Plans d'action contre la BVD en France - Le Point Vétérinaire n° 252 du 01/01/2005
Le Point Vétérinaire n° 252 du 01/01/2005

MALADIES INFECTIEUSES DES BOVINS

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COURS

Auteur(s) : Hervé Petit*, Ludovic Plée**, Barbara Dufour***

Fonctions :
*FNGDSB
149, rue de Bercy
75595 Paris Cedex 12
**FNGDSB
149, rue de Bercy
75595 Paris Cedex 12
***Unité pédagogique maladies
contagieuses
École nationale vétérinaire
d'Alfort
7, avenue du Général-de-Gaulle
94700 Maisons-Alfort

Les actions conduites contre la BVD dans trois régions françaises permettent d'illustrer les différentes stratégies de lutte collective applicables en fonction de la situation épidémiologique.

L'agent de la BVD/MD (Bovine viral diarrhoea/Mucosal disease) est un virus de la famille des Flaviviridae, du genre Pestivirus, qui possède une parenté antigénique avec les virus de la Border disease des ovins (BDV) et de la peste porcine classique (CSFV) [2]. Deux génotypes de ce virus peuvent être différenciés (BVDV-I et BVDV-II), chacun présentant un biotype cytopathogène (cp) et un biotype non cytopathogène (ncp) [3].

L'infection des troupeaux bovins est fréquente à l'échelle mondiale et ses conséquences dans les élevages nécessitent de plus en plus la mise en œuvre de plans d'action de différents types et finalités [1].

De nombreux pays européens, dont la France, ont mis en place des méthodes de contrôle de cette maladie, en raison des conséquences zootechniques et économiques associées à une infection par le virus de la BVD. Cet article présente des plans d'action de groupements de défense sanitaire (GDS) contre la BVD en France. Trois principales méthodes de lutte sont ainsi employées selon la situation épidémiologique et l'organisation zootechnique de l'élevage dans une zone donnée [d].

Maîtrise clinique sans intervention sur la circulation virale

Ce type de stratégie ne comporte pas de recherche systématique des infectés permanents immunotolérants (IPI) dans tous les élevages, mais il consiste en un appui technique et financier aux élevages où sont trouvés des signes cliniques de la maladie afin de réduire, par la mise en place de plans d'assainissement, les pertes économiques associées.

Il nécessite également une maîtrise des facteurs de risque qui pourraient être responsables de l'apparition de telles formes cliniques dans les élevages.

L'éleveur reste un acteur majeur de la lutte contre la BVD puisqu'il identifie les périodes critiques lors desquelles ces facteurs de risque peuvent intervenir (protection des animaux autour de la période de gestation par exemple).

Cette stratégie est mise en place lorsque les conditions épidémiologiques sont défavorables à la maîtrise de la circulation virale sur le plan régional : forte prévalence dans les élevages, circulation des animaux, pâturages en commun.

Elle a ainsi été menée par exemple dans le Limousin depuis 1987. Les GDS y apportent un appui technique et financier aux éleveurs et les sensibilisent aux facteurs de risque de la maladie en élevage. Les interventions en élevage portent sur [a] :

– la confirmation en laboratoire de la circulation du virus de la BVD ;

– l'analyse des facteurs de risque qui pèsent sur l'élevage ;

– le dépistage des IPI en laboratoire en vue de leur élimination ;

– la surveillance de populations sentinelles pour évaluer l'évolution de la circulation virale ;

– une vaccination éventuelle pour limiter la circulation virale.

Les caisses mutuelles des GDS participent aux frais de prélèvements sanguins, d'analyses, de vaccination et/ou d'incitation à l'élimination des IPI. L'information sur la maîtrise des facteurs de risque relatifs à la BVD s'effectue à un niveau collectif, par communication large en provenance des GDS, et à un niveau individuel, par un partenariat entre les GDS et les vétérinaires praticiens qui personnalisent les conseils au cas par cas. Les GDS incitent également les éleveurs, lors d'introduction et de constitution de cheptels, à signer un “billet de garantie conventionnelle” qui prévoit une recherche virologique individuelle chez les animaux nouvellement acquis, si le statut non-IPI de ces derniers n'a pas été établi antérieurement [a].

Contrôle régional de la circulation virale

Avec cette méthode, les pertes économiques des élevages atteints de BVD tentent d'être diminuées en limitant la circulation virale, quels que soient la période et les facteurs de risque associés. Il est alors nécessaire de connaître au préalable le statut des élevages vis-à-vis de la maladie, de façon à repérer les sources de virus et à en prévenir la diffusion.

Deux modes de prévention sont possibles et peuvent être utilisés isolément ou de manière complémentaire :

– assainissement des sources de virus identifiées (par dépistage et élimination des IPI au sein des élevages infectés) ;

– protection renforcée des élevages reconnus indemnes (introductions d'animaux et contacts possibles avec des élevages atteints). Cette stratégie s'applique lors de situation épidémiologique plus favorable que la précédente, en particulier lorsque la circulation virale est modérée, voire faible, et que le recours aux pratiques d'élevage en commun est limité. Elle est actuellement employée dans les régions Bretagne et Pays de la Loire. Pour ce faire, les GDS de ces régions, après avoir utilisé des méthodes classiques d'assainissement en élevages infectés, ont notamment mis à profit le développement d'outils diagnostiques de groupe (analyses de mélange sur le lait de tank) [d].

• En production laitière, la connaissance du statut individuel des cheptels par rapport à la BVD repose sur le résultat d'au moins trois analyses sérologiques successives du lait de tank à quatre mois d'intervalle. Les cheptels sont classés en cinq catégories : négatifs, faiblement positifs, séroconversion récente ou en cours, positifs, ininterprétables [c].

• En production de viande, des sérologies sont effectuées tous les ans sur deux mélanges de trois sérums provenant d'animaux de moins de trente-six mois. Le classement s'effectue sur la base des deux derniers résultats.

Toutes ces analyses sont financées par les GDS. Les statuts des cheptels, régulièrement mis à jour, sont portés à la connaissance de l'éleveur.

En Bretagne, les élevages classés négatifs sont invités à mettre en place des mesures de prévention des risques (“plan protection BVD”). Dans les autres élevages, une recherche et une élimination des IPI sont effectuées (prise en charge par les GDS et versement d'une indemnité forfaitaire lors de l'élimination des IPI). Une analyse virologique est également effectuée lors de toute introduction, si le statut non-IPI de l'animal introduit n'a pas été établi antérieurement.

À la différence de la Bretagne, qui s'est orientée vers l'assainissement des cheptels infectés, les Pays de la Loire ont préféré renforcer la protection des élevages négatifs et surveiller les troupeaux à résultats positifs, sans inciter à rechercher et à éliminer systématiquement les IPI [b].

Recours à la vaccination

Le recours à la vaccination dans la lutte contre la BVD peut constituer un choix lors de circulation importante du virus et de fréquents contacts entre les cheptels. Il s'agit d'une alternative à la maîtrise de la forme clinique, sans intervention sur la circulation virale (voir précédemment).

Un tel recours de façon élargie à la vaccination est actuellement conseillé en Bourgogne, région à production majoritairement allaitante et ayant une situation de départ proche de celle du Limousin, avec en outre des élevages de grande taille, gérés en lots fréquemment remaniés.

Dans les élevages où des formes cliniques de BVD apparaissent, cette stratégie est associée à la recherche et à l'élimination des IPI [e] (PHOTOS 1 ET 2).

Le caractère variable de l'épidémiologie de la BVD, selon les régions et les modes d'élevage, implique l'existence de plans de lutte différents, phénomène retrouvé au niveau européen comme en France. Une harmonisation des outils de lutte employés semble donc illusoire. Il est néanmoins indispensable que les échanges communautaires et nationaux ne souffrent pas de cette diversité d'actions. Pour ce faire, un Code des échanges a été mis en place par les GDS, avec l'appui de la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire. Il permet d'apporter des garanties individuelles lors de mouvements d'animaux concernant le statut non-IPI de l'animal introduit, car les IPI représentent la principale source de contamination en matière de BVD.

À lire également

1 – Lindberg A. Bovine viral diarrhoea virus infection and its control. A review. Vet. Q. 2003;25(1):1-16.

2 – Petit H. Typex mag. 2002;47:56-57.

3 – Thiry E. GDS Info. 1999: 133-134:7-13.

En savoir plus

– Fourichon C, Beaudeau F, Seegers H. Maîtrise de la diarrhée virale bovine en Europe. Point Vét. 2004;35 (Numéro spécial “Actualités en pathologie digestive des bovins”):4-8.

Congrès

a – Groupement régional d'action sanitaire du Limousin, 2003. Réunion Bassin allaitant du 20 mai 2003. Non publié.

b – Holleville P. 2003. Communication personnelle.

c – Joly A, Garrec MH, Thibert B et coll. 2001. Recueil des Journées bovines nantaises.

d – Petit H. Renc. Rech. Ruminants. 2003 ; 10 : 277-280.

e – Petit E. Réunion Bassin allaitant du 20 mai 2003. Non publié.

Points forts

En production laitière, dans les régions françaises qui cherchent à contrôler la circulation virale, le statut individuel des cheptels par rapport à la BVD repose sur le résultat d'au moins trois analyses sérologiques successives du lait de tank à quatre à six mois d'intervalle.

En production de viande, dans les régions françaises qui cherchent à contrôler la circulation virale, le statut individuel des cheptels par rapport à la BVD repose sur des sérologies effectuées tous les ans sur deux mélanges de trois sérums provenant d'animaux de moins de trente-six mois.

Lorsque les conditions épidémiologiques sont défavorables à la maîtrise de la circulation virale sur le plan régional, l'appui technique et financier aux élevages où sont trouvés des signes cliniques de la maladie est associé à la maîtrise des facteurs de risque.

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