Des logiciels de suivi sanitaire en élevage toujours plus performants - Le Point Vétérinaire n° 234 du 01/04/2003
Le Point Vétérinaire n° 234 du 01/04/2003

APPROCHE GLOBALE DU SUIVI SANITAIRE

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NOUVEAUTÉS

Auteur(s) : Béatrice Bouquet

Des praticiens ont créé des outils informatiques qui facilitent la gestion des maladies en élevage.

Dans un contexte de taille croissante des élevages et d’intensification, les logiciels de suivi d’élevage aident l’éleveur et le vétérinaire pour une approche globale et préventive de la santé. « Nous avons invité une cinquantaine d’éleveurs de notre clientèle à une réunion de présentation d’un de ces logiciels : le Garbo-véto », témoigne Loïc Guiouillier, praticien à Pré-en-Pail (Mayenne). « Une vingtaine sont venus et la moitié d’entre eux a finalement acquis le système. »

Service après-vente vétérinaire

« Le manque de succès de l’informatique à la ferme s’explique en partie par l’absence de soutien logistique vétérinaire », estiment les concepteurs de Garbo-véto. « Le praticien peut aider chaque éleveur à analyser les données et à se fixer des objectifs zootechniques et sanitaires raisonnables », explique Bertrand Debotz, praticien à Sartilly (Manche). La saisie quotidienne des principaux événements sanitaires reste en revanche une tâche dévolue à l’éleveur. Dans la clientèle de notre confrère Loïc Guiouillier, un an après son lancement, Garbo-véto n’est correctement utilisé que dans cinq élevages sur une dizaine. « Il n’y a pas de profil type de l’éleveur intéressé », témoigne Loïc Guiouillier.

Version « tout-terrain »

Depuis 2000, les données de Garbo-véto peuvent être saisies sur Palm® (un petit écran avec un stylo tactile et quelques boutons fonctions) (PHOTO 1).

Garbo-véto est le fruit de recherches conduites à la faculté de médecine vétérinaire de Liège. Tout d’abord axé uniquement sur la reproduction, il s’étend aujourd’hui à l’identification, à la santé, à la production, à la génétique et à la croissance. « Cet outil est particulièrement intéressant comme registre d’élevage ». Des bilans (mensuels, annuels) de reproduction et des plannings de tarissement ou de vêlages peuvent ainsi être dressés. À tout moment, l’éleveur et le praticien sont en mesure de consulter les antécédents cliniques d’une vache du troupeau, le calendrier des chaleurs et des inséminations, les résultats laitiers mensuels, les taux cellulaires, etc.

Un logiciel comme assistant sanitaire

Comme Garbo-véto, Vétosurv a été conçu pour être un « assistant sanitaire de l’éleveur et du vétérinaire au quotidien ». Il a été créé dans le Sud-Ouest, sous l’impulsion de Christian Gipoulou, praticien à Castres (Tarn) et de la Fédération régionale des groupements techniques vétérinaires (FRGTV) Midi-Pyrénées. Il est également utilisé en élevage allaitant. Une version ovine est prévue, si la demande se fait sentir. « La progression est assez lente, avoue Christian Gipoulou, mais nous préférons bien verrouiller chaque étape. » Selon Paul Mondoly, praticien à Lacaunes (Tarn), testeur du logiciel, « l’informatique effraie encore quelques éleveurs. Certains sont en outre déjà équipés de programmes qui ne sont pas compatibles. Les mêmes données doivent alors être saisies plusieurs fois, ce qui est rébarbatif ».

Au fil des années, le volume d’informations que Vetosurv permet d’enregistrer et d’analyser s’est accru. « Aucun Palm® n’a la capacité suffisante de s’y adapter », explique Christian Gipoulou. Vétosurv pousse loin l’analyse de la reproduction et de la qualité du lait, surtout lorsque des accords de partages de données, avec le contrôle laitier par exemple, sont passés.

Protectionnisme des données

Dans Vétosurv, les numéros à dix chiffres doivent encore être rentrés manuellement. Dans certains départements, en effet, contrôles laitiers et/ou ARSOE(1) partagent difficilement les données qui concernent les élevages.

Pour Garbo-véto, en revanche, des accords ont été passés avec le contrôle laitier et l’éleveur peut racheter ses données pour les utiliser dans ce logiciel, pour la somme de 160 € environ.

Le contrôle laitier, les firmes de génétique, etc., développent leurs propres logiciels, qui incluent des modules sanitaires comme « Clarté » ou « Tech alliance » pour le contrôle laitier, avec une version pour Palm® en préparation. Dans le Nord-Pas-de-Calais, contrôle laitier, organismes d’identification et groupements de défense sanitaire se sont alliés à la firme de génétique Gène diffusion pour lancer le logiciel Synel. Celui-ci rend pratiquement les mêmes services à l’éleveur que Garbo-véto, avec une possibilité de saisies en ligne des naissances, etc. (ou par Palm®).

Choisir ses partenaires

Face à cette course aux données, Marc Ennuyer, praticien dans la Somme, défend plutôt un système où l’informatique « reste à la ferme ». Le logiciel Kit fécondité ne nécessite pas de conclure d’accords particuliers avec les partenaires d’élevage. Il est destiné au vétérinaire qui intervient dans le cadre d’un suivi d’élevage ou d’un audit de fécondité. Il est dérivé du Kit fécondité dans sa version papier et du logiciel Sintel.

L’éleveur doit « garder son indépendance et choisir ses partenaires », insiste Marc Ennuyer. Je ne souhaite pas un organisme centralisateur des informations qui puisse, d’une part, orienter, voire sélectionner les intervenants dans l’élevage, d’autre part, pointer du doigt les éleveurs « bons en génétique », « mauvais en hygiène », « bons en qualité du lait », etc. ».

Kit fécondité ne gère pas le quotidien de l’éleveur. Il aide le praticien à objectiver un problème, à le quantifier et à le résoudre.

Médicament et estimation des pertes

Un autre outil informatique « complémentaire mais pas concurrent du précédent », selon Marc Ennuyer, est proposé : Estel. Il ne gère pas la reproduction, mais l’utilisation du médicament. Il décrit la maladie à partir du registre d’élevage que doit remplir l’éleveur ou le praticien à chaque intervention. Il permet d’estimer la fréquence et les coûts direct et indirect des maladies qui affectent l’élevage (laitier, veaux de boucherie, voire allaitants). Développé il y a sept ans en Ille-et-Vilaine, il est également bien implanté en Haute-Normandie, avec l’appui de l’ARGDS et du GTV régional, dans le cadre du réseau local d’épidémiosurveillance. « À partir des enregistrements du registre des soins, nous réalisons la saisie informatique des données une fois par mois », explique Gerrit Boender, praticien utilisateur en Seine-Maritime. Une dizaine de ses clients l’utilisent actuellement. Des bilans sont effectués au moins une fois par an. Un comparatif interélevages est établi, avec des critères d’alerte qui mettent en évidence les défaillances de l’élevage. « L’éleveur se rend compte du coût réel des différentes maladies. Des actions spécifiques peuvent donc plus facilement être proposées par le vétérinaire », souligne Gerrit Boender.

Rude concurrence

Outre les praticiens et les institutions, des firmes privées commercialisent d’autres logiciels qui incluent des volets sanitaires, comme Isagri. La version élevage laitier, baptisée « Isa-lait » (800 €), est souvent achetée par les éleveurs en même temps que leur logiciel de comptabilité (Isa-compta), avec « en prime » des séances de formation à l’informatique. Les données peuvent être saisies sur Pocket PC® (plus cher, moins autonome mais plus puissant que Palm®).

  • (1) ARSOE : associations régionales qui gèrent les bases de données de l’élevage bovin.

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