Conduite à tenir devant une fracture chez un veau - Le Point Vétérinaire n° 250 du 01/11/2004
Le Point Vétérinaire n° 250 du 01/11/2004

ORTHOPÉDIE BOVINE

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CONDUITE À TENIR

Auteur(s) : Arnaud Bohy

Fonctions : Cabinet vétérinaire
Le Grand Chemin n° 14
71360 Épinac

Lors de fracture d'un membre, la motivation de l'éleveur, le prix du montage, le poids du veau et les particularités anatomiques, interviennent dans le choix de la technique.

Les fractures des membres chez les bovins sont en général d’origine traumatique. Leur diagnostic est facile, mais le pronostic et le choix de la méthode de traitement nécessitent la prise en compte de plusieurs facteurs :

- la gravité de la fracture ;

- les lésions associées ;

- le poids de l’animal ;

- le choix de la technique réparatrice ;

- le coût ;

- le pourcentage de réussite.

Première étape : diagnostiquer et caractériser la fracture

Une fracture n’est jamais bénigne ; elle doit être évaluée avec soin. Une radiographie permet de confirmer et de préciser le diagnostic ; elle permet d’évaluer la gravité de la fracture et participe au choix du traitement mis en place (PHOTO 1).

Deuxième étape : effectuer les premiers gestes

En urgence, les premiers gestes à réaliser sont :

- nettoyer et désinfecter une plaie éventuelle ;

- stabiliser la fracture avec un pansement de type Robert-Jones qui permet de différer le traitement de douze à vingt-quatre heures ;

- prévoir une antibioprévention si nécessaire (fracture ouverte) ;

- tranquilliser l’animal si cela est nécessaire (et possible) pour organiser son transport à la clinique.

Troisième étape : évaluer la motivation du propriétaire et le cadre de vie du veau

L’expérience montre que le premier facteur de réussite est la motivation de l'éleveur.

Le coût du montage intervient aussi dans la décision (voir le TABLEAU “Coût des différentes techniques de fixation lors de fracture chez un veau”).

Le propriétaire de l’animal doit être informé que la réussite de la réparation dépend des soins apportés. Il est ainsi illusoire d’espérer une guérison en laissant un veau avec un plâtre ou un fixateur externe dans une stabulation humide et 50 cm de fumier… (PHOTO 2).

Le milieu de vie proposé au veau en convalescence est ainsi un facteur essentiel de réussite de l’intervention. Le veau doit être attaché ou mieux, être maintenu dans un espace restreint d'un mètre sur un mètre ; il ne doit pas avoir de chemin à parcourir pour aller téter et surtout, pas de chaîne de curage à sauter. Sa litière doit être maintenue propre.

Quatrième étape : choisir le traitement adéquat

Le poids du veau est un facteur déterminant dans le choix du montage mais aussi pour la réussite du traitement, pour la pose d'un plâtre comme pour la mise en place de fixateurs externes. Les difficultés sont peu fréquentes si le veau pèse moins de 80 kg, le pronostic devient en revanche aléatoire pour un poids supérieur à 150 kg.

Le type de la fracture (présence ou non d'esquilles, etc.) et sa localisation (haute ou basse) entrent également en ligne de compte (voir le TABLEAU “Éléments de choix raisonné de la technique de fixation d’une fracture chez le veau”).

1. Contention externe

La contention externe peut faire appel à :

- un pansement rembourré de type Robert-Jones ;

- une attelle de Thomas ;

- un plâtre à l’ancienne avec ou sans attelle (tige métallique ou gouttière en PVC), ou une résine (PHOTOS 3 et 3 bis). Dans tous les cas, il convient de respecter certaines règles élémentaires (voir l’ENCADRÉ “Règles de contention externe”). Lors de la pose d'un plâtre ou d'une résine, il convient de prévoir les modalités de retrait dès la pose (par exemple intégration d’un fil de scie-fil si pas de scie électrique, PHOTO 4).

2. Contention interne

Fixateurs externes

La pose de fixateurs externe est la technique de choix pour la chirurgie orthopédique chez le veau (PHOTOS 5, 5 bis, 6 et 6 bis). Elle est peu invasive et s’accorde avec une vie en étable propre, avec une activité restreinte (voir l’ENCADRÉ “Principes de base de la fixation externe”).

Plaque

La finesse de la corticale des os chez les bovins par rapport aux autres espèces fait de la pose de plaques une pratique uniquement expérimentale.

Enclouage centromédullaire

Utilisée sur les fractures du fémur avec le clou à expansion de Bellon (PHOTOS 7 et 7 bis) et sur certaines fractures du tibia, cette technique demeure compliquée à mettre en place en clientèle. La finesse de la corticale constitue également un frein à la solidité des montages.

Laisser faire la nature paraît peu académique, mais reste dans certaines circonstances un choix possible. L’arrêt de l’abattage d’urgence il y a quelques années a en effet permis de mettre en évidence des guérisons spontanées surprenantes avec un traitement “conservateur”. Aucune guérison spontanée n’est toutefois à espérer lors de fractures basses trop mobilisables. Les guérisons spontanées sont rares, mais possibles pour les fractures du tibia et du radius. Elles sont envisageables (deux tiers de réussite) lors de fractures de l’humérus ou du fémur, en raison de l’importance de la masse musculaire.

Règles de contention externe

Nettoyer le membre

Bander les zones à risque

Placer un jersey tubulaire sur toute la longueur

Immobiliser les deux articulations autour du rayon fracturé

Provoquer une extension forcée

Inclure la totalité du pied

Principes de base de la fixation externe

1. Localiser le foyer de fracture : radiographie obligatoire.

2. Préparer un schéma du montage.

3. Placer les deux premières broches le plus loin possible du foyer de fracture.

4. Placer la barre en réduisant la fracture.

5. Placer une deuxième barre pour servir de support aux broches suivantes.

6. Placer les quatre broches suivantes si cela est possible.

7. Retirer la barre support et la placer de l’autre côté en vérifiant la réduction de la fracture.

8. Vérifier qu’aucune barre ou qu’aucun coapteur ne puisse blesser.

9. Faire un pansement léger à changer tous les dix jours ou avant s'il est sale.

10. Maintenir le montage en place entre 25 et 40 jours selon l’âge et la gravité.

En savoir plus

- Bellon J. Traitement des fractures du fémur chez le veau par enclouage centromédullaire. Point Vét. 2001 ; 32 (numéro spécial « Chirurgie des bovins et des petits ruminants », tome II) : 87-91.

- Bellon J. Enclouage centromédullaire : concept de broche à effet expansif. Application aux fractures du fémur chez le veau. Point Vét. 1996 ; 27(173) : 955-961.

- Chatre J-L. Fractures du canon chez le veau traités avec des Fessa. Point Vét. 2003 ; 34(241) : 70-72.

- Chatre J-L. Principes généraux du traitement chirurgical des fractures des membres chez le veau. Point Vét. 2001 ; 32 (numéro spécial « Chirurgie des bovins et des petits ruminants », tome II) : 81-84.

- Chatre J-L. Fractures du métacarpe, du métatarse et du tibia chez le veau : utilisation raisonnée de la fixation externe. Point Vét. 1995 ; 27(169) : 225-235.

- Ravary B, Desrochers A. Orthopédie bovine. Fractures métacarpiennes et métatarsiennes. Point Vét. 2003 ; 34(235) : 42-45.

- Vignault G. Particularités du traitement chirurgical des fractures du tibia chez le veau, Point Vét. 2001 ; 32 (numéro spécial « Chirurgie des bovins et des petits ruminants », tome II) : 80.

ATTENTION

La pose de fixateurs externe est la technique de choix pour la chirurgie orthopédique chez le veau.

Laisser faire la nature paraît peu académique, mais reste dans certaines circonstances un choix possible.

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