Le shunt hépatique : clinique et diagnostic - Le Point Vétérinaire n° 237 du 01/07/2003
Le Point Vétérinaire n° 237 du 01/07/2003

GASTRO-ENTEROLOGIE DU CHIEN ET DU CHAT

Se former

COURS

Auteur(s) : Stéphane Bureau*, Éric Monnet**

Fonctions :
*Le Bourg
33480 Moulis-en-Médoc
**Colorado State University,
Veterinary Teaching Hospital,
Fort Collins, Co 80523 USA

Chez le chien et chez le chat, le shunt l’hépatique est souvent sous-diagnostiqué, en raison de ses multiples expressions cliniques non pathognomoniques.

Un shunt hépatique est une commu-nication vasculaire anormale entre la circulation porte et la circulation systémique. Un shunt peut être congénital ou acquis, extra- ou intrahépatique, simple ou multiple, macroscopique ou microscopique. Il est décrit anatomiquement pour la première fois en 1949 par Hickman, Edwards et Mann [48, 57], mais il convient d’attendre 1974 pour que paraisse la première description clinique de cette anomalie chez un chien [17]. En 1980, le premier cas est décrit chez un chat [59]. Depuis, les publications se sont multipliées, aussi bien sur l’expression clinique que sur le diagnostic ou le traitement de cette anomalie vasculaire.

Le shunt congénital portosystémique est actuellement considéré comme l’anomalie cardiovasculaire congénitale la plus fréquente chez le chien [9].

Le shunt hépatique est souvent sous-diagnostiqué, en raison de ses multiples expressions cliniques non pathognomoniques. Après des rappels anatomiques et physiologiques fondamentaux, les différents types de shunts sont définis, en précisant les données épidémiologiques qui s’y rattachent. Les éléments diagnostiques sont également abordés. Les possibilités thérapeutiques médicales et chirurgicales feront l’objet d’un second article.

Épidémiologie

Le shunt est une anomalie vasculaire qui permet au sang véhiculé par le système porte (qui provient des intestins, du pancréas, de l’estomac et de la rate) (voir l’ENCADRE “Rappels anatomiques”) de rejoindre la circulation systémique sans passer par le foie. 80 % des shunts sont simples [10, 46]. Plusieurs types de shunt sont décrits (voir la FIGURE “Visualisation des différents types de shunt hépatique”).

1. Le shunt congénital

Le shunt congénital représente 70 % des cas de shunt hépatique chez le chien et la grande majorité des cas chez le chat [60, 78]. Selon sa localisation par rapport au foie, le shunt est extrahépatique (53 % des cas de shunt simple) ou intrahépatique [a].

Un chien de race de petite taille a dans 93 % des cas un shunt extrahépatique, alors qu’un chien de race de grande taille a dans 90 % des cas un shunt intrahépatique [5, 29]. 92 % des chiens affectés par un shunt intrahépatique pèsent plus de 25 kg [13]. L’origine de cette différence est inconnue [29].

Les animaux sont le plus souvent présentés jeunes (en moyenne sept mois), mais des shunts congénitaux ont déjà été décrits chez des chiens d’une dizaine d’années [38, 46, 68].

Le shunt congénital extrahépatique

• Lors de shunt congénital extrahépatique, un vaisseau tortueux anormal (PHOTO 4) connecte la veine porte ou un de ses composants avec la veine cave caudale, entre la veine rénale gauche et le diaphragme (dans 56 à 67 % des cas), avec la veine azygos (dans 11 à 15 % des cas), ou avec la veine thoracique interne [29, 32, 48, 55, a]. Il a souvent pour origine la veine splénique ou la veine gastrique gauche [13, 21]. Il représente 53 à 63 % des shunts simples ; 11 % sont doubles [10, 32, 55, a].

Il est préférentiellement rencontré chez les chats (47 % des cas de shunt) et chez les races de petite taille : yorkshire, schnauzer nain, teckel, caniche, bichon maltais, carlin [2, 10, 46, 48, 60, 82, a]. 73 % des animaux affectés par un shunt extra-hépatique congénital sont présentés à la consultation avant l’âge de deux ans ; leur poids moyen est de 4,8 kilos [5, 28].

Chez le chat, le shunt le plus fréquent relie la veine gastrique gauche à la veine cave ; 23 % des animaux affectés sont des persans et des himalayens. Les chats à poils courts sont plus fréquemment atteints [4, 13, 48, 55, 82].

• Un autre type de shunt extrahépatique est également décrit. Il part de la veine porte, entre le lobe médial gauche et le lobe carré, puis remonte dans le ligament falciforme pour traverser la partie gauche du diaphragme et a ensuite un trajet intrathoracique. Il mesure 5 à 6 mm de diamètre. Il pourrait correspondre à un défaut de dégénérescence de la veine ombilicale gauche [8].

Le shunt congénital intrahépatique

Le shunt congénital intrahépatique représente 23 à 50 % des shunts simples [10, 71, a].

Un shunt intrahépatique n’est pas systématiquement inclus dans le parenchyme en intégralité et n’est pas systématiquement unique. Il s’abouche dans le système veineux posthépatique, au niveau d’une veine hépatique, ou directement sur la veine cave [25, 29].

Le plus fréquemment observé (sur 61 % des cas [38]) est celui qui connecte la veine cave via la veine hépatique gauche, ce qui correspond à la persistance du canal veineux embryonnaire (voir l’ENCADRE “Rappels sur le développement embryonnaire”) [5, 13, 38, 41, 46, 47, 60, 78, 80, a]. Il passe au travers du lobe latéral gauche, ou entre le lobe latéral et le processus papillaire du lobe caudé [80]. En Australie, le shunt intrahépatique le plus fréquent est situé à droite [80].

Un shunt central peut se présenter sous la forme d’un foramen entre une portion dilatée de la veine porte intrahépatique et la veine hépatique ou la veine cave crâniale [25, 80]. Son origine est plus incertaine : il pourrait représenter une persistance de la veine omphalomésentérique droite, une communication entre la veine ombilicale droite et l’anastomose crâniale des veines vitellines, ou une malformation des sinus hépatiques [80].

Un shunt intrahépatique droit traduirait une malformation des sinus hépatiques durant le développement du lobe hépatique latéral droit [80].

Chez le chat, une anatomie particulière du shunt intrahépatique gauche est décrite, qui dérive du canal veineux embryonnaire. Il se dirige craniolatéralement entre le lobe latéral gauche et le processus papillaire du lobe caudé, avant de s’achever dans une dilatation (ou ampoule veineuse) en communication avec la veine cave. Dans cette ampoule pénètrent également la veine hépatique gauche et la veine phrénique gauche [81].

Le shunt intrahépatique se rencontre préférentiellement chez des chiens de races de grande taille, âgés de moins d'un an : irish wolfhound, golden retriever (jusqu’à 39 % des cas [38]), labrador, berger allemand, dobermann, setter irlandais, samoyède [10, 13, 41, 46, 51, 60, 71, 77, 78, 82].

La dysplasie microvasculaire hépatique

La dysplasie microvasculaire hépatique représente 2 % des cas de shunt simple et est congénitale [10, a]. Elle est décrite dans plusieurs races, dont le cairn terrier [62]. Il s’agit de connections intrahépatiques entre le système artériel hépatique et le système porte.

Plusieurs hypothèses étiologiques sont avancées : anomalie du développement du plexus capillaire embryonnaire (hamartome vasculaire), traumatisme, chirurgie ou obstruction de la veine hépatique [1, 13, 56, 61, 78, a]. Le flux sanguin s’établit selon les gradients de pression et conduit à une augmentation et à une inversion du flux sanguin porte, avec congestion viscérale [77]. Cela peut secondairement conduire à des shunts multiples acquis, à une hypoplasie de la veine porte ou à une atrophie hépatique [1, 13, 30, 61].

Les shunts multiples acquis

Les shunts multiples acquis représentent 20 % à 24 % des cas [10, 39, a].

De multiples connections vasculaires non fonctionnelles existent de manière physiologique entre le système porte et la circulation systémique (veine cave, veine azygos). Elles deviennent fonctionnelles lorsque la pression dans le système porte augmente. Elles agissent comme un système de “délestage” précoce, qui permet une régulation, le plus souvent partielle, de cette hypertension [5, 30, 31, 33, 48, 60, 78]. Une hypertension porte peut être liée à une augmentation de résistance du flux sanguin intrahépatique (atteinte hépatique telle que fibrose, cirrhose, hépatite chronique active, infiltration graisseuse, obstruction biliaire, thrombose, lymphome), à une atrésie congénitale de la veine porte, à une hypertension dans la veine cave (ou syndrome de Budd Chari : insuffisance cardiaque, péricardite restrictive, tamponnade, tumeur, thrombose, hernie) ou à une augmentation du flux sanguin porte [42, 63, 77].

Les shunts multiples acquis sont des vaisseaux tortueux multiples, localisés le plus souvent dans la région périrénale gauche [30, 33, 39].

La plupart des animaux atteints sont âgés d’un à sept ans [39].

Clinique

Les signes cliniques observés lors de shunt hépatique sont le plus souvent non spécifiques et sont évocateurs de nombreuses autres affections : leucose, rage, toxoplasmose, maladie de Carré, parasitisme intestinal, syndrome urologique félin, etc. [44, 59]. Cette anomalie vasculaire doit donc être envisagée dans le diagnostic différentiel.

Le type de shunt semble influencer l’âge d’apparition des signes et leurs manifestations [33]. 75 % des animaux qui ont un shunt hépatique congénital sont présentés avant l’âge d’un an, mais certains peuvent être âgés de dix ans [39, 44]. Les chats semblent présenter des signes plus précocement, dès l’âge de trois mois.

À l’inverse, la plupart des shunts acquis s’observent chez des animaux âgés, hormis ceux qui résultent de causes de type atrésie portale, fistule, etc. [78].

Les chiens avec un shunt intrahépatique sont souvent présentés plus tôt que ceux avec un shunt extrahépatique. Le diamètre généralement supérieur du shunt permet en effet le passage d’une masse sanguine plus importante ; au cours du temps, la résistance vasculaire hépatique s’accroît et tend à aggraver le shunt [13, 33, 38, 77].

Lors de dysplasie microvasculaire, les signes cliniques sont moins sévères et les animaux sont moins jeunes [1].

1. Signes nerveux

Les signes nerveux sont non systématiques, intermittents, de fréquence et de nature variables, et pas toujours en relation avec un repas [20].

Observés dans 70 à 90 % des cas, ils traduisent l’encéphalose hépatique (voir l’ENCADRE “L’encéphalose hépatique”) [20, 22, 39, 68, 78, a]. Il s’agit de modifications comportementales (agressivité, abattement, stupeur, coma), de cécité, de troubles proprioceptifs, d’un port de tête anormal, d’ataxie, de crises convulsives, d’un réveil retardé après une anesthésie, parfois sans aucun autre signe (15 % des cas dans une étude) [21, 38, 43, 59, 74, a].

2. Signes digestifs

Les signes digestifs sont présents dans 30 à 75 % des cas [48, 60, 68, 78, a].

Ils peuvent être dus à la malabsorption intestinale suite à la stase veineuse, à la mauvaise digestion des lipides par baisse de la synthèse des acides biliaires ou à l’atrophie hépatique [60].

Il s’agit d’anorexie, de polyphagie, d’amaigrissement, de diarrhée, de vomissements [2, 13, 38, 43, 59]. Un ictère est peu fréquent [32].

Les chats présentent souvent du ptyalisme [13, 38, 39, 43, 48, 59, 74].

3. Signes urinaires

Les signes urinaires sont présents dans 15 à 53 % des cas [48, a]. Des infections urinaires récurrentes sont observées dans 10 % des cas [43].

Une polyuropolydipsie est parfois notée, sans que son origine exacte ne soit déterminée : polydipsie psychogène ou stimulation des centres de la soif suite à l’encéphalose, altération des osmorécepteurs présents dans la veine porte, perte potassique, diminution du gradient de concentration de la medulla rénale par baisse de l’urémie [13, 60, 77].

En présence de calculs de biurate d’ammonium (observés dans 20 à 59 % des cas [22, 32, 57, 77, 78]) chez un chien autre que dalmatien, il convient de suspecter un shunt. Leur présence traduit l’incapacité hépatique à détoxifier l’ammoniaque et à métaboliser l’acide urique en allantoïne [2, 13, 44, 45, 48, 60, 74]. Purs, ils sont radiotransparents et de couleur verte [45, 60].

4. Autres signes

Certaines études rapportent 36 %, parfois 50 % de mâles cryptorchides, sans qu’aucune relation n’ait pu être établie avec l’existence d’un shunt hépatique [13, 48, 79].

Les animaux affectés de manière congénitale sont souvent plus petits que les autres membres de la portée [13, 60, 77].

Certains auteurs notent des hyperthermies transitoires, ainsi que des intolérances médicamenteuses (barbituriques, phénothiazines) [77, 78].

De l’ascite est parfois observée suite à l’hypoprotéinémie ou lors de shunts acquis avec persistance d’une hypertension porte [31, 60, 78]. Elle n’existe généralement pas lors de shunt congénital car la pression porte demeure normale [31].

Une couleur cuivrée des yeux est rapportée chez le chat [13], ainsi que la présence fréquente d’un souffle [21, 48, 59].

Examens complémentaires

Les commémoratifs et les signes cliniques ne permettent qu’une suspicion de shunt hépatique. Des examens complémentaires de spécificité et d'accessibilité variables confirment ou infirment cette suspicion.

1. Numération-formule et temps de coagulation

Les éléments les plus fréquemment observés lors de la réalisation d’une numération-formule sont :

- une anémie modérée dans 46,2 % des cas [60], non régénérative, hypochrome et microcytaire [4, 13, 49, 72, 77, 80]. La microcytose (diminution de volume des hématies) est fréquente (65 à 84,6 % des cas [13, 40, 54]) et d’origine inconnue : une anomalie du métabolisme du fer, ainsi qu’une atteinte oxydative des hématies, une anomalie du métabolisme lipidique et des pertes sanguines chroniques ont été suspectées [40, 48, 60] ;

- une leucocytose dans 15,4 % des cas [4, 13, 49, 54], qui peut être liée à l’absorption intestinale de bactéries [13] ;

- la numération plaquettaire est normale dans 87,2 % des cas [54].

Les temps de coagulation sont modérément allongés, mais ne s'accompagnent généralement pas de tendances hémorragiques [13, 54, 78]. Cela traduit l’incapacité du foie à sécréter les facteurs de coagulation [54, 72].

2. Paramètres biochimiques

Plusieurs paramètres sont modifiés lors de shunt hépatique :

- l’urémie est diminuée dans 62 à 74 % des cas [13, 54], ce qui traduit l’absence de synthèse hépatique par le foie à partir de l’ammoniaque [2, 4, 48, 49, 78] ;

- une hypoglycémie est notée dans 5 à 30 % des cas [5, 32, 69, 78]. Elle est liée au faible stock de glycogène hépatique, à la réponse anormale au glucagon, à l’absence de réponse à l’insuline qui a peu d’action hépatique, à l’activité déficiente des hormones régulatrices (cortisol, épinéphrine) [13, 60] ;

- les concentrations sériques d’enzymes hépatiques (ALT : alanine amino-transférase ; PAL : phosphatases alcalines) sont généralement normales à modérément augmentées, car il n’y a pas de lésion des hépatocytes, excepté une hypoxie cellulaire [4, 5, 13, 21, 48, 49, 60]. Les PAL sont augmentées de manière physiologique chez les animaux en croissance suite au métabolisme osseux [12, 80] ; les ALT sont également augmentées lors d’affection intestinale [14] ;

- une hypoprotéinémie est notée [2, 4, 49], avec une hypo-albuminémie dans 15 à 93 % des cas [13, 32, 54, 77] suite à la baisse de synthèse hépatique, aux pertes intestinales, à l’anorexie et à la mauvaise absorption digestive [31] ;

- une hypocholestérolémie est observée dans 30 à 67 % des cas [4, 13, 49, 54, 77], 50 % du cholestérol étant synthétisé par le foie.

Ces analyses manquent donc de sensibilité et de spécificité [16].

3. Dosages spécifiques

Jusqu’à la fin des années 1980, le diagnostic reposait sur le test à la sulfobromophtaléïne (BSP) et sur le dosage de l’ammoniaque avec test de tolérance (voir les ENCADRES “Test de l’excrétion de la sulfobromophtaléine” et “Mesure de l’ammoniémie”) [49].

• La mesure de la concentration des acides biliaires, comme le test de tolérance à l’ammoniaque, est un indicateur sensible de la fonction hépatique, mais elle n’est pas pathognomonique d’un shunt hépatique : elle peut aussi traduire une obstruction biliaire ou une atteinte hépatocellulaire diffuse [14, 16, 23, 78]. Aussi sensible que le test de tolérance à l’ammoniaque et plus sensible que celui de la BSP, elle est actuellement reconnue comme étant la plus fiable [12, 59, 68]. Cette mesure ne peut toutefois être utilisée comme un outil de dépistage en l’absence de signes cliniques ; elle aurait alors une faible prévalence [14].

• Le dosage des acides biliaires est un test endogène de la fonction hépatique qui traduit l’efficacité du cycle entéro-hépatique [12, 50, 60]. Seuls 2 à 5 % des acides biliaires sont éliminés dans les matières fécales quotidiennement. Pendant la période postprandiale, ils sont recyclés trois à cinq fois. Après une diète de douze heures, seules de faibles quantités demeurent dans la circulation systémique : moins de 5 µmol/l chez le chien et moins de de 2 µmol/l chez le chat [12, 72]. Le risque d’avoir une affection hépatique chez un chien est de 90 % si la concentration est supérieure à 30 µmol/l et de 100 % au-delà de 50 µmol/l. Chez un chat, le risque est de 90 % pour une concentration supérieure à 5 µmol/l et de 100 % pour une concentration supérieure à 15 à 20 µmol/l [14, 72]. Les animaux ayant une fonction hépatique réduite peuvent cependant avoir une concentration proche de la normale après une diète, en raison des cycles répétés, mais leurs valeurs postprandiales sont élevées [12, 48, 50, 80]. Ainsi, la concentration en acides biliaires lors de shunt hépatique est augmentée dans 76 % des cas à jeun et dans 100 % des cas après un repas [54].

Le dosage est effectué après une diète de douze heures et deux heures après un repas [12]. Les acides sont mesurés dans le sérum. Non labiles, ils sont stables deux jours à température ambiante et davantage à - 20 °C [12, 14].

Les valeurs peuvent être faussement augmentées lors d’hémolyse ou de lipémie [14, 24, 43]. La concentration en acides biliaires est en outre dépendante de plusieurs paramètres physiologiques : la masse hépatique fonctionnelle et l’intégrité du tractus biliaire, mais également l’absorption intestinale et la nature du repas. Cette dernière influe sur le temps de vidange gastrique, le largage de la cholécystokinine, la contraction de la vésicule biliaire et le temps de transit intestinal [14, 72]. Lors d’un jeûne prolongé, des contractions spontanées de la vésicule biliaire avec évacuation biliaire peuvent se produire, ce qui explique que certains animaux ont des concentrations supérieures à jeun qu’après un repas [14, 24]. Les valeurs obtenues ne sont pas corrélées à la gravité et au type d’affection [12, 79].

4. Radiographie sans préparation

La radiographie sans préparation apporte généralement peu d'informations : le contraste abdominal est le plus souvent faible en raison de la teneur réduite en graisse des animaux affectés [4, 48, 52].

Le foie est de petite taille, souvent difficile à évaluer, avec une localisation plus crâniale que la normale [2, 31, 49].

Les reins sont souvent de taille augmentée. L’origine de cette augmentation est inconnue : modification du flux sanguin, augmentation du métabolisme rénal suite à l’hyperammoniémie [44, 52].

5. Échographie

L’échographie a une sensibilité de 80,5 % et une spécificité de 66,7 % lors de shunt extra-hépatique. Lors de shunt intrahépatique, la spécificité est de 98 % et la sensibilité de 100 % [23, 65, a].

L’examen s’effectue chez un animal à jeun depuis douze heures, afin de limiter les interférences avec le tube digestif [23].

L’échographie permet de visualiser les vaisseaux portes dilatés lors d’hypertension, d’évaluer le tractus biliaire et de découvrir une éventuelle tumeur ou une thrombose [31].

Le foie apparaît de petite taille, hypovasculaire, avec des vaisseaux portes et hépatiques peu ou pas reconnaissables [52, 83]. Il est parfois possible d’identifier le shunt [4, 41, 48].

En raison de la petite taille du foie, notamment chez des chiens à thorax profond, il est parfois difficile d’obtenir des images satisfaisantes car l’organe est masqué par les côtes et les poumons. Le recours à une anesthésie gazeuse et le maintien en inspiration forcée permettent de repousser le diaphragme et le foie, de dilater la veine cave et les veines hépatiques (effet Vasalva). Les images obtenues sont de meilleure qualité et la visualisation du shunt est facilitée [41, 52, 83].

L’échographie peut également être utilisée en phase peropératoire pour le diagnostic des shunts intrahépatiques [52].

• Un shunt intrahépatique est suspecté lorsqu’un vaisseau de fort diamètre est identifié entre le système porte intrahépatique et une veine hépatique. Ce vaisseau est généralement de diamètre constant, plus élevé que les autres, avec une course sinueuse. Un flux unidirectionnel uniforme est mis en évidence avec le Doppler depuis le système porte vers le système veineux [23]. Le Doppler permet également de savoir si le flux dans le shunt est veineux ou artériel, ce qui contribue à faire le diagnostic différentiel entre shunt intra-hépatique et fistule artérioveineuse [26].

• Un shunt extrahépatique est diagnostiqué lorsqu’une branche de la veine porte semble aberrante : le flux sanguin visualisé au Doppler s’échappe de la veine au lieu de la rejoindre. De même, le flux apparaît turbulent à la jonction avec la veine cave.

L’expérience du manipulateur est essentielle lors de cet examen. Le pourcentage de faux négatifs diminue avec le nombre d’animaux explorés [23].

• Lors de shunts acquis, l’échographie permet de visualiser l’augmentation de taille et du nombre des vaisseaux dans la région rénale gauche, des zones hépatiques hyperéchogènes, une diminution en taille et en nombre des vaisseaux hépatiques et portes [11].

6. Examens angiographiques

Plusieurs méthodes de diagnostic et visualisation du shunt sont décrites.

Angiographie de l’artère mésentérique crâniale

Un cathéter, introduit dans une artère fémorale, est guidé sous fluoroscopie jusqu’à l’artère mésentérique crâniale. Une injection de 1,5 à 3 ml de produit de contraste est effectuée, suivie de radiographies en série : trois à six pendant la phase artérielle qui dure de quatre à dix secondes ; huit à dix pendant la phase veineuse qui dure de six à quatorze secondes. Cette méthode est très peu invasive. Le shunt n’est cependant visualisé qu’au temps veineux, après dilution du produit de contraste dans le sang. Cette technique est en outre réservée aux structures universitaires en raison de sa technicité [52, 75].

Splénoportographie

L’animal est placé en décubitus latéral droit, puis une ponction est réalisée au tiers ventral de l’arc costal. Une canule est introduite en oblique dans le parenchyme splénique, puis guidée afin que son extrémité soit proche du hile. Son positionnement correct se traduit par un retour veineux lorsque le mandrin est retiré. Si la rate est de petite taille, une laparotomie est réalisée.

Après une injection test de 2 à 3 ml, 5 à 15 ml de produit de contraste sont injectés ; après deux à quatre secondes, six à huit clichés sont effectués, séparés par un intervalle d'une seconde. Cette technique permet de visualiser la veine splénique mais peu la veine mésentérique crâniale. Peu invasive, elle expose cependant à des risques de lacération splénique et reste difficileàréaliser [52, 75, 77].

Cathétérisation de la veine porte par voie transsplénique

La méthode de cathétérisation de la veine porte par voie transplénique dérive de la précédente : un cathéter est introduit dans une veinule de fort diamètre au travers du parenchyme splénique [64]. Il est avancé dans la veine splénique, voire dans la veine porte, afin d’effectuer des mesures de pression. Il permet l’administration de produit de contraste. Cette méthode expose à des risques de lacération splénique avec hémorragie. Le serrage excessif de la suture de maintien du cathéter peut entraîner sa courbure.

Portographie depuis une veine mésentérique

La portographie depuis une veine mésentérique est la méthode la plus invasive, mais elle permet une excellente visualisation du système porte (PHOTOS 5, 6 et 7) car le produit ne subit aucune dilution. Elle est en outre aisément réalisable [52, 77].

Une anse jéjunale est isolée et un cathéter est placé sur une veine mésentérique, perpendiculaire au bord intestinal, afin de ne pas avoir d’ischémie locale [b]. Ce cathéter permet également la mesure de la pression dans le système porte [48, 60]. Il est pour cela relié à un robinet trois voies et à une colonne d’eau, dont la base est placée au niveau de l’atrium droit ou de la veine cave. Après remplissage de la colonne par du soluté physiologique, le robinet est ouvert. La colonne d’eau se vide jusqu’à équilibre : la lecture donne alors la mesure de la pression dans le système porte. La pression est toujours mesurée avant l’administration du produit de contraste car il tend, en raison de son hyperosmolarité, à induire un vasospasme qui accroît faussement les valeurs [31, 63].

La portographie n’est pas systématique car elle augmente le temps anesthésique, la morbidité et le coût [10, 38, 46, 53]. Elle est réalisée lorsque le shunt n’a pas pu être identifié lors de l’exploration abdominale ou lorsque l’occlusion du vaisseau suspecté ne se traduit pas par une élévation de la pression dans le système porte [8, 60].

L’administration du produit de contraste (0,5 à 2 ml/kg) est suivie, dès la fin de l’injection, d’une radiographie de profil ; une nouvelle injection est réalisée, suivie d’une radiographie de face [10, 32, 52]. Si le shunt est crânial à la treizième vertèbre thoracique, il est probablement intrahépatique ; si une partie du shunt est caudale à cette vertèbre, il est probablement extrahépatique et ce, sans influence du temps respiratoire [3]. L’opacification du parenchyme hépatique ne signifie pas une obstruction totale du shunt et vice versa. Elle indique les animaux chez lesquels il y a davantage de risque de complications postopératoires [67].

Le cathéter est ôté et la suture qui le maintenait est serrée, ce qui n’entraîne aucune ischémie en raison de la circulation collatérale [60].

Les complications éventuelles sont un choc (par largage histaminique, activation du complément, atteinte de l’endothélium vasculaire), une hémorragie (saignement au niveau de la veine mésentérique mal ligaturée suite à l’hypertension), le déclenchement d’une encéphalose, une hypoglycémie et une hypothermie, notamment chez les races toy [20, 22, 38, 46, 60].

La délimitation du système porte peut être affectée par la prémédication anesthésique et la profondeur de l’anesthésie [67].

Scintigraphie par voie transrectale

La scintigraphie par voie transrectale est une technique non invasive de diagnostic des shunts hépatiques [49].

L’examen se réalise chez un animal vigile ou légèrement tranquillisé, placé en décubitus latéral droit après une diète de douze heures [49]. La réalisation d’un lavement, deux heures avant l'intervention est controversée : elle permettrait une meilleure absorption du produit, mais expose à des risques de fuite et de contamination [18, 36, 75].

Un cathéter est introduit de 15 à 20 cm dans le rectum. En fonction du poids, 5 à 20 mCi de produit radioactif sont introduits dans 1,5 ml de soluté, puis chassés par une seringue d’air pour éviter la dilution [15, 36].

Une série séquentielle de quarante-cinq images est réalisée avec un cliché toutes les quatre secondes, au moyen d’une caméra gamma qui permet l’étude de la répartition de la radioactivité. Chez un chien sain, le temps nécessaire pour que le sang passe au travers du foie vers le cœur est de douze secondes [16, 18].

La radioactivité est normalement retrouvée dans le foie avant d’être dans le cœur, sauf lors de shunt où elle apparaît dans le cœur en premier [16, 18, 36, 49]. L’opérateur définit ainsi deux “régions d’intérêt” centrées sur le cœur et sur le foie, ainsi qu’un “temps zéro” qui correspond à l’apparition de la radioactivité [58]. Les courbes temps/activité sont étudiées par informatique pour ces deux zones et par comparaison est définie la “fraction de shunt”, pourcentage de sang porte qui ne passe pas au travers du foie [16]. Cette fraction est normalement inférieure à 15 % [15, 16, 49, 58, 76]. Les animaux affectés ont en moyenne une fraction de shunt préopératoire de 52 à 84 % et postopératoire de 58 % [16].

Il convient de ne jamais interpréter ces résultats isolément : s’ils indiquent une absence de shunt en contradiction avec les autres éléments diagnostiques, une portographie et/ou une exploration chirurgicale sont indiquées [58].

La résolution anatomique de la caméra gamma est insuffisante pour faire la distinction entre les types de shunt, leur nombre et permettre leur localisation [16, 34, 76].

Les facteurs de variation de la mesure de la fraction, à considérer notamment lors de l’évaluation postopératoire du degré d’occlusion, sont les facteurs humains dans la définition des “régions d’intérêt” et du “temps zéro” : les mouvements de l’individu au cours de l’examen qui entraînent une moins bonne définition des clichés, la dilution du produit dans une masse de matières fécales avec moindre absorption, l’administration d’un sédatif, une absorption partielle, notamment chez les petits animaux, par le côlon distal au lieu du côlon descendant, avec passage dans la veine cave caudale via la veine rectale caudale qui augmente faussement la fraction [16, 18, 36, 58, 76].

La scintigraphie est utilisée en postopératoire pour évaluer le degré d’occlusion du shunt [49]. Elle serait un meilleur indicateur que le dosage des acides biliaires [18]. Ne permettant aucune localisation anatomique, elle n'autorise toutefois pas la distinction entre un shunt partiellement occlus et un shunt acquis secondaire à une hypertension porte [49].

Lors d’occlusion partielle, les valeurs de shunt sont identiques ou diminuées par rapport aux valeurs préopératoires. La persistance d’une hypertension porte peut favoriser le passage du sang au travers du shunt : de nouvelles mesures sont nécessaires afin de confirmer qu’avec le temps et l’équilibrage de la pression porte, la fraction du shunt continue de décroître [16].

Dans le cas d’une encéphalose persistante, la scintigraphie permet de déterminer si les signes traduisent un shunt perméable ou une diminution des fonctions hépatiques [18].

Deux molécules ont été utilisées pour la réalisation de la scintigraphie par voie transrectale.

• L’iodo-amphétamine 123 est un produit onéreux, qui ne peut pas être produit sans être contaminé par des isotopes hautes énergies qui dégradent la qualité de l’image [36]. Il a une demi-vie relativement longue de 13,3 heures, qui justifie une hospitalisation prolongée [35, 36]. Cette substance est extraite par le foie et les poumons : le ratio d’extraction qui en découle est à la base du calcul du pourcentage de substance qui ne passe pas par le foie [15, 35].

• Le technétium pertechnate sous forme soufrée est un isotope de qualité, avec une courte demi-vie de six heures [16]. Il est absorbé en deux temps : une phase rapide de 14 %, avec visualisation de la porte en dix à quinze secondes, suivie d’une phase lente [36]. Non extrait, il n’est pas possible de définir une fraction d’extraction et il subit une redistribution avec le flux sanguin [15, 37].

Angiographie par résonance magnétique

L’image créée par résonance magnétique est générée par le signal électromagnétique émis par les protons de l’organisme soumis à différents champs magnétiques. Pour les shunts extrahépatiques acquis, elle admet une sensibilité de 63 % et une spécificité de 97 % ; pour les shunts extrahépatiques congénitaux, elles sont respectivement de 79 et 100 %. Elle permet l’identification de l’origine et de l’insertion du shunt dans 57 % des cas de shunt extra-hépatique et 97 % des cas de shunt intra-hépatique [65]. Elle demeure cependant une technique onéreuse difficilement accessible.

Autres

Lors d’ascite liée à une hypertension porte, le liquide prélevé est un transsudat modifié ou non. L’aspect modifié du transsudat traduit l’hypertension au sein des sinusoïdes hépatiques, avec passage de lymphe riche en protéines, ce qui est en faveur d’une obstruction hépatique ou posthépatique [31].

L’urine a une faible densité et des cristaux de biurate d’ammonium sont fréquemment observés [2, 4, 49].

7. Biopsie

L'analyse histologique du foie lors de shunt montre une atrophie lobulaire hépatique sévère à modérée liée à la non-exposition aux substances trophiques, une multiplication artériolaire périportale, une congestion veineuse, une prolifération des canalicules biliaires, une fibrose avec hypoplasie du système porte, une infiltration graisseuse diffuse ou centrolobulaire [1, 6, 54, 59, 60, 76, 80].

Il n’existe pas de différence significative entre les résultats histologiques obtenus chez des animaux atteints d’encéphalose et les animaux sains [20]. L’examen histologique reste le seul diagnostic de certitude de la dysplasie microvasculaire [1, 78].

L’étude histologique de reins de chiens atteints de shunt hépatique montre des lésions de glomérulopathie, avec un épaississement irrégulier des capillaires glomérulaires. La sévérité des lésions n’est pas corrélée à l’âge des animaux. Il ne semble pas qu’il y ait de dépôt d’IgA ou d’IgG comme chez l’homme lors de la glomérulosclérose cirrhotique (le foie ne joue plus son rôle de détoxifiant et de capture des antigènes qui se fixent dans les reins). Ces lésions s’accompagnent d’une protéinurie discrète, voire absente [70].

Face à toute affection systémique à manifestation nerveuse, digestive et/ou urinaire, il convient d'évoquer la possible existence d’un shunt.

Rappels anatomiques

Le traitement du shunt hépatique est le plus souvent chirurgical ; il nécessite une bonne connaissance de l’anatomie locorégionale, notamment de l’anatomie vasculaire.

Le foie est constitué de six lobes répartis en trois parties [71, b] :

- la partie gauche, composée du lobe latéral gauche et du lobe médial gauche ;

- la partie centrale, qui regroupe le lobe carré et le lobe médial droit. Entre ces deux lobes se situe la vésicule biliaire ;

- la partie droite constituée du lobe latéral droit et du lobe caudé. Ce dernier est subdivisé en lobe caudé stricto sensu et en processus papillaire, séparés par un isthme de parenchyme comprimé entre la portion hépatique de la veine cave caudale dorsale et la veine porte ventrale [55].

Le foie est fixé au diaphragme par le ligament triangulaire droit fin et sans réel support, et, surtout, par le ligament triangulaire gauche [55, 71]. Il est lié à l’estomac par le ligament gastrohépatique et au duodénum par le ligament hépatoduodénal [55].

La veine cave caudale naît des veines iliaques et lombaires (PHOTO 1). Elle reçoit la veine rénale droite, puis la veine rénale gauche, plus longue que son homologue et qui reçoit la veine ovarienne ou testiculaire gauche. Les veines rénales sont obliques et de fort diamètre. La veine cave caudale est ensuite rejointe par les veines phrénico-abdominales droite et gauche. Au niveau du hile hépatique, elle est dorsale et à droite de la veine porte ; les artères hépatiques, le plus souvent au nombre de trois, passent dorsalement. En avant du foie, elle devient la veine cave crâniale sur laquelle s’abouchent les veines phréniques, à hauteur du foramen, ainsi que six à huit veines hépatiques (PHOTO 2) [a]. Elles forment une spirale autour de la veine cave. À l'exception de la veine hépatique gauche, ventrolatérale, qui draine les lobes latéral et médial gauches et s’insère le plus en avant, les veines sont incluses dans le parenchyme hépatique [46, 71, b].

La veine porte naît, au niveau de la première vertèbre lombaire, de la veine mésentérique crâniale, formée par les veines jéjunales et iléales, et de la veine mésentérique caudale, formée par les veines iléo-colique (veine colique moyenne puis colique droite) et colique gauche (PHOTO 3). Elle est rejointe à gauche par une veine de diamètre élevé, la veine splénique, formée par les veines gastrique et gastro-épiploïque gauches, auxquelles se rajoutent deux petites afférences pancréatiques gauches. À environ 1,5 cm du hile hépatique la veine gastroduodénale s’abouche ; elle draine le sang depuis l’estomac et le tiers proximal du duodénum (veines gastrique et gastro-épiploïque droites) et la veine pancréatico-duodénale crâniale, qui draine le sang depuis le duodénum descendant et le pancréas [2, 59, 71, 80, a]. Au niveau du hile hépatique, la veine porte se scinde en deux branches : une branche droite qui irrigue la partie droite du foie, et une branche gauche qui se poursuit en direction des lobes centraux et gauches. Cette branche donne un rameau vers le lobe médial droit, puis se divise en veines carrée, médiale gauche et latérale gauche [46, 59, b]. La veine porte mesure 3 à 8 cm [2].

Le flux sanguin porte représente 75 à 80 % du flux sanguin hépatique total, 20 à 25 % du débit cardiaque au repos et 50 % de l’oxygène hépatique [46, 55, 60, 63]. C’est un système basse pression, sans valve antiretour. Il se mélange au sang artériel dans les sinus hépatiques, puis est drainé par les veines hépatiques [63].

La veine azygos débute au niveau de la troisième lombaire ; elle est ventrale du rachis jusqu’au tiers caudal du thorax [a].

Rappels sur le développement embryonnaire

Le système veineux porte, les sinus hépatiques et la portion hépatique de la veine cave caudale se forment par modification et anastomose des veines vitellines.

La portion restante de la veine cave et la veine azygos se forment depuis le système veineux cardinal [27, 55, 59].

La veine ombilicale contribue à la formation de la veine porte intrahépatique, des sinus hépatiques et du canal veineux. Ce dernier transporte le sang depuis la veine ombilicale gauche, au travers du foie fœtal, jusqu’à la veine cave crâniale, ce qui permet au sang oxygéné de passer du placenta au cœur sans traverser les sinus hépatiques [81].

Le canal veineux se ferme normalement dans les deux à trois jours après la naissance, suite à la chute brutale de flux sanguin liée à l’occlusion du flux ombilical ou à l’action de médiateurs type thromboxane [7, 48, 55, 59]. La seule communication physiologique est la jonction entre la veine cave préhépatique d’origine cardinale et la veine cave posthépatique d’origine vitelline [55].

Toute anomalie de formation des anastomoses entre veines vitellines et système veineux cardinal, ou anomalie de fermeture du canal veineux, conduit à l’existence d’un shunt portosystémique ou portocave [55, 59].

L’encéphalose hépatique

Les signes nerveux non spécifiques tels que l'anorexie, l'abattement, la polyuro-polydipsie, le ptyalisme, etc., et spécifiques, tels que les troubles comportementaux, les convulsions, etc., observés lors de shunt hépatique traduisent l’existence d’une encéphalose hépatique [4, 19].

Celle-ci est considérée comme une altération métabolique réversible (sauf lors d’atteinte chronique) du cerveau, induite par des altérations biochimiques secondaires à un dysfonctionnement hépatique (shunt, atteinte hépatique diffuse, déficience congénitale en enzymes du cycle de l’urée) [33, 72].

La pathogénie est mal connue et semble multifactorielle. Deux grandes théories sont avancées [4, 19, 78].

(1) Le foie ne métabolise plus les toxines en provenance du tube digestif qui circulent dans l’organisme. L’ammoniaque est l’un des éléments toxiques incriminés : elle est produite par les bactéries “uréase- positives” du côlon et, au niveau rénal, à partir de la glutamine, puis est extrait du système porte à raison de 81 à 87 % pour être converti en urée dans le cycle de Krebs. Son mécanisme d’action au niveau cérébral est inconnu et l’importance de l’encéphalose n’est pas proportionnelle à l’ammoniémie. Les autres éléments toxiques suspectés sont la méthionine transformée par les bactéries du tube digestif en mercaptans, les acides gras libres à courte chaîne, la glycine, un déséquilibre entre acides aminés aromatiques (phénylalanine, tyrosine et tryptophane) et acides aminés ramifiés (valine, leucine, isoleucine), à l’origine de faux neurotransmetteurs et de neurotransmetteurs inhibiteurs (l’acide gamma-aminobutyrique ou GABA, neuro-inhibiteur produit par les bactéries digestives), avec une augmentation de la sensibilité des récepteurs cérébraux [13, 19, 22, 39, 60, 73, a].

(2) Le foie s’atrophie progressivement en raison de l’absence de substances trophiques (insuline, glucagon, etc.) et ne produit plus les facteurs nécessaires au bon fonctionnement cérébral [19, 22, 48, 78].

Les facteurs d’aggravation sont les sédatifs, les hémorragies intestinales (source de protéines pour les bactéries) ; les transfusions avec du sang stocké ; les diurétiques (hypokaliémie secondaire, alcalose) ; les infections (catabolisme) ; la constipation [19, 22].

Test de l’excrétion de la sulfobromophtaléine

La sulfobromophtaléine, ou BSP, est une substance organique administrée à raison de 5 mg/kg (ou 0,1 ml/kg) dans une veine périphérique.

Une prise de sang est réalisée après 30 ou 45 minutes et la substance estdosée : il doitnormalement en demeurer moins de 5 % après une demi-heure et moins de 2,5 % après 45 minutes. Elle est en effet prélevée dans le flux sanguin, métabolisée par les hépatocytes, puis excrétée dans le tube digestif par la bile.

La vitesse d’excrétion est le reflet de la masse hépatique fonctionnelle : environ 55 % du foie doit être atteint pour que les valeurs augmentent.

Toute cause d’hypertension qui perturbe la circulation sanguine hépatique se traduit par une augmentation des valeurs. Ces valeurs sont cependant dépendantes de la clairance plasmatique, et sont affectées par l’hypoprotéinémie ou la présence d’un troisième secteur hydrique de type ascite.

Ce test nécessite plusieurs dosages, ce qui accroît les risques d’erreur et le rend peu aisé à réaliser.

D’après [12, 14, 31, 59, 60].

Causes des fractures

L’ammoniaque est très labile dans le sang ; il convient donc d'éviter l'hémolyse de l'échantillon, de le centrifuger immédiatement, de le conserver dans la glace et d'effectuer l'analyse dans l’heure qui suit le prélèvement.

Un shunt hépatique se traduit par une hyper-ammoniémie qui reflète la non-transformation hépatique en urée dans le cycle de Krebs. Le dosage admet des faux négatifs.

Il est complété par le test de tolérance à l’ammoniaque qui consiste, après douze heures de diète, en l’administration, par voie orale ou rectale, de chlorure d’ammonium, suivie de mesures de l’ammoniémie après 20, 30 ou 40 minutes. Ce test est un indicateur plus sensible des anomalies circulatoires mais se traduit par des vomissements et le déclenchement de crises d’encéphalose.

D’après [2, 31, 44, 60, 77, 78].

Congrès

- Philips L, Tappe J, Lyman R. Hepatic microvascular dysplasia without demonstrable macroscopic shunts. Proc. 11th ACVIM forum Washington DC, 1993.

Points forts

Chez les chiens de races de petite taille, les shunts sont extrahépatiques dans 93 % des cas, alors que chez les chiens de races de grande taille, ils sont intrahépatiques dans 90 % des cas.

Les signes cliniques observés lors de shunt hépatique sont le plus souvent non spécifiques et évocateurs de nombreuses autres affections.

La portographie n’est pas systématique car elle augmente le temps anesthésique, la morbidité et le coût. Elle est réalisée lorsque le shunt n’a pas pu être identifié lors de l’exploration abdominale ou que l’occlusion du vaisseau suspecté ne se traduit pas par une élévation de la pression dans le système porte.

À lire également

- Verez F, Viguier E. Le shunt portosystémique extrahépatique du chien. Aspects diagnostiques et thérapeutiques. L’Action Vétérinaire. 1997 ; 1415 : 21-30.

- Witz M, Pelrin F. Traitement chirurgical du shunt portosystémique chez le chien et le chat. L’Action Vétérinaire. 1999 ; 1488 : 11-18.

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