La thiamine fait l’unanimité lors de nécrose du cortex - Le Point Vétérinaire n° 239 du 01/10/2003
Le Point Vétérinaire n° 239 du 01/10/2003

NÉCROSE DU CORTEX CÉRÉBRAL CHEZ LE JEUNE RUMINANT

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SUR ORDONNANCE

Auteur(s) : Marc Gogny

Fonctions : Unité de pharmacologie et de toxicologie, ENVN

L’apport immédiat de thiamine (vitamine B1) est le seul traitement qui fasse l’unanimité lors de nécrose du cortex cérébral chez les bovins.

Un confrère est appelé auprès d’une jeune génisse de six mois qui pèse une centaine de kilos, pour anorexie, diarrhée et signes nerveux. L’examen clinique révèle une ataxie, un déficit sensoriel (cécité notamment) et un port de tête en hyperextension. L’âge de l’animal et l’ensemble du tableau clinique évoquent fortement une nécrose du cortex cérébral. Un traitement d’attaque est alors rapidement instauré.

Anticonvulsivants :Uniquement en cas de myoclonies

Lors du développement de la nécrose du cortex cérébral, il est fréquent d’observer des myoclonies, voire des épisodes convulsifs et un opisthotonos. Le recours à des anticonvulsivants, comme le diazépam (0,01 à 0,04 mg/kg par voie intraveineuse) ou le phénobarbital (20 mg/kg par voie intraveineuse), a donc été proposé. Sur le plan réglementaire, l’administration de diazépam ou de phénobarbital est toutefois interdite chez les animaux dont la chair ou les produits sont destinés à la consommation humaine, y compris chez des génisses. En effet, aucune LMR n’a été fixée pour le diazépam ou le phénobarbital, qui ne figurent pas dans les annexes I, II ou III du règlement européen CEE 2377/90 du 26 juin 1990.

Metacam® : Un AINS : pourquoi pas ?

Le recours à des AINS ne fait pas partie du traitement classique de la nécrose du cortex cérébral. Aucune donnée ne permet d’en étayer l’efficacité. L’effet analgésique du méloxicam est peut-être intéressant, en raison de l’hypertension intracrânienne. Chez les bovins, l’indication officielle de Metacam® à cette concentration est le traitement des affections respiratoires. La notice mentionne une contre-indication concernant l’association avec les corticoïdes, mais cette idée, communément répandue, n’a guère de fondement pharmacologique.

Voren Solution® : Pour son action anti-œdémateuse

La pathogénie de la nécrose du cortex cérébral comprend une réaction pseudo-inflammatoire, qui inclut libération de médiateurs, hydrolyse et peroxydation des phospholipides membranaires, avec libération de radicaux libres, œdème et augmentation de la pression intracrânienne. Le recours à un corticoïde d’action rapide, comme l’isonicotinate de dexaméthasone, peut donc se justifier. La dose employée ici, de l’ordre de 0,1 mg/kg, quoique nettement supérieure à celle préconisée par l’AMM, est probablement encore insuffisante.

Nutra B® et corébral® : Pour un apport rapide de vitamine B1

L’apport de thiamine (vitamine B1) est le seul traitement qui fasse l’unanimité lors de nécrose du cortex cérébral chez les bovins, car une carence liée à une production excessive de thiaminase dans les réservoirs gastriques est l’une des hypothèses étiologiques communément admises. La dose ici administrée à l’animal (10 mg/kg) correspond à celle recommandée de Nutra B® par l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Elle est parfois insuffisante et il peut être nécessaire de la doubler, avec un risque d’échec lorsque la dégénérescence neuronale est trop avancée ou que la cause est autre (excès de sulfates notamment). Nutra B® contient aussi les vitamines B6, PP et C. Cette association augmenterait l’efficacité du traitement, mais cela reste à démontrer. La nécrose du cortex cérébral ne fait pas partie des indications mentionnées dans la notice d’emploi de Nutra B®, alors qu’elle est indiquée pour d’autres spécialités injectables comme Corébral® ou Ultra B® (vitamines B1 et B6 uniquement). Le choix de la voie intraveineuse se justifie par la nécessité d’intervenir le plus vite possible, avant toute extension irréversible des lésions. Il convient cependant d’injecter la solution de Nutra B® lentement pour éviter des accidents cardiovasculaires. Associer une administration par voie intramusculaire prolonge l’effet. La voie orale est exclue en phase d’attaque car d’action trop lente, et sans doute insuffisante si la thiamine administrée est partiellement détruite par les thiaminases. C’est la raison pour laquelle Corébral® est prescrit par voie intramusculaire le lendemain de l’administration de Nutra B®.

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