Les progrès de la pratique vétérinaire en anesthésie et en analgésie - Le Point Vétérinaire n° 340 du 01/11/2013
Le Point Vétérinaire n° 340 du 01/11/2013

ANESTHÉSIE ET ANALGÉSIE

Dossier

Auteur(s) : Gwenola Touzot-Jourde

Fonctions : École nationale vétérinaire, agroalimentaire et de
l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706
44307 Nantes Cedex 3

Les molécules et les pratiques de l’anesthésie et de l’analgésie vétérinaires ont beaucoup évolué ces 40 dernières années. L’arsenal thérapeutique s’est nettement étoff é, et la prise en compte de la douleur est devenue un enjeu majeur de la profession.

La naissance de l’anesthésie et de l’analgésie vétérinaire se confond avec celle de l’anesthésie et de l’analgésie humaine. Les pratiques ont évolué sur deux siècles (encadré complémentaire sur WK-Vet.fr). Les 40 dernières années ont été particulièrement riches en changements et en améliorations en raison de la disponibilité d’un arsenal thérapeutique de plus en plus large et performant, de l’amélioration des pratiques et des équipements. L’évaluation scientifique des effets des associations anesthésiques et analgésiques a permis d’affiner les indications et de diminuer les effets secondaires. L’attitude du grand public et des vétérinaires envers la douleur et le bien-être animal a également beaucoup progressé avec une prise de conscience à l’échelle mondiale.

1 L’anesthésie et l’analgésie des années 1970– 1980 à nos jours

Pharmacopée disponible

Ces 40 dernières années ont vu le nombre de molécules anesthésiques et analgésiques se multiplier sur le marché vétérinaire, en même temps que la mise à disposition d’appareils d’anesthésie et de monitoring de plus en plus adaptés, sophistiqués et abordables. La famille des α2-agonistes s’est agrandie avec la détomidine et la romifidine chez les grands animaux, la médétomidine et la dexmédétomidine chez les petits animaux. Pendant les années 2000, l’halothane est tombé en désuétude et a été remplacé par l’isoflurane ou le sévoflurane, qui présentent les avantages d’entraîner une dépression cardiovasculaire moins marquée et des caractéristiques physicochimiques permettant un endormissement et un réveil rapides avec un métabolisme minimal. L’anesthésie intraveineuse de longue durée sans complication de réveil prolongé est maintenant possible à l’aide d’agents anesthésiques non cumulatifs comme le propofol ou l’alfaxalone, quel que soit l’état de la fonction hépato-rénale. Les analgésiques systémiques sont nombreux avec un vaste choix de médicaments avec autorisation de mise sur le marché vétérinaire (AMMV). Dans la gamme des anti-inflammatoires, les molécules COX-2 préférentielles ou sélectives ont moins d’effets secondaires sur le tractus digestif et la fonction rénale pour une efficacité anti-inflammatoire et analgésique équivalente. Les morphiniques sont de plus en plus accessibles, avec les présentations vétérinaires de butorphanol, buprénorphine et méthadone. La contrainte de leur commande et de la tenue d’un registre pour les agonistes ì est faible, comparée aux bénéfices de ces molécules dans la gestion de la douleur des animaux. Les techniques d’anesthésie locorégionale ont pris un nouvel essor avec l’aide à la localisation des nerfs par échographie et/ou électrostimulation. Le cahier des charges de l’anesthésie, incluant perte de conscience, myorelaxation, analgésie, sécurité et réversibilité, rapidité et facilité de mise en oeuvre, coût raisonné, n’a pas changé et est couvert par de multiples protocoles d’anesthésie balancée où anesthésiques, analgésiques et techniques d’anesthésie locorégionale sont combinés pour une efficacité supérieure pendant l’anesthésie, des effets secondaires limités et une diminution de l’intensité et de la durée de la douleur postopératoire.

Reconnaissance de la douleur animale

La préoccupation de la reconnaissance et de la gestion de la douleur animale a commencé à s’exprimer à grande échelle à partir de 1973, année qui a vu la création de l’International Association for the Study of Pain (IASP). Les premières réalisations de l’IASP ont été de définir la douleur et de démontrer que les animaux comme les êtres humains pouvaient la ressentir. Une discussion sur l’éthique de l’utilisation des animaux par les hommes et sur le bien-être animal a été initiée, aboutissant à des recommandations sur l’utilisation des animaux pour la recherche. Le cadre de l’animal de laboratoire a largement été dépassé, avec des répercussions sur le bien-être des animaux de rente et aussi, appuyées par une opinion publique forte, sur la reconnaissance et la gestion de la douleur chez les animaux de compagnie. L’absence de douleur tient une place importante dans la définition du bien-être animal, qui comprend cinq libertés :

– ne pas souffrir de faim ni de soif ;

– ne pas souffrir de contrainte physique ;

– être indemne de douleurs, de blessures et de maladies ;

– avoir la liberté d’exprimer des comportements normaux ;

– être protégé de la peur et de la détresse.

À travers son journal scientifique Pain, l’IASP a promu le développement de la recherche dans ce domaine. Les découvertes des mécanismes de la douleur ont amené les chercheurs à émettre des recommandations thérapeutiques et préventives qui constituent le fondement des protocoles analgésiques développés ces 10 dernières années. Les premiers constats concernent l’effet des agents anesthésiques sans valence analgésique supprimant, en raison de l’inconscience qu’ils produisent, la sensation de douleur (perception consciente de la nociception), mais qui ne diminuent pas ou peu l’activation des voies de la nociception pendant la stimulation chirurgicale, par exemple. La conséquence est le développement d’une douleur postopératoire intense, souvent accompagnée d’hyperalgie voire d’allodynie, et qui peut se transformer en douleur chronique. L’incorporation dans le protocole anesthésique d’analgésiques qui agissent à différents niveaux de la transmission et de la modulation de la nociception pendant et après la chirurgie permet de diminuer significativement l’activation des voies de la douleur et ses répercussions en phase postopératoire. Cela permet également de diminuer le besoin en anesthésique pur et par conséquent ses effets secondaires, la profondeur de l’anesthésie nécessaire étant fonction du degré de stimulation nociceptive. Ce concept d’anesthésie balancée a même été poussé plus loin lorsqu’il a été démontré qu’un traitement préventif de la douleur avant l’application du stimulus était encore plus bénéfique. L’analgésie multimodale, qui correspond à l’association d’analgésiques ayant des mécanismes d’action différents et ciblant différents niveaux des voies de la douleur, a montré des effets au minimum additifs, mais la plupart du temps synergiques, permettant de mieux traiter la douleur, de limiter les échecs thérapeutiques et de diminuer les effets secondaires de chaque analgésique. C’est ainsi que d’anciennes molécules ont été redécouvertes pour leurs vertus analgésiques. La kétamine à une dose très faible subanesthésique a un excellent effet anti-hyperalgique qui a été démontré chez le chien à la suite d’une amputation ou d’une exérèse d’une chaîne mammaire, avec une diminution des besoins en analgésiques postopératoires, une hospitalisation plus courte et un retour de l’appétit plus rapide (photos 1a et 1b). La lidocaïne en perfusion continue est très utilisée chez le cheval souffrant de coliques, mais aussi pour d’autres affections douloureuses et dans d’autres espèces en raison de ses effets anti-inflammatoires, analgésiques et prokinétiques, et parce qu’elle diminue le besoin en anesthésique [9].

2 Anesthésie des animaux de compagnie

Les attentes des propriétaires sur le niveau de la pratique vétérinaire sont en pleine mutation depuis une vingtaine d’années, en partie en raison de la place grandissante des animaux de compagnie au sein de la cellule familiale. Les progrès de la médecine humaine et vétérinaire ont créé une boucle où une médicalisation plus poussée entraîne une espérance de vie plus longue, laquelle nécessite une médicalisation plus importante avec des interventions et des anesthésies potentiellement plus difficiles. L’arsenal thérapeutique anesthésique et analgésique actuellement disponible, ainsi qu’un équipement adapté permettent de répondre à cette demande.

Chiens et chats

Des études prospectives et rétrospectives ont évalué la sécurité de protocoles anesthésiques chez les chiens et les chats et abouti à des recommandations dans les manuels d’anesthésie vétérinaire [1, 2]. L’association xylazinekétamine, par exemple, est liée à une augmentation du risque de mortalité peranesthésique chez le chat et il est actuellement recommandé de substituer la xylazine par la médétomidine. Les agents à action courte, comme le propofol ou l’isoflurane, ont supplanté des agents à action plus longue, comme le thiopental et l’halothane. Une illustration est l’utilisation très répandue du propofol lors de césarienne, avec une meilleure vitalité des chiots et un nombre de chiots vivants supérieurs, ainsi que pour les chats insuffisants rénaux chroniques qui ont besoin de soins dentaires réguliers et pour lesquels le réveil n’est pas prolongé. La réalisation d’une surveillance clinique et instrumentale concourt aussi à améliorer la qualité de l’anesthésie et à diminuer les complications. Ainsi, le monitoring du pouls et l’utilisation d’un oxymètre de pouls chez le chat ont été associés à une diminution du risque de mortalité peranesthésique. Chez le chien, l’utilisation d’un agent volatil seul pour l’induction et l’entretien de l’anesthésie, ainsi que la combinaison induction injectable/entretien à l’halothane comparés à induction injectable/entretien à l’isoflurane, a un risque plus élevé de mortalité peranesthésique.

Le pourcentage de mortalité liée à l’anesthésie n’a pas forcément diminué sur les 30 dernières années, mais les progrès de l’anesthésie et de la réanimation permettent à l’heure actuelle d’envisager et de réussir des opérations qui aboutissaient à une mort certaine il y a 30 ans chez les chiens et les chats, mais aussi chez les chevaux pour lesquels, par exemple, une fracture de membre entraînait presque systématiquement l’euthanasie immédiate de l’animal [7].

Chevaux

La conjonction des progrès chirurgicaux et anesthésiques, de la surveillance et du soutien des fonctions vitales pendant l’anesthésie et de l’analgésie peropératoire permet à l’heure actuelle de réaliser des chirurgies majeures chez le cheval avec un temps d’anesthésie prolongé (3 à 5 heures), une qualité de réveil adéquate, avec un minimum de risque de traumatisme fatal au relever et une diminution des complications postopératoires, en partie du fait d’une analgésie postopératoire adaptée (photo 2). L’anesthésie équine a fait plusieurs bonds en avant depuis le temps de la contention physique et du couchage manuel des chevaux. Tout d’abord avec l’apparition des phénothiazines, du thiopental et de la guaïfénésine dans les années 1950-1960, puis avec l’arrivée de la xylazine, de la kétamine et de l’halothane dans les années 1960-1970. Ces 20 dernières années ont vu la généralisation du suivi instrumental cardiorespiratoire (pression artérielle, gaz sanguins, capnographie), accompagné de l’utilisation de la dobutamine pour soutenir le débit cardiaque et la perfusion musculaire, de l’application de la ventilation mécanique pour diminuer les complications d’hypercapnie et d’hypoxémie, et de l’abandon de l’halothane au profit de l’isoflurane ou du sévoflurane permettant d’améliorer la qualité du réveil des anesthésies supérieures à 90 minutes [9]. À cela s’ajoute une gestion peropératoire multimodale et adaptée de la douleur à base d’α2-agoniste, de morphinique, de lidocaïne et/ou de kétamine, le plus souvent administrés à faible dose en perfusion continue et d’anesthésie/analgésie locorégionale si cela est applicable. Les protocoles d’anesthésie balancée sont courants, par exemple un protocole d’anesthésie avec de l’isoflurane accompagné d’une perfusion continuede kétamine, de butorphanol et de romifidine utilisé lors d’arthroscopie et évalué dans une clinique équine française [3].

L’arrivée du butorphanol dans les années 2000 a remis au goût du jour l’emploi de morphiniques chez le cheval et permis le développement de la sédanalgésie de bonne qualité, souvent accompagnée d’un bloc local et rendant possible la réalisation de nombreuses chirurgies sur cheval debout avec un confort et une sécurité pour l’animal et le chirurgien. De la même façon que pour l’anesthésie générale, des protocoles de longue durée en perfusion continue ont été développés et testés (perfusion d’un α2-agoniste et de butorphanol ou de lidocaïne ou de kétamine à très faible dose). Plusieurs études ont rapporté les effets de la morphine utilisée pendant l’anesthésie ou la sédation des chevaux avec des résultats qui valident son intérêt pour le traitement de la douleur : des réveils de bonne qualité, peu d’effet sédatif mais une amélioration de l’analgésie quand la morphine est associée aux α2-agonistes et peu d’impact significatif sur la reprise du transit. La disponibilité de la méthadone, relativement équivalente à la morphine, avec une AMMV pour les chiens, va sans doute permettre une utilisation plus facile et plus fréquente de ce genre de morphinique chez le cheval. Il a été prouvé dans plusieurs espèces que la douleur avait un effet négatif sur le transit. Quelques indices apparaissent chez le cheval. Dans une étude sur la douleur postopératoire de colique chez le cheval, une perfusion continue de butorphanol pendant les premières 24 heures postopératoires a entraîné un retard à l’émission du premier crottin, mais amélioré le confort des chevaux et diminué de façon significative le temps d’hospitalisation [10].

Animaux de rente

L’ère de la production de masse et de l’élevage intensif a provoqué un questionnement fondamental sur le bienêtre des animaux de rente. L’union européenne travaille depuis des années à améliorer les conditions de vie et les soins apportés aux animaux de rente, tout en gardant en tête la maîtrise du coût. Des standards de pratique ont été rédigés et sont en cours de mise en application. L’anesthésie et l’analgésie chez les animaux de rente se sont développées plus lentement que chez les autres espèces pour les raisons suivantes :

– un comportement stoïque, peu expressif face à la douleur, donc difficile à détecter et à interpréter ;

– une réglementation de plus en plus stricte pour l’administration de médicaments chez des animaux destinés à la consommation humaine ;

– un arsenal thérapeutique limité ;

– un coût à maîtriser ;

– un manque d’éducation, aussi bien des vétérinaires que des éleveurs, avec des pratiques ancestrales difficiles à détrôner.

Les techniques d’anesthésie locale et locorégionale, bien que décrites et utilisées couramment depuis les années 1940, ont longtemps été vues comme un moyen de confort et de sécurité pour le chirurgien qui travaille sur une vache qui ne bouge pas, ne cherche pas à se coucher ou à donner un coup de pied, plutôt que comme un bénéfice pour la vache qui ne souffre pas pendant la chirurgie et souffrira moins en phase postopératoire. La lidocaïne, même si elle a perdu son AMMV pour les ruminants en raison de la mise en conformité des AMM au niveau européen, est toujours utilisable à travers la cascade. Les techniques d’anesthésie péridurale et du flanc restent les plus utilisées en pratique depuis des dizaines d’années. L’anesthésie générale, en revanche, est peu répandue sauf chez les jeunes animaux de rente, en raison du coût, des complications respiratoires et digestives rencontrées chez les adultes et de l’efficacité des techniques locorégionales. Toutefois, les éleveurs actuels, de plus en plus formés aussi bien dans le domaine du bien-être animal que dans celui de la rentabilité de leur élevage, sont demandeurs de soins plus poussés sur des animaux à haute valeur génétique (photo 3). Ces animaux sont anesthésiés le plus souvent dans des structures chirurgicales de référés pour des fractures et autres affections souvent orthopédiques ou encore liées à l’appareil reproducteur. Les soins sont alors d’une qualité similaire à ceux prodigués aux chevaux. De plus, les pays anglosaxons ont de plus en plus de vaches, de petits ruminants et de cochons de compagnie pour lesquels les propriétaires ont des attentes similaires à celles qu’ils ont pour leur chien ou leur cheval. Cette évolution se fait aussi progressivement en France.

En 2006, deux universitaires anglais rapportent les résultats d’un questionnaire sur la perception de la douleur chez les bovins par les vétérinaires praticiens au Royaume-Uni. Cette grande première est suivie en 2008 d’une étude à l’échelle européenne avec une implication importante d’Oniris, l’École nationale vétérinaire de Nantes, pour le volet français. Les résultats attestent d’un changement des pratiques. Les vétérinaires récemment diplômés et les vétérinaires femmes sont plus sensibles à la douleur animale et plus enclins à administrer des analgésiques [6]. Le constat est toutefois que la douleur est peu traitée par rapport à celle des animaux de compagnie. Cette première initiative a été poursuivie par l’Institut nationale de la recherche agronomique (Inra), qui a formé un comité d’experts pour évaluer la douleur chez les animaux de rente et rédiger des recommandations publiées dans la revue internationale Animal [5]. Les actions à réaliser se regroupent en trois volets :

– supprimer les procédures douloureuses non indispensables, telles que l’amputation de la queue chez la vache laitière, après la confirmation qu’il n’existe pas un risque supérieur de contamination de la mamelle et du lait chez les vaches avec une queue entière ;

– substituer une intervention douloureuse par une autre moins invasive et moins pénible. C’est le cas de l’écornage avec une recommandation de le réaliser le plus tôt possible (avant l’âge de 3 semaines) et par cautérisation (réponse au stress diminuée par rapport aux autres méthodes) ;

– soulager avec des techniques d’anesthésie locorégionale et des analgésiques systémiques tels que les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et le butorphanol. Ce volet rencontre encore les contraintes du coût et de la possibilité législative et pratique de la mise en application. Une profonde mutation est toutefois en cours. L’analgésie peut être rentable. Un exemple est la comparaison des effets d’une anesthésie locale et d’un AINS pour la castration du veau. Par rapport à un groupe témoin de veaux non castrés, les veaux castrés sans anesthésie et sans analgésie présentant un gain moyen quotidien (GMQ) négatif à 7 jours, ceux ayant reçu une anesthésie locale un GMQ légèrement négatif à 7 jours, ceux ayant reçu un AINS un GMQ positif mais inférieur au groupe témoin. Ceux qui ont eu une anesthésie et des AINS ont un GMQ à 7 jours proche de celui du groupe témoin [4].

3 Évolution du statut de la discipline et des connaissances des vétérinaires français

C’est uniquement en 1948, soit 50 ans après la création de sociétés savantes anglo-saxonnes, que la discipline d’anesthésie-réanimation en médecine humaine est reconnue en France par un décret du ministère de l’Éducation nationale. La pratique était d’avoir un garçon de salle qui faisait office d’anesthésiste. Une évolution similaire a eu lieu 40 ans plus tard, dans les années 1990, dans le monde vétérinaire, avec l’arrivée dans les écoles françaises des anesthésistes-réanimateurs. La discipline est restée essentiellement universitaire dans la mesure où, à l’opposé du reste de l’Europe, elle n’est toujours pas reconnue comme une spécialité en France. Toutefois, il est possible de dénombrer quelques diplômés des collèges d’anesthésie et d’analgésie vétérinaires européens et américains (ECVAA, ACVAA) sur le sol français, en particulier dans les écoles vétérinaires. La discipline reste la face cachée de la chirurgie avec un manque de visibilité et de valorisation en temps que telle, mais aussi pécuniaire auprès des propriétaires. Toutefois, une mutation est en marche avec l’intervention occasionnelle à permanente de spécialistes dans des structures privées de type centres de référés.

L’arrivée des anesthésistes-réanimateurs dans les écoles vétérinaires a permis la réintroduction ou l’augmentation de l’utilisation des morphiniques pour les opérations de convenance ou non, la systématisation du suivi de la douleur et l’incorporation de son évaluation dans l’examen clinique comme le cinquième signe vital après la température, les fréquences cardiaques et respiratoires et la pression artérielle. La plupart des écoles offrent maintenant un enseignement en anesthésie et analgésie à part entière et non comme une partie de la pathologie chirurgicale, aussi bien pour les cours théoriques que pour les rotations cliniques. Au niveau professionnel, les anesthésistes vétérinaires francophones ont été à l’origine de la formation de l’association vétérinaire pour l’anesthésie et l’analgésie animale (4AVet) à la fin de l’année 2000. L’association promeut, depuis une dizaine d’années, les principes de l’anesthésie et de la gestion de la douleur dans les pays francophones. Une première série de conférences destinées aux praticiens et portant sur l’anesthésie a fait un tour de France au début des années 2000, suivi d’un autre tour de France de l’analgésie vétérinaire en 2008-2009.

L’offre de formation continue s’est développée et répond à une demande essentielle de vétérinaires qui cherchent à améliorer leurs pratiques dans un domaine où le changement de routine et l’acquisition de nouveaux réflexes peuvent paraître impressionnants, risqués et laborieux. L’évolution de l’attente des propriétaires et l’apparition de la médecine gériatrique poussent vers l’acquisition de compétences supplémentaires pour une anesthésie plus sûre et une gestion à long terme du bien-être animal. Cette prise de conscience reste toutefois timide en France par rapport au reste de l’Europe et de l’Amérique du Nord, voire au Brésil.

Conclusion

L’anesthésie et l’analgésie vétérinaires ont beaucoup évolué ces 40 dernières années, en raison de la disponibilité de nouvelles molécules et techniques, d’un appareillage développé pour la pratique vétérinaire mais aussi de la préoccupation grandissante du bien-être animal aussi bien dans le public, propriétaire de l’animal, que dans les milieux professionnels vétérinaire, scientifique et législatif.

Références

  • 1. Brodbelt DC et coll. Results of the confidential enquiry into perioperative small animal fatalities regarding risk factors for anesthetic-related death in dogs. J. Am. Vet. Med. Assoc. 2008;233:1096-1104.
  • 2. Brodbelt DC. Feline anesthetic deaths in veterinary practice. Top Companion Anim. Med. 2010;25:189-194.
  • 3. Caure S, Cousty M, Tricaud C. Effects of adding butorphanol to balanced anaesthesia protocol during arthroscopic surgery in horses. Vet. Rec. 2010;166:324-328.
  • 4. Early B, Crowe MA. Effects of ketoprofen alone or in combination with local anesthesia during the castration of bull calves on plasma cortisol, immunological and inflammatory responses. J. Anim. Sci. 2002;80:1044-1052.
  • 5. Guatteo R et coll. Minimising pain in farm animals: the 3S approach – “Suppress, Substitute, Soothe”. Animal. 2012;6-8:1261-1274.
  • 6. Guatteo R, Holopherne D, Whay HR and Huxley JN. Attitudes et pratiques actuelles des vétérinaires praticiens dans la prise en charge de la douleur des bovins. Bulletin de la SNGTV 2008;44,61-68.
  • 7. Johnston GM, Taylor PM, Holmes MA et coll. Confidential enquiry of perioperative fatalities (CEPEF-1): preliminary results. Equine Vet. J. 1995;27:195.
  • 8. Jones RS et coll. A history of veterinary anesthesia. An. Vet. (Murcia). 2002;18:7-15.
  • 9. Muir WW, Hubbell JAE. Chapter 1: History. In: Muir WW. Hubbell JAE. Equine anesthesia monitoring and emergency therapy. 2nd Ed. Saunders Elsevier, St Louis Missouri USA. 2009:1-10.
  • 10. Sellon DC et coll. Effects of continuous rate infusion of butorphanol on physiologic and outcome variables in horse after celiotomy. J. Vet. Intern. Med. 2004;18:555-563.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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