L'octodon (Octodon degus) en consultation - Le Point Vétérinaire n° 225 du 01/05/2002
Le Point Vétérinaire n° 225 du 01/05/2002

CONSULTATION DES NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE : RONGEURS

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COURS

Auteur(s) : Léa Kishida

Fonctions : 165, rue de Charonne
75011 Paris

L'introduction comme animal de compagnie en Europe de l'octodon, originaire d'Amérique du Sud, est récente. Sa consultation nécessite de connaître ses particularités et ses besoins.

L'octodon (PHOTO 1) est un rongeur qui appartient au sous-ordre des hystricomorphes, comme le chinchilla (famille des Chinchillidæ) et le cobaye (famille des Caviidæ) (voir l'ENCADRÉ “Classification zoologique”). La famille des octodontidés compte six genres répartis en huit espèces, toutes sud-américaines. Dans les animaleries, seule l'espèce Octodon degus est répandue.

Le nom d'octodon est lié à l'aspect de la surface occlusale des prémolaires et molaires, qui comportent des replis en forme de 8 (PHOTO 2). Malgré son succès grandissant, cet animal est encore mal connu et souvent vendu sans informations. Pourtant, il est nécessaire de connaître quelques éléments de sa biologie afin de conseiller les propriétaires et de comprendre certaines affections, fréquemment liées à une méconnaissance de ses besoins d'entretien et d'alimentation (voir la FICHE “Éléments de biologie de l'octodon”).

Des éléments de pathologie et de chirurgie sont également indispensables pour sa consultation.

L'octodon en consultation

1. Anamnèse

Le recueil des commémoratifs doit être soigné, car la majorité des troubles constatés sont en relation avec une erreur d'alimentation ou des conditions d'entretien.

Lors de la prise de rendez-vous, il est conseillé de faire venir l'animal dans sa cage habituelle et non dans une cage de transport. Cela permet de vérifier de visu les conditions d'hygiène et d'entretien [b]. À défaut, leur description par le propriétaire doit être aussi précise que possible.

Cage et accessoires

Les octodons sont capables de tout ronger. Il est donc indispensable de les maintenir en cage et de les empêcher de fuguer afin d'éviter les dégâts et les accidents [5].

Une grande cage, d'une taille minimale de 60 cm de long, 40 cm de large et 50 cm de hauteur pour un individu (il convient d'ajouter 80 cm2 de surface au sol par sujet supplémentaire [e]), équipée d'échelles, de toboggans, d'une roue en métal et de branchages, permet une dépense physique correcte. Des étages peuvent séparer la chambre à coucher (toujours située en hauteur) du terrain de jeu ou de ravitaillement. Les cages dont le fond est en plastique sont à proscrire. Le matériau de choix est le verre (terrarium équipé d'un solide grillage au fond et d'un tiroir pour récupérer le fumier). Les matériaux à éviter sont le bois, le plastique et le plexiglas. Les cages métalliques ne sont pas conseillées, car les octodons sont capables de défaire les soudures.

Une mangeoire en verre ou en terre cuite convient. L'eau est distribuée grâce à un biberon.

L'octodon apprécie les bains de sable. Il est conseillé de placer dix minutes par jour un récipient (par exemple un petit aquarium rond) contenant un fond de quelques centimètres de terre à bain destinée aux chinchillas.

La litière peut être à base de copeaux de bois dépoussiérés ou de foin en épaisse couche. Il est également possible de laisser du papier journal, que l'octodon déchire et amasse en tas comme il le ferait dans la nature avec les brindilles et la terre. Si le fond de la cage est grillagé, il convient de prévoir un abri où les animaux peuvent construire leur nid.

Les accessoires et la cage doivent être nettoyés et désinfectés sur un rythme hebdomadaire, car l'urine est assez abondante et malodorante et l'octodon procède régulièrement au marquage urinaire du territoire [14].

Environnement

L'atmosphère des appartements (chambre ou salon) convient bien à l'octodon lorsque la température ambiante est stable (autour de 20 °C), et que les animaux peuvent profiter de la lumière du jour en évitant l'humidité, les courants d'air et l'exposition directe au soleil. La cuisine et la salle de bain sont en revanche inadaptées.

Les végétaux toxiques ne doivent pas se trouver à proximité des animaux, qui risquent de les ronger en cas d'évasion : Caladium, cyclamen, digitale pourpre, narcisse, jacinthe, philodendron, azalée, rhododendron, bois de cèdre, etc. [5].

Alimentation

L'octodon est strictement végétarien. Dans la nature, selon la saison, il se nourrit de pignons de pin, de graines, d'herbes, de racines, de bulbes, de tubercules et d'écorces [5, 11]. Les arbustes représentent environ 15 % du régime alimentaire [g]. La pauvreté en sucres et en lipides de ce régime est compensée par une grande capacité à digérer la cellulose au niveau de la jonction iléocæcocolique. Le régime alimentaire doit être varié et riche en fibres (voir l'ENCADRÉ “Alimentation de l'octodon”).

En revanche, les octodons sont incapables de métaboliser complètement le glucose. Les friandises classiquement proposées pour les rongeurs, souvent trop riches en sucre, risquent de provoquer un diabète. Il est néanmoins possible d'offrir quelques fruits secs avec parcimonie : une demi-cacahuète, une amande ou une noisette tous les quinze jours et une dizaine de graines de tournesol réparties dans la semaine. Des petits morceaux de pain sec peuvent être distribués deux fois par semaine. Les raisins secs, trop riches en sucre, sont à proscrire [5, 3].

L'eau de boisson est présentée à volonté et renouvelée quotidiennement (10 à 15 ml/100 g, en moyenne 20 ml par animal et par jour) [5].

L'octodon est un rongeur dont les dents sont hypsodontes (à croissance continue) : leur usure est nécessaire en permanence. Il convient de leur offrir des morceaux de bois dur non traités (cep de vigne, branches d'arbres fruitiers, d'érable ou de chêne, pain de seigle rassi, demi-noix de coco, etc.) [14, d].

2. Examen clinique et contention

Examen à distance

L'octodon est d'abord examiné à distance afin de repérer les signes de bonne santé : sa vivacité, son temps de réaction dans la cage, puis sur la table de consultation, sont évalués. La brillance des yeux et des poils, ainsi que la couleur orangée des incisives, sont également des critères à rechercher.

Les signes de maladie sont : un comportement inhabituel (agressivité ou prostration et abattement), des incisives blanches, un poil “piqué”, un amaigrissement brutal et une perte d'appétit.

Contention

Lors de l'examen rapproché, la maîtrise de la contention est indispensable pour éviter les réactions d'agressivité (griffures, voire morsure profonde et très douloureuse qui doit immédiatement être désinfectée en raison du risque de pasteurellose) [5].

Il est impératif d'éviter de saisir un octodon par l'extrémité de la queue, car une brutale vasoconstriction réflexe provoque le détachement de la peau (fur slip), voire de l'organe lui-même (qui ne se régénère pas) [4]. Cette réaction de défense passive est sans gravité (pratiquement sans hémorragie), mais la plaie est spectaculaire.

Il est recommandé de saisir rapidement l'octodon dans la paume de la main en enserrant fermement le cou entre l'index et le majeur (PHOTO 6), puis de le soulever délicatement (PHOTO 7) [4, 5, 10]. Si l'animal est bien apprivoisé, il est préférable de laisser le propriétaire le manipuler [5], mais il est possible de le capturer à l'aide d'un récipient rigide en verre ou en acier [12], ou encore d'une serviette et d'un gant [4] s'il est agressif. Dans tous les cas, des précautions sont prises pour éviter de le laisser s'échapper en fermant toutes les issues.

Examens complémentaires

La mise en œuvre des examens complémentaires nécessite généralement une anesthésie.

Des radiographies permettent d'évaluer une fracture. Les appareils utilisés en médecine dentaire permettent d'obtenir des clichés de l'appareil locomoteur [1].

Les prises de sang (voir les TABLEAUX on-line “Biochimie chez l'octodon” et “Hématologie chez l'octodon”) sont réalisées avec une aiguille fine (25 G) montée sur une seringue à insuline, au niveau de la veine jugulaire (l'abord est peu aisé, car le cou est court et le tissu adipeux abondant [e]), de la veine saphène, du plexus orbital [13] ou de la veine caudale ventrale [e].

Les prélèvements d'urine sont possibles chez le mâle à l'aide d'une sonde pour chat [e].

Dominantes pathologiques

La pathologie de l'octodon est encore mal connue et les publications sont rares [9, 14]. Cette situation est sans doute liée à un engouement encore récent pour ce rongeur [5, 7]. Les affections prédominantes sont surtout d'ordre digestif et alimentaire, puis respiratoire, comme pour les autres hystricomorphes [2, 10, e]. Des cas de toxémie de gestation associée à une stéatose hépatique [2], ainsi que de dystocie et de septicémie puerpérale, ont été décrits [9].

1.Diabète sucré

Le diabète sucré non insulinodépendant, associé à une cataracte, est décrit et bien étudié chez l'octodon, qui est un modèle d'étude en laboratoire [8, 13].

À l'origine de cette affection, des erreurs alimentaires sont suspectées, car l'octodon est incapable de métaboliser le glucose, mais une infection à cytomégalovirus semble également en cause [8].

Les signes cliniques sont la polyuro-polydipsie, la glucosurie et l'hyperglycémie. Il n'existerait pas de traitement et l'issue est fatale.

La clef de la prévention réside dans une alimentation équilibrée et adaptée. Il convient d'exclure les fruits, les friandises à base de miel, les raisins secs et les aliments pour souris ou pour rats, trop énergétiques.

2. Obésité

L'obésité guette l'octodon qui reçoit une alimentation pléthorique (excès de graines oléagineuses comme le tournesol). Une cage suffisamment spacieuse et des accessoires de jeux permettent de pallier le manque d'exercice en captivité.

3. Dentisterie

Une malocclusion dentaire (par malformation congénitale, post-traumatique, alimentaire, nutritionnelle ou secondaire à un état d'anorexie) ou un abcès alvéolodentaire peuvent entraîner une dysphagie, un ptyalisme et un épiphora, accompagnés d'une baisse d'état général. Les dents deviennent blanches. Des clichés radiographiques de face et de profil de la tête sont réalisés afin d'affiner le diagnostic et d'établir le traitement étiologique adéquat [b, d, e].

4. Pathologie digestive

Les selles normales sont dures, sèches et de couleur marron foncée.

Entérites non spécifiques

Les causes d'entérite sont multiples et généralement indéterminées. L'origine est plus souvent nutritionnelle (erreurs sur la valeur qualitative et quantitative des aliments, manque de propreté de l'eau de boisson) qu'infectieuse (salmonellose en particulier [e], Escherichia coli [14]). Une coccidiose peut toutefois favoriser le développement d'une entérite bactérienne [14].

Les symptômes associés sont le mauvais appétit, l'abattement, l'anorexie, la diarrhée (souillure de la région anogénitale) et la cachexie.

Le pronostic est sombre lorsque l'anorexie se prolonge pendant plusieurs jours. Le traitement consiste essentiellement à réalimenter progressivement par petites quantités, voire à gaver l'animal (riz cuit, carottes, petits pots pédiatriques, thé noir) et de laisser à sa disposition du foin de bonne qualité. Une fluidothérapie de soutien est nécessaire en cas de forte déshydratation (glucose à 5 %, lactate de Ringer, vitamines). Une antibiothérapie est conseillée lors d'infection bactérienne (voir le TABLEAU on-line “Agents thérapeutiques utilisables chez l'octodon”).

Coccidiose à Eimeria [14]

Une perte d'appétit, de la diarrhée et une dégradation générale de l'état doivent conduire à suspecter une coccidiose, surtout lors de surpopulation ou en élevage. Un examen coproscopique des selles après enrichissement et flottation permet le diagnostic (mise en évidence d'ookystes). Le traitement consiste à administrer des sulfamides dilués dans l'eau de boisson, trois fois à quatre jours d'intervalle.

5. Pathologie respiratoire

La rhinite ou la conjonctivite sont les principales affections des voies respiratoires supérieures, mais les pneumonies sont souvent asymptomatiques (découvertes d'autopsie) [14]. Les germes en cause lors de bronchopneumonies bactériennes sont généralement Pasteurella multocida et Bordetella bronchiseptica. Le pronostic est sombre [2].

La prévention consiste à éviter les locaux surchauffés et les courants d'air [e].

6. Dermatologie

Ectoparasitoses

La gale du corps ou des oreilles et la teigne s'accompagnent de prurit.

• Lors de gale, un traitement à base d'imidaclopride(1) (Advantage(r) 40 spot on, Bayer) est envisageable, à raison d'une goutte pour 200 g de poids vif.

• La teigne à Trichophyton mentagrophytes, qui provoque une alopécie prurigineuse du chanfrein et des pattes, peut se traiter par l'administration de lufénuron(1) (deux administrations de 60 mg/kg à quinze jours d'intervalle) [e].

Alopécie

Une alopécie de la face ventrale est physiologique chez les animaux âgés, mais elle peut être d'origine parasitaire ou comportementale (automutilation ou attaques par d'autres congénères). En raison d'une composante héréditaire possible, il convient d'écarter de la reproduction les sujets qui se livrent au picage [14].

Dermatite papillomateuse à diplocoques

Une dermatite associée à de multiples proliférations cutanées qui évoluent en nécrose localisée (en grains de cerise) est décrite. D'origine probablement virale, l'affection est secondaire à une infection par des diplocoques. Une antibiothérapie par voies générale et locale (crèmes à base de chloramphénicol ou de tétracyclines) est préconisée [14].

7. Affections neurologiques

Des cas d'épilepsie essentielle et de paralysie post-traumatique ont été décrits [e].

Les affections comportementales liées à l'isolement se manifestent par des stéréotypies (morsures des barreaux de cage), de l'agressivité ou une dépression d'involution (immobilisation).

8. Cataracte congénitale

La cataracte est bilatérale et souvent partielle (PHOTO 8). Chez des animaux jeunes et en bon état général, une origine congénitale est suspectée. La fréquence de cette affection est probablement liée à la consanguinité des octodons de compagnie. Il convient de ne pas la confondre avec la cataracte du diabète sucré, d'évolution aiguë.

9. Traumatologie

Plaies

Les blessures peuvent être fréquentes, en particulier lors d'affrontements violents entre mâles. Les plaies cicatrisent généralement vite, mais peuvent nécessiter un parage chirurgical. Une énucléation a été pratiquée chez un octodon blessé profondément à l'œil.

Autotomie caudale

Une mauvaise contention risque de provoquer un fur slip, qui met à nu une portion de la queue, ou entraîne la perte d'une partie de la queue (autotomie), qui ne se régénère pas [9]. Le “greffage” de la peau détachée est aléatoire. L'extrémité mise à nu subit généralement une nécrose sèche, mais dans certains cas, l'animal la ronge lui-même. Une amputation et une antibioprévention sont envisageables. Il convient de séparer momentanément le sujet amputé des congénères, qui pourraient l'agresser ou le mutiler.

Fracture

Des fractures sont susceptibles de se produire, car l'octodon est un animal particulièrement actif. Le cas d'une fracture tibiale simple chez un sujet âgé de trois mois a été décrit [1]. La fracture a été réduite par un enclouage centro-médullaire à l'aide d'une aiguille à injection (21 G), retirée après dix-huit jours de cicatrisation.

Éléments de chirurgie

1. Anesthésie

Une diète préopératoire (eau et foin uniquement) de deux à quatre heures est utile pour réduire le volume gastrique [7, a, c, f, g].

Anesthésie fixe

L'anesthésie fixe (voir le TABLEAU “Principaux protocoles d'anesthésie chez l'octodon”) n'est généralement pas recommandée en raison des risques de surdosage. Il convient de limiter son emploi aux interventions en région cervico-céphalique, lorsque l'utilisation d'un masque est impossible.

• La médétomidine (Domitor(r)(1)) est à utiliser avec prudence, en l'associant à la kétamine : il est possible de rincer une seringue de 1 ml à la médétomidine (l'espace mort constitue la dose suffisante) et de prélever, à l'aide de la même seringue, la dose correspondant à 20 mg/kg de kétamine. Le mélange est administré par voie intramusculaire dans la cuisse et l'injection est suivie d'un massage. L'intervention peut débuter quinze minutes après.

• Le diazépam (Valium(r)(2)), administré en prémédication, est un puissant orexigène, à raison de 0,875 mg par animal par voie intramusculaire. Il est nécessaire de manipuler l'animal avec précaution afin d'éviter les morsures involontaires.

•  En raison de l'étroitesse des marges de sécurité, l'utilisation des barbituriques est à proscrire chez l'octodon.

Anesthésie gazeuse

L'anesthésie gazeuse (halothane ou mieux, isoflurane) est souple d'emploi et sûre. Lors de l'induction, il est possible d'utiliser une boîte transparente (aquarium) ou d'enfermer la cage de l'animal dans un grand sac ligaturé à la tubulure de l'appareil d'anesthésie. Une induction à l'aide de kétamine (15 mg/kg) ou avec l'association tilétamine-zolazépam (10 mg/kg) est également possible [c].

Un gant en latex en guise de masque peut être fixé à la tête de l'animal à l'aide de sparadrap, de manière à empêcher les fuites. Le majeur du gant est sectionné et accolé à l'aide de sparadrap à la tubulure d'un circuit semi-ouvert de type Bain. Il est nécessaire d'immobiliser la tubulure sur un support fixe pour éviter de plier le gant et d'étouffer l'animal [g].

Le réveil est rapide dès l'arrêt de l'administration de l'agent anesthésique.

L'hypothermie est limitée en plaçant l'octodon sur un support isolant (serviette, bouillotte, emballage à bulles ou tapis chauffant) au cours de l'intervention, puis sous une lampe à infrarouges ou dans un local chauffé (température de 30 °C, abaissée ensuite à 25 °C) lors du réveil [1, 3].

2. Chirurgie de convenance

Lorsque les octodons sont gardés en groupe pour le maintien de leur équilibre psychique [7], la stérilisation est indiquée afin de limiter la multiplication des individus.

Après toute intervention chirurgicale, pendant la durée de la cicatrisation, il est préférable de séparer l'animal de ses congénères qui pourraient le perturber, voire le mutiler au niveau de la plaie opératoire.

Une antibioprévention (doxycycline à la dose de 5 mg/kg/j [1] ou marbofloxacine à raison de 5 mg/kg/j) est mise en place pour une courte durée de trois à quatre jours, voire huit jours en cas d'intervention chirurgicale lourde (chirurgie osseuse, par exemple).

Castration du mâle

Avant d'intervenir, il est nécessaire de vérifier le sexe de l'animal. Les testicules ne sont pas visibles en raison de leur positionnement intra-abdominal et de l'absence de scrotum. La présence d'un ligament mésentérique qui relie la vésicule séminale au testicule est une particularité anatomique dont il convient de tenir compte [7].

La castration est indiquée pour diminuer la libido et éviter les portées surnuméraires, ainsi que les batailles violentes entre mâles au sein d'une colonie [3, 7, a, c].

• Technique

L'animal est placé en décubitus dorsal ; les pattes et la queue sont fixées à la table au moyen de sparadrap. La région inguinale est tondue et désinfectée à la polyvidone iodée (PHOTO 9).

La voie d'abord est paramédiane inguinale et la castration s'effectue à testicule découvert. Les testicules sont refoulés en position inguinale, le plus près possible de l'anneau inguinal proximal (il est utile de se faire aider ou d'incliner la table pour surélever l'avant du corps). Une incision inguinale permet d'extérioriser le testicule couvert par le muscle crémaster à l'aide de tractions douces. La gaine vaginale, incisée, est maintenue à l'aide de pinces hémostatiques fines (PHOTO 10). Le cordon testiculaire découvert est ligaturé le plus près possible de l'anneau inguinal, ainsi que le ligament mésentérique de la vésicule séminale (PHOTO 11) ; le testicule est alors excisé. La gaine vaginale, puis la peau, sont suturées à l'aide de fil résorbable lent de type Vicryl(r) (déc. 1,5). Le procédé est renou-velé pour l'autre testicule.

Une autre technique consiste à effectuer une castration par la voie abdominale. Une laparotomie sur la ligne médiane est réalisée comme pour une ovariectomie chez la femelle. L'avantage de cette technique est qu'elle ne nécessite pas d'aide pour maintenir les testicules en position scrotale et que les risques de hernie vaginale sont limités.

• Précautions

Il est préférable de privilégier la technique à testicule découvert par rapport à celle sans ouverture de la gaine vaginale, car elle prévient les risques d'hémorragie et, surtout, d'éventration (l'anneau inguinal étant large). La plaie est en outre protégée des souillures [3, 7].

Lorsque la suture de la peau est réalisée à l'aide de fil résorbable, il est inutile de retirer les points, ce qui permet d'éviter des manipulations traumatisantes.

Lors de l'intervention, il convient d'isoler la vésicule séminale du testicule afin de ne pas l'inclure dans la ligature ou de l'inciser. La sécrétion fluide, qui se solidifie au contact de l'air, empêcherait une bonne cicatrisation de la plaie et risquerait de provoquer la formation d'une fistule [7].

Ovariectomie et ovariohystérectomie

Les interventions de convenance chez les femelles sont rarement demandées [5, a, c]. L'ovariohystérectomie ne présente pas de difficultés particulières par rapport aux autres espèces de rongeurs (PHOTO 12). Il est à noter que la position des ovaires est très craniale dans la cavité abdominale, particulièrement du côté droit. Le pédicule ovarien étant assez court, les tractions doivent être douces.

Conclusion

Apprécié pour son aspect original, son activité diurne, sa robustesse et ses excellentes facultés d'adaptation à la vie en captivité, l'octodon est encore méconnu sur les plans pathologique et thérapeutique. La plupart des substances administrées sont en effet évaluées à partir des données obtenues chez les autres caviomorphes, en particulier le chinchilla.

Pourtant, cet animal de compagnie encore récent devrait pouvoir bénéficier des connaissances acquises dans les laboratoires de recherche.

  • (1) Médicament dont l'AMM n'est pas disponible pour cette espèce dans cette indication.

  • (2) Médicament à usage humain.

Classification zoologique

•  Classe : mammifères

•  Ordre : rongeurs

•  Sous-ordre : hystricognathes ou caviomorphes

•  Famille : octodontidés

•  Genre : Octodon

•  Espèce : degus

•  Noms vernaculaires :

octodon, dègue du Chili, degu, bori, pseudorat, souris à queue en trompette, raton des las cercas, raton de las tapias, bush rat [5].

D'après [2, 5, 7, 11, 13].

Alimentation de l'octodon

Il est possible de constituer une « ration ménagère » à partir de légumes, par exemple : une rondelle de carotte par animal et par jour (de la pomme, du choux rave, du chou-fleur, de la betterave ou de la poire peuvent convenir également), une demi-feuille de salade verte, de pissenlit, de chicorée ou d'endive tous les deux jours, des graines et une poignée de foin de qualité tous les deux jours [5, b, d].

Le recours à une alimentation sous forme de granulés est préférable, car elle est équilibrée et empêche les tentatives de tri. Les pellets destinés aux chinchillas, mélangés pour moitié avec ceuxpour cobayes, conviennent parfaitement. Des mélanges de graines et de granulés spécialement formulés pour les besoins des octodons sont disponibles dans le commerce. L'apport de foin est indispensable.

Il convient d'éviter les fèves crues et les pommes de terre (surtout les parties vertes germées), qui sont toxiques.

Éléments de biologie de l'octodon

Morphologie et anatomie

L'aspect général de l'octodon rappelle le rat [7, 9, 13], mais la tête est arrondie. La femelle pèse environ 170 g, alors que le mâle atteint 300 g. La longueur totale du corps est de 30 à 50 cm, dont les deux tiers sont constitués par la tête et le tronc, la queue représentant le tiers restant [9, 11]. Cette dernière, velue et terminée par un pinceau de soies noires, mesure de 10 à 16 cm et est maintenue dressée. Les pattes sont pourvues de griffes noires, acérées. La robe agouti est constituée de poils durs et courts. Des poils noirs plus longs sont implantés régulièrement sur toute la couverture : ils auraient un rôle de vibrisses et de gabarit.

La cavité orale, grande, comporte une fente palatine. Les dents, à croissance continue, sont très coupantes. La face vestibulaire des incisives est colorée en orange lorsque l'animal est en bonne santé.

Le tube digestif est caractéristique d'un consommateur de fibres riches en cellulose : l'intestin est très long, mais comparé aux autres caviomorphes, le cæcum n'est proportionnellement pas aussi volumineux. La digestion de la cellulose se produit essentiellement au niveau de la jonction iléocæcocolique (PHOTO 3) [d].

Origine et milieu de vie

L'octodon vit dans les steppes xérophytiques (végétation de milieu aride) du Chili central et du sud du Pérou, jusqu'à une altitude inférieure à 1 800 ou 2 000 mètres [7, 13], probablement en raison de sa sensibilité à la diminution de la pression en oxygène de l'air et à la chaleur (il ne supporte pas les températures supérieures à 33-35 °C lorsque l'humidité est inférieure à 35 %) [11].

L'octodon n'est ni domestique, ni protégé (il n'est pas inscrit à la Convention de Washington) [4]. En revanche, il est considéré comme nuisible dans son pays d'origine, où il ravage les cultures [7, 11; sites Internet : 3, 5].

Mode de vie

Comportement en milieu naturel

Les octodons sont des mammifères sociaux qui vivent en colonies de taille variable (de dix à cent individus [5, 9] selon une densité de cinquante à deux cents individus par hectare [11]). À l'aide de leurs puissantes incisives et de leurs griffes, ils creusent des réseaux de galeries.

Chaque cavité est réservée à une activité précise : maternité, repos, provisions, etc. Parfois, d'autres rongeurs cohabitent avec la colonie, comme Akodon olivaceus (muridé nocturne) ou Abrocoma benetti (chinchillidé) [5, 11].

À l'approche de la mauvaise saison, l'octodon accumule de l'énergie sous forme de bourrelets adipeux souscutanés en région dorsolombaire, mais il n'hiberne pas [9]. Ses activités, diurnes, suivent toutefois le rythme des saisons. En été, lorsqu'il fait chaud et sec, il est inactif en milieu de journée et il se nourrit d'aliments riches en eau (écorces d'Acacia caven, fèces fraîches de chevaux ou de bovins). En hiver et au printemps, il est actif la journée et s'alimente de parties végétales vertes et de graines de graminées [11].

Les prédateurs de l'octodon sont nombreux, ce qui explique sa longévité réduite dans les populations sauvages (voir le TABLEAU « Données physiologiques relatives à l'octodon »).

Il s'agit surtout de rapaces diurnes ou nocturnes, plus rarement de prédateurs terrestres (renards, chiens, chats). L'homme l'a également chassé pour sa chair blanche [5, 9, 11]. De nombreux moyens de défense passive permettent toutefois aux colonies de survivre (voir l'ENCADRÉ « Moyens de défense de l'octodon »).

Pour communiquer au sein de la colonie, les octodons poussent des cris de contact qui rappellent un gazouillis d'oiseau. Les manifestations de concurrence sont en revanche plus brutales : les bagarres sont ponctuées de cris aigus et secs.

La peur déclenche un cri d'alerte strident [5].

Comportement en captivité

Il est fortement recommandé de garder ensemble plusieurs octodons afin de respecter leur sociabilité. Isolé, l'animal dépérit progressivement et développe une sociopathie (agressivité, stéréotypies ou abattement).

Il est possible de les faire vivre en couple [7], à condition d'éviter d'associer plusieurs mâles avec une femelle (bagarres), de séparer les femelles allaitantes des autres femelles et d'éviter de laisser le mâle en présence d'une femelle qui vient de mettre bas [5].

Lors de l'introduction d'un nouvel animal, deux à trois jours d'acclimatation sont nécessaires. Il convient de ne pas chercher à l'approcher. L'utilisation d'une cage à paroi centrale amovible permet de séparer temporairement l'espace entre le nouvel occupant et les autres afin qu'ils s'habituent progressivement. En cas de mésentente franche, il peut être nécessaire de les séparer définitivement.

L'apprivoisement est facile en raison de la sociabilité atavique de l'octodon, surtout lorsque le contact humain commence dès le plus jeune âge [7]. Il est impératif de manipuler les animaux avec douceur et patience, à l'aide de friandises au besoin. Des gestes brusques peuvent rendre l'octodon agressif. Il risque alors de griffer ou de mordre très sérieusement.

Ce rongeur n'est pas à conseiller aux jeunes enfants.

Reproduction

Les octodons se reproduisent toute l'année en captivité [13]. En revanche, dans le milieu naturel, la saison de reproduction varie selon les régions géographiques. Les accouplements se produisent généralement de juin à juillet et les naissances ont alors lieu en septembre et en octobre, mais lorsqu'ils se déroulent de septembre à octobre, les naissances surviennent jusqu'en janvier [7, 11]. Les bagarres entre mâles sont violentes [5]. Pour les éviter en captivité, la castration est conseillée.

La diagnose des sexes, réalisée par l'observation de la région anogénitale, n'est pas toujours aisée [7, 3, 4, 5]. L'orifice génito-urinaire est masqué par un organe saillant dans les deux sexes.

Chez la femelle, le clitoris saillant à l'extérieur du vagin au niveau de l'orifice urétral est souvent confondu avec le fourreau du mâle.

Le mâle ne possède pas de scrotum : les testicules sont en position abdominale (PHOTO 4). Seule la distance entre la protubérance et l'anus permet une distinction : elle est plus grande chez le mâle que chez la femelle (PHOTO 5). En outre, le mâle possède un pénis avec des papilles cornées et un os pénien [12].

La maturité sexuelle est atteinte vers l'âge de trois à six mois dans les deux sexes. Parfois, elle peut survenir plus tôt chez la femelle (vers huit ou neuf semaines [3]). Il n'est cependant pas recommandé de les mettre à la reproduction avant l'âge de six mois.

Une femelle peut se reproduire pendant deux à trois années, à raison de deux portées par an comportant cinq à dix petits. Le cycle est polyoestrien et l'ovulation semble spontanée.

La gestation dure de quatre-vingt-sept à quatre vingt-treize jours. La mise bas a généralement lieu tôt le matin et l'expulsion peut durer quarante-cinq minutes. La femelle est en oestrus dès la parturition, ce qui explique les deux périodes de naissances observées dans la nature. En absence de saillie postpartum, les chaleurs suivantes n'apparaissent qu'après le sevrage des jeunes [1, 3, 4].

À la naissance, le jeune pèse de 15 à 20 g. À deux ou trois jours, les yeux sont ouverts, le pelage est complet et il est déjà capable de ronger de l'herbe tendre (espèce nidifuge). La lactation est assurée par les sept paires de mamelles (une paire inguinale et six sur le flanc dorsal). L'allaitement dure de quatre à six semaines, puis les petits sont sevrés [5, 2].

L'octodon, animal de laboratoire

Les octodons sont utilisés comme animaux de laboratoire depuis les années 70 pour des études en immunologie, ophtalmologie, physiologie, psychologie [13], cancérologie et reproduction [11].

Leur faculté à développer très facilement le diabète sucré a été mise à contribution dans l'étude de cette affection. Chez les premiers cas présentant des signes cliniques de diabète sucré (cataracte et glycosurie), une hyperplasie pancréatique a été mise en évidence à l'autopsie. L'analyse histopathologique a révélé une amyloïdose diffuse des îlots de Langerhans du type AA, qui est généralement associée à des infections virales chroniques. Les cellules pancréatiques contenaient en outre des inclusions à cytomégalovirus. L'octodon est ainsi un modèle animal de choix dans l'étude du diabète sucré juvénile à cytomégalovirus, maladie humaine décrite en pédiatrie et chez les patients immunodéprimés, mais dont la pathogénie n'est pas connue à ce jour [8, 13].

Leur incapacité à éliminer la caféine est en rapport avec leur grande sensibilité au stress. Des stéréotypies apparaissent rapidement lorsqu'ils sont isolés dans de trop petites cages : ils grignotent les barreaux (et parviennent parfois à défaire les soudures) ou se tiennent en boule dans un coin [3, 5].

Moyens de défense de l'octodon

L'octodon possède plusieurs moyens de défense passifs qui lui permettent d'échapper à ses prédateurs.

Les entrées des galeries, reliées entre elles par des pistes faciles d'accès, sont systématiquement en terrain couvert : sous des racines d'arbres, des amoncellements de cailloux ou des buissons denses au ras du sol. Ainsi, la répartition des colonies semble dépendre de la distribution et de la densité arbustive du terrain [11].

La vie cavernicole n'empêche pas l'octodon d'être un bon grimpeur, de courir et de sauter avec beaucoup de rapidité en cas de fuite [5]. Les déplacements sont furtifs et toujours entrecoupés d'un temps d'immobilisation qui permet de tromper le prédateur.

La robe agouti permet un camouflage instantané dans l'environnement.

Le panache caudal, toujours érigé, constitue une sorte de leurre : lorsque le prédateur s'en saisit, la queue se détache brusquement par un phénomène d'autotomie [5, 7, 11]. L'extrémité cicatrise rapidement, mais ne se régénère pas [5].

Les organes des sens (vue et ouïe) sont particulièrement développés : la distance de fuite est de cinquante mètres [5]. Le pouvoir de résolution de la rétine est plus élevé pour la perception des objets situés au-dessus de l'animal que pour ceux placés dans le plan horizontal [11, f] : l'octodon perçoit particulièrement bien le danger aérien.

Remerciements : C. Bullot pour certains clichés photographiques.

  • 1 - Beregi A, Felkai F, Seregi F et coll. Medullary fixation of a tibial fracture in a three-month-old degu (Octodon degus). Vet. Record. 1994 ; 134 (25)  : 652-653.
  • 2 - Boussarie D. L'octodon. Point Vét. 1999 ; 30 (n°« spécial Nouveaux animaux de compagnie »)  : 565-566.
  • 3 - Boussarie D. Chirurgie de convenance des rongeurs et lagomorphes de compagnie. Prat. Méd. Chir. Anim. Comp. 1997 ;(32)  : 371-391.
  • 5 - Boussarie D. L'octodon ou dègue du Chili, nouveau rongeur de compagnie : étude de quelques données biologiques. Prat. Méd. Chir. Anim. Comp. 1996 ;(31)  : 93-96.
  • 6 - Carpenter JW, Mashima TY, Rupiper DJ. Exotic animal formulary. 2nd ed. Philadelphia, WB Saunders Co. 2001 : 272-297.
  • 7 - Fehr M, Schanen H, Grof D et coll. Anatomische grundlagen und beschreibung einer kastrationsmethode beim degu (Octodon degus Molina). Kleintierpraxis. 1994 ; 39(12)  : 837-840.
  • 8 - Fox JG, Murphy JC. Cytomegalic virus-associated insulitis in diabetic Octodon degus. Vet. Pathol. 1979 ; 16(5)  : 625-628.
  • 9 - Grzimek B. Les cobayes et leurs alliés. Dans : Le monde animal en treize volumes, encyclopédie de la vie des bêtes, tome XI. Zurich, Stauffacher SA. 1975 : 429-464.
  • 11 - Le Boulengé E, Fuentes ER. Quelques données sur la dynamique de population chez Octodon degus (rongeur hystricomorphe) du Chili central. Terre Vie. 1978 ; 32(3)  : 325-341.
  • 12 - Maltais D, Saint-Pierre M. Soigner les animaux en toute sécurité. Montréal, éditions Saint-Martin. 1991 : 173.
  • 13 - Murphy JC, Niemi SH, Hewes KM et coll. Hematologic and serum protein reference values of the Octodon degus. Amer. J. Vet. Res. 1978 ; 39(4)  : 713-715.
  • 14 - Sassenburg L. Degu. In : Krankheiten des Heimtiere ; Gabrisch K, Zwart P, edr. Hannover, Schlütersche. 1995 : 197-215.
  • 15 - Simonetti JA, Fuentes ER. Shrub preferences of native and introduced Chilean Matorral herbivores. Acta Oecologia/Oecol. Applic. 1983 ; 4(3)  : 269-272.
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