Le savoir-faire relationnel et le faire-savoir à destination du client et de la clientèle - Le Point Vétérinaire n° 360 du 01/11/2015
Le Point Vétérinaire n° 360 du 01/11/2015

PLAN DOULEUR

Article original

Auteur(s) : Thierry Poitte

Fonctions : Clinique vétérinaire
8, rue des Culquoilès
La Croix-Michaud
17630 La Flotte

Dernier volet du plan douleur, cet article développe la communication à mettre en place auprès du client et, plus globalement, de la clientèle de la clinique.

Forts d’un savoir-faire scientifique (compréhension des mécanismes physiopathologiques de la douleur, pratique de l’évaluation, actualisation des connaissances sur les grands syndromes douloureux) et d’un savoir-faire opérationnel (procédures, référents douleur, audit), les praticiens intéressés à la mise en place d’un plan douleur (Cap Douleur®) doivent repenser la gestion de la relation client(1).

Cet article vous propose, dans une première partie, de développer le savoir-faire relationnel à travers le nouveau paradigme de l’alliance thérapeutique. Deux exemples pratiques d’applications de l’alliance thérapeutique vous sont présentés dans un autre article par la gestion, quotidienne dans nos cliniques, de la maladie arthrosique et d’un cas atypique de douleur chronique(2).

La seconde partie s’intéresse au faire-savoir, en conseillant un cadre de communication valorisant les compétences du praticien en analgésie.

SAVOIR-FAIRE RELATIONNEL ET FAIRE-SAVOIR À DESTINATION DU CLIENT

→ Le savoir-faire relationnel englobe les capacités requises pour se comporter ou se conduire avec les autres de façon pertinente dans un contexte donné. Adapté à l’exercice vétérinaire et au plan douleur, il porte sur les facultés du praticien à :

– s’insérer dans un collectif de travail (l’équipe de la clinique) et à participer à la gestion de la clientèle ;

– interagir de façon efficace avec ses confrères et les auxiliaires spécialisés vétérinaires (ASV) ;

– écouter le propriétaire raconter la douleur de son animal (médecine narrative) ;

– rechercher les mécanismes de la douleur, évaluer et proposer une prise en charge pour préserver la qualité de vie (analgésie raisonnée et protectrice) de l’animal ;

– s’adapter à des situations spécifiques (patient based medicine) ;

– surmonter les situations adverses, les aléas rencontrés ;

– capitaliser ses expériences (positives ou négatives) afin de progresser ;

– évoluer sur le plan à la fois professionnel et personnel.

→ Le savoir-faire relationnel désigne les attitudes, les comportements en situation, qui mettent en jeu des connaissances et une compétence affichée, mais aussi des affects, comme la façon de se situer par rapport à l’autre et l’image de soi.

→ Le savoir-faire relationnel permet de consolider la relation client. En effet, les nouvelles classes pharmacologiques ou les derniers outils technologiques sont rapidement inopérants si le praticien échoue à convaincre le propriétaire des bienfaits de l’observance et du suivi thérapeutique.

1. De la compliance à l’alliance thérapeutique

Toute affection chronique est source de nomadisme médical car la mauvaise compréhension de la maladie et l’irréversibilité de l’évolution, associée parfois à la faiblesse des résultats thérapeutiques, incitent le client à recueillir une multitude d’avis.

La continuité des soins analgésiques, quant au lieu de consultation, est un gage de qualité dans la mesure où la connaissance partagée du vécu douloureux de l’animal, de l’évolution de la maladie, de la définition d’un objectif thérapeutique, de ses réponses thérapeutiques favorables ou insuffisantes participe à l’amélioration de la prise en charge.

Le risque de prescriptions multiples et redondantes assorties de discours contradictoires et de promesses irréalistes conduit à une mauvaise compliance.

Compliance

La compliance est une mesure : elle évalue le degré selon lequel le comportement d’un patient (prise de médicaments, suivi d’un régime, exercices physiques ou modification du mode de vie) coïncide avec les conseils médicaux ou de sante reçus [6].

Ce terme anglo-saxon (“to comply with” : se soumettre ou suivre conformément à) sous-entend un rapport d’autorité et de soumission, réduisant la relation entre le thérapeute et sa clientèle à de bons (compliants) ou de mauvais patients (non compliants).

En médecine humaine, la compliance est de 50 %, toutes maladies chroniques confondues. Les responsabilités de ce mauvais chiffre sont partagées entre le praticien, le patient et le système de soins.

Une récente étude de grande ampleur (170 000 malades) montre que cette faible compliance concerne toutes les maladies. Les disparités relatées s’expliquent par la nature insidieuse de l’affection (hypertension artérielle, hypercholestérolémie), la survenue ponctuelle de symptômes (asthme) et la complexité de la prise en charge (diabète)(3).

La mauvaise compliance est un facteur aggravant de complications et représente des coûts socio-économiques considérables.

Médecins et vétérinaires se rejoignent dans leur estimation inappropriée de la compliance de leurs malades.

Des études récentes nous apprennent que, au cours d’affections douloureuses chroniques, 30 à 60 % des patients humains ne suivent pas la prescription médicamenteuse, alors que la souffrance perdure [4].

Il est fortement probable que les prescriptions d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) au long cours chez les animaux suivent cette même règle.

Enfin, selon un article récent, la compliance est désignée par les vétérinaires comme le frein majeur à la prise en charge des douleurs chroniques [2].

Construire une nouvelle relation vétérinaire-client suggère d’abandonner ce terme de compliance pour adopter les mots d’observance, d’adhésion et d’alliance thérapeutique.

Observance

L’observance est un comportement dynamique. Elle se distingue de la compliance au caractère passif. L’observance est définie par la capacité du patient à suivre les recommandations du praticien. La notion d’observance thérapeutique peut être synthétisée sous la forme d’un rapport entre ce que le praticien dit et ce que le client fait pour son animal.

Une étude présentée au dernier congrès de la Société française d’études et de traitement de la douleur (SFETD) a établi le lien entre l’observance du patient et la qualité du discours tenu, soulignant ainsi que « l’observance [ était ] également une affaire de relationnel ».

L’idée est de repenser la relation thérapeutique sous le signe d’une négociation entre le vétérinaire et le propriétaire, et non plus dans un cadre autoritaire dans lequel les capacités personnelles d’observation et d’adhésion du client sont négligées.

Le défaut d’observance a des origines multiples, liées aux comportements de l’animal, du propriétaire ou du vétérinaire (tableaux 1 et 2 complémentaires sur www.lepointveterinaire.fr).

La mauvaise observance est pourvoyeuse de morbidité accrue, de qualité de vie amoindrie et souvent de coûts supplémentaires pour le propriétaire.

L’amélioration de l’observance est atteignable par des mesures connues et cependant parfois négligées : adaptation de la forme galénique, appétence, rationalisation et simplification des prescriptions, etc.

Le paradigme de l’alliance thérapeutique propose d’intervenir en amont de ces recommandations grâce à la qualité de la relation praticien-client.

Alliance thérapeutique

L’alliance thérapeutique (du latin ad ligare, lier ou unir avec) se propose de remplacer la relation d’autorité et d’améliorer l’observance par une action conjointe contre la maladie, qui associerait deux alliés aux pouvoirs complémentaires pour combattre la douleur. Elle suggère la transition de la compliance vers l’observance et l’adhésion thérapeutique, gages de coopération volontaire à la prise en charge de la douleur.

L’adhésion thérapeutique se définit comme une appropriation réfléchie, de la part du client, de la prise en charge de la maladie de son animal, de ses traitements, associée à la volonté de “s’accrocher”, de persister dans la mise en pratique d’une analgésie multimodale. Cela reflète sa ténacité à maintenir un changement de comportement au fil du temps et son implication. L’adhésion ne renvoie pas seulement à un comportement, mais à une attitude. L’adhésion thérapeutique devient, selon cette perspective, un projet dans lequel s’engagent réciproquement le praticien et le client, afin d’atteindre l’objectif fixé ensemble.

Une étude publiée en 2007 pour la médecine humaine montre que la qualité de l’alliance thérapeutique (working alliance) a un impact significatif sur la perception par le patient de l’utilité de son traitement, son sentiment d’auto-efficacité concernant sa capacité à prendre celui-ci, le taux d’adhérence thérapeutique et la satisfaction du malade [5].

En médecine vétérinaire, l’alliance thérapeutique doit mettre l’accent sur la relation praticien-client, empreinte de pédagogie, de personnalisation du traitement et de négociation de sa faisabilité. La nature des liens entre l’animal et son propriétaire (attachement) doit être évaluée.

Le vétérinaire dans cette relation particulière avec la douleur de l’animal et de son propriétaire se doit d’être à la fois professionnel (disposer d’un statut et de compétences), chaleureux (contact visuel, tonalité de la voix, etc.), authentique (pouvoir se sentir à l’aise avec le propriétaire, la situation clinique, ses propres émotions et idées) et empathique (centré sur la réalité que vit le client).

Afficher une compétence, donner du temps, pratiquer le suivi et se montrer empathique sont des qualités indispensables à l’établissement de cette relation de confiance (encadrés 1 et 2).

2. Éducation thérapeutique

Selon l’Organisation mondiale pour la santé, l’éducation thérapeutique du patient vise à l’aider à acquérir ou à maintenir les compétences dont il a besoin pour gérer au mieux sa vie avec une maladie chronique.

Adaptée à la médecine vétérinaire, l’éducation thérapeutique du propriétaire vise à l’aider à acquérir ou à maintenir les différentes compétences dont il a besoin pour gérer au mieux la qualité de vie de son animal douloureux chronique.

Étroitement liée à l’alliance thérapeutique, cette éducation participe à l’installation de la relation de confiance entre le client et le praticien (figure 1, encadré 3 complémentaire sur www.lepointveterinaire.fr).

Le client : compétences intellectuelles

Les compétences intellectuelles concernent les connaissances du propriétaire. Comprendre pourquoi son animal a mal est la première étape de l’acceptation de la maladie.

Il s’agit de lui expliquer ce que sont les maladies chroniques par rapport aux maladies aiguës et les différents types de douleur s’y rapportant.

Ces explications sont nécessaires pour convaincre le propriétaire d’accepter l’irréversibilité de la maladie douloureuse, les possibilités de rechute, souvent sources de déception, de résignation et d’abandon des traitements.

Elles sont utiles pour valoriser les résultats obtenus et persuader le propriétaire que sa réactivité est le meilleur garant d’un maintien de la qualité de vie.

Ces éléments explicatifs légitiment le recours à un large éventail de solutions thérapeutiques complémentaires, vis-à-vis desquelles le choix éclairé du client devient plus facile.

Les informations données sont nombreuses : il est indispensable que le propriétaire bénéficie de supports écrits généraux et personnalisés en fonction du vécu douloureux de son animal et de ses choix (figure 2 complémentaire sur www.lepointveterinaire.fr).

Le client : compétences techniques

→ La première compétence technique à faire acquérir au propriétaire est celle de l’évaluation de la douleur. Il est important d’insister à l’aide d’exemples précis, voire de schémas ou de photos sur l’association des troubles fonctionnels (boiterie, postures, faciès) et comportementaux (anxiété, dépression, troubles du sommeil, irritabilité, agressivité).

Les grilles d’évaluation de la douleur ont une forte valeur pédagogique car elles recontextualisent l’impression de souffrance dans l’environnement quotidien de l’animal. Le récit du propriétaire devient plus précis et gagne progressivement en objectivité.

Le remplissage de ces grilles peut paraître fastidieux à certains : le recours à la prise de photos ou de vidéos par le propriétaire, à des webapplications ou au port d’un collier d’activité sont des solutions alternatives crédibles ou prometteuses.

→ La deuxième compétence technique concerne les modalités de traitement et l’acquisition de techniques de soins.

Grâce à l’évaluation de la douleur, le propriétaire devient capable de repérer les accès paroxystiques et de choisir en conséquence d’administrer un antalgique plus puissant. Nous utilisons régulièrement le terme d’“analgésique de secours” pour la prescription du tramadol après avoir insisté sur l’absolue nécessité de ne jamais laisser s’installer durablement la douleur.

La prise de comprimés ou de solutions orales doit parfois être montrée en consultation. Le recours à un coupe-comprimé ou à un broyeur de comprimés facilite l’administration, mais est proscrit pour les comprimés à libération prolongée, les capsules ou les dragées.

Le concours des nouvelles technologies est un levier d’observance particulièrement pertinent : pilulier électronique, SMS de rappel, sites web d’informations et de démonstrations, etc.

L’acquisition de techniques de soins concerne les massages et l’électrostimulation.

Son utilisation quasi quotidienne ou bihebdomadaire nécessite une prise en charge par le propriétaire, dont la formation repose sur une démonstration à la clinique accompagnée de supports vidéo (placement des électrodes, réglage de l’intensité, etc.).

Toutes ces compétences sont transmises en face à face praticien-client et peuvent bénéficier de l’accompagnement supplémentaire de l’ASV référente douleur.

Par exemple, sur le modèle de formations en petits groupes à destination des clients (du type école du chien atopique), des ateliers éducatifs du chien ou du chat arthrosique sont proposés dans les locaux de notre clinique. Des séances de sensibilisation-dépistage autour du thème “Arthrose et douleur” sont animées par le vétérinaire et l’ASV référents douleur. Les composantes fonctionnelles et comportementales sont illustrées par des présentations PowerPoint et une large iconographie. Les options thérapeutiques sont décrites en insistant sur leur complémentarité et la nécessité d’adaptation à chaque cas. L’intérêt de l’évaluation devient alors évident et la séance se termine par le remplissage de questionnaires écrits ou via les webapplications Dolodog® et Dolocat®. Les scores obtenus sont validés et font l’objet de recommandations (conseils, consultations, suivis, etc.).

Un temps significatif est laissé pour les échanges entre les propriétaires : ressenti de la maladie, difficultés thérapeutiques, etc.

L’éducation thérapeutique continue par la désignation d’un objectif réaliste (atteignable) et le partage éclairé de la décision de soins (médicaments, diététique, physiothérapie et amélioration de l’environnement) sur une ordonnance informatisée de lecture aisée. La bonne compréhension de ces échanges est un premier pas vers l’adhésion au traitement.

FAIRE-SAVOIR À DESTINATION DE LA CLIENTÈLE

Le plan d’action à destination de la clientèle obéit aux objectifs suivants :

– afficher une compétence en matière d’analgésie ;

– convaincre la clientèle de la réalité et du bien-fondé de la démarche Cap Douleur® de la clinique.

1. Communication intraclinique

→ La communication opère dès les abords de la clinique et dès l’entrée du propriétaire dans les locaux. La clinique doit être accueillante et refléter les objectifs de bien-être animal : séparation des salles d’attente des chiens et des chats, atmosphère chaleureuse et rassurante de professionnalisme, de calme et de sérénité, signalétique orientée vers une prise en charge optimale de la douleur (photo 1).

→ La déclinaison des services proposés est courante dans les zones d’accueil des cliniques : la gestion de la douleur peut y apparaître de manière prioritaire puisque transdisciplinaire par essence. L’offre de la consultation douleur constitue à ce jour un service encore extrêmement différenciant (photo 2).

→ Il est indispensable d’éviter les distorsions entre le message véhiculé (qualité de la prise en charge de la douleur) et la perception de la clientèle (accueil austère et non courtois, tensions au sein de l’équipe soignante, vocalises des animaux en phase de réveil, contention brutale, entretien négligé des locaux, etc.).

→ Les enquêtes de satisfaction sont particulièrement bien perçues par la clientèle car elles témoignent du souci de bien faire et valorisent les propriétaires (considération et reconnaissance).

De plus, elles sont devenues incontournables pour nos entreprises vétérinaires soumises à un contexte conjoncturel particulier : hausse de la démographie vétérinaire, exercice canin prépondérant, baisse du nombre de chiens, concurrence des professions paravétérinaires, etc.

Un client satisfait recommande la clinique à trois propriétaires, alors qu’un client insatisfait la dénigre auprès de dix autres [7, 15].

Ainsi, les messages négatifs émis par 10 % de clients mécontents impactent la réputation de la clinique à hauteur de 27 %.

Lorsque la qualité perçue est supérieure à la qualité attendue, les efforts de l’équipe soignante sont récompensés par une fidélisation accrue et sont sources de nouveaux clients.

En cas de normalité ou d’infériorité (insatisfaction), les enseignements sont d’autant plus profitables qu’ils ont été analysés par l’ensemble des professionnels : les référents douleur de la structure (vétérinaire et ASV) sont les responsables privilégiés du changement des procédures [13].

→ Il est important d’associer une identité forte et symbolique à ce projet, qui permet de fédérer l’ensemble du personnel de la clinique et qui assure une visibilité auprès de la clientèle. L’identité visuelle est un des piliers d’une stratégie de communication réussie : elle transmet de façon directe une image facilement et rapidement identifiable, assure progressivement une notoriété, permet de transmettre des valeurs actuelles et fédératrices (bien-être animal), positionne, enfin, l’entreprise dans un historique d’expertises et un avenir prometteur d’innovations. L’identité visuelle a donc pour fonction de communiquer autour d’une expertise affirmée et revendiquée dans les domaines de la douleur et de la qualité de vie de nos animaux de compagnie.

Nous vous avons proposé de donner une double identité à ce plan douleur :

– celle d’un Cap Douleur®, acronyme angliciste de la volonté de changer le regard et la prise en charge de la douleur : Change Animal Pain ;

– celle d’un logo, illustré par la main protectrice et rassurante dans laquelle se réfugient chats et chiens douloureux.

D’autres outils de communication doivent être développés, sans oublier de les personnaliser (logos Cap Douleur® et de la clinique, signature des vétérinaires, etc.) : réglettes ou grilles d’évaluation, Dolodog® et Dolocat®, charte contre la douleur animale, photos de la salle de soins, des pièces d’hospitalisation, etc. (figure 3 complémentaire sur www.lepointveterinaire.fr).

Dans les salles de consultation, la présentation de schémas et/ou de radiographies, et la distribution de leaflets explicatives (notamment sur l’évaluation de la douleur et la prise en charge de l’arthrose) renforcent le message délivré tout en soulignant les niveaux d’implication et d’expertise de la clinique.

Les comptes rendus chirurgicaux et la facturation, en faisant apparaître le volet analgésie, sont également des moyens de communication attestant de la réalité de la prise en charge de la douleur.

La communication numérique dédiée à la douleur repose sur les sites web, les newsletters, les mailings et les webapplications dédiés à l’évaluation de la douleur. La communication numérique permet de s’adapter au traditionnel bouche-à-oreille, longtemps considéré comme le média prépondérant, source de recommandations et désormais particulièrement amplifié par les réseaux sociaux (Facebook®, Twitter®, Linkedin®, blogs).

Au-delà de tous ces outils matériels et informatisés, les propriétaires sont sensibles à une communication plus subtile, invisible, mais faite d’ambiances de travail, de rigueur, de professionnalisme, d’accueil, d’écoute, de sollicitude, de bienveillance et d’empathie.

2. Communication extérieure

→ Les outils de communication institutionnelle sont représentés par la publicité média (presse, affichage, télévision, radio), le marketing direct (mailing, phoning), la promotion (offre de prix, abonnements), la présence sur les salons ou dans les expositions et la parution dans les annuaires. Ces outils étaient jusqu’à présent interdits pour la plupart ou strictement encadrés.

→ Depuis le 13 mars 2015, l’article R. 242-35 “Communication et information” du Code rural et de la pêche maritime précise que la communication du vétérinaire est libre, quels qu’en soient le support et les modalités, sous réserve d’être loyale, honnête et scientifiquement étayée, de ne pas porter atteinte au respect du public ni à la dignité de la profession, et de ne pas contrevenir aux lois et règlements (notamment au Code de la santé publique).

→ Selon l’Ordre des vétérinaires, l’intervention des confrères dans les médias grand public (par exemple des émissions de radio(4)) est extrêmement positive pour la profession en raison de l’exposition de notre savoir-faire et de la démonstration de notre implication (vétérinaires et auxiliaires) pour la santé et le bien-être des animaux [14].

→ Il est urgent de mieux informer les propriétaires sur nos compétences et les différentes activités de nos cliniques car notre profession va être de plus en plus soumise à la concurrence des autres ayants droit de la santé animale ou des métiers paravétérinaires : ostéopathes et physiothérapeutes non vétérinaires, masseurs canins, comportementalistes, interprètes animaliers, etc.

Cette ouverture réglementée par l’Ordre des vétérinaires est bénéfique pour l’image de notre profession et la pérennité de nos activités car elle permet de devancer l’émergence de nouveaux métiers, surfant avec opportunité sur des préoccupations sociétales majeures, dont le bien-être animal.

Il est également utile de convier des journalistes à des ateliers éducatifs, par exemple sur l’arthrose. La diffusion par la presse de ces initiatives conforte la légitimité de notre profession dans la prise en charge de la douleur et permet de relier notre expertise avec l’actualité scientifique (nouvelles technologies, alliance et éducation thérapeutiques)(5).

Conclusion

Le plan douleur par son savoir-faire (trois volets, scientifique, opérationnel et relationnel) et son faire-savoir (deux programmes d’action à destination du client et de la clientèle) a ainsi l’ambition d’apporter la maîtrise raisonnée de la prise en charge de toutes les douleurs, dans les contextes de chirurgie, de situation d’urgence et de médecine interne.

Nous souhaiterions vivement réfléchir avec les instances professionnelles (Ordre, syndicat, Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie, groupements techniques vétérinaires) à l’éventualité d’une certification douleur, reposant sur un système de management de la qualité :

– actualisation et perfectionnement des connaissances en analgésie ;

– pratique de l’évaluation de la douleur selon les grilles traditionnelles validées et les nouvelles technologies d’information et de communication (Dolodog®, Dolocat®, collier d’activité) ;

– diffusion des techniques d’anesthésie locorégionales ;

– apprentissage des technologies modernes de soulagement de la douleur : laser, électrostimulation TENS, plasma riche en plaquettes (PRP), acide hyaluronique, cellules souches, etc. ;

– amélioration de la relation client par l’éducation et l’alliance thérapeutiques ;

– spécialisation de nos auxiliaires spécialisés vétérinaires référents douleur ;

– audit douleur annuel.

Nous nous sentons encouragés dans cette volonté par la satisfaction des nombreux vétérinaires présents aux conférences Cap Douleur® et par la remise du prix de l’Ordre 2015, venant récompenser, selon le président Michel Baussier, « une démarche à la fois scientifique, éthique, managériale et de communication ».

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ Le savoir-faire relationnel et l’alliance thérapeutique favorisent l’établissement d’un contrat de soins aux objectifs réalistes et aux moyens renforcés.

→ Une communication efficace à destination du client s’obtient en consacrant un temps quantitatif et qualitatif à l’examen clinique de l’animal et à l’écoute de son propriétaire.

→ Un plan d’action à destination de la clientèle concourt à façonner les images de compétence et d’expertise de cliniques vétérinaires garantes de la santé et du bien-être animal.

ENCADRÉ 1
L’alliance thérapeutique : établir une relation de confiance

Le praticien : compétences techniques et interpersonnelles

Le praticien doit disposer de compétences pour comprendre le problème, l’évaluer et proposer une prise en charge adaptée. Il doit aussi disposer de facultés relationnelles.

Le premier enjeu réside dans la garantie de l’excellence technique qui constitue le socle de l’expertise médicale. La compétence technique repose sur la perception qu’a le client du niveau d’expertise du soignant (dont l’actualisation de ses connaissances scientifiques et la maîtrise des nouveaux outils technologiques).

La compétence interpersonnelle repose sur les aspects humains de la relation client, comme l’expression d’un intérêt pour l’expérience du propriétaire confronté à la douleur de son animal, la prise en compte de ses préoccupations, l’expression d’empathie, de respect et de probité.

Le praticien : compétences pédagogiques

La compétence pédagogique se traduit par la communication d’informations claires et précises, l’établissement d’un partenariat et d’un partage des décisions. Les termes utilisés sont clairs, affirmatifs et convaincants. Des exemples évocateurs sont choisis pour l’explication de termes techniques (main brûlée ou zona et allodynie).

Les principaux obstacles à une communication efficace concernant les médicaments sont l’utilisation d’un vocabulaire trop technique, un style communicationnel dominant de la part du soignant, qui laisse peu de place à la participation du client, la difficulté éprouvée par les praticiens à aborder la question du risque ou de l’aléa thérapeutique.

Des résistances peuvent être créées lors de la relation client par certaines attitudes du praticien, comme un essai de persuasion directe frontale, l’utilisation de questions fermées, inquisitrices, une banalisation ou un jugement du comportement du propriétaire.

Aussi le praticien a-t-il intérêt à mener sa consultation en pratiquant le procédé mnémotechnique “FER les 4R”.

Toutes ces compétences conduisent à la confiance, prérequis à l’adhésion à la prise en charge multimodale de la douleur. Sans cette confiance, la capacité du client à soigner est diminuée [8, 9].

Donner du temps et pratiquer le suivi

Donner du temps conduit à la connaissance optimale du parcours médical de l’animal et à la reconnaissance de son propriétaire (motivations, implications, contraintes).

Donner du temps permet de renouer avec les vertus de l’examen clinique, particulièrement utile dans la recherche des signes douloureux (toucher, palpation, mobilisation).

Donner du temps permet de s’assurer que le client a bien compris les prescriptions.

Le suivi doit être de qualité : les nouvelles prises de rendez-vous obligent les assistants spécialisés vétérinaires (ASV) à la parfaite connaissance du dossier et à une sollicitude accrue compte tenu de l’impact particulier du ressenti de la douleur par le propriétaire. Des appels téléphoniques sont programmés, notamment lors de prescriptions de coanalgésiques ou de psychotropes, afin de rechercher les signes de tolérance et d’efficacité.

Le suivi personnalisé du client par un vétérinaire et une ASV référents douleur est garant de la cohérence des soins.

Le climat de confiance est renforcé par l’empathie montrée par le praticien.

Empathie

L’empathie (ressenti de l’intérieur) désigne le mécanisme par lequel un individu peut comprendre les sentiments et les émotions d’une autre personne (empathie émotionnelle) et ses états mentaux comme ses croyances ou ses perspectives (empathie cognitive).

L’empathie se crée par la résonance émotionnelle dont les supports neurophysiologiques sont les neurones miroirs du cortex cingulé antérieur.

La résonance émotionnelle est un début de partage de l’expérience douloureuse entre celui qui la subit et celui qui y assiste. Elle conduit donc à l’empathie qui vise à partager les émotions avec autrui, sans confusion entre soi et l’autre, mais dépassant le cadre de la simple sympathie (ressenti avec) [12].

L’empathie est un puissant moyen de communication interindividuelle car son objet est la compréhension : à ce titre, elle est l’un des éléments clés dans la relation thérapeutique qui devient collaborative [11, 16].

En médecine humaine, l’empathie augmente l’observance aux traitements des maladies chroniques [10].

Savoir être empathique n’est pas qu’une compétence innée : acquérir une plus grande empathie se cultive en reconnaissant ses propres émotions, en réfléchissant sur celles-ci, en acceptant les différences des autres, ainsi que les retours positifs et négatifs des clients.

Savoir communiquer est rarement inné. Se perfectionner dans l’art de la communication, par exemple en s’entraînant grâce à la méthode “FER les 4R”, a pour conséquences directes de développer et de révéler davantage au client des dispositions empathiques… probablement innées.

Savoir communiquer développe par conséquent l’observance. Une méta-analyse récente de 127 études en médecine humaine a montré que l’observance thérapeutique des patients dont le médecin avait bénéficié d’une formation spécifique en communication était améliorée de plus de 60 % par rapport à celle des malades dont le médecin traitant n’avait pas reçu pareille formation [17].

ENCADRÉ 2
Une aide pour la consultation : le procédé mnémotechnique “FER les 4R”

→ Feed-back

Il s’agit de faire un retour en montrant par des ponctuations verbales ou gestuelles que l’information donnée par le propriétaire est entendue et intelligible. La prise de notes (mots clés) peut servir de support aux étapes suivantes (éducation thérapeutique).

→ Écoute Réflexive

L’écoute réflexive nécessite la concentration du praticien (contact visuel). Elle rassure le propriétaire, qui voit le vétérinaire montrer un intérêt à son récit (médecine narrative), sans jamais juger.

L’écoute réflexive est axée sur des questions ouvertes pour connaître la motivation du propriétaire et sur des questions fermées pour obtenir des précisions.

Enfin, elle implique le praticien : « Oui, je comprends. C’est normal d’être inquiet, moi aussi… »

→ Recontextualiser

Il s’agit de recadrer les informations données dans le contexte clinique et l’environnement de l’animal : « Qu’est-ce qui vous fait dire que la douleur est plus importante, à quels moments de la journée… »

Une bonne recontextualisation centre l’attention du propriétaire sur les circonstances de survenue de la douleur chez son animal et lui permet ainsi d’être beaucoup plus précis.

→ Reformuler

La reformulation permet de bien vérifier la compréhension du récit, en utilisant les mêmes mots que le client (reformulation écho), les propres mots du praticien (reformulation miroir ou reflet), de synthétiser (reformulation résumé) et, enfin, de faire préciser certains points (reformulation clarification).

→ Résumer

Le résumé permet de faire un état des lieux de la situation douloureuse, et de vérifier que praticien et client sont d’accord sur les objectifs, par exemple maintenir la qualité de vie.

→ Renforcer

Il s’agit de valoriser les acquis et les progrès en comparant les scores d’évaluation de la douleur, en maximisant le rôle du propriétaire, en cherchant activement de nouvelles pistes thérapeutiques.

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