Traitement chirurgical des fistules périanales - Le Point Vétérinaire n° 229 du 01/10/2002
Le Point Vétérinaire n° 229 du 01/10/2002

PROCTOLOGIE CHEZ LE CHIEN

Se former

COURS

Auteur(s) : Véronique Clerc*, Didier Fau**

Fonctions :
*46, rue du Maréchal-Delattre
de-Tassigny
94700 Maisons-Alfort
**Service chirurgical
ENVL

Le traitement chirurgical des fistules périanales est entrepris en seconde intention, après le traitement médical immunosuppresseur. Le choix de la technique dépend du stade des lésions.

Avant l’apparition des immunosuppresseurs, le traitement chirurgical des fistules périanales chez le chien était le seul réellement efficace. Aujourd’hui, il fait plutôt suite au traitement médical, en le complétant. L’intervention est entreprise lorsque, au terme de deux à trois semaines, le traitement médical n’améliore pas les lésions. Différentes techniques sont utilisées selon le type de fistules.

Préparation de l’intervention

1. Antibiothérapie

Une antibiothérapie est instaurée un à trois jours avant l’intervention chirurgicale [1, 2, 14]. Le plus fréquemment, un antibiotique à visée entérique est prescrit quelques jours avant l’opération pour diminuer le risque de contamination des fistules par la flore fécale. L’antibiothérapie est complétée par l’administration, une à deux heures avant l’intervention, d’un antibiotique à large spectre par voie intraveineuse. Celle-ci est poursuivie pendant vingt-quatre heures après l’acte chirurgical, puis un relais peut être mis en place par voie intramusculaire ou orale. La céphalexine, la gentamicine, la clindamycine ou l’association gentamicine-métronidazole sont utilisées [6, 14].

2. Alimentation

Il est conseillé de réduire la ration alimentaire habituelle une semaine avant l’opération [14], voire de la diviser par deux et/ou d’utiliser une alimentation à faibles résidus. Pour éviter que l’animal ne soit affamé, la diminution du volume alimentaire peut être compensée par la distribution de bouillon de légumes, de yaourts, de fromage blanc, etc. [1].

Une diète hydrique est mise en place entre vingt-quatre et soixante-douze heures avant l’intervention chirurgicale [1, 2, 14]. Les bouillons de légumes, les yaourts et le fromage blanc à 0 % sont autorisés pendant cette diète [1].

3. Laxatifs et lavements

Des laxatifs et des substances qui diminuent la consistance des selles sont administrés vingt-quatre à soixante-douze heures avant l’intervention [14], voire huit jours avant [1].

Des lavements sont effectués, quelle que soit la période de diète hydrique, entre les douze et trente-six heures qui précèdent le traitement chirurgical. Ils sont, en revanche, contre-indiqués dans les douze heures avant l’intervention, en raison des risques de fuite peropératoire de matières fécales.

Temps préopératoire

• L’animal est largement tondu, après prémédication ou sous anesthésie. La zone tondue comprend :

- la base de la queue sur toute sa circonférence ;

- la zone périanale jusqu’aux bourses ou jusqu’à la vulve [5] ;

- les faces internes et caudales des cuisses.

• Le chien anesthésié est placé en décubitus sternal sur la table chirurgicale. Cette dernière est inclinée de 25 à 30° au maximum (voir la FIGURE “Position opératoire avant la mise en place des champs”) [9]. Les membres antérieurs sont tirés et fixés vers l’avant, les membres postérieurs pendent dans le vide. Un coussin est placé sous le ventre et les cuisses de l’animal afin d’éviter qu’il ne se blesse au bord de la table, d’ajuster la hauteur et de le maintenir en position. Les membres postérieurs ne sont pas tirés vers l’avant car une traction trop forte risquerait de léser les nerfs fémoraux (dits familièrement “nerfs sciatiques”) [9]. La queue est ramenée vers l’avant et au-dessus du chien. Elle est maintenue à l’aide de deux lacets fixés de chaque côté de la table. Il est possible d’utiliser un ruban adhésif collé directement sur le dos ou relié à une pince hémostatique fixée sur le dos du chien. La position correcte de la queue est essentielle car elle conditionne la mise en place des sutures, donc la forme du nouvel orifice anal.

• Les sacs anaux sont ensuite vidangés complètement, ainsi que, éventuellement, l’extrémité distale du rectum. Un tampon hygiénique ou des compresses (imbibés d’une solution d’antiseptique diluée) sont placés dans le rectum afin d’éviter toute souillure pendant l’opération. Ils seront retirés dès la fin de l’acte chirurgical.

• Le site opératoire est nettoyé et désinfecté par des lavages successifs avec un savon antiseptique (à base de povidone iodée ou de chlorhexidine), puis par l’application d’une solution antiseptique (povidone iodée ou chlorhexidine).

Techniques chirurgicales

1. Exérèse des fistules et sutures

L’exérèse des fistules est réservée aux cas les plus simples : petits pertuis de stade 1 et fistule des sacs anaux. Rapide, cette technique permet une cicatrisation par première intention [12, 9].

• Une incision cutanée est effectuée autour des orifices fistuleux.

• Les cavités abcédées sont ouvertes et disséquées minutieusement pour les séparer des tissus normaux.

• Les sacs anaux sont toujours retirés, qu’ils soient atteints ou non.

• Si une fistule rectale est présente, elle est excisée et la paroi rectale est soigneusement suturée. Les cavités formées sont examinées attentivement pour éviter de laisser en place des tissus anormaux. Elles sont ensuite largement irriguées avec une solution antiseptique diluée.

• Les cavités sont suturées, éventuellement sur un drain, en trois plans :

- un premier plan profond réduit au minimum la lumière cavitaire (à l’aide de points simples de fil résorbable) ;

- un deuxième plan sous-cutané est réalisé avec des points simples de fil résorbable ;

- un troisième plan cutané achève la suture avec des points simples de fil monofilament, résorbable ou non.

Les points simples facilitent le traitement des désunions de suture, très fréquentes dans cette région régulièrement contaminée par les matières fécales.

L’utilisation d’un fil monofilament ou enduit évite le drainage des germes dans cette région fortement contaminée.

• Lorsqu’un drain est mis en place (à l’exception des fistules qui communiquent avec l’intérieur du rectum), il est retiré trois à quatre jours après.

• Lorsque la dissection est plus étendue en surface, seuls les points profonds sont effectués (pour éviter des tensions trop importantes, qui provoquent des désunions des points de suture). La cicatrisation a alors lieu par seconde intention et la guérison définitive est obtenue en deux à trois semaines.

• Lorsque les pertes de substance après dissection sont particulièrement étendues, aucune suture n’est mise en place. La guérison est obtenue au bout de quatre à six semaines, par granulation.

Cette technique permet d’obtenir de bons résultats lors de stade 1 associé à des pertuis et à des fistules des sacs anaux. Les récidives sont rares [9, 12]. Cependant, si les lésions sont plus étendues (à partir du stade 2) et que les points de suture sont placés sous tension, le taux de réussite chute à 46 % [12].

2. Dissection, cautérisation et curetage des fistules

Les techniques de dissection, de cautérisation et de curetage des fistules concernent les stades 1 et 2 et le stade des pertuis et/ou de la dentelle, associés à des fistules des sacs anaux.

Cautérisation électrique

La technique de dissection, de cautérisation et de curetage des fistules a pour but de conserver les tissus sains et les structures essentielles, comme le sphincter anal externe. Les parties atteintes sont explorées et parées. Elles cicatrisent par seconde intention (voir la FIGURE “Technique d’extériorisation, de cautérisation et de curetage des fistules périanales”). Cette méthode est employée lors de stade 2 ou 3.

• L’orifice des sacs anaux est repéré puis sondé afin de déterminer la position des sacs et d’établir s’ils ont été détruits par l’inflammation. Lorsque c’est le cas, leur ablation est pratiquée. Celle-ci doit être complète pour éviter les récidives de fistules. La présence de tissu de granulation rend parfois la dissection difficile, lorsque l’affection primaire s’étend à la région des sacs anaux. Il convient également de veiller à léser le moins possible le sphincter anal externe et son innervation lors de cette ablation.

• Chaque orifice fistuleux est repéré et sondé pour déterminer sa profondeur et sa direction. Tous les tissus qui entourent et surmontent les lésions sont éliminés à l’aide du bistouri électrique. Les trajets fistuleux sont explorés jusqu’au fond et tous les tissus de granulation et de cicatrisation sont retirés afin de créer une plaie ouverte en “soucoupe”. Dans les cas sévères, ce temps opératoire exige de léser le sphincter anal externe. Il convient alors de ne pas éliminer complètement les lésions pour éviter des pertes de substance trop étendues du sphincter. L’innervation doit en outre être préservée au mieux (pour prévenir les séquelles d’incontinence fécale).

• Après la mise à découvert des parties atteintes, une fulguration du fond de chaque lésion est réalisée. Cette dissection des tissus malades atteint une profondeur de 1 à 2 mm sans léser les parties plus profondes, souvent essentielles [8, 12].

• La zone opérée est irriguée abondamment à l’aide d’une solution antiseptique (povidone iodée ou chlorhexidine).

Cette technique rapide offre de bons résultats [12]. Toutefois, la fulguration provoque souvent la formation de cicatrices étendues et sténosantes de l’anus. L’utilisation d’une électrode assez fine permet un contrôle correct de la surface cautérisée [23]. Le taux de récidives est parfois élevé [15]. Dans les cas graves, il est nécessaire d’utiliser des techniques plus agressives.

Cautérisation au laser

Il est possible d’exciser les tissus fistuleux avec un bistouri laser (Yag laser®), qui a pour caractéristiques une énergie de 60 W et un rayonnement de longueur d’onde de 1,064 µ. Cette technique préserve mieux les tissus sains en raison de sa précision. Elle est suivie de moins de complications que l’intervention chirurgicale : peu d’écoulements et de nécrose liés à l’utilisation du laser. Le taux de récidives est faible par rapport aux autres techniques, mais son application est onéreuse [6].

Cautérisation par le froid

Il est possible d’utiliser la cryochirurgie [14]. Après le traitement cryochirurgical, les tissus fistulisés se nécrosent et sont remplacés par des tissus sains. Les tissus cicatrisent par seconde intention.

Les suintements, l’œdème et les écoulements nécrotiques postopératoires sont des complications qui expliquent le peu de succès à l’heure actuelle de ce traitement. Les résultats sont sensiblement les mêmes que pour la cautérisation électrique.

Fistulectomie avec cryptectomie et plastie rectocutanée totale

La fistulectomie avec cryptectomie et plastie rectocutanée est adaptée au traitement des fistules de stade 3 ou 4 et de stade de la dentelle ou des cavernes, associées à des fistules des sacs anaux et/ou à des fistules sous-muqueuses et des culs-de-sac rectaux et/ou des fistules rectales. Elle comporte quatre temps opératoires (voir la FIGURE “Technique de fistulectomie associée à la cryptectomie totale”) [7, 9, 11].

• Le premier temps consiste à inciser et à isoler les tissus sains de la zone fistulisée.

Une incision de 360° périrectale, pas forcément symétrique par rapport à l’anus, est réalisée (PHOTO 1). Elle contourne largement les tissus fistulisés, de couleur suspecte, et délimite une zone cutanée saine qui permet la réalisation des points de suture cutanéorectaux.

La région limitée par l’incision est décollée et isolée par une dissection mousse aux ciseaux, de façon centripète, pour parvenir jusqu’aux marges de l’anus qui sont marquées par la présence du sphincter anal externe.

• Le deuxième temps consiste en l’ablation des sacs anaux (voir la FIGURE “Ablation des sacs anaux”). Elle est réalisée avec ou sans produit de remplissage [11] (hydrocolloïdes utilisés pour les empreintes par les dentistes ou élastomères de silicone).

Sans produit de remplissage, la dissection est réalisée à sac fermé ou ouvert.

Si le sac est rempli, son bombement sous la peau indique le lieu de l’incision (en regard de la région bombée). Si le sac est vide, une sonde cannelée ou une pince hémostatique est introduite via le conduit anal dans le sac anal et permet d’en connaître la position. L’incision cutanée est effectuée en regard du sac, perpendiculairement à son grand axe. La dissection est poursuivie jusqu’à la découverte de l’extrémité distale du sac. Elle est alors orientée de cette extrémité vers le canal anal, en séparant le sac des fibres musculaires du sphincter anal externe. Il convient de préserver au maximum ces fibres musculaires.

Lorsque le sac est isolé, le canal excréteur est ligaturé, puis sectionné.

Si la peau est déjà incisée pour fistulectomie, le sac est recherché en regard de l’endroit où la peau a été décollée. Parfois, la région est tellement modifiée que les restes du sac sont retirés lors du traitement des fistules.

Si les sacs ont été détruits par l’inflammation, le tissu restant est enlevé lors du premier temps.

• L’amputation de la zone des cryptes constitue le troisième temps opératoire. Un doigt peut être placé à l’intérieur du rectum pour mieux localiser la zone des cryptes et sa limite afin d’en faciliter la dissection. Celle-ci a pour but l’exérèse de la zone des cryptes qui tapissent le canal anal, lui-même entouré par les sphincters. Dans les cas les plus favorables, seule la muqueuse qui forme les cryptes est ainsi individualisée, en préservant la paroi du canal anal. Si les fistules sont trop évoluées, l’amputation globale est souvent la seule issue possible.

Le travail de dissection est effectué aux ciseaux et à la compresse (PHOTOS 2, 3 et 4). Il suit au plus près la sous-muqueuse tendue par le doigt introduit dans le rectum, afin de respecter au maximum le sphincter anal interne. La fin de la zone des cryptes est marquée par le passage d’une zone pigmentée et festonnée à une zone rose et lisse. La zone décollée est alors sectionnée, ce qui revient à amputer le canal anal juste en arrière du rectum.

Le contrôle de l’hémostase est assuré par électrocoagulation (en particulier des artères rectales caudales et ventrales). Le nerf rectal caudal chemine en région craniale du sphincter externe, du côté ventrolatéral du rectum. Une dissection très partielle du sphincter externe permet de le préserver. Chez les animaux qui ont subi une amputation conséquente du sphincter externe, une diminution de la motricité sphinctérienne peut être observée. Mais cette motricité demeure parfois suffisante pour permettre une défécation normale [9]. La continence relève alors essentiellement du sphincter interne.

• Le quatrième temps correspond à la plastie rectale et à la suture.

Le rectum est suturé aux tissus sous-cutanés et cutanés. Si le délabrement est réduit, une plastie complète est réalisée. Lorsque le délabrement est étendu, la plastie est réservée à la région ventrale ou n’est pas effectuée. La suture est réalisée en deux plans :

- un plan profond qui unit le muscle sphincter externe rectal aux tissus sous-cutanés avec des points simples à l’aide d’un fil résorbable monofilament (PHOTO 5) ;

- un plan superficiel cutanéomuqueux entre la peau et le rectum avec des points séparés de fil résorbable ou non, monofilament de préférence (PHOTOS 6 et 7).

Lors d’intervention délabrante, il est possible de laisser des portions étendues de tissus sous-cutanés à l’air libre. Cela évite des tensions tissulaires excessives et la mise en place de points responsables de déhiscence. Le tissu de granulation se développe en une dizaine de jours. Dans ce cas, il est préférable de placer des points de suture dans le cadran rectal inférieur en laissant le cadran rectal supérieur libre.

Fistulectomie avec cryptectomie partielle

La fistulectomie avec cryptectomie partielle est réalisable lors de fistules de stade 1 ou 2 (et fistules du stade de la dentelle ou des cavernes, associées à des fistules des sacs anaux et/ou à des fistules sous-muqueuses et des culs-de-sac rectaux et/ou des fistules rectales). Elle comprend quatre temps (voir la FIGURE “Technique de fistulectomie partielle”) [9, 11].

Seul le quartier fistulisé et le quartier de la zone des cryptes correspondant sont excisés. Les zones restées en place contribuent à maintenir la souplesse de l’anneau rectal pour limiter la sténose anale ou l’incontinence.

• Le premier temps correspond à l’incision cutanée de la zone fistulisée selon la même méthode que la technique totale, mais l’incision délimite un arc de cercle.

• Le deuxième temps correspond à l’ablation des sacs anaux.

• Le troisième temps est l’excision de la zone des cryptes. La zone cutanée fistulisée étant maintenue par des pinces d’Allis, la dissection est poursuivie depuis l’intérieur du canal anal mais elle est limitée au quartier correspondant aux fistules. La dissection s’arrête à la zone des cryptes, juste avant le début de la zone rectale. Il convient alors de racler la muqueuse de la zone des cryptes en respectant la paroi.

• Le quatrième temps est le temps de suture. Si les tensions tissulaires consécutives sont faibles, les sutures sont placées selon deux plans qui incluent successivement le rectum et le tissu sous-cutané, puis le rectum et la peau. Le caractère dissymétrique de l'intervention peut provoquer une déviation de l’anus, qui ne crée pas de complication secondaire. Si les tensions tissulaires sont marquées ou si les tissus ne sont pas sains, la zone d’exérèse est laissée à cicatriser par seconde intention.

Résultats des fistulectomies associées à la cryptectomie

Chez quarante-trois chiens atteints de fistules périanales traités par fistulectomie avec cryptectomie totale, 79 % des résultats ont été considérés comme “très bons” ou “acceptables” [10].

Dans une autre étude, suite à une fistulectomie avec cryptectomie totale, aucune récidive n’a été observée sur un lot de vingt chiens [9]. D’après cette étude, les risques (sténose, incontinence) sont faibles, même en cas d’amputation considérable et la douleur disparaît. L’animal reprend du poids et défèque à nouveau normalement.

La technique de fistulectomie associée à la cryptectomie nécessite toutefois une grande habileté, surtout au moment de la dissection de la zone des cryptes. Le taux de complications varie selon l’expérience du praticien et la gravité des lésions. Lors de l’excision chirurgicale, ce taux varie de 51 à 83 %. L’aspect des plaies après la chirurgie nécessite de prévenir le propriétaire.

Soins postopératoires

Les soins postopératoires incluent une hospitalisation pendant au moins vingt-quatre heures, communément quatre à cinq jours, voire davantage lorsque le propriétaire ne peut assurer ces soins [10]. L’animal doit porter une collerette pour éviter tout accident d’auto-mutilation [9, 10].

Les soins locaux sont effectués deux ou trois fois par jour : nettoyage et désinfection à l’aide d’une solution physiologique associée à un antiseptique (povidone iodée à 1 % ou chlorhexidine à 0,05 %) [5, 7, 9]. Ils sont poursuivis jusqu’à la cicatrisation totale (soit une quinzaine de jours environ).

L’alimentation est légèrement laxative en phase postopératoire grâce à une plus grande proportion de légumes [9] ou à l’ajout d’huile de paraffine pendant au moins deux semaines. Il est possible de proposer une alimentation à faibles résidus [5, 10].

Complications

1. Complications à court terme

• Les désunions de suture sont des complications très fréquentes (50 % des cas) qui se produisent majoritairement le troisième jour après l’intervention [9, 17]. Elles peuvent être partielles ou totales. Elles sont liées à la défécation, aux mouvements de la queue et des membres postérieurs et à la surtension des sutures [10]. Il est rare de suturer à nouveau. La plaie cicatrise bien par seconde intention [9, 10], mais il convient de la nettoyer après chaque défécation [16].

Ces désunions de suture surviennent surtout lors de fistulectomie associée à une cryptectomie totale. Parfois, la déhiscence complète de la suture est suivie d’une striction anale.

Pour les prévenir, il est conseillé de mettre en place des points résorbables entre les tissus profonds (paroi du rectum et fascia sous-cutané) pour immobiliser le rectum et réduire les tensions des sutures entre la peau et la muqueuse rectale.

• L’incontinence fécale est fréquente pendant la période de cicatrisation [10], surtout lors de fistulectomies associées à des cryptectomies totales.

• Une diarrhée survient parfois immédiatement après l’opération [11].

• Dans les heures qui suivent l’intervention, des saignements nécessitent parfois une nouvelle intervention pour assurer une hémostase chirurgicale.

2. Complications à long terme

• L’incontinence fécale est l’une des principales complications en raison de sa fréquence et des désagréments qu’elle engendre. Elle est présente chez 24 à 28 % des chiens opérés [3] (26,8 % [17]).

L’incontinence fécale est due à une lésion trop étendue du sphincter anal externe et surtout à la lésion du sphincter anal interne. Quand elle est incomplète, elle se traduit par l’émission d’une petite quantité de selles à chaque fois que la pression abdominale augmente, par exemple lorsque le chien est excité ou qu’il aboie. Lorsqu’elle est totale, le chien émet des fèces en permanence.

Elle aboutit souvent à l’incapacité de terminer normalement la défécation. Des selles restent adhérentes à la région périanale [16].

Une alimentation à faible teneur en résidus (haute digestibilité) permet de pallier ce trouble [10, 18]. Il est également possible d’instaurer un traitement symptomatique antidiarrhéique et d’augmenter le nombre de promenades hygiéniques. Une vie totalement à l’extérieur de l’habitation reste la meilleure solution.

Les risques d’incontinence fécale augmentent lors des récidives, en raison des séquelles des nouvelles lésions après traitement. Les incontinences les plus sévères sont un motif d’euthanasie.

• La sténose anale [3, 6] atteint 14,6 % des chiens traités chirurgicalement pour fistules [17]. Des études décrivent 14 % de cas de sténose anale après une fistulectomie associée à une cryptectomie totale [3] et 21 % de sténoses anales suite à l’extériorisation, à la cautérisation et au curetage des fistules [12]. Nous avons constaté 18 % de sténoses anales dans notre étude [4]. Cette complication peut être prévenue par un geste aussi peu traumatisant que possible.

La sténose anale postchirurgicale se traduit par la présence d’un tissu dense et fibreux autour de l’orifice anal, dont le diamètre est diminué. Cette striction, perceptible lors du toucher rectal, provoque un ténesme en raison de l’absence de dilatation anale.

Le traitement de cette complication dépend alors de sa gravité :

- lors de sténose peu marquée, une dilatation anale est réalisée sous anesthésie générale soit à l’aide d’un ballonnet, soit à l’aide d’une bougie. Elle permet d’augmenter le diamètre du canal anal, mais l’amélioration n’est souvent que temporaire [11] ;

- lorsque la sténose n’inclut pas les structures profondes, les brides cicatricielles sont excisées [11] ;

- lors de sténose sévère incluant les structures profondes ou suite à l’échec des techniques précédentes, une anoplastie est effectuée par incision radiale ou en Z. La partie terminale du rectum est parfois amputée [11].

• Des flatulences sont décrites après une fistulectomie associée à une cryptectomie totale [1, 10]. Elles sont parfois à l’origine de l’éversion distale du rectum (prolapsus rectal) : 17,1 % de 41 chiens opérés par fistulectomie associée à une cryptectomie totale [17]), et doivent alors être traitées par réduction du prolapsus rectal.

• Le taux de récidives des fistules est variable selon les études : entre 17 et 56 % toutes techniques chirurgicales confondues [3], 23 % selon une autre étude [12], 45 à 56 % après fistulectomie associée à une cryptectomie totale [15] et 56 % dans un délai moyen de 15,7 mois (intervalle compris entre 1 et 70 mois) [17]. Dans notre étude, 47 % de récidives ont été observées [4]. Ces récidives nécessitent parfois des interventions chirurgicales répétées ou un traitement médical. Elles peuvent constituer un motif d’euthanasie.

L’intervention chirurgicale des fistules périanales est généralement entreprise en seconde intention, après le traitement médical immunosuppresseur. Ce dernier réduit les lésions et permet d’utiliser des techniques chirurgicales sans cryptectomie.

Le plus fréquemment, en pratique, le traitement médical est mis en place pendant deux à quatre semaines, puis il est complété par une opération des fistules périanales.

La technique chirurgicale est choisie selon le stade des fistules périanales. Cependant, lors de fistules de stade 3 ou 4, de stade des cavernes, associées à des fistules des sacs anaux et/ou à des fistules sous-muqueuses et des culs-de-sac rectaux et/ou des fistules rectales, les fistulectomies avec cryptectomie (partielle ou non) demeurent le traitement le plus efficace et le moins sujet à récidive.

Points forts

Lors d’intervention chirurgicale de fistules périanales, le positionnement correct de la queue est essentiel, car il conditionne la mise en place des sutures, donc la forme du nouvel orifice anal.

Il est possible d’exciser les tissus fistuleux avec un bistouri laser. Cette technique, plus précise, préserve mieux les tissus sains que la cautérisation au bistouri électrique.

Les désunions de suture sont des complications fréquentes (50 % des cas) qui se produisent majoritairement le troisième jour après l’intervention.

L’incontinence fécale est l’une des principales complications en raison de sa fréquence et des désagréments qu’elle engendre. Elle est présente chez 24 à 28 % des chiens opérés.

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