Les traitements antiparasitaires chez les bovins - Le Point Vétérinaire expert rural n° 347 du 01/07/2014
Le Point Vétérinaire expert rural n° 347 du 01/07/2014

PARASITOLOGIE DES BOVINS

Synthèse

Auteur(s) : Bruno Polack

Fonctions : Université Paris-Est,
École nationale vétérinaire d’Alfort,
Unité de parasitologie-mycologie,
7, avenue du Général-de-Gaulle,
94704 Maisons-Alfort Cedex

Le rôle du praticien est d’utiliser les antiparasitaires dans un objectif de développement durable et avec des stratégies adaptées à chaque cas pour maintenir leur efficacité en élevage.

La maîtrise du parasitisme est essentielle pour tous les élevages bovins, en production de viande ou laitière, et quel que soit le système de production (intensif ou extensif). Dans ces différents systèmes, les stratégies de lutte mises en place sont souvent de plus en plus complexes pour prendre en compte les caractéristiques de chaque élevage et trouver une solution adaptée à la fois aux objectifs de l’éleveur et aux contraintes existantes. Dans ce contexte, les antiparasitaires disponibles pour les bovins ont peu évolué depuis près de 20 ans. La dernière molécule mise sur le marché est l’halofuginone (Halocur®) en 1999, qui était déjà connue en production avicole. À l’opposé, les années 1970 et 1980 avaient été très riches dans le développement de nouvelles molécules et familles d’antiparasitaires. Le coût de développement des nouveaux médicaments a probablement orienté les firmes pharmaceutiques vers d’autres centres d’intérêt, car, dans d’autres productions ou espèces, les nouveaux antiparasitaires sont nombreux (1). De plus, les dernières innovations dans le domaine des anthelminthiques pour les ruminants ont été développées pour le marché des ovins avec deux molécules de deux familles. Il s’agit du monépantel (Zolvix®) mis sur le marché dans l’Union européenne en 2010 et du derquantel (Startect®) mis sur le marché au Royaume-Uni en 2012.

PRINCIPES GÉNÉRAUX D’UTILISATION DES ANTIPARASITAIRES CHEZ LES BOVINS

Actuellement, un peu plus de 90 médicaments disposent d’une indication antiparasitaire dans l’autorisation de mise sur le marché (AMM) mais cela ne correspond qu’à 30 molécules différentes appartenant à 14 familles chimiques (2) [24]. Le nombre de molécules a tendance à diminuer car les exigences pour le maintien de l’AMM sont de plus en plus grandes. De plus, pour d’anciennes molécules dont le brevet est déjà dans le domaine public, il n’est pas toujours rentable pour un laboratoire de faire les études nécessaires pour le maintien de l’AMM. Ainsi, pour le traitement de certaines parasitoses, le choix se restreint ou même n’existe plus. Il convient donc d’avoir recours au principe de la cascade. C’est le cas notamment de la dicrocœliose et de la paramphistomose, pour lesquelles aucun médicament bovin ne dispose d’une indication dans son AMM.

La mise en place d’une stratégie de lutte contre une parasitose bovine doit prendre en compte l’ensemble des moyens de lutte disponibles. Les antiparasitaires ont une place de choix dans ces stratégies, mais ils ne sont pas les seuls dispositifs disponibles et, avant d’y recourir, un certain nombre de conditions doivent être vérifiées.

1. Confirmer le diagnostic

Tout d’abord, il est nécessaire de confirmer le diagnostic chez les animaux suspects d’être parasités et d’identifier précisément le ou les parasites en cause. L’expérience montre que cette étape est à l’origine de nombreux échecs qui peuvent avoir des conséquences très importantes en raison de la taille de plus en plus grande des élevages. Tout retard ou toute erreur de diagnostic se paye souvent cher pour l’éleveur alors que des techniques simples auraient pu l’éviter. Un microscope et un peu de temps permettent généralement d’établir un diagnostic suffisamment précis pour mettre en place un traitement. Des documents de référence avec de bonnes clés de diagnose sont indispensables, même aux parasitologues confirmés. C’est d’autant plus nécessaire que, dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP), de plus en plus de médicaments prévoient ce diagnostic dans leur indication. Ainsi, par exemple, l’indication du toltrazuril précise : « Prévention des signes cliniques de la coccidiose et réduction de l’excrétion des coccidies chez les veaux à l’étable destinés au renouvellement du troupeau laitier, dans les élevages ayant un historique confirmé de coccidiose due à Eimeria bovis ou à Eimeria zuernii. » Cette étape doit devenir le préalable à toute démarche de traitement en médecine de population.

2. Définir les objectifs

La deuxième étape permet de définir l’objectif ou les objectifs à atteindre. Il est nécessaire de déterminer s’il est souhaitable de ne rien faire (par exemple pour une démodécie bovine qui généralement va guérir spontanément), de trouver un équilibre entre la population parasitaire et la production recherchée (c’est le cas le plus souvent des strongyloses digestives et aussi de la majorité des parasitoses) ou d’éradiquer le parasite (comme pour la gale psoroptique). Il est important de fixer un objectif réalisable.

3. Choisir la méthode de lutte

La troisième étape consiste à choisir le ou les dispositifs à mettre en place : lutte agronomique, biologique, chimique, phytothérapie, alimentation adaptée (augmentation de la résilience), etc. Dans ce cadre, le choix du ou des médicaments antiparasitaires utilisés est très important. Les critères de celui-ci doivent prendre en compte à la fois l’efficacité de la molécule et ses conditions d’emploi chez les animaux, notamment en termes de délais d’attente (DA) viande et lait, les précautions à prendre par la personne qui administre le médicament vétérinaire aux animaux et celles pour l’environnement.

Indiquer les précautions à prendre pour les utilisateurs

Les antiparasitaires sont des molécules qui peuvent être dangereuses pour les personnes qui les manipulent. Celles qui administrent les insecticides en pulvérisation doivent être particulièrement bien protégées. Cela doit aussi être le cas pour certains médicaments à administration percutanée qui peuvent être toxiques pour les hommes. Il est nécessaire, en tant que prescripteur, de rappeler aux utilisateurs les précautions indiquées dans le RCP. Celles-ci sont soit conseillées, soit recommandées, soit indispensables, et parfois très contraignantes. Ainsi, pour le Taktic®, il est indiqué qu’il convient de « porter des vêtements imperméables, protecteurs lavables et des gants. Pour éviter des inhalations prolongées, le traitement par pulvérisation sera fait en plein air ou dans un bâtiment bien ventilé ». De plus, il est ajouté que « en raison des propriétés hyperglycémiantes et hypotensives de l’amitraze, ces précautions doivent être scrupuleusement respectées par les personnes diabétiques et/ou sous traitement hypotenseur ».

Respecter les précautions pour l’environnement

Les antiparasitaires peuvent également avoir des conséquences pour l’environnement d’autant plus que, par rapport à d’autres classes thérapeutiques, ils sont souvent utilisés chez un nombre élevé d’animaux ou chez tous les animaux d’un élevage. L’impact des antiparasitaires sur l’environnement est donc pris en compte dans le dossier d’AMM et de plus en plus de précautions sont requises. Celles-ci peuvent aussi limiter considérablement l’utilisation de certains médicaments. Par exemple, le RCP du toltrazuril précise qu’il est indiqué « chez les veaux à l’étable destinés au renouvellement du troupeau laitier » et « pour raison environnementale » il est contre-indiqué « chez les veaux de plus de 80 kg ». Le toltrazuril est un herbicide de la famille des triazines qui interagit sur une cible présente dans un organite de type plaste observé chez les coccidies [14]. Il est très stable dans l’environnement avec une demi-vie de plus de 1 an, ce qui explique les précautions qui doivent être prises lors de son utilisation.

L’effet des antiparasitaires sur les insectes coprophages a été particulièrement étudié [19, 31]. En effet, de nombreux antiparasitaires sont éliminés principalement par voie fécale sous forme active et peuvent avoir un impact sur la faune coprophage qui participe à la dégradation des excréments. Les principaux antiparasitaires incriminés sont les pyréthrinoïdes utilisés en pour-on et les lactones macrocycliques car ce sont des insecticides et qu’ils sont souvent éliminés sur une longue période dans les fèces. Le rôle de la faune coprophage est plus important dans les régions à climat sec (zones méditerranéennes et de montagne) que dans celles à climat pluvieux (zones océaniques) où la pluie est le facteur principal de dispersion des excréments. Pour limiter l’impact de ces antiparasitaires, ils ne devraient pas être utilisés pendant la période d’activité maximale des insectes coprophages, qui se situe généralement au printemps. Ils le sont pourtant fréquemment, alors que cela est souvent inutile, car à cette période le parasitisme est encore faible.

Outre ce rôle, trois familles d’antiparasitaires, les pyréthrinoïdes, les organophosphorés et les actones macrocycliques, ont une toxicité aquatique élevée. Elles sont composées de molécules hydrophobes et lipophiles qui peuvent s’accumuler dans les sédiments et avoir un impact plus important sur la faune benthique, notamment sur les insectes, les crustacés et les mollusques. Elles sont également toxiques pour les poissons [19, 25, 33].

TRAITEMENTS ACARICIDES ET INSECTICIDES

Les acaricides et insecticides appartiennent à une classe de médicaments où la recherche est active avec de nouvelles molécules et de nouvelles familles qui arrivent régulièrement sur le marché. Cependant, aucune d’entre elles n’a été développée pour les animaux de production, mais uniquement pour les animaux de compagnie. Ces molécules se trouvent toutefois dans certains biocides (3) pour lutter contre les arthropodes des bâtiments d’élevage. Cet article n’aborde pas la lutte contre les tiques, peu pratiquée en France hexagonale.

1. Lutte contre les gales

Les deux gales les plus fréquemment rencontrées sont la gale psoroptique dans les troupeaux allaitants et la gale choroptique dans les troupeaux laitiers, la gale sarcoptique étant rarement observée.

Gale psoroptique

Le traitement de la gale psoroptique est parfois difficile, car il doit viser l’éradication du parasite en traitant tous les bovins de l’élevage, soit avec des lactones macrocycliques injectables, soit avec de la moxidectine ou de la doramectine en pour-on (l’ivermectine et l’éprinomectine pour-on n’ont pas une activité suffisante), soit avec des insecticides en pulvérisation ou, de préférence, quand c’est possible, en bain (fenvalérate, deltaméthrine, dimpylate, phoxime ou amitraze) (photo 1). La désinfection de l’environnement peut aussi être intéressante dans la mesure où le parasite peut survivre plus de 2?semaines dans le milieu extérieur. Il est donc souvent nécessaire d’effectuer plusieurs traitements à 10 jours ou à 3semaines d’intervalle suivant la rémanence de la molécule utilisée afin d’obtenir l’éradication du parasite [20]. Malgré des traitements correctement effectués, des échecs ont été signalés en Belgique chez des bovins de race blanc bleu belge (BBB) et au Royaume-Uni [9, 18]. La difficulté de traitement des bovins de race BBB ne semble pas liée à une biodisponibilité plus faible des lactones macrocycliques dans cette race [29]. Au Royaume-Uni, en cas d’échec du traitement avec une lactone macrocyclique, de bon résultats sont obtenus avec de la perméthrine en pour-on (médicament non disponible en France) administrée trois fois à 2 semaines d’intervalle. Elle est proposée comme solution alternative à l’utilisation de l’amitraze [9]. Actuellement, il n’est pas possible de conclure si ces échecs thérapeutiques sont liés à une chimiorésistance, comme cela a déjà été observé avec les pyréthrinoïdes pour la gale du mouton. En ce qui concerne le traitement de la gale psoroptique chez des vaches laitières, aucun des médicaments actifs n’a un DA lait nul car l’éprinomectine n’a pas une activité suffisante. Le recours à des médicaments ayant un DA court comme Butox® 50 ‰ (DA lait = 1 jour) ou la moxidectine pour-on (DA lait = 6 jours) est ainsi nécessaire.

Gale chorioptique

La gale chorioptique est moins contagieuse et moins prurigineuse que les autres gales bovines. Elle peut circuler longtemps à bas bruit dans un élevage, le plus souvent laitier, sans être à l’origine de pertes économiques importantes car elle est généralement observée cliniquement chez quelques animaux et reste asymptomatique chez les autres. Cependant, les animaux les plus fortement atteints ont une production diminuée [26]. Le traitement peut reposer sur les lactones macrocycliques en pour-on, les formes injectables étant peu ou pas efficaces, ou sur des insecticides par pulvérisation ou en bain (les mêmes que pour la gale psoroptique). L’éradication du parasite est difficile car il peut survivre 2?mois dans l’environnement. De plus, les deux espèces retrouvées chez les bovins, Chorioptes bovis et Chorioptes texanus, sont observées en Europe chez les ruminants et les équidés [10]. Il convient d’en tenir compte dans le traitement car tous les ruminants et équidés d’un élevage doivent être traités pour éradiquer le parasite. En élevage laitier, seule l’éprinomectine, qui a un délai d’attente lait nul, peut être utilisée. Un seul traitement permet de diminuer fortement le nombre d’animaux infestés, mais plusieurs sont nécessaires pour son éradication [30]. La question de l’intérêt d’éradiquer le parasite doit toutefois se poser car les conséquences restent limitées pour un troupeau bien entretenu, et cette démarche peut être compliquée et onéreuse [15]. Cependant, pour des raisons éthiques, il semble nécessaire de traiter les animaux présentant des lésions importantes en raison de l’inconfort qu’elles entraînent.

2. Lutte contre les poux

Les poux piqueurs (anoploures) et les poux broyeurs (mallophages) sont très fréquemment observés en élevage (photo 2). Ils présentent une cyclicité annuelle avec une augmentation pendant la phase hivernale et une diminution pendant la phase estivale quand les animaux sont au pâturage. Ils sont plus fréquents chez les jeunes de moins de 1 an ou des adultes malades ou sous-alimentés [4]. La principale conséquence d’une infestation est l’inconfort pour les animaux, mais les répercussions peuvent être plus importantes lors d’infestation forte par des anoploures avec des diminutions de production et aussi une mortalité chez les jeunes [22]. De plus, en raison des lésions provoquées sur les cuirs par les anoploures, il convient de traiter les veaux de boucherie car la valorisation de la peau est importante dans cette filière (photo 3) [8].

Pour la lutte contre les poux, de nombreuses molécules sont disponibles : les pyréthrinoïdes, les organophosphorés, les formamidines et les actones macrocycliques. Pour ces dernières, les formes pour-on ont une action sur les deux types de poux, mais les formes injectables n’ont une bonne efficacité que sur les anoploures. De plus, seuls les pour-on de deltaméthrine et d’éprinomectine ont un DA lait nul. En cas de présence de poux dans un élevage, la lutte mise en place peut viser deux objectifs différents : limiter la pullulation hivernale ou viser l’éradication. Pour le premier objectif, il est préférable de traiter en fin d’automne ou en début d’hiver [3]. Pour l’éradication, une étude norvégienne a montré que deux traitements à 21 jours d’intervalle avec un pyréthrinoïde en pour-on (deltaméthrine ou fluméthrine) sont efficaces dans la majorité des cas (28 troupeaux sur 33) [21]. La recontamination est principalement liée soit à une pâture commune avec un élevage infesté, soit à l’achat de bovins sans traitement à l’introduction.

3. Lutte contre les mouches du bétail

Les mouches perturbent les animaux (et les hommes) et leur transmettent des agents pathogènes. C’est notamment le cas des bactéries responsables de kérato-conjonctivites et de mammites d’été, des parasites comme Thelazia sp. (nématode à localisation oculaire), Besnoitia besnoiti, et d’un certain nombre de kystes de protistes (kystes de Giardia sp., oocystes de Toxoplasma gondii et de Cryptosporidium sp.) [11, 13]. La lutte est difficile car elle dépend de la biologie de chaque espèce. Elle passe éventuellement par le traitement des mouches dans le milieu extérieur lorsque certains de leurs stades de développement sont localisés dans des endroits précis :

– destruction des adultes sur les murs des bâtiments ou avec un attractif, pour les stomoxes ou Musca sp. ;

– destruction des larves dans le fumier ou le lisier en évacuant les bouses et les litières régulièrement, avec stockage fermé, ou en les traitant avec des insecticides inhibiteurs de croissance [11].

La lutte chez les animaux repose aussi sur l’utilisation de pyréthrinoïdes en pulvérisation ou en pour-on et de lactones macrocylciques pour-on [11, 32]. Ces dernières ont une bonne efficacité sur Haematobia irritans. Les pyréthrinoïdes ont une activité sur une période longue mais variable selon les espèces, jusqu’à 10?semaines pour la deltaméthrine pour-on et 4 mois pour les plaquettes auriculaires de cyperméthrine. Ces deux formulations présentent aussi l’avantage d’avoir un DA lait nul.

TRAITEMENTS ANTIPROTISTES

L’arsenal thérapeutique reste très limité et, pour beaucoup de parasites, aucun médicament n’est disponible. Ainsi, pour les coccidies, des molécules ont une bonne efficacité dans le contrôle des eimérioses (avec les limites environnementales très contraignantes pour le toltrazuril), mais aucune n’est opérante pour les autres espèces (Sarcocystis sp., Besnoitia besnoiti, Neospora caninum, Toxoplasma gondii). Pour les cryptosporidies, le seul médicament disponible en France, le lactate d’halofuginone, limite le développement du parasite. La paromomycine permet également son contrôle, mais elle n’a pas d’AMM en France. Pour la giardiose, les benzimidazoles peuvent être utilisés hors AMM. Même si l’importance de la giardiose reste encore controversée chez le veau, de plus en plus d’études montrent l’intérêt d’un traitement anti-Giardia chez des jeunes bovins entre 1 et 4 mois avec un retard de croissance ou un mauvais état général sans autre explication que la présence de kystes de Giardia duodenalis [12]. La présence de kystes dans les fèces étant intermittente, il convient de les rechercher chez plusieurs animaux. Le traitement de la giardiose doit toujours être associé à des mesures hygiéniques pour prévenir une recontamination immédiate [23].

Dans le sang, deux groupes de protistes peuvent parasiter les bovins : les trypanosomes et les piroplasmes. Pour les premiers, seul Trypanosoma theileri est présent en France et il est non pathogène. Il est possible de l’observer fortuitement sur un frottis ou des cultures de lymphocytes. Il est transmis de façon mécanique par des mouches piqueuses (Tabanidés ou Stomoxinés). Deux piroplasmes sont présents en France, Babesia divergens, le plus pathogène, et Babesia major. Le contrôle des babésioses bovines est fondé sur l’obtention d’une situation enzootique stable avec un équilibre entre l’immunité concomitante des animaux et les nouvelles infections. Seuls les animaux présentant une babésiose clinique sont alors traités avec le seul médicament disponible : l’imidocarbe [1].

TRAITEMENTS ANTHELMINTHIQUES

Les anthelminthiques constituent la majorité des antiparasitaires disponibles pour les bovins. Cependant, cette classe de médicaments évolue peu, et il est important de bien les utiliser pour retarder au maximum l’apparition de résistances. Sur le plan mondial, l’augmentation des populations de parasites résistants constitue un obstacle de plus en plus important au contrôle des helminthoses. Les études scientifiques sur la résistance aux anthelminthiques ainsi que sur les stratégies à mettre en place pour l’éviter ou freiner son apparition sont très nombreuses [2, 5, 6, 16, 17]. L’objectif général peut se résumer en quelques mots tirés de la réunion de conclusion du projet européen Parasol (Parasite Solutions) pour définir les nouvelles stratégies de contrôle des strongyloses chez les ruminants : « Traiter aussi peu que possible, mais autant que nécessaire ! » Vaste programme… Il remet le vétérinaire au centre du jeu. Ainsi le système Cows (control of worms sustainably) au Royaume-Uni préconise un certain nombre de bonnes pratiques que Taylor résume ainsi [27] :

– élaborer une stratégie de contrôle du parasitisme avec le vétérinaire ou le conseiller ;

– avoir un programme de quarantaine efficace permettant d’empêcher l’importation de vers résistants avec l’introduction de bovins ;

– vérifier régulièrement l’efficacité des anthelminthiques utilisés dans l’exploitation ;

– administrer correctement les anthelminthiques (dose, méthode d’administation, etc.) ;

– utiliser les anthelminthiques seulement quand c’est nécessaire ;

– sélectionner l’anthelminthique approprié à l’objectif de traitement ;

– adopter des stratégies pour préserver la sensibilité aux anthelminthiques des vers présents dans l’exploitation ;

– réduire la dépendance aux anthelminthiques.

Si ces préconisations commencent à être prises en compte dans les productions ovine et caprine, cela doit le devenir en production bovine.

De plus, certaines indications pour des parasitoses de moindre importance ne sont pas soutenues par les laboratoires lors de la procédure de renouvellement d’AMM. Ainsi, il n’existe plus d’indications pour la dicrocœliose et la paramphistomose alors que celles-ci subsistent pour les ovins. Enfin, les nouveaux délais d’attente pour les douvicides rendent le contrôle de cette parasitose encore plus difficile pour les troupeaux laitiers [28]. Les mesures agro-environnementales à mettre en place deviennent encore plus importantes [7]. Comme en élevage de caprins laitiers dans le centre-ouest de la France dans les années 1970 et en raison de la difficulté de gestion du parasitisme au pâturage et de l’augmentation de la taille des troupeaux, la norme en vache laitière ne doit pas devenir un cheptel en zéro-pâturage.

Conclusion

Le contrôle des parasitoses bovines nécessite la mise en place de stratégies de plus en plus complexes et adaptées à chaque cas. Les molécules antiparasitaires disponibles doivent être utilisées dans un objectif de développement durable pour maintenir leur efficacité en élevage le plus longtemps possible. Le vétérinaire, dans ce cadre, doit voir son rôle renforcé et rester, ou redevenir, le principal interlocuteur des éleveurs. En effet, il dispose à la fois des compétences nécessaires en parasitologie et de la connaissance de chaque élevage dans sa complexité, ce qui lui permet de proposer une stratégie antiparasitaire adaptée.

  • (1) Pour les carnivores domestiques notamment, le marché des antiparasitaires est en plein développement et ne nécessite pas d’études de résidus.

  • (2) Voir la fiche “Traitements antiparasitaires pour bovins” des mêmes auteurs, dans le numéro spécial du Point Vétérinaire de 2014, qui est une mise à jour des médicaments disposant d’une indication antiparasitaire chez les bovins en France.

  • (3) Les informations sur les biocides sont disponibles sur le site simmbad.fr.

Références

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Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ Ne pas identifier les animaux parasités ni les parasites en cause est à l’origine de nombreux échecs thérapeutiques. L’établissement de ce diagnostic fait partie de l’indication de nombreux médicaments.

→ Les personnes qui administrent les traitements doivent se protéger, et de plus en plus de précautions sont à prendre pour limiter l’impact des antiparasitaires sur l’environnement.

→ Le vétérinaire joue un rôle important dans le choix des stratégies mises en place pour le traitement, qui doivent être adaptées à chaque cas.

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e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

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L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

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