Le sexage tardif du fœtus chez la vache - Le Point Vétérinaire n° 241 du 01/12/2003
Le Point Vétérinaire n° 241 du 01/12/2003

ÉCHOGRAPHIE EN CLIENTÈLE RURALE

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CONDUITE À TENIR

Auteur(s) : Damien Lebastard

Fonctions : 10, place Général De Gaulle,
49340 Vezins

Le sexage par échographie entre 70 et 120 jours de gestation peut facilement être intégré aux suivis de reproduction, ou entrer dans le cadre d’une « certification de la gestation ».

Une technique « tardive » de sexage échographique du fœtus bovin par visualisation des organes génitaux externes entre 70 et 120 jours de gestation a été décrite à partir du milieu des années 1980 aux États-Unis. Appliquée par un opérateur entraîné, la technique présente une exactitude de l’ordre de 85 à 90 % (voir le tableau 1« Diagnostic du sexe du fœtus bovin par échographie entre 73 et 120 jours »).

Par rapport au sexage précoce, réalisé entre 55 et 65 jours de gestation, fondé sur la position relative du tubercule génital, la technique tardive peut paraître plus abordable, au moins au début, pour un praticien en clientèle courante. La fenêtre d’observation est plus étendue, permettant d’intégrer facilement le sexage dans un service de suivi échographique gynécologique. Les structures observées (pénis, scrotum, trayon) sont nettement plus importantes à 90-100 jours qu’à 55-60 jours.

Toutefois, les deux méthodes peuvent être avantageusement combinées dans le cadre d’un service « sexage » régulier.

Organes génitaux externes des fœtus bovins entre 55 et 90 jours

Les éléments recherchés lors du sexage sont le pénis, le scrotum et le trayon (voir la FIGURE « Développement des organes génitaux externes »). Le pénis et le scrotum étant plus faciles à identifier en raison de leur taille, il convient de les rechercher en priorité.

Il est préférable d’attendre 90 jours pour pratiquer le sexage tardif. En effet, entre 60 et 90 jours de gestation, le diamètre du scrotum est multiplié par 2,5 et, entre 60 et 120 jours, il est multiplié par 4 (voir le tableau 2« Taille moyenne approximative de différentes structures fœtales entre 60 et 120 jours de gestation »).

1. Organes mâles

Le pénis se présente comme un renflement jouxtant caudalement la base du cordon ombilical. Le scrotum se trouve en partie médiane, en région pelvienne. Il apparaît sous la forme d’une masse bilobée.

Chez un fœtus de 80 jours (voir la figure « Développement des organes génitaux externes »), les diamètres transversaux du pénis et du cordon ombilical ont un rapport d’environ 1 pour 2.

Le cordon ombilical formant des circonvolutions, sa coupe à l’échographie peut parfois être confondue avec celle du scrotum (surtout vers trois ou quatre mois de gestation, lorsque leurs diamètres en coupe sont assez voisins). La coupe de queue peut aussi être confondue avec la coupe du scrotum.

2. Organes femelles

Les trayons apparaissent en partie abdominale caudale et se présentent sous la forme de traits très échogènes. Ils sont nettement plus petits que les organes génitaux externes mâles.

Différents plans de coupe utilisables

Trois coupes de base sont intéressantes lors du sexage tardif (voir la FIGURE « Représentation schématique et désignation des plans de coupe »), les coupes transversale et sagittale étant les plus utiles.

La coupe transversale permet de visualiser le scrotum ou les trayons (qui apparaissent groupés par deux). Quand elle est pratiquée après orientation du fœtus, en région abdominale postérieure ou pelvienne, la coupe sagittale permet de visualiser le scrotum et surtout le pénis, qui apparaissent comme un renflement échogène situé juste en arrière de l’attache abdominale du cordon ombilical. La coupe horizontale permet en théorie, le repérage du pénis, du scrotum et des trayons mais n’est pas toujours simple à interpréter (nécessité de jouer sur l’échelle des gris).

Souvent, les coupes observées sont intermédiaires entre ces trois coupes.

Conditions matérielles de réalisation du sexage

1. Préparation de l’animal

La contention doit être efficace : le temps de réalisation étant souvent plus long que pour un simple diagnostic de gestation, l’opérateur ne doit pas avoir à se soucier de sa sécurité, de façon à pouvoir se concentrer sur l’image.

La vidange du rectum doit être complète, car une clarté maximale de l’image est recherchée. Si l’animal est stressé (rectum tendu), une anesthésie épidurale à l’aide de xylocaïne peut être éventuellement réalisée.

2. Réglage de l’échographe

Un échographe avec de bonnes qualités de définition et de résolution, équipé d’une sonde linéaire, microconvexe ou sectorielle, peut être utilisé. La fréquence de 5 MHz est celle qui offre le meilleur compromis entre le pouvoir de pénétration et la résolution. Les sondes sectorielles de 3,5 MHz peuvent être utilisées, mais sont plus adaptées a priori à une technique de sexage par voie transabdominale, à des stades plus avancés.

L’opérateur doit bien connaître les réglages optimaux de son appareil (résolution, puissance, réglage des gris, de la profondeur, zooms), et travailler le plus souvent possible aux mêmes stades de gestation avec les mêmes réglages.

Pour un sexage entre 75 et 120 jours, il semble intéressant :

- de régler la profondeur d’exploration pour visualiser, si possible, la totalité du fœtus sur l’écran (travailler à des profondeurs comprises entre 120 et 150 mm) ;

- d’augmenter la puissance du faisceau d’ultrasons (par rapport au diagnostic de gestation simple), pour augmenter l’échogénicité naturelle des structures fœtales recherchées.

Les organes génitaux externes seront recherchés comme des protubérances échogènes sur les coupes échographiques adaptées.

Un diagnostic de sexe peut être réalisé en vingt secondes ou ne pas l’être au bout de dix minutes. Une moyenne de trois à quatre minutes est habituellement nécessaire.

Méthode. Séquences d’examens

La méthode d’examen est la suivante :

1 Repérer le plan de coupe dans lequel on va travailler.

2 Le plan de coupe étant visualisé, orienter le fœtus (repérer les extrémités crâniale et caudale, les faces dorsale et ventrale).

3 Repérer, au sein de la coupe, quelques structures fœtales « clés » : tête, cordon ombilical en coupe sagittale, membres postérieurs, cordon ombilical et, éventuellement, vessie en coupe transversale.

4 Rechercher en priorité le pénis et le scrotum.

Sur une coupe transversale au niveau du bassin, le scrotum apparaît comme une masse bilobée, assez échogène, faisant saillie entre les membres postérieurs (PHOTO 1).

Le pénis se présente comme un petit renflement échogène, à la base de l’attache abdominale du cordon ombilical, bien visualisable en coupe sagittale (PHOTO 2).

Les testicules peuvent être repérés (après 100 jours de gestation) sous la forme de deux petites zones rondes non échogènes à l’intérieur du sac scrotal (échogène).

Assez souvent, l’apex du scrotum apparaît beaucoup plus échogène que le reste du sac scrotal (bourrelet de peau ?), ce qui autorise une différenciation rapide avec le cordon ombilical.

Pour faire la différence entre le scrotum et le cordon ombilical, l’idéal est de pouvoir observer ces deux structures sur la même image, ce qui est plus aisé en coupe sagittale (PHOTOS 2 et PHOTOS 3).

Le scrotum peut parfois, en coupe transversale, être confondu avec la queue du fœtus.

Si les recherches du pénis et du scrotum (idéalement sur deux coupes différentes) s’avèrent infructueuses, il convient alors de rechercher d’éventuels trayons (si on ne les a pas déjà aperçus lors de la recherche des organes génitaux mâles). En coupe transversale, ils apparaissent comme deux petits traits très échogènes, rapprochés, en relief par rapport à l’abdomen (PHOTO 4). En coupe horizontale, les trayons apparaissent comme quatre points échogènes, disposés en trapèze (beaucoup plus proéminents et échogènes chez le fœtus femelle).

La fiabilité du diagnostic entre 75 et 120 jours est résumée dans le tableau « Fiabilité du sexage échographique entre 75 et 120 jours de gestation ».

Le sexage en clientèle

1. Entraînement au sexage

L’entraînement au sexage peut se faire lors de suivis de fécondité. Le praticien peut affecter son diagnostic d’un coefficient de fiabilité (+ / ++ / +++), consigner cette information sur un classeur de suivi et vérifier ainsi son diagnostic la saison suivante.

2. Certification de la gestation

En cas de vente de reproductrices, si le sexage du fœtus permet d’apporter une plus-value à la vente, il devra nécessairement être certifié. Dans ce cas, l’engagement du praticien devra alors reposer sur une certitude. Un forfait de deux sexages entre 15 et 20 jours d’intervalle chez le même animal serait en mesure d’apporter une bonne fiabilité (premier examen entre 75 et 90 jours, second examen entre 100 et 120 jours si le premier ne permet pas de conclure).

3. Suivi de fécondité

Le sexage peut être intégré au suivi de fécondité ou à un suivi échographique plus restreint.

Un premier examen des reproductrices est pratiqué entre 30 et 60 jours de gestation. L’opérateur ne se concentre alors que sur le diagnostic de gestation et sur la recherche d’éventuels jumeaux. Le second examen peut être réalisé entre 75 et 120 jours de gestation. Il permet la confirmation de la gestation (absence de mortalité embryonnaire) et un sexage éventuel.

Le sexage est le plus souvent limité par l’éleveur à certaines catégories d’animaux : reproductrices à forte valeur génétique, génisses destinées à la vente ou à l’exportation, receveuses lors de transplantation embryonnaire, etc.

Intérêts et limites de la pratique du sexage tardif en clientèle

→ Intérêts

• Quand la valeur génétique du fœtusestimportante, la connaissance du sexe in utero peut apporter une plus-value lors de transactions commerciales (vente de reproductrices).

• La connaissance du sexe, avant le vêlage, peut parfois aussi conduire l’éleveur à renforcer sa surveillance au moment du vêlage (par exemple, femelle de bonne valeur génétique).

• L’avenir proche permettra peut-être la mise en place de semences ou d’embryons déjà sexés.

• Limites

• La visualisation du sexe est parfois difficile (fœtus difficilement accessible, basculé dans la cavité abdominale, mauvaise position fœtale).

• Les élevages susceptibles d’être intéressés par ce service proposé par le praticien sont assez souvent déjà entourés techniquement (partenariat avec le centre d’insémination artificielle).

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