Examen radiographique de la partie distale des membres - Le Point Vétérinaire n° 245 du 01/05/2004
Le Point Vétérinaire n° 245 du 01/05/2004

RADIOGRAPHIE DE L’APPAREIL LOCOMOTEUR DES BOVINS

Se former

COURS

Auteur(s) : Laurent Blond*, Guy Beauregard**, Pierre-Yves Mulon***

Fonctions :
*Service d’imagerie
**Service d’imagerie
***Service de chirurgie
des grands animaux
Département des sciences
cliniques, Faculté de médecine
vétérinaire de l’Université
de Montréal, Saint-Hyacinthe,
Québec, J2S 7C6, Canada

La radiographie est un examen complémentaire intéressant lors d’affection locomotrice chez les bovins. L’examen de l’extrémité distale des membres est d’un accès relativement aisé, surtout chez les jeunes animaux.

L’examen radiographique est souvent révélateur lors d’affection du système locomoteur. Avec l’examen clinique, il représente un outil indispensable pour établir un diagnostic précis ou au moins une courte liste de diagnostics différentiels.

La plupart des affections du système myoarthro-squelettique chez les bovins concernent la portion distale des membres thoraciques ou pelviens. L’examen radiographique de cette région, chez le veau comme chez l’adulte, est accessible à tout vétérinaire qui possède un appareil portatif et des cassettes de petite taille (18 à 24 cm ou 24 à 30 cm) avec un couple écran-film rapide (voir le TABLEAU “Constantes radiographiques utilisables pour la partie distale des membres des bovins adultes”) [1]. Cette région présente l’avantage, d’une part, de permettre un examen radiographique complet (incidences orthogonales et obliques) et, d’autre part, de pouvoir être radiographiée la plupart du temps chez un bovin debout sans que la qualité des clichés soit compromise.

Lors de l’examen d’un jeune animal, il est impératif de bien situer les plaques de cartilage de croissance car elles apparaissent radio-transparentes et peuvent parfois être confondues avec des fractures (voir le TABLEAU “Localisation des différentes plaques de croissance et âge de leur fermeture chez le veau”).

Radiographie du pied

Les affections du pied sont les causes les plus fréquentes de boiterie chez les bovins [3].

1. Technique radiologique

Il est essentiel de bien nettoyer et curer le pied avant l’examen radiographique, afin d’éviter que les salissures ne perturbent l’interprétation. Tout traitement de plaie à l’aide de solutions d’iode doit être évité pour les mêmes raisons.

Au centre hospitalier universitaire vétérinaire de Saint-Hyacinthe, trois incidences sont systématiquement utilisées.

L’incidence dorsoplantaire ou dorsopalmaire

Le pied de l’animal est en appui sur un support en bois afin de le surélever. La cassette est placée verticalement derrière le pied. Le faisceau est orienté perpendiculairement à l’axe du pied et centré au-dessus du bourrelet coronaire. Pour le pied du membre pelvien, les flancs peuvent gêner le positionnement du tube de l’appareil. Il suffit alors de décaler latéralement le pied ou, chez les animaux dociles, de faire une projection plantarodorsale. Il est aussi possible de faire cette projection en élevant le pied vers l’arrière à l’aide d’une corde attachée au jarret. Un cliché pris avec le pied surélevé facilite en outre la visualisation des phalanges et des sésamoïdes distaux (os naviculaires).

L’incidence latéromédiale

La procédure est la même, mais la cassette est placée sur la face médiale du pied.

L’incidence médiolatérale ou latéromédiale interdigitée

Ce cliché se réalise plus facilement chez l’animal en décubitus latéral ou avec le pied maintenu en élévation. Un film à simple émulsion, protégé de la lumière par une pochette cartonnée, est glissé entre les doigts de l’animal. Le faisceau est centré sur le doigt à examiner. Cette projection permet de mettre en évidence la phalange distale, ainsi qu’une partie de son articulation avec la phalange intermédiaire et l’os naviculaire. Elle est cependant parfois difficile à réaliser lors de tuméfaction ou de douleur dans cette région.

Lors de fistule, il est possible d’évaluer son trajet en plaçant une sonde métallique dans celle-ci ou en y injectant un produit de contraste à base d’iode et en répétant le ou les clichés adéquats.

2. Anatomie radiographique normale

Le pied comprend l’ensemble des structures distales par rapport au boulet (articulation métacarpo- ou métatarsophalangienne).

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTOS 1, 2, 3 ET 4), les phalanges distales présentent de nombreux canaux vasculaires. Le sésamoïde distal d’un doigt s’articule avec la phalange intermédiaire et la phalange distale. Il possède une bourse. Au niveau des fanons, des phalanges rudimentaires sont parfois visibles, et ne doivent pas être confondues avec des fragments osseux. Certains processus dus à l’âge ne doivent pas non plus être confondus avec des lésions :

- l’augmentation de taille et d’irrégularité de l’éminence pyramidale ;

- l’augmentation de taille et la minéralisation des cartilages complémentaires ;

- l’augmentation de l’irrégularité et la diminution de l’opacité de la marge solaire ;

- une exostose sur le rebord axial de la première phalange qui correspond à l’insertion du ligament interdigité proximal.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 5 ET 6), les plaques de croissance proximales des phalanges proximales et moyennes sont visibles.

Radiographie du boulet

1. Technique radiographique

L’articulation du boulet est généralement incluse sur les clichés dorsopalmaire ou -plantaire et latéromédial du pied.

2. Anatomie radiographique normale

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTOS 1, 2, 3 ET 4), chaque doigt possède une paire d’os sésamoïdes proximaux qui s’articulent entre eux et avec l’articulation métacarpo- ou métatarsophalangienne. L’os sésamoïde du côté abaxial apparaît plus étroit que son homologue.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 5 ET 6), les plaques de croissance distales des métatarses ou des métacarpes sont visibles.

Radiographie du métacarpe et du métatarse

1. Technique radiographique

L’examen complet du métacarpe ou du métatarse nécessite dans la plupart des cas deux incidences : dorsopalmaire ou -plantaire et latéromédiale. Les cassettes sont maintenues à la verticale, le faisceau est dirigé horizontalement et centré au milieu de la diaphyse du métacarpe ou du métatarse.

2. Anatomie radiographique normale du métacarpe

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTOS 7 ET 8), l’extrémité proximale du métacarpe est constituée de deux surfaces articulaires séparées par une fossette synoviale médiane. La présence d’un sillon médian (septum vertical) en faces dorsale et palmaire fait apparaître une ligne plus radio-opaque au milieu de l’os sur la projection dorsopalmaire. Ces deux sillons médians sont terminés proximalement et distalement par des canaux interosseux visibles sur les clichés. L’extrémité distale du métacarpe comporte deux éminences articulaires (trochlées), avec chacune un relief intermédiaire. Elles sont séparées par une échancrure interarticulaire marquée. En face palmarolatérale de l’extrémité proximale du métacarpe se trouve le vestige de l’os métacarpien V. L’union fibreuse des deux os explique la ligne radiotransparente présente sur le cliché radiographique.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 5 ET 6), la ligne de croissance distale est visible et l’os métatarsien V est ossifié.

3. Anatomie radiographique normale du métatarse

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTO 9), il existe un os sésamoïde en face plantaromédiale de l’extrémité proximale du métatarse, proche du sillon médian. L’anatomie est sensiblement identique à celle du métacarpe pour sa partie distale.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 10 ET 11), l’os sésamoïde à l’extrémité proximale du métatarse n’est pas encore ossifié. La ligne de croissance distale du métatarsien principal est fonctionnelle.

Radiographie du carpe et du tarse

1. Technique radiographique

L’examen complet du carpe et du tarse nécessite dans la plupart des cas deux incidences :

L’incidence dorso-palmaire ou -plantaire

Pour le carpe, la cassette est maintenue en position verticale et centrée sur l’os pisiforme (os accessoire). Pour le tarse, elle est centrée sur le talus et appuyée sur l’extrémité proximale du calcanéum. Le faisceau est horizontal et centré sur le pisiforme ou le talus.

L’incidence latéromédiale

La cassette est maintenue en position verticale sur la face médiale du membre, centrée sur l’étage proximal du carpe ou du tarse. Le faisceau est horizontal et centré sur l’étage proximal de l’articulation.

2. Anatomie radiographique normale du carpe

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTOS 12 ET 13), le carpe est une articulation constituée de pièces multiples réparties en deux étages distincts. La superposition des différents os rend l’interprétation radiographique plus difficile que pour d’autres parties du squelette. L’incidence dorsopalmaire provoque une superposition de l’os pisiforme et de l’extrémité distale de l’ulna avec les os de l’étage proximal. L’incidence latéromédiale permet une meilleure visualisation de ces deux os, mais entraîne une superposition des os de l’étage proximal comme de l’étage distal.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 14 ET 15), une ligne de croissance est visible en portion distale du radius et de l’ulna.

3. Anatomie radiographique normale du tarse

Chez l’adulte

Chez l’adulte (PHOTOS 16 ET 17), le tarse est aussi une articulation constituée de pièces multiples. L’incidence dorsoplantaire permet une bonne évaluation des étages distaux. Avec cette incidence, le calcanéum est superposé au talus et à la portion distale du tibia. L’incidence latéromédiale permet alors de mieux apprécier les contours articulaires du talus.

La malléole latérale du tibia s’articule avec le calcanéum et le talus. La présence d’une ligne radiotransparente entre le tibia et la malléole latérale est donc physiologique.

Chez le veau

Chez le veau (PHOTOS 18 ET 19), l’os central du tarse et le quatrième os ne sont pas encore fusionnés. Les lignes de croissance distale du tibia et de l’extrémité proximale du calcanéum sont visibles selon l’âge.

Aux examens essentiels décrits pour l’ensemble de ces parties anatomiques des projections obliques peuvent être ajoutées afin de mieux identifier certaines lésions [2].

Points forts

Lors de l’examen radiographique d’un jeune animal, il est impératif de bien situer les plaques de cartilage de croissance car elles apparaissent radiotransparentes et peuvent parfois être confondues avec des fractures.

Chez le bovin adulte, des phalanges rudimentaires sont parfois visibles, au niveau des fanons. Elles ne doivent pas être confondues avec des fragments osseux.

La présence d’un sillon médian en face dorsale et palmaire du métacarpe du bovin adulte fait apparaître une ligne plus radio-opaque au milieu de l’os sur la projection dorsopalmaire.

L’extrémité distale du métacarpe comporte deux éminences articulaires séparées par une échancrure interarticulaire marquée.

La superposition des différents os du carpe rend l’interprétation radiographique de cette région assez difficile.

L’incidence dorsopalmaire provoque une superposition de l’os pisiforme et de l’extrémité distale de l’ulna avec les os de l’étage proximal.

L’incidence latéromédiale permet une meilleure visualisation de ces deux os, mais provoque une superposition des os de l’étage proximal comme de l’étage distal.

L’incidence dorsoplantaire permet une bonne évaluation des étages distaux du tarse, mais le calcanéum est superposé au talus et à la portion distale du tibia.

La présence d’une ligne radiotransparente entre le tibia et la malléole latérale est physiologique.

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