Qu’apportent les nouveaux antiparasitaires sur prescription ? - Le Point Vétérinaire n° 345 du 01/05/2014
Le Point Vétérinaire n° 345 du 01/05/2014

LA “SAGA” DES ANTIPARASITAIRES

Thérapeutique

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : Le Fougerais
44850 Saint-Mars-du-Désert

Trois nouvelles molécules, le dinotéfurane, l’afoxolaner et le fluralaner, enrichissent l’offre des antiparasitaires externes pour chiens.

En Europe, dont la France, et dans le monde, le marché des antiparasitaires externes (APE) est le plus important chez les animaux de compagnie. En 1994, le lancement du fipronil (Frontline(r)) a révolutionné l’offre. Actuellement, ce marché de 120 millions d’euros dans l’Hexagone en prix fabricant est très disputé. Chez les chiens, il est dominé par deux marques de spot on : Frontline(r) (± Combo) et Advantix(r) (imidaclopride et perméthrine).

Les concurrents se multiplient

Depuis 2009, les génériques de Frontline(r) se sont multipliés dans tous les circuits : vétérinaires, pharmaciens, jardineries ou autres. Des autorisations de mise sur le marché (AMM) viennent aussi d’être octroyées à des spot on à base d’imidaclopride (génériques d’Advantage(r)) ou de fipronil et de méthoprène (comme dans Frontline(r) Combo).

Pas de bioéquivalence pour les spot on

Toutefois, aucun des génériques en topiques n’a été développé à partir d’études de bioéquivalence plasmatique. Car les concentrations sanguines de fipronil ou d’un autre insecticide topique agissant par contact ne sont pas représentatives de leur efficacité. Ces génériques ont donc tous démontré que les formulations étaient efficaces, non par bioéquivalence, mais par des travaux de laboratoire sur des infestations expérimentales de puces ou de tiques.

Cela conduit parfois à des résumés des caractéristiques du produit (RCP) et à des notices d’emploi confus et ambigus, sur l’efficacité antitiques du fipronil notamment. Néanmoins, ce n’est pas sur la base du libellé d’un RCP administratif qu’il est possible de juger de la supériorité d’un générique par rapport à un autre.

Les nouveautés en spot on ne datent pas d’hier

Depuis une dizaine d’années, les nouvelles molécules spot on se sont succédé sans toutefois rencontrer le grand succès espéré par leurs promoteurs en France. Ainsi, le pyriprole (Prac-Tic(r) chiens) et la métaflumizone (Promeris(r) chats et Promeris(r) Duo chiens avec l’amitraz) ont été lancés la même année, en 2007. Plus récemment, en 2011-2012, l’indoxacarbe (Activyl(r) chats et Activyl(r) Tick Plus avec la perméthrine pour les chiens) était également présenté en spot on.

Toutes ces molécules, approuvées par l’Agence européenne du médicament, sont efficaces. Durant les cinq années qui suivent leur lancement, ces médicaments nouveaux sont délivrés sur prescription. Leur publicité est restreinte aux seuls ayants droit. Cela peut expliquer que ces marques ne soient ni connues ni réclamées par les propriétaires. Alors que les deux marques leaders, Frontline(r) et Advantix(r), bénéficient de publicités à la télévision, à la radio, dans la presse ou encore sur les écrans des salles d’attente des cliniques vétérinaires.

Le comprimé de spinosad d’action rapide

Sur ce marché dominé à 80 % par des spot on (une innovation de Bayer des années 1980), Elanco renouvelle l’offre en 2011 en présentant le spinosad (Comfortis(r)) sous la forme d’un comprimé antipuces adulticide d’action rapide (toutes les puces sont tuées en 4 heures) et rémanente (1 mois). Cette innovation des comprimés (sur prescription) rencontre le succès aux États-Unis et aussi en France chez les vétérinaires, malgré un spectre limité aux puces et des vomissements bénins chez 5 à 10 % des animaux traités. La part de marché de ce comprimé chez les vétérinaires est estimée entre 15 et 20 %. Fin 2013, Elanco poursuit sur cette dynamique en associant dans Trifexis(r) la milbémycine (nématocide) au spinosad antipuces. Aux États-Unis, touchés par la dirofilariose, Trifexis(r) est devenu le premier APE avec plus de 30 % de parts de marché. En France, un rythme mensuel de vermifugation n’est pas couramment appliqué.

Les nouveaux colliers Seresto(r) (imidaclopride, fluméthrine) lancés en 2012, une forme pourtant délaissée ne nécessitant pas de prescription, sont aussi plutôt bien accueillis en termes de ventes. Cela s’explique sans doute à la fois par la rémanence d’activité antipuces et antitiques de 7 à 8 mois de ce dispositif, son prix compétitif et la publicité grand public qui a accompagné le lancement.

Dans un marché dominé par les spot on et deux marques leaders, ces nouveaux comprimés et colliers ont déjà bousculé un peu les habitudes depuis 2 ans.

En 2014, les nouveautés antiparasitaires s’accumulent en spot on comme en comprimés (tableaux 1 et 2).

Le dinotéfurane, plus rapide et plus large

Ceva fait son entrée en Europe sur le marché des APE princeps avec un nouveau spot on, Vectra(r) 3D, et surtout une molécule innovante, le dinotéfurane. Ce nouvel insecticide de la famille des néonicotinoïdes (comme l’imidaclopride) agit vite. En 2 heures, toutes les puces sont tuées (si le spot on est appliqué depuis au moins 24 à 48 heures pour laisser le temps de la diffusion de l’insecticide sur le pelage). Cet insecticide est associé à deux autres principes actifs bien connus, la perméthrine, à la fois insecticide, acaricide et répulsive, et le pyriproxyfène comme IGR (insect growth regulator, inhibiteur de croissance, action ovicide et larvicide pour limiter les réinfestations par les puces). La liste des indications approuvées dans le RCP est longue, puisqu’elle inclut, en plus des puces et des tiques, une activité répulsive contre les phlébotomes, les moustiques, et même contre les mouches d’étable, pendant 1 mois. Le rythme d’administration reste donc mensuel. Une version féline de ce spot on, Vectra(r) Felis, sans perméthrine, vient d’être approuvée par l’Agence européenne du médicament.

Comprimés d’isoxazolines d’action systémique et rapide

Merial et MSD ont choisi de développer des comprimés tendres non sécables de deux représentants d’une nouvelle famille jusque-là inédite : les isoxazolines. Les deux principes actifs, l’afoxolaner (NexGard(r), Merial) et le fluralaner (Bravecto(r), MSD), sont à la fois insecticides (antipuces) et acaricides (antitiques). Comme pour le spinosad, ils agissent par voie systémique. Il est donc nécessaire que les parasites prennent au moins partiellement un repas de sang pour qu’ils soient tués par ces principes actifs. L’effet répulsif contre les tiques parfois recherché avec les spot on n’existe donc pas. Après la prise orale, l’activité des principes actifs dépend de la vitesse avec laquelle les concentrations sériques minimales efficaces sont atteintes. La biodisponibilité de ces composés lipophiles est toujours bonne (74 % pour l’afoxolaner) avec une résorption assez rapide. Le pic plasmatique est atteint en 2 à 4 heures avec l’afoxolaner (à 2,5 mg/kg) et en 24 heures avec le fluralaner (à 25 mg/kg). Pour les deux principes actifs, près de 100 % des puces présentes sont tuées dans les 8 heures suivant la prise orale. Ce délai est finalement plus court qu’avec un insecticide topique qui agit par contact. Car la diffusion homogène des principes actifs à partir du point d’application nécessite 24 à 72 heures. Les études d’efficacité par infestation expérimentale mesurent d’ailleurs l’efficacité des spot on 48 heures après la première application.

L’action rémanente des isoxazolines est directement liée à la longue persistance de concentrations efficaces dans le sang. Très lipophiles, elles sont donc éliminées lentement avec des demi-vies de l’ordre de 2 semaines pour les deux composés, principalement par voie biliaire.

Rémanence de 12 semaines pour le fluralaner

La rémanence d’activité d’environ 12 semaines des comprimés Bravecto(r) de fluralaner, contre 1 mois pour l’afoxolaner, n’est pas liée à une élimination plus lente du premier, mais à une dose (minimale) dix fois plus élevée : 25 mg/kg pour le fluralaner contre 2,5 mg/kg pour l’afoxolaner. Cela est rendu possible par la bonne tolérance de ces molécules, même à des doses très élevées par rapport aux doses minimales efficaces. Car ces neurotoxiques pour les arthropodes n’ont pas de récepteur chez les mammifères, y compris chez les colleys MDR-1.

Les deux composés ayant été développés simultanément, aucune étude clinique publié n’a comparé leur efficacité. En dehors de la rémanence, les autres différences entre eux apparaissent plus culinaires : une appétence démontrée avec l’arôme bœuf braisé pour NexGard (r), qui peut être pris à jeun ou pendant les repas, ou un arôme foie de porc pour Bravecto (r), à prendre avec les repas, etc.

Des puces aux cestodes du chat

Chez les chats, la seule nouveauté disponible est Broadline(r) : un spot on de quatre principes actifs différents. Le spectre d’activité endectocide est ainsi élargi des parasites externes (puces et tiques) aux nématodes (ascaris et ankylostomes) et surtout, avec le praziquantel, aux cestodes. La prévalence des ténias serait d’ailleurs sous-estimée chez les chats. À l’autopsie, un quart à un tiers des chats seraient infestés par Dipylidium caninum ou par un ténia, alors que les coproscopies sont presque toujours négatives. Cette activité cestodicide différencie Broadline(r) de ses deux concurrents endectocides : Advocate(r) (Bayer), à base d’imidaclopride et de moxidectine, et Stronghold(r) (Zoetis), avec la sélamectine.

Dans Broadline(r), l’éprinomectine comme nématocide et le praziquantel agissent par effet systémique. À l’inverse, le fipronil et le méthoprène font appel à l’effet de contact en se diffusant à la surface de la peau. Mais leurs doses minimales sont doublées par rapport à celles de Frontline(r) Combo, ce qui explique sans doute des rémanences un peu plus longues. Enfin, ce spot on n’est pas conditionné dans une pipette souple, mais dans une petite seringue plastique unidose. Pour le moment, il n’est pas indiqué contre la gale d’oreille, contrairement à ses concurrents endectocides.

La prescription : un atout et un frein

Les quatre nouveaux antiparasitaires de 2014 complexifient donc encore davantage une offre déjà abondante. Leur point commun est qu’ils sont tous sur prescription pendant au moins 5 ans. C’est un atout pour les vétérinaires, qui seront ainsi moins concurrencés par les pharmaciens et pas du tout par les autres circuits en vente libre. Un inconvénient aussi car, la publicité grand public étant interdite, les propriétaires ne viendront pas réclamer ces nouvelles marques au comptoir…

Conflit d’intérêts

Aucun

En savoir plus

– Agence européenne du médicament. Rapports publics d’évaluation des médicaments antiparasitaires : ActivylR, ActivylR Tick Plus, Prac-TicR, PromerisR et PromerisR Duo, VectraR 3D, BravectoR, NexGardR et BroadlineR. http://www.ema.europa.eu/ema/

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