Ne pas prescrire d’antibiotiques sans examen des animaux - Le Point Vétérinaire n° 245 du 01/05/2004
Le Point Vétérinaire n° 245 du 01/05/2004

VENTE D’INTRAMAMMAIRE AU CABINET VÉTÉRINAIRE

Pratiquer

SUR ORDONNANCE

Auteur(s) : Éric Vandaele*, Jean-Dominique Puyt**

Fonctions :
*4 square de Tourville, 44470 Carquefou
**Unité de pharmacologie et toxicologie, ENVN

La prescription d’antibiotiques au “comptoir” est une pratique illégale. Elle est moins contestable si l’ordonnance traduit une connaissance de l’élevage.

Le GAEC Des Fontaines est une exploitation laitière d’environ 80 vaches. Les vétérinaires du cabinet sont régulièrement appelés lors de maladies de ses animaux. L’éleveur a l’habitude d’acheter les médicaments vétérinaires préventifs ou curatifs au cabinet vétérinaire.

Le 15 mai 2004, il vient au cabinet s’approvisionner en traitement intramammaire en lactation pour renouveler son stock en voie d’épuisement.

Législation : Comment prescrire des antibiotiques au cabinet ?

La réglementation actuelle sur les substances vénéneuses interdit toute prescription – et donc a fortiori toute délivrance – d’antibiotiques sans « examen du malade » (article R. 5194 du Code de la santé publique). Cette réglementation adaptée à la prescription médicale n’a jamais vraiment été respectée par les vétérinaires, en particulier pour les médicaments préventifs comme les antiparasitaires ou les antibiotiques intramammaires utilisés au tarissement. Dans le cas des médicaments curatifs, comme le traitement des mammites cliniques, cette réglementation est en outre parfois contraire à la santé animale, car il est utile de traiter les infections mammaires précocement (dès le dépistage des signes cliniques à la traite), plutôt que de reporter ce traitement d’une demi-journée ou d’une journée dans l’attente du praticien. Cette réglementation est donc jugée inapplicable par les vétérinaires et les éleveurs.

Les praticiens qui se trouvent aujourd’hui quotidiennement en infraction avec cette réglementation ne peuvent évidemment pas interrompre leur activité de prescription et de délivrance au cabinet à des éleveurs qu’ils connaissent bien. Un refus de prescription et de vente conduirait probablement ces éleveurs à s’adresser à d’autres ayants droit (pharmaciens ou groupements). Même si les praticiens ne peuvent pas réaliser l’examen de l’animal malade prévu par la réglementation, ils peuvent néanmoins démontrer, par la rédaction de leur ordonnance, qu’ils connaissent bien l’élevage et ses animaux et que leur prescription n’est pas réalisée à l’aveugle. La description des animaux à traiter permet en outre de vérifier que les quantités délivrées ne sont pas excessives.

Un projet de décret prescription/délivrance, spécifique aux vétérinaires, devrait à moyen terme corriger en partie le caractère inapplicable de cette réglementation. Le principe est de permettre aux praticiens de prescrire et de délivrer les médicaments vétérinaires aux élevages dont ils ont une réelle connaissance. Cette connaissance de l’élevage devrait s’appuyer sur, au minimum, une visite annuelle donnant lieu à un bilan sanitaire écrit et, comme actuellement, sur la réalisation des visites courantes si nécessaire. Le projet de décret prévoit que la date de la dernière visite devra y être mentionnée.

Mastijet® : Trois antibiotiques et un anti-inflammatoire

Mastijet® est une préparation intramammaire à base de trois antibiotiques : la tétracycline (antibiotique bactériostatique contre les bactéries Gram positif et négatif), la néomycine (bactéricide actif plutôt contre les bactéries Gram négatif et les streptocoques) et la bacitracine (bactériostatique actif contre les germes Gram positif). Son spectre d’activité est donc large pour traiter les infections mammaires à staphylocoques, streptocoques ou entérobactéries.

Le laboratoire Intervet a pu démontrer l’absence d’antagonisme entre les trois antibiotiques pour obtenir son AMM en 1992. Dans la gamme des traitements intramammaires disponibles en lactation, Mastijet® ne contient pas de bêtalactamines, contrairement à la quasi-totalité des autres traitements.

Il contient en outre également un corticoïde : la prednisolone. Par son activité anti-inflammatoire, l’administration locale de prednisolone conduit à observer une diminution rapide de l’inflammation mammaire et une reprise de l’appétit lors de mammite aiguë. Toutefois, l’apparente guérison clinique ne doit pas faire interrompre trop tôt le traitement contre les infections mammaires.

Quelle que soit la voie d’administration, les corticoïdes sont contre-indiqués chez les bovins en fin de gestation en raison du risque d’avortement, mais cette précaution ne figure pas sur la notice d’emploi des traitements locaux. La fin de gestation des vaches correspond généralement à la période de tarissement mais cette précaution peut néanmoins être ajoutée sur l’ordonnance.

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