Thrombo-embolie aortique non cardiogénique - Le Point Vétérinaire n° 243 du 01/03/2004
Le Point Vétérinaire n° 243 du 01/03/2004

AFFECTION CARDIOVASCULAIRE CHEZ LE CHAT

Pratiquer

CAS CLINIQUE

Auteur(s) : Stéphanie Hamon

Fonctions : 30, avenue Jean Jaurès, Bât. B
94100 Saint-Maur-des-Fossés

Chez le chat, la majorité des thrombo-embolies aortiques (TEA) sont dues à des cardiomyopathies, mais d’autres origines sont possibles. Ce cas décrit une cause marginale de TEA féline.

Une chatte européenne âgée de quatorze ans est présentée à la consultation des urgences pour une paralysie survenue brutalement.

Cas clinique

1. Anamnèse et commémoratifs

La chatte n’a jamais été vaccinée ni vermifugée. Elle vit en appartement et n’a jamais été testée pour les virus FeLV ou FIV.

Sa propriétaire l’a retrouvée paralysée brutalement, après l’avoir entendue crier.

2. Examen clinique

Les muqueuses sont roses. La température corporelle est de 34,5 °C.

Une dyspnée restrictive est accompagnée d’une discrète discordance intermittente.

L’auscultation cardiaque semble assourdie.

L’animal semble souffrir (PHOTO 1). Il présente une paralysie des postérieurs. La proprioception et les réactions posturales sont absentes, mais la sensibilité profonde est conservée. Les réflexes patellaire et tibial crânial sont légèrement diminués. Une absence de pouls fémoral bilatérale, une froideur des extrémités et une extériorisation et une cyanose des griffes (PHOTOS 2A et 2B) sont en outre constatées. La palpation des muscles gastrocnémiens est très douloureuse.

3. Hypothèses diagnostiques

La lésion de type motoneurone périphérique postérieur d’apparition brutale, associée à une absence de pouls fémoral, oriente en priorité vers une thrombo-embolie aortique. En effet, d’autres hypothèses telles qu’une hernie discale, une embolie fibro-cartilagineuse, une lésion traumatique, tumorale ou inflammatoire, ne s’accompagneraient pas d’une absence de pouls fémoral et d’une froideur des extrémités.

La chatte présente en outre une dyspnée restrictive, une légère discordance et une auscultation cardiaque modifiée qui peuvent être compatibles avec : une thrombo-embolie pulmonaire ; une tumeur pulmonaire ; une bronchopneumonie ; une atélectasie ou une torsion de lobe pulmonaire ; un épanchement pleural ; un pneumothorax ; une hernie diaphragmatique.

4. Examens complémentaires

• En première intention, des clichés radiographiques du thorax sont effectués (PHOTO 3). Ils révèlent un léger épanchement pleural, mais surtout une lésion pulmonaire. Une densification alvéolaire du lobe moyen droit est observée, avec une impression d’augmentation de son volume (contours bombés). Cette image peut être expliquée par une thrombo-embolie (les clichés radiographiques lors de thrombo-embolie peuvent : être normaux, présenter une opacification alvéolaire ou une hyperclarté du champ pulmonaire, ou encore montrer l’arrêt brutal d’un vaisseau). Cet aspect du lobe moyen peut aussi, et plus probablement, être celui d’une tumeur pulmonaire primitive, en raison de l’augmentation de sa taille.

• Une prise de sang est effectuée afin de mesurer la concentration sérique de la créatine-kinase (CK) qui augmente fortement lors de thrombo-embolie aortique. Elle est ici de l’ordre de 150 000 UI, ce qui est quasiment pathognomonique d’une thrombo-embolie.

• Une échographie abdominale associée à un Doppler couleur est réalisée. Un arrêt partiel du flux est observé dans une portion de l’aorte distale, ce qui traduit l’existence d’un thrombus (PHOTO 4).

Il s’agit donc d’une thrombo-embolie périphérique associée à une lésion pulmonaire.

Les thrombo-embolies aortiques chez le chat sont généralement dues à un dysfonctionnement cardiaque, et plus précisément à des cardiomyopathies hypertrophiques.

• Un électrocardiogramme (ECG) et une échocardiographie sont donc effectués, malgré une auscultation cardiaque normale. L’ECG ne révèle aucune anomalie : le rythme est régulier et sinusal.

Les conclusions de l’échocardiographie sont :

- une infiltration myocardique (inflammatoire ou tumorale) (PHOTO 5

- une hypocontractilité secondaire (fraction de raccourcissement = 34 %) 

- une endocardiose mitrale de stade 2 ;

- une masse pulmonaire probablement tumorale.

La thrombo-embolie aortique n’est donc pas consécutive à une cardiomyopathie hypertrophique. En revanche, il existe effectivement une cardiomyopathie, puisqu’une altération du muscle cardiaque est observée.

Une cytoponction de la masse pulmonaire est réalisée lors de l’échographie, une population cellulaire atypique évoque un carcinome pulmonaire.

5. Diagnostic

Trois hypothèses sont envisageables :

- le carcinome pulmonaire a entraîné un remaniement cardiaque à l’origine de la thrombo-embolie ;

- le carcinome pulmonaire est lui-même à l’origine de la thrombo-embolie (avec formation d’un thrombus dans l’aorte ou dans le cœur) ;

- la thrombo-embolie n’a aucun lien avec le carcinome pulmonaire, mais elle est provoquée par une fuite d’antithrombine III, consécutive à une protéinurie.

6. Traitement

Un traitement est entrepris à base d’anticoagulants, et plus précisément d’héparine(1). Des ampoules de Fraxiparine®(1) (héparine de faible poids moléculaire) sont administrées par voie sous-cutanée, à la dose de 350 UI/kg [4] deux fois par jour.

La flunarizine(1) (Sibélium®) permet d’améliorer la circulation collatérale  elle est administrée par voie orale à la dose de 0,5 mg/kg matin et soir.

7. Évolution et suivi

La chatte reste hospitalisée trois jours au cours desquels une récupération partielle du membre postérieur droit est notée, sans évolution du postérieur gauche.

Pendant cette période, la kaliémie et la réserve alcaline (HCO3-) sont dosées régulièrement afin d’évaluer l’étendue des lésions de reperfusion. L’hypoxie cellulaire musculaire conduit en effet à une augmentation des déchets intracellulaires, qui sont relargués dans la circulation générale au moment de la reperfusion des tissus. Un métabolisme anaérobie conduit en outre à une acidose. La kaliémie se maintient dans les normes et une légère acidose est corrigée par l’intermédiaire de la perfusion.

En revanche, l’état général de la chatte se dégrade et les difficultés respiratoires s’amplifient.

8. Pronostic

Le pronostic de la thrombo-embolie est toujours réservé et est ici assombri par la présence d’une tumeur pulmonaire. L’euthanasie de l’animal est décidée.

9. Autopsie

Aucune anomalie cardiaque n’est retrouvée lors de l’examen nécropsique et le thrombus n’est pas visualisé (l’autopsie a été effectuée quelques jours après la mort de l’animal). Une nécrose musculaire postischémique est en revanche notée, compatible avec la thrombo-embolie. La tumeur pulmonaire est confirmée, il s’agit d’un carcinome épidermoïde.

Les reins sont normaux, ce qui permet d’écarter l’hypothèse d’une protéinurie à l’origine d’une fuite d’antithrombine III.

Discussion

1. Épidémiologie

La thrombo-embolie aortique est beaucoup plus souvent décrite chez le chat que chez le chien. Il semble qu’elle affecte majoritairement les mâles (environ 70 % des cas) en raison de leur atteinte préférentielle par les cardiomyopathies hypertrophiques (CMH), sans prédisposition de race [8]. La moyenne d’âge des animaux atteints est d’environ huitans [8].

2. Étiologie

90 % des thrombo-embolies aortiques félines sont secondaires à des cardiomyopathies (stricto sensu ou cardiopathie secondaire à une hyperthyroïdie ou à une hypertension artérielle) et 90 % des cardiopathies acquises du chat sont des CMH [7, 8], d’où l’originalité de ce cas.

Une origine pulmonaire stricte est ici envisageable, même si elle a rarement été décrite dans la littérature [5, 8]. Chez l’homme, il semblerait qu’une thrombocytose paranéoplasique soit fréquemment associée à des tumeurs des poumons, du pancréas, du tube digestif et des ovaires. Même si la relation de cause à effet n’est pas réellement prouvée, les patients atteints de ce type de cancer présentent fréquemment une thrombo-embolie. Aucune numération-formule sanguine n’a toutefois été réalisée dans le cas décrit.

L’hypothèse d’une lésion cardiaque secondaire à la tumeur pulmonaire est discutable car il ne s’agit pas d’une réelle cardiomyopathie.

3. Pathogénie

Deux étapes se succèdent dans la pathogénie de la thrombo-embolie [11] : la thrombose et l’embolisation du thrombus formé.

• La thrombose résulte de trois facteurs :

- une altération du tissu endocardique qui expose le collagène sous-endothélial. Celui-ci induit l’adhésion plaquettaire et active la voie intrinsèque de la coagulation plasmatique ;

- une perturbation de l’hémodynamique intracardiaque (stase ou turbulences) ;

- une modification de la coagulation sanguine (or les plaquettes du chat sont naturellement plus réactives car plus volumineuses que celles de nombreuses autres espèces. Elles sont en outre plus sensibles à l’action pro-agrégante de la sérotonine).

• Dans un second temps, le thrombus s’embolise dans la circulation, mais les symptômes de la neuromyopathie ischémique ne résultent pas uniquement de la présence de cet embole. Des expériences ont en effet révélé que la seule ligature de l’aorte distale du chat ne reproduit pas le tableau clinique [7]. En particulier, aucune paralysie n’est observée et les membres restent chauds, ce qui est dû à la mise en place d’une circulation sanguine collatérale. Des médiateurs vaso-actifs sont libérés par l’embole aortique : la sérotonine relarguée par les vésicules plaquettaires et le thromboxane A2 produit par les plaquettes activées. Ces deux substances provoquent une nouvelle agrégation plaquettaire et, surtout, une sévère vasoconstriction collatérale. L’action mécanique d’obstruction par le thrombus n’est donc pas seule responsable de la symptomatologie de cette affection.

4. Sémiologie

La thrombo-embolie aortique provoque une paraparésie, voire une paralysie postérieure, brutale, algique, accompagnée d’une absence de pouls fémoral avec une cyanose des extrémités et une froideur des membres. Elle respecte la règle anglo-saxonne des “cinq P” :

- pulselessness : déficit pulsatile des artères fémorales ;

- pain : douleur, notamment à la palpation des muscles cruraux ;

- pallor : cyanose des extrémités digitées ;

- polar : froideur des membres ;

- paresis : paraparésie à paralysie [1].

Ce tableau clinique peut s’accompagner de signes cardiorespiratoires tels qu’un souffle, un bruit de galop, une arythmie, ou une dyspnée et une discordance (lors de thrombo-embolie pulmonaire simultanée ou de décompensation cardiaque) TABLEAU “Symptômes rencontrés lors de thrombo-embolie” [3].

5. Diagnostic

Le diagnostic de la thrombo-embolie aortique est avant tout clinique. Une paralysie postérieure brutale avec absence de pouls fémoral et froideur des extrémités est ainsi très évocatrice de thrombo-embolie.

D’autres indices, comme une augmentation forte et brutale de la CK, orientent vers cette affection.

Le diagnostic de certitude nécessite toutefois des examens complémentaires d’imagerie : angiographie, échographie ou échocardiographie.

L’aorto-artériographie est une angiographie sélective qui consiste à marquer un territoire artériel délimité à l’aide d’un produit de contraste. Elle nécessite la mise en place d’un cathéter dans l’aorte abdominale, via l’artère carotide commune, le tronc brachio-céphalique et l’aorte thoracique [3]. L’injection de 8 ml de Telebrix® permet d’effectuer des clichés radiographiques avec préparation. Un arrêt net et cupuliforme du produit de contraste dans une artère est en faveur d’une embolie. Cet examen nécessite une anesthésie générale et une technicité du praticien, ce qui rend sa réalisation difficile. Une alternative peut être une angiographie non sélective par voie veineuse : un volume plus élevé de produit de contraste est injecté dans la veine jugulaire et des clichés radiographiques sont réalisés sériés dans les 2 à 20 secondes qui suivent, ce qui est peu aisé.

D’autres méthodes plus récentes et moins invasives sont préférées à l’heure actuelle, telles que l’échographie de l’aorte abdominale ou l’échocardiographie associée au Doppler couleur.

L’échographie abdominale permet de visualiser le thrombus sous forme d’une image échogène qui obstrue la lumière aortique. L’innocuité de cet examen est appréciable, mais l’expérience du manipulateur est nécessaire.

Une échocardiographie peut mettre en évidence un thrombus intracavitaire qui permet d’expliquer, par embolisation dans la grande circulation, la présence d’un thrombus aortique. La majorité des thrombi se forment dans l’atrium gauche [6].

Un électrocardiogramme peut également être réalisé, mais il ne permet pas d’affirmer l’existence d’une thrombo-embolie. Il témoigne seulement des modifications cardiaques (élargissement possible de l’onde P qui atteste d’une dilatation auriculaire gauche, extrasystoles qui accompagnent une cardiomyopathie hypertrophique, etc.).

6. Traitement et prophylaxie

Le traitement comporte deux volets : un volet médical et un autre chirurgical. Le traitement médical est le plus employé. Il a plusieurs buts :

- la lyse du thrombus ;

- la mise en place d’une circulation collatérale ;

- la prévention de nouveaux thrombi.

Les thrombolytiques

La streptokinase(1) (Streptase®, Kabikinase®) et l’urokinase(1) (Actosolv Urokinase®, Urokinase Choay®) sont les principaux thrombolytiques. Cependant, ce sont des molécules à haut risque.

Let-PA(2) (Actilyse®) (activateurduplasminogène tissulaire) est un activateur préférentiel du plasminogène lié à la fibrine du thrombus. Cette substance paraît donc plus intéressante, mais elle est très onéreuse. En outre, une mortalité de 50 % est rapportée [11] et les risques de récidive sont de 50 %.

Les agents favorisant la circulation collatérale

La flunarizine(1) (Sibélium®) est un inhibiteur calcique préconisé pour la lutte contre le spasme vasculaire engendré par les amines vasoactives. À la posologie de 0,5 à 1 mg/kg, il semble qu’elle favorise la vasodilatation régionale et que son action soit bénéfique lors d’administration précoce. Aucune étude n’a encore toutefois démontré sa réelle efficacité.

L’acépromazine (Calmivet®) présente également des propriétés vasodilatatrices, à la dose de 0,3 mg/kg. Cette substance est toutefois également responsable d’une hypotension, qui peut être gênante chez des animaux déjà atteints, pour la plupart, de cardiopathies sous-jacentes [1].

La balnéothérapie par massages et douches tièdes des membres se montre également efficace.

Les anticoagulants

L’héparine(1) est un mélange hétérogène de glycosaminoglycanes polysulfatés. Elle ne provoque pas la lyse du thrombus mais en limite la croissance et prévient la formation de nouveaux caillots. Elle potentialise l’effet de l’antithrombine III, qui augmente la neutralisation de certains facteurs activés, comme le facteur Xa et le facteur IIa (thrombine). Elle exerce une action anti-coagulante rapide, mais sa demi-vie est courte. De nombreuses posologies sont proposées : une première dose de 100 UI/kg est injectée en bolus intraveineux, suivie de 100 UI/kg par voie sous-cutanée toutes les 8heures [8, 9]. Des effets secondaires (saignements) peuvent être redoutés puisque l’héparine(1) déprime de façon non spécifique le facteur X. Il convient donc de surveiller régulièrement le temps de céphaline-kaolin, dont la valeur doit se maintenir entre une fois et demi et deux fois et demi celle du témoin.

Les héparines(1) standards (HS) ont un poids moléculaire de 15 000 daltons. Les héparines(1) de bas poids moléculaire (HBPM), comme, la nadroparine calcique(1) (Fraxiparine®(1)), sont constituées des fractions polysaccharidiques de l’héparine(1) standard. Leur poids moléculaire avoisine les 5 000 daltons.

Les HS sont suffisamment grandes pour former des complexes trimoléculaires avec l’antithrombine III et un facteur activé. Cependant, in vivo, ce complexe, trop encombrant, ne peut accéder qu’au facteur IIa (qui est libre dans le sang) et non au facteur Xa, fixé sur le thrombus.

Les HBPM agissent différemment pour neutraliser les facteurs activés. Elles modifient la conformation de l’antithrombine III, ce qui rend les sites d’attachement aux facteurs activés plus accessibles. Elles inhibent donc le facteur Xa, mais elles sont quasiment inactives sur le facteur IIa.

Par conséquent, plus le poids moléculaire de l’héparine(1) est élevé, plus l’action anti-IIa est importante. Inversement, plus il est faible, plus l’action anti-Xa augmente [2].

Les HBPM présentent d’autres différences par rapport aux HS. Leur capacité de liaison aux éléments plasmatiques, aux cellules endothéliales et aux plaquettes est faible : leur biodisponibilité est donc beaucoup plus forte que celle des HS. Leur vitesse d’élimination est en outre proportionnelle au poids moléculaire. Ainsi, les HBPM ont une demi-vie supérieure à celle des HS (deux à quatre fois plus longue). La réponse au traitement semble aussi beaucoup plus prévisible avec les HBPM, ce qui implique un suivi allégé et des effets secondaires moindres.

Pour toutes ces raisons, elles semblent constituer une alternative intéressante aux HS.

Les anti-agrégants plaquettaires

Le chef de file des anti-agrégants plaquettaires est l’acide acétylsalicylique (Aspirine®(1), Vétalgine®). Il inhibe de façon irréversible la cyclo-oxygénase plaquettaire qui produit le thromboxane-A2, et de façon réversible la cyclo-oxygénase endothéliale qui produit une prostacycline à effet anti-agrégant plaquettaire. Son deuxième effet est néfaste, mais il est réversible en 24 heures. Ainsi, une administration à la dose de 25 mg/kg/j tous les trois jours permet une inhibition totale du thromboxane-A2 et une activité partielle de la prostacycline endothéliale [1, 12]. Cependant, de nombreuses récidives de thrombo-embolie sont observées malgré une utilisation préventive d’acide acétylsalicylique [11].

Gestion de la douleur

La thrombo-embolie aortique s’accompagne d’une douleur vive. Il convient donc d’administrer des antalgiques.

L’Aspirine®(1) peut être employée chez le chat à la dose de 80 mg toutes les 48 heures [10].

Les opioïdes semblent cependant plus efficaces et dotés de moins d’effets secondaires. Ils peuvent être administrés chez les chats atteints de cardiopathie car ils influencent peu la contractilité, la précharge et la postcharge. Le butorphanol(2) peut être administré en cas de douleur faible, à la dose de 0,2 à 0,4 mg/kg. Lors de douleur plus intense, il convient de privilégier l’oxymorphone(3) à la dose de 0,05 mg/kg. Ces deux molécules peuvent être administrées par voie sous-cutanée, intramusculaire ou intraveineuse, toutes les quatre heures. Il est également possible d’utiliser des patchs de fentanyl(1).

Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical consiste en une thrombolectomie à la sonde de Fogarty (cathéter à ballonnet). Il reste peu employé, car il occasionne de nombreuses complications per- et postopératoires et entraîne souvent de la mort de l’animal. En effet, outre les risques encourus lors de l’anesthésie d’un chat cardiaque, des accidents dus à la reperfusion tissulaire brutale se produisent (relargage brutal de toxines métaboliques dans la circulation, en particulier de potassium).

Ce traitement, s’il est choisi, doit être précoce.

7. Pronostic

Le pronostic d’une thrombo-embolie reste sombre. La douleur est extrême. Une reperméabilisation partielle ou totale de l’aorte peut se produire avec une amélioration clinique en deux à six semaines [a, 3]. Une faible proportion de chats retrouvent toutefois leur état normal et des séquelles sont possibles : plantigradie, parésie, etc. Certains chats ne guérissent pas et présentent une nécrose et une gangrène [11]. Une amputation est alors possible si la lésion est unilatérale.

Le pronostic est également à moduler en fonction de l’atteinte cardiaque, qui ne peut que l’aggraver.

Une étude montre une durée moyenne de survie de 11,5 mois, avec des récidives dans 50 % des cas, malgré une prévention à l’aide d’acide acétylsalicylique [8].

Ce cas clinique décrit une cause marginale de thrombo-embolie aortique féline. Quelle qu’en soit l’origine, cette affection reste difficile à combattre car les molécules disponibles sont peu efficaces ou dotées d’effets secondaires non négligeables.

  • (1) Médicament à usage humain.

  • (2) Médicament réservé à l’usage hospitalier.

  • (3) Médicament réservé à l’usage hospitalier non disponible en France.

Points forts

• La thrombo-embolie aortique répond à la règle des “cinq P” : pulselessness, pallor, polar, pain, paresis.

• 90 % des thrombo-embolies félines sont consécutives à des cardiomyopathies.

• Une tumeur pulmonaire pourrait être à l’origine d’une thrombo-embolie.

• Il existe peu de possibilités thérapeutiques face à une thrombo-embolie. Les héparines de bas poids moléculaire semblent une alternative intéressante aux héparines standard.

À lire également

a -  De Madron E. Thrombo-embolie de l’aorte distale ayant pour origine un thrombus intra-auriculaire chez un chat atteint de cardiomyopathie hypertrophique. L’Action Vét. 1990 ; 1150 : 31-33.

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