Les décollements de rétine et des lésions oculaires de l'hypertension artérielle féline en images - Le Point Vétérinaire n° 226 du 01/06/2002
Le Point Vétérinaire n° 226 du 01/06/2002

Se former

COURS

Auteur(s) : Bernard Clerc*, Sabine Chahory**

Fonctions :
*Service d’ophtalmologie, ENVA,
7, avenue du Général de Gaulle,
94704 Maisons-Alfort Cedex

Dans le réseau vasculaire de l’œil, l’hypertension artérielle provoque des modifications d’aspect du segment antérieur et du segment postérieur.

Dans le segment antérieur, des hémorragies peuvent être observées sur les deux yeux de façon symétrique ou non (PHOTO 1) ou sur un seul œil (PHOTO 2). L’hémorragie de la chambre antérieure est souvent organisée. Son origine est soit l’iris, soit le corps ciliaire. Après traitement, des séquelles persistent sur l’iris (PHOTO 3), avec une altération de la surface de l’iris qui évoque une séquelle d’uvéite. Un nodule organisé persiste sur l’iris “à 6 heures” en regard de la base de l’ouverture pupillaire. Les lésions hémorragiques régressent avec le traitement médical de l’HTA.

Dans le segment postérieur, de multiples lésions de rétinopathie hypertensive peuvent être mises en évidence (comparer avec un fond d’œil normal, PHOTO 4). Des hémorragies vitréennes, identifiées par un examen au transilluminateur et après dilatation, ou encore après un examen ophtalmoscopique, peuvent être constatées. Les lésions les plus fréquentes et les plus caractéristiques sont observées en ophtalmoscopie. Il est possible d’observer des lésions de rétinopathie, de choroïdopathie ou de névropathie optique lors de l’examen ophtalmoscopique.

Décollement de la rétine

De multiples décollements séreux de la rétine (PHOTOS 5, 6 et 7) sont observés dans les stades évolués. Ces décollements bulleux ou séreux pourraient également être observés lors de maladie inflammatoire du fond d’œil. L’origine du décollement n’est affirmée que par la mesure de la tension artérielle.

Le décollement bulleux unique peut être de plus grande taille (PHOTO 8). Il ressemble dans ce cas au décollement maculaire séreux décrit chez l’homme. Il est ici situé dans l’area centralis rétinienne, zone pauvre en vaisseaux qui est la partie essentielle pour la vision.

Décollement rétinien avec déchirures et hémorragies

Le décollement peut être étendu et accompagne des hémorragies rétiniennes perceptibles directement après dilatation de l’iris (PHOTO 9). Il peut résulter d’hémorragies de la choroïde et d’œdèmes qui proviennent de lésions choriocapillaires.

Hémorragies

Les hémorragies en nappe se situent entre deux lames tissulaires. Elles peuvent être prérétiniennes, sous-rétiniennes ou sous l’épithélium pigmentaire (PHOTOS 8, 9 et 10).

Il est difficile de dissocier ces hémorragies en nappe des hémorragies intrarétiniennes. Néanmoins, leur extension marquée et leur couleur rouge sombre sont en faveur d’hémorragies sous-rétiniennes.

Sur la PHOTO 10, le sang est bien en position sous-épithéliale. En revanche, sur la PHOTO 9, l’hémorragie s’étend largement sous le décollement rétinien, qui s’accompagne d’une déchirure probable à l’ora serrata. Les vaisseaux rétiniens, dégénérés et exsangues, sont matérialisés par les trajets blancs qui traversent l’image.

Les hémorragies intrarétiniennes ponctiformes, en flamme, en houppe de coton et les hémorragies périvasculaires

Dans la rétine, l’hémorragie se développe autour des structures rétiniennes. Les hémorragies superficielles siègent le long des fibres des cellules ganglionnaires et autour des vaisseaux (PHOTO 10).

Les hémorragies en zone moyenne se développent entre les cellules bipolaires. Elles sont ponctiformes (PHOTOS 8 et 11). Lorsqu’elles disparaissent, elles laissent une trace sous la forme de ponctuations noires.

Les lésions de la choroïde, bien étudiées par différents auteurs vétérinaires [2], peuvent être responsables de lésions rétiniennes ou sous-rétiniennes.

Les décollements séreux de la rétine

Les altérations choroïdiennes sont identifiées par les modifications de couleur du tapis qui est une structure choroïdienne (PHOTOS 8 et 12). La modification d’aspect résulte à la fois de la modification choroïdienne et de l’altération rétinienne, dont la nutrition est perturbée (aspect plus ou moins brillant des lésions).

La neuropathie optique secondaire à l’hypertension vasculaire a été décrite lors d’études expérimentales. Unœdème de la papille, consécutif aux troubles vasculaires, est présent. Cette lésion est rarement ou non identifiée chez le chat lors de l’examen clinique, en raison d’unœdème rétinien, d’un décollement de la rétine ou d’une hémorragie qui peuvent masquer l’oedème papillaire.

Les signes de l’oedème de la papille sont, pour des raisons anatomiques, moins évidents que chez le chien et il existe peu de comptes rendus angiographiques qui indiquent plus précisément la fréquence et l’étendue de l’oedème papillaire chez le chat hypertendu.

L’évolution terminale est l’atrophie optique (PHOTO 12). Une chatte âgée de douze ans a ainsi été suivie pendant six mois malgré le refus de sa propriétaire de traiter l’HTA. Les lésions d’atrophie de la papille sont associées à une dégénérescence de tout le système vasculaire rétinien et à la présence d’exsudat organisé. Elles constituent l’évolution terminale de la dégénérescence rétinienne.

Les modifications tardives du fond d’oeil du chat hypertendu.

L’atrophie rétinochoroïdienne accompagne les cas de dégénérescence rétinienne au stade terminal et provoque un changement d’aspect et de couleur, surtout perceptible dans la zone du tapis.

Bibliographie

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  • 16 - Synder PS. Amlodipine : a randomized, blinded clinical trial of 9 cats with systemic hypertension. J. Vet. Intern. Med. 1998 ; 12 : 157.
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