Le traitement de choix de l’hypercorticisme du furet est chirurgical et consiste en une exérèse de la ou des glandes surrénales atteintes.

Traitement chirurgical

• Le traitement chirurgical est hautement technique et fait appel à un matériel spécifique (clamps vasculaires, instruments de microchirurgie) [13]. Le retrait de la surrénale gauche est assez aisé à réaliser, contrairement à celui de la surrénale droite. Cette dernière, située entre le rein et le foie, est en effet liée à la veine cave caudale par un fascia, ce qui complique l’intervention et augmente les risques hémorragiques [9]. Chez le furet, la veine cave caudale peut toutefois être clampée (voire ligaturée définitivement), avant l’exérèse de la surrénale droite. Une circulation collatérale se met alors rapidement en place.

La fréquence cardiaque et la pression artérielle peuvent augmenter significativement lors de la manipulation des surrénales, puis diminuer fortement après la ligature vasculaire. Il est donc conseillé de mettre en place une perfusion intraveineuse et un suivi peropératoire cardio-respiratoire. Si le furet paraît léthargique dans les heures qui suivent l’intervention, une injection de dexaméthasone(1) peut être effectuée à la dose de 2 à 4 mg/kg par voie intraveineuse [7].

Après l’exérèse de la surrénale affectée, une tumeur apparaît sur la surrénale controlatérale dans 17 % des cas, en moyenne dans les six mois qui suivent, ce qui nécessite une nouvelle intervention [12].

Lors d’atteinte bilatérale, une surrénalectomie complète de la glande la plus hypertrophiée et la surrénalectomie subtotale de la glande controlatérale sont recommandées. Peu de complications postopératoires sont observées et le taux de mortalité est inférieur à 2 % [13]. Certains auteurs conseillent même une surrénalectomie bilatérale complète, dans la mesure où le furet peut vivre sans surrénales et sans supplémentation hormonale [12]. L’existence de reliquats surrénaliens le long de la veine cave caudale assurerait en effet une production hormonale suffisante pour l’organisme.

La cryochirurgie est une option intéressante [4]. Elle permet une ablation surrénalienne efficace, plus rapide et diminue significativement les risques hémorragiques.

• Le pronostic est bon après un traitement chirurgical. La taille de la vulve diminue en quelques jours, les poils repoussent en quelques semaines, voire en quelques mois. La survie moyenne après ablation varie selon l’âge de l’animal au moment de l’intervention. Ainsi, plus le furet est opéré jeune, meilleur est le pronostic. La survie est d’environ trois ans pour un animal opéré avant l’âge de trois ans et d’un an et demi lorsque l’ablation a lieu après l’âge de quatre ans (un furet vit entre cinq et onze ans).

Traitement médical

Le traitement médical n’est envisagé que si l’intervention chirurgicale est techniquement impossible (envahissement trop important de la veine cave caudale, présence de métastases, animal trop âgé ou trop débilité) ou lorsque les propriétaires s’y opposent.

• L’Op’DDD(2) est peu efficace et non dénué de risque chez le furet. Le kétoconazole(1) est mieux toléré, mais il n’est pas actif lors d’hypercorticisme du furet. Le trilostane(3) (Vetoryl®) pourrait être intéressant à la dose de 6 mg/kg/j, mais aucune étude chez le furet n’a été rapportée et ce produit n’est pas disponible en France. Il agit en inhibant de manière réversible la synthèse des stéroïdes [1].

• L’acétate de leuprolide(3) (Lupron® dépôt 30 days formulation) semble donner des résultats intéressants [11]. Il s’agit d’un analogue synthétique de la gnRH qui agit en inhibant la synthèse et la libération des hormones gonadotropes. Il permet une régression, voire une disparition de l’ensemble des symptômes généraux ou cutanés liés à l’hypercorticisme, avec notamment une repousse du pelage dans les deux mois. Il est à l’origine d’une diminution statistiquement significative des concentrations en 17-hydroxyprogestérone, en androstènedione, en œstradiol et en déhydro-épiandrostérone. Il est administré à la dose de 100 mg/kg en injection intramusculaire toutes les trois à quatre semaines. Il est bien toléré et la posologie peut être doublée si aucune amélioration n’est observée après deux ou trois injections. En France, il existe différentes spécialités contenant d’autres analogues de la gnRH : la triptoréline(2) (Decapeptyl LP®), la leuproréline(2) (Enantone®), la goséréline(2) (Zoladex®) et la buséréline(2) (Suprefact®). Elles pourraient avoir un effet similaire à l’acétate de leuprolide(3) chez le furet. Des résultats cliniquement satisfaisants ont été obtenus dans un cas d’hypercorticisme traité avec de la triptoréline(2) [a].

L’administration d’analogues de la gnRH ne constitue toutefois qu’un traitement symptomatique palliatif car ils n’agissent pas sur la surrénale, mais limitent seulement l’action des hormones sexuelles.

• La survie moyenne lors de traitement médical ne semble pas augmentée par rapport à la survie sans traitement, mais il améliore la qualité de vie de l’animal.

La durée de survie moyenne sans traitement est de six mois à un an [4]. L’affection surrénalienne est rarement la cause directe de la mort qui survient plutôt en raison de complications, comme l’aplasie médullaire. Même si l’atteinte est généralement unilatérale, une atteinte controlatérale ultérieure est possible et un suivi régulier est nécessaire. Les métastases sont rares et essentiellement rencontrées lors d’adénocarcinome de la glande surrénale droite, avec un envahissement de la veine cave caudale, du foie et des autres viscères abdominaux.

  • (1) Médicament vétérinaire utilisé hors RCP.

  • (2) Médicament à usage humain.

  • (3) Non disponible en France.

Remerciements à : Frédérique Degorce, Juliette Besso, Jean-Christos Troger et André Demontoy.

Points forts

À l’inverse du chien et du chat, l’hypercorticisme chez le furet n’est pas associé à un hypercortisolisme.

Il ne s’agit donc pas d’un “syndrome de Cushing”.

Il est observé dans les deux sexes, le plus souvent chez des animaux âgés de trois à cinq ans et stérilisés.

L’hypercorticisme interviendrait après une stérilisation précoce, en raison d’une stimulation chronique du cortex surrénalien, en l’absence de rétrocontrôle par la testostérone ou l’œstradiol.

Une alopécie bilatérale est presque toujours présente. Chez quelques animaux, un gonflement vulvaire ou un prurit peut toutefois être le seul signe clinique.

L’ablation de la ou des surrénales atteintes est le traitement de choix. Elle est toutefois délicate pour la surrénale droite.

La sensibilité de la détection échographique d’une hypertrophie surrénalienne chez un furet est d’environ 50 % pour un opérateur expérimenté qui dispose d’un matériel performant.

Le diagnostic différentiel entre un hyperœstrogénisme (femelle non stérilisée ou qui présente un reliquat ovarien) et un hypercorticisme peut nécessiter une épreuve hormonale.

À lire également

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