Le syndrome mycoplasmique caprin - La Semaine Vétérinaire n° 239 du 01/10/2003
La Semaine Vétérinaire n° 239 du 01/10/2003

PATHOLOGIE INFECTIEUSE DES PETITS RUMINANTS

Se former

COURS

Auteur(s) : Pascale Mercier*, Dominique Bergonier**

Fonctions :
*AFSSA Niort
60 rue de Pied-de-Fond
BP 3081, 79012 Niort Cedex
**Département élevage et
produits, UMR INRA-ENVT 959,
Physiopathologie infectieuse
et parasitaire des ruminants,
ENVT,
23, chemin des Capelles
31076 Toulouse Cedex

Les mycoplasmoses caprines se manifestent par des troubles mammaires, articulaires, pulmonaires et oculaires. Elles peuvent revêtir une importance économique considérable, en particulier dans les élevages laitiers intensifs.

Les mycoplasmoses de la chèvre sont des maladies contagieuses provoquées par des micro-organismes du genre Mycoplasma, regroupant plusieurs espèces, que l’on rencontre également chez les ovins. Il existe cependant des particularités épidémiocliniques propres aux caprins.

Les syndromes mycoplasmiques ont essentiellement une importance économique (diminution de la production laitière, pertes par mortalité ou par réforme, dépenses liées au traitement) et dans certains cas, heureusement rares, ils apparaissent comme une véritable catastrophe pour les élevages atteints (voir l’ENCADRÉ “L’avis du praticien”). Ils font partie des maladies de la liste B de l’OIE (sous la dénomination générale d’“agalactie contagieuse”(1)) et des maladies contrôlées dans le cadre des échanges intra-communautaires de petits ruminants (arrêté du 17 maîtrise 1994).

Étiologie

Les agents responsables du syndrome mycoplasmique peuvent être répartis en deux groupes.

• D’une part, Mycoplasma agalactiae (Ma) ;

• D’autre part, les mycoplasmes du “groupe mycoides ”:

Mycoplasma mycoides subsp. mycoides biotype LC (MmmLC) ;

Mycoplasma capricolum subsp. capricolum (Mcc) ;

Mycoplasma putrefaciens (Mp).

Cependant, M. putrefaciens peut être considéré comme un germe dont le pouvoir pathogène est intermédiaire entre les mycoplasmes majeurs (Ma, MmmLC et Mcc) et les mycoplasmes opportunistes (M. arginini) [1].

Les mycoplasmes rencontrés chez la chèvre sont communs aux deux espèces de petits ruminants, mais leur fréquence est différente. Alors que M. agalactiae est isolé préférentiellement chez les ovins, ce sont les mycoplasmes du “groupe mycoides” qui sont isolés le plus souvent chez les caprins (voir le TABLEAU “Mycoplasmes isolés à l’AFSSA Niort de 1987 à 1997” ). L’enzootie d’agalactie contagieuse due à M.agalactiae chez les caprins de Savoie et de Haute-Savoie (voir l’ENCADRÉ “Le programme de lutte contre l’agalactie contagieuse caprine en Savoie”) fait figure d’exception.

À l’instar de ce qui a été mis en évidence pour d’autres mycoplasmes (M. agalactiae et M. bovis), il existe une variabilité antigénique pour les mycoplasmes du “groupe mycoides” [11].

Aspects cliniques

Les quatre espèces de mycoplasmes provoquent des symptômes comparables. Les mycoplasmoses se caractérisent par l’existence de plusieurs symptômes, diversement associés dans un troupeau et au cours du temps, certains pouvant être absents. Il s’agit d’une maladie protéiforme qui peut se traduire par des signes cliniques très importants ou, à l’inverse, passer complètement inaperçue.

Trois localisations principales sont distinguées : mamelle, articulations et poumons. Les différents symptômes peuvent être précédés ou accompagnés d’un syndrome fébrile [1].

1. Chez les adultes

Chez les adultes, le syndrome mycoplasmique se manifeste par :

- des symptômes mammaires, généralement en début de lactation [5] : diminution ou arrêt de la production laitière, mammites avec du lait plus ou moins modifié, sans signes caractéristiques ;

- des symptômes articulaires : (poly)arthrite sérofibrineuse, se traduisant par des boiteries ou une incapacité à se déplacer ;

- des symptômes pulmonaires : troubles respiratoires avec des lésions de pleuropneumonie sérofibrineuse ;

- des symptômes oculaires : kératoconjonctivite (opacification de la cornée), rare chez les caprins.

Des avortements peuvent également se produire [14, 15].

2. Chez les jeunes

Chez les jeunes, on peut observer des symptômes articulaires (polyarthrite chez les chevreaux de quinze jours à trois semaines) et des symptômes pulmonaires. La mortalité brutale par septicémie est également possible.

Ces différents symptômes s’expriment plus ou moins suivant l’espèce de mycoplasme en cause (voir le TABLEAU “Caractéristiques cliniques des mycoplasmoses caprines” ). En outre, les associations de plusieurs mycoplasmes ne sont pas exceptionnelles chez les caprins, soit dans un même élevage, soit chez un même animal malade [1, 5, 8, 10].

L’expression clinique de la maladie est généralement plus sévère chez les caprins que chez les ovins [1].

Épidémiologie

1. Répartition géographique et incidence

Deux zones peuvent être distinguées en France :

- les Alpes, zone d’enzootie “historique” due à M. agalactiae, avec des flambées épizootiques périodiques, actuellement en cours d’assainissement (voir l’ENCADRÉ “Le programme de lutte contre l’agalactie contagieuse caprine en Savoie”) ;

- les autres bassins de production laitière caprine, où sont enregistrés des cas sporadiques, surtout liés à M. mycoides mycoides LC.

Ces dernières années, la fréquence des syndromes mycoplasmiques a semblé augmenter [1]. Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer ce phénomène : d’une part, une amélioration du dépistage ; d’autre part, les transferts d’animaux (reproducteurs) peuvent être à l’origine d’une dissémination des infections. Enfin, l’intensification de la production laitière caprine a probablement joué un rôle de révélateur, en créant des conditions favorables (animaux plus sensibles, conduite du troupeau plus délicate) à l’expression clinique.

Une enquête réalisée par l’AFSSA Niort [10] sur 448 laits de tank du Centre-Ouest a permis de situer l’importance des mycoplasmoses caprines dans cette zone de production (voir le TABLEAU “Les différentes espèces de mycoplasmes isolés sur les laits de tank” ) : la prévalence a été évaluée à 7 % (33 élevages positifs, c’est-à-dire présentant une excrétion de mycoplasmes par voie mammaire).

2. Évolution dans un troupeau

Dans un troupeau atteint, la maladie peut apparaître soudainement, sous la forme d’une “explosion” clinique, ou affecter successivement un nombre limité d’animaux, toutes les formes intermédiaires étant possibles. Cependant, il est fréquent de noter, a posteriori, que quelques cas cliniques frustes étaient survenus auparavant, voire au cours de la lactation précédente [1, 3]. L’évolution de la maladie est liée à l’existence de porteurs asymptomatiques.

Il existe deux types de facteurs favorisants pour l’apparition des signes cliniques [1] :

- ceux liés à l’animal : âge, sexe et stade physiologique agissent sur la sensibilité ;

- ceux liés au milieu : des stress divers (traite, alimentation, bâtiment, agrandissement de troupeau, pathologie associée) favorisent le déclenchement d’un épisode clinique [3, 8, 16].

La persistance clinique est généralement de l’ordre de plusieurs mois en l’absence d’intervention (abattage, antibiothérapie). La maladie récidive parfois lors de la lactation suivante, sur les mêmes animaux, ou sur d’autres, et peut persister pendant deux à quatre ans, voire plus [1].

La persistance microbiologique peut être mise en évidence par la recherche directe des mycoplasmes dans du lait de mélange. Une équipe israélienne a retrouvé MmmLC dans du lait de tank pendant deux années, y compris dans des troupeaux sans expression clinique apparente [12].

3. Sources de mycoplasmes et voies de pénétration

Les sources de mycoplasmes sont identiques à celles de l’agalactie contagieuse des ovins. Le portage auriculaire de mycoplasmes, parfois associé à la présence d’acariens, est cependant une caractéristique propre aux caprins [1, 2, 3, 5, 6, 7].

L’importance épidémiologique des mâles en tant que sources de mycoplasmes (transmission vénérienne) doit encore être précisée.

La voie mammaire peut être considérée comme la principale voie de contamination des femelles traites. Les autres voies possibles sont la voie orale (jeunes), la voie respiratoire et la voie oculaire. Elles sont favorisées par la promiscuité [1].

4. Modalités de la transmission [1]

La principale modalité de transmission est la transmission horizontale. Elle peut être :

- directe, à partir d’animaux excréteurs (malades ou asymptomatiques) pour les formes respiratoires ;

- indirecte : rôle prépondérant de la traite [3, 8], rôle plus discuté de vecteurs (acariens auriculaires).

La transmission verticale s’effectue essentiellement par la tétée [8]. La transmission in utero de la mère au fœtus est possible (avortements).

Les jeunes se contaminent généralement par voie orale, par ingestion de colostrum ou de lait infecté, et sont souvent les révélateurs d’une infection inapparente des mères.

L’infection d’élevages indemnes fait généralement suite à l’introduction d’animaux porteurs. La rapidité et l’intensité de la maladie dépendent du stade physiologique du troupeau et de l’efficacité des transmissions galactophore (traite) ou aérophore (confinement) [1].

Diagnostic

La maladie étant protéiforme, les données épidémiologiques et cliniques aboutissent en général à une suspicion (voir l’ENCADRÉ “Quand suspecter un syndrome mycoplasmique ?”). Par ailleurs, d’autres entités cliniques (AECV, pasteurelles, mammites ou arthrites bactériennes) peuvent induire des signes comparables. Le diagnostic étiologique est donc indispensable.

1. Diagnostic direct

Prélèvements

Les prélèvements varient selon les symptômes : lait (individuel ou de tank) prélevé aseptiquement (valable même en l’absence de symptômes mammaires) ; articulations (ou, pour les chevreaux, le membre entier) ; poumons ; écouvillonnages des culs-de-sac conjonctivaux (en cas de kératoconjonctivite) ou des conduits auditifs externes (dépistage des porteurs). L’écouvillon, en particulier lors de kératite, doit être placé dès sa réalisation dans un milieu de culture spécifique.

Les prélèvements doivent être conservés au froid positif et expédiés le plus rapidement possible à un laboratoire spécialisé.

Isolement

Tous les prélèvements sont mis en culture dans des milieux riches et sélectifs, liquide et solide(2). L’incubation est réalisée à 37° C, de préférence en atmosphère humide enrichie en CO2. La croissance apparaît en général au bout d’un à cinq jours [4].

Identification

L’identification repose sur l’aspect des colonies, observé à la loupe binoculaire (“œuf sur le plat”), leur vitesse de croissance, leurs caractères biochimiques et sur une analyse sérologique. Cette identification sérologique peut être réalisée par un test d’inhibition de croissance sur gélose en testant la souche à identifier avec des sérums hyperimmuns spécifiques obtenus chez des lapins (sérums polyclonaux) [13].

Tests d’immuno-adsorption sur filtre (MF dot)

Le principe de ce test réside dans la filtration de cultures au travers d’une membrane qui retient les cellules mycoplasmiques. Celles-ci sont ensuite identifiées au moyen d’antisérums polyclonaux hyperimmuns spécifiques. Ces réactions sont réalisables en deux à trois heures à partir de bouillons et peuvent détecter des mélanges. La spécificité de cette méthode est comparable à celle de l’analyse par inhibition de croissance. Les avantages de cette technique sont sa facilité, sa rapidité, sa standardisation et la possibilité de traiter simultanément un grand nombre d’échantillons. Ainsi, ces tests sont utilisables pour le diagnostic de routine, y compris dans des laboratoires non spécialisés [11].

Détection génomique (PCR)

La PCR constituerait la technique d’avenir. Elle doit cependant faire l’objet d’études complémentaires préalables avant d’être utilisée en routine. Différentes amorces sont disponibles pour le “groupe mycoides”, dont certaines seraient utilisables directement sur le lait (Nicholas, VLA, Wheybridge, communication personnelle).

2. Diagnostic indirect : sérologie

Au sein du “groupe mycoides”, il existe des relations antigéniques étroites, qui peuvent être à l’origine de réactions croisées [11]. Par ailleurs, il existe une hétérogénéité antigénique intraspécifique. Le choix des antigènes utilisés pour les kits est donc très important.

Actuellement, les différents kits existants font appel à des techniques ELISA, et ne permettent donc qu’un diagnostic de troupeau.

Méthodes de lutte

Les principes du traitement et de la prophylaxie des syndromes mycoplasmiques caprins sont comparables à ceux de l’agalactie contagieuse des ovins. Cependant, les plans de lutte doivent être adaptés en fonction de la situation épidémiologique.

1. Mesures offensives

En présence de mycoplasmose confirmée par des analyses de laboratoire, il convient de mettre en place un certain nombre de mesures.

• Traitement antibiotique de tous les malades par voie générale, et éventuellement par voie mammaire. Le traitement fait appel principalement à des antibiotiques de la famille des macrolides et doit être administré suffisamment longtemps (8 à 10 jours). Il devrait également être étendu à l’ensemble des animaux des lots dans lesquels des cas cliniques ont été observés ou à l’ensemble du troupeau (porteurs asymptomatiques), sans oublier les boucs. Le traitement vise avant tout à obtenir une guérison clinique.

• Traitement systématique au tarissement avec des spécialités contenant des macrolides (à raison d’une seringue par mamelle).

• Antibioprévention (voir l’ENCADRÉ “L’avis du praticien”).

• Réforme des animaux les plus atteints (non valeurs économiques).

• Instauration d’un ordre de traite : les animaux présumés sains, en particulier les primipares, seront traits en premier, les animaux infectés seront traits en dernier.

• Désinfection des trayons après la traite (post-trempage) avec les antiseptiques usuels.

• Séparation des futurs reproducteurs dès la naissance et distribution de colostrum thermisé (à 56 °C pendant vingt minutes).

• Vérification du matériel de traite (contrôle de la machine à traire, changement des manchons trayeurs) et amélioration des mesures générales d’hygiène de l’élevage (nettoyage et désinfection).

2. Mesures défensives

Pour un troupeau a priori indemne, il peut être recommandé, lors d’achat d’animaux, d’évaluer le statut sanitaire du troupeau du vendeur par une recherche de mycoplasme sur du lait de tank.

  • (1) Le syndrome mycoplasmique de la chèvre est parfois dénommé improprement “agalactie contagieuse”. Cette appellation, apparue à l’origine dans les régions méditerranéennes, devrait être réservée à la maladie provoquée par M. agalactiae.

  • (2)Des milieux prêts à l'emploi sont commercialisés.

Le programme de lutte contre l’agalactie contagieuse caprine en Savoie

En Haute-Savoie, puis en Savoie, la recrudescence des cas cliniques dus à M. agalactiae à partir de 1985 a montré l’urgence de la mise en place de mesures de contrôle afin de pouvoir, à long terme, envisager une éradication de la maladie. Le programme de lutte est largement inspiré de celui qui est en vigueur contre l’agalactie ovine dans les Pyrénées-Atlantiques (voir l’ARTICLE “L’agalactie contagieuse des ovins” dans le n° spécial “Pathologie ovine et caprine”, Le Point Vétérinaire 2003, p 52-57), avec quelques adaptations à l’espèce caprine (réactions sérologiques moins intenses, titres plus faibles, taille des troupeaux moins importante). Une prophylaxie sanitaire systématique a été mise en place depuis 1992 : dépistage de tous les troupeaux caprins, déclaration des foyers, abattage des troupeaux atteints avec aide financière pour la reconstitution des troupeaux, contrôle des mouvements d’animaux.

Le pourcentage de troupeaux infectés est passé de 27 à 14 entre 1992 et 1999 (voir la FIGURE “Évolution de l’incidence de l’agalactie contagieuse en Savoie et en Haute-Savoie entre 1992 et 1999” ). Les différents partenaires recherchent maintenant des outils plus adaptés à une situation de “queue de prophylaxie”.

Quand suspecter un syndrome mycoplasmique ?

Chute de production laitière ou production insuffisante.

Niveau cellulaire du tank élevé ou en augmentation.

Signes cliniques : mammites, arthrites, pneumonies, kératites.

Existence d’un stress physiologique, alimentaire ou autre.

Points forts

Les mycoplasmoses caprines sont des maladies protéiformes dans lesquelles dominent des symptômes mammaires, articulaires, pulmonaires et oculaires, diversement associés dans un élevage.

Pour obtenir un diagnostic de qualité, les prélèvements doivent être ensemencés dans des milieux appropriés.

La guérison bactériologique est illusoire. L’objectif principal du traitement est de faire disparaître les signes cliniques et d’éviter les mortalités.

À lire également

- Bergonier D, Poumarat F, Pépin M, Lebret P, Berthelot X. Agalactie contagieuse des petits ruminants : clinique et épidémiologie. Point Vét. 1996 ; 28(180): 779-788.

- Bergonier D, Berthelot X, Poumarat F, Van De Wiele A, Valognes A, Lebret P, Lambert M, Pépin M. État actuel et perspectives du contrôle de l’agalactie contagieuse des petits ruminants. Point Vét. 1997 ; 28(186): 1727-1736.

- Bergonier D. L’agalactie contagieuse chez les ovins. Point Vét. 2002 ; 33(n° spécial “Pathologie ovine et caprine”):52-57.

- Mercier P, Coutineau H, Lenfant D, Decoux V. Un épisode d’agalactie causé par Mycoplasma putrefaciens dans un troupeau caprin. Point Vét. 2000 ; 31(208): 345-348.

- Poumarat F, Le Grand D, Bergonier D. Propriétés générales des mycoplasmes et hypervariabilité antigénique. Point Vét. 1996 ; 28(180):761-769.

L’avis du praticien par François Audoux et Laurence Marouteix, 86350 Château-Garnier

Que ce soit sous forme mammaire ou sous forme pulmonaire, certains cas de mycoplasmose peuvent prendre des allures dramatiques, voire catastrophiques, comme le démontre un cas survenu dans un élevage de 334 chèvres.

Contexte

Les premiers symptômes (troubles respiratoires accompagnés de fièvre et de mortalité) sont apparus début février 1998. Mycoplasma capricolum a été isolé fin avril. Fin juin, 146 animaux étaient morts (mort naturelle ou abattage préventif) malgré la mise en place d’une antibioprévention lourde (tylosine pendant dix jours sur tout le troupeau).

La réintroduction en 1999 d’un troupeau racheté s’est soldée par d’importantes pertes (66 %). En 2000, l’introduction des chevrettes a également redéclenché les symptômes. En maîtrise 2001, les conclusions d’une réunion de travail avec différents partenaires ont abouti aux propositions suivantes :

- soit élimination du troupeau, visite sanitaire et repeuplement ;

- soit changement de production et réaménagement du bâtiment ;

- soit mise en place d’un programme sanitaire préventif.

La troisième solution a été retenue par les responsables de l’élevage, qui nous ont demandé de définir un plan de prophylaxie tenant compte des observations effectuées depuis trois ans, du mode de contamination et de notre expérience acquise dans d’autres espèces animales (porc notamment).

Principe du programme

Le plan de prévention est fondé sur une contamination précoce et contrôlée des chevrettes, afin qu’elles puissent développer une immunité contre M. capricolum. Il a été conçu en fonction des observations faites dans l’élevage, notamment au niveau de la cinétique d’apparition des symptômes lors de l’introduction des chevrettes.

Le succès de ce plan passe par :

- une contamination effective des chevrettes lors de l’introduction des chèvres de réforme ;

- un contrôle de l’infection, pour que l’immunité puisse s’établir sans pour autant que les animaux soient gravement malades ;

- une introduction contrôlée médicalement ;

- mais aussi une limitation des différents facteurs de stress : alimentation, ventilation et ambiance du bâtiment.

Modalités

Le plan en plusieurs étapes a été immédiatement mis en place.

1 Contamination “préventive” du troupeau de renouvellement (prétroupeau).

• J0 : introduction d’une quinzaine de chèvres de réforme dans le prétroupeau (chevrettes âgées d’environ cinq mois). Choisir des animaux en bonne santé apparente (pas de trouble respiratoire, ni de maladie caséeuse, ni d’AECV), mais porteurs (porteurs asymptomatiques).

• J8 : contrôle de l’infection du prétroupeau par injection d’antibiotiques, selon deux modalités :

- soit une injection de10 mg/kg de poids vif de tilmicosine par voie sous-cutanée. Suite à l’administration de tilmicosine, les effets secondaires suivants ont été constatés : abattement pendant 24 heures, raideur de l’encolure et déplacements limités. Ce principe actif doit être utilisé dans l’espèce caprine avec beaucoup de précautions (évaluation précise du poids des animaux et utilisation d’un diluant) car les risques de surdosage sont importants ;

- soit oxytétracycline longue action (deux injections à trois jours d’intervalle) + tylosine (une injection par jour pendant trois à cinq jours).

Les animaux malades étaient traités ponctuellement avec de la tylosine (10 mg/kg pendant cinq à dix jours) ou de la difloxacine (2,5 mg/kg par voie sous-cutanée pendant trois à cinq jours) et, éventuellement, des AINS et une thérapeutique respiratoire adjuvante.

2 Contrôle de l’introduction du prétroupeau dans le troupeau de souche.

• J50 : introduction du prétroupeau en une seule fois et sous antibiothérapie préventive (tilmicosine, 10 mg/kg par voie sous-cutanée deux fois à 50 jours d’intervalle).

Les animaux malades sont traités ponctuellement dès l’apparition des symptômes.

3 Traitement préventif au tarissement :

- par voie locale avec des préparations à base de macrolides (une seringue dans chaque quartier après désinfection) ;

- par voie générale avec de la tilmicosine (une injection de 10 mg/kg par voie sous-cutanée).

Résultats

Au cours de l’année 2001, aucune perte liée à M. capricolum n’a été déplorée. En août 2001, des chèvres laitières ont présenté de la toux avec du jetage (syndrome grippal). Un traitement à base d’aspirine et de vitamine C a été mis en œuvre sur l’ensemble du lot, complété par un traitement antibiotique à base de ceftiofur sur les plus atteintes (pas de délai d’attente lait). Cela a permis de contrôler la situation sans perte.

Si tout se passe pour le mieux, le troupeau va vivre en équilibre avec M. capricolum grâce à l’immunité ainsi acquise. Cependant, tout facteur de stress excessif pourrait, à tout moment, déclencher une réapparition de la maladie, avec une intensité difficilement prévisible actuellement.

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