Le prolapsus rectal des ruminants : facteurs étiologiques, traitements et pronostic - Le Point Vétérinaire expert rural n° 320 du 01/11/2011
Le Point Vétérinaire expert rural n° 320 du 01/11/2011

GASTRO-ENTÉROLOGIE ET CHIRURGIE

Article de synthèse

Auteur(s) : Camille Wallut

Fonctions : 11 bis, rue du Marché-ovin
87330 Mézières-sur-Issoire

Lors de prolapsus rectal, une intervention rapide est conseillée et la recherche de l’affection causale est indispensable, en particulier si plusieurs animaux d’un troupeau sont atteints.

Le prolapsus rectal se définit comme le passage d’une portion ou de l’ensemble du rectum à travers l’anus [6]. Les vétérinaires peuvent y être régulièrement confrontés puisque la prévalence se situe entre 0,1 et 1,5 % chez les ruminants (à l’exception des chèvres qui semblent plutôt épargnées) [12]. Le praticien doit donc connaître ce qu’il est possible ou non de proposer à l’éleveur en fonction de la sévérité de l’affection, de la valeur de l’animal, du coût de l’intervention et du pronostic.

ÉTIOLOGIE

La survenue d’un prolapsus rectal peut être due à une hausse de la pression dans l’abdomen, par exemple à la suite de l’augmentation de volume d’un organe abdominal (rumen, utérus gravide, etc.). Une toux chronique (bronchite, pneumonie) est également parfois à l’origine d’un prolapsus rectal. Enfin, un ténesme peut aussi être en cause. Il est généralement provoqué par une forte douleur abdominale (diarrhée, constipation, etc.) [12].

Si le tonus sphinctérien de la zone périnéale n’est pas maintenu, une extériorisation du rectum ou du vagin est possible. Cette perte de tonus peut avoir une origine nerveuse ou hormonale. En effet, les œstrogènes, en particulier au cours ou à la suite de la parturition, provoqueraient un relâchement et un œdème du tissu conjonctif de la zone périnéale [2].

Toutes sortes de facteurs favorisants sont à rechercher face à un ou à plusieurs prolapsus rectaux. Ils peuvent être classés comme suit :

– les facteurs mécaniques, comme une infection (en particulier la maladie des muqueuses) ou un parasitisme du tractus digestif (en particulier la coccidiose), une dystocie, un prolapsus vaginal ou utérin, des urolithiases, une tumeur rectale, une paralysie des muscles sphinctériens, la présence d’une auge surélevée, etc. [1, 12]. Ces facteurs, fréquents, sont souvent les seuls à être recherchés lors de prolapsus rectal. Les cas de prolapsus rectal les plus souvent décrits concernent des agneaux atteints de coccidiose. Dans ce cas, la présence de coccidies ne doit pas faire oublier au vétérinaire de rechercher les autres facteurs possibles, comme ceux qui sont liés à la conduite d’élevage ;

– les facteurs liés à la conduite d’élevage, comme le traitement aux hormones, en particulier le diéthylstilbœstrol, une hormone de synthèse aux propriétés œstrogéniques (de plus en plus remplacée par des traitements de substitution présentant moins d’effets secondaires), la coupe courte de la queue des agneaux ou encore la ration alimentaire (une ration plus concentrée est associée à une augmentation du taux de prolapsus rectaux chez les animaux à l’engraissement) [10, 11] ;

– les facteurs toxiques, comme les alcaloïdes de pyrrolizidine contenus dans la plante et plus particulièrement dans la fleur du séneçon jacobée ou dans l’héliotrope d’Europe (photo 1) [5, 8]. Cette molécule, en provoquant une cirrhose du foie, conduit à une malabsorption avec alors une diarrhée et un ténesme, et parfois un prolapsus rectal (dans 30 % des cas). Les facteurs toxiques sont les plus difficiles à mettre en évidence puisque l’élément responsable doit être recherché dans tout l’espace de pâturage.

Si l’un de ces facteurs se trouve mis en cause lors d’un cas de prolapsus rectal, il convient de mettre en œuvre les moyens nécessaires à son élimination. En effet, dans le cas contraire, la récidive ou l’apparition de nouveaux cas dans le troupeau sont très probables.

DIFFÉRENTS GRADES DE PROLAPSUS RECTAL

Le prolapsus rectal peut revêtir différentes formes, gradées de I à IV, en fonction de la quantité de tissu extériorisée [6, 7]. Les deux premiers grades (I et II) sont les plus fréquents, les grades III et IV restant exceptionnels (figure 1).

ÉVOLUTION ET COMPLICATIONS DU PROLAPSUS RECTAL

1. Évolution

La partie prolabée n’a pas le même aspect selon la durée d’évolution du prolapsus [7, 12]. Il convient de déterminer les dommages subis par la muqueuse avant de décider de l’intervention à choisir. Pour cela, l’examen du prolapsus doit être complet, par l’observation et la palpation.

Lors d’un prolapsus récent, la muqueuse présente un aspect rouge et luisant. Elle demeure encore humide et est peu œdématiée.

Après quelques heures, la muqueuse commence à se dessécher, apparaissant moins luisante (photo 2). Elle est salie par des fèces ou de la litière, et, éventuellement, présente des irritations, voire des plaies dues aux frottements de la queue ou du sol.

Enfin, si une nécrose survient par défaut d’irrigation, progressivement, la muqueuse, voire les couches sous-jacentes prennent un aspect noirâtre et friable. Des ulcérations surviennent et une odeur nauséabonde peut émaner de la partie prolabée.

2. Complications

Lors de l’examen, il convient de rechercher la présence des complications suivantes [6, 7, 12] :

– une adhérence entre les séreuses qui rendrait vaine toute tentative de réduction manuelle ;

– une nécrose et une infection d’une partie ou de la totalité de la paroi rectale ;

– un défaut d’irrigation, induisant un manque d’oxygénation et un œdème ;

– une incontinence anale par rupture sphinctérienne ;

– des lacérations de la muqueuse superficielle ou profonde, pouvant provoquer des hémorragies, des infections, voire des éviscérations.

TRAITEMENT

1. Objectifs du traitement

L’action thérapeutique engagée doit avoir un triple objectif [6, 12] :

– réduire le prolapsus le plus tôt possible pour répondre au motif de consultation de l’éleveur et pour limiter le développement de complications ;

– corriger ou éliminer les facteurs à l’origine du prolapsus rectal, tant pour l’individu que pour le troupeau. Cela permet de diminuer les risques de récidive et d’apparition de nouveaux cas dans le cheptel ;

– contrôler les complications. Pour cela, il convient de bien nettoyer la portion de rectum prolabée, de la débrider, de réduire l’œdème et, éventuellement, de suturer les lacérations.

2. Choix du traitement

Le premier choix qui se présente est celui de traiter ou non l’animal [12]. En effet, le traitement ne peut se justifier qu’en tenant compte de la valeur du bovin, du cours du marché (viande ou lait), du pronostic et du coût de l’intervention.

Dans un second temps, un examen minutieux de l’animal, et en particulier de la zone prolabée, permet de choisir entre un traitement conservateur et un traitement chirurgical [12].

Lorsque le prolapsus rectal est réductible et que la paroi prolabée du rectum n’est pas lésée, un traitement conservateur peut être entrepris sous la forme d’une réduction avec réintroduction du rectum au travers de l’anus dans l’espace rétropéritonéal [7]. Cette option thérapeutique est possible lors de prolapsus récent et sans lésion associée. Toutefois, il peut être difficile d’évaluer si un tissu est sain lorsque ce dernier est très œdématié ou cyanosé (bleu à violet). De plus, des érosions superficielles ou des débris collés sur la muqueuse rectale éversée cachent parfois une muqueuse saine sous-jacente. Ainsi, il convient de nettoyer la muqueuse et d’essayer de réduire l’œdème avant toute décision thérapeutique [12].

Lorsqu’un prolapsus est plus ancien, la muqueuse rectale prolabée est généralement sèche et peut présenter des lésions (irritation, lacération, nécrose) provoquées par les mouvements de la queue, la présence de matières fécales, voire des prédateurs. C’est pourquoi une intervention chirurgicale avec une résection de tissu doit être envisagée pour toute lésion grave et irréversible de la muqueuse ou de la paroi dans son ensemble, avant de projeter la réintroduction du rectum au travers de l’anus [7] (figure 2).

3. Traitement du prolapsus rectal

La préparation du matériel et du chirurgien suit la procédure classique. En revanche, quelques points essentiels doivent être abordés concernant celle du site chirurgical.

Le rectum prolabé est soigneusement nettoyé à l’aide d’un antiseptique doux dilué dans de l’eau chaude afin d’éliminer les débris tissulaires et de désinfecter les tissus [13]. Ce n’est qu’une fois ces derniers bien nettoyés que l’opérateur peut estimer la sévérité de l’atteinte de la muqueuse rectale et le degré de l’œdème.

Un œdème important peut être un obstacle à la réduction du prolapsus, et il est donc essentiel d’essayer de le diminuer. Pour cela, il convient d’appliquer localement, sur la paroi rectale prolabée, une solution hyperosmotique, par exemple une solution de NaCl hypertonique, de la glycérine, du sucre roux ou du sulfate de magnésium [4].

Un second nettoyage, chirurgical, est enfin réalisé avant de commencer l’intervention. Il peut être effectué à l’aide de Vétédine(r) Savon et Solution.

Réduction manuelle et suture en bourse

Il s’agit simplement de replacer la portion de rectum prolabé en position anatomique et d’effectuer une suture en bourse en région périanale pour le maintenir en place et prévenir toute récidive du prolapsus [1].

Une fois les tissus nettoyés et l’œdème réduit, la partie extériorisée du rectum peut être remise à sa place anatomique. Pour cela, le prolapsus est délicatement réintroduit au travers de l’anus, en utilisant les deux mains et en exerçant une pression modérée sur le tissu déjà fragilisé. Les régions anale et périanale sont ensuite nettoyées chirurgicalement.

Une suture en bourse est réalisée autour de l’anus, tout en laissant une ouverture de la lumière anale d’environ deux ou trois doigts pour un veau et un doigt pour un agneau, ce qui permet aux matières fécales d’être évacuées. Pour limiter le risque de contamination fécale de la suture, il convient de commencer et de terminer celle-ci latéralement à l’anus, tout en faisant attention à ne pas traverser la paroi du rectum. Pour cela, une aiguille en “S” chargée d’une bande de Bünher (ou d’un fil chirurgical de fort diamètre et doublé) est introduite “à 3 heures”, contourne l’anus dorsalement pour ressortir “à 9 heures”, puis est réintroduite par la même ouverture “à 9 heures”, contourne l’anus ventralement pour ressortir par l’ouverture d’entrée (figure 3). De cette manière, le ruban est assez isolé du milieu extérieur pour limiter le risque de contamination. La suture est réalisée à une distance de 2 à 4 cm de l’anus [12].

Le taux de récidives est élevé en cas de simple réduction du prolapsus avec pose d’une suture en bourse [12]. Pour limiter celles-ci, la technique de contre-irritation, ci-dessous décrite, peut être utilisée, ou bien une anesthésie péridurale avec un mélange de xylazine et de lidocaïne (ce qui permet de prolonger l’anesthésie jusqu’à 36 heures), ou encore une alcoolisation des nerfs sacrés.

Ainsi, ce traitement conservateur est relativement facile et rapide à réaliser, et donc bon marché. Sa mise en œuvre peut être judicieuse, notamment chez un ruminant de faible valeur économique, pour une prise en charge à court terme de l’animal, mais, à plus long terme, il est préférable de choisir une autre technique [12].

Contre-irritation

Plus efficace à long terme que la simple réduction du prolapsus avec suture en bourse, la technique de contre-irritation est préférable si l’animal est destiné à demeurer dans le troupeau et que le tissu prolabé est sain. La réduction du prolapsus est alors associée à des injections “contre-irritantes” et à une suture en bourse. Un produit irritant est injecté dans le tissu périrectal, créant ainsi une réponse inflammatoire locale. La cicatrice qui en résulte permet de retenir le tissu prolabé après que la suture en bourse a été retirée. Bien que légèrement plus longue, cette technique est relativement rapide à réaliser et peu coûteuse [12].

La technique de contre-irritation est surtout utilisée chez les ovins, principalement quand la cause du prolapsus est une coupe de queue trop courte. En effet, chez les bovins, la masse du rectum est plus importante, ce qui rend cette méthode moins efficace [1].

Après nettoyage du prolapsus, le rectum prolabé est remis en place. Une aiguille de 40 mm de long et de 1,2 mm de diamètre (aiguille rose) est introduite à travers la peau à environ 2 heures par rapport à l’anus. Elle est rentrée parallèlement au rectum dans le tissu périrectal à une distance d’une trentaine de millimètres. L’opérateur introduit un index dans le rectum, à la fois pour guider l’aiguille et pour vérifier que l’aiguille n’a pas traversé la paroi rectale.

Une fois l’aiguille en position, une seringue contenant 0,5 à 1 ml de solution iodée y est emboîtée. Le produit est injecté dans le tissu périrectal tout en retirant l’aiguille petit à petit caudalement vers l’extérieur et en prenant toutes les précautions pour ne pas en injecter dans le sphincter anal [12].

Cette procédure est ensuite réitérée aux sites correspondant à 4, 8 et 10 heures par rapport à l’anus.

Une fois toutes les injections effectuées, la suture en bourse peut être effectuée, comme cela a été précédemment décrit.

Bien que la littérature vétérinaire ne fournisse pas de valeur précise pour le taux de guérison, les auteurs s’accordent à dire que le pronostic à la suite de la contre-irritation est bon à excellent. En cas de récidive, le traitement peut être répété [12].

Résection partielle de la muqueuse

La résection partielle de la muqueuse allie l’élimination des tissus lésés superficiels (muqueuse) et la conservation des tissus sous-jacents (musculeuse et séreuse).

En raison de la dissection des tissus nécessaire à sa réalisation, la technique de résection partielle demande du temps et du matériel chirurgical, ce qui la rend plus coûteuse qu’une méthode conservatrice [13].

Un tube de diamètre approprié est inséré dans la lumière du prolapsus. Il sert d’appui au cours de l’intervention. Deux aiguilles de rétention sont mises en place afin de maintenir extériorisés les tissus prolabés.

Après avoir repéré la zone à réséquer, le chirurgien incise la muqueuse, et seulement elle, en formant deux incisions circulaires, l’une cranialement à la partie à réséquer et l’autre caudalement à cette partie.

Une troisième incision, n’incluant elle aussi que la muqueuse, est pratiquée longitudinalement de façon à relier les deux premières (figure 4).

À partir de cette troisième incision, une dissection mousse est effectuée afin de séparer la muqueuse lésée de la sous-muqueuse saine [13].

Les deux berges de muqueuse saine restantes sont rapprochées et alignées à l’aide de quatre points simples équidistants. Les quatre quadrants font ensuite l’objet de surjets simples. Il convient de réaliser la suture en plusieurs fois (dans ce cas : une pour chaque quadrant) pour éviter un effet de suture en bourse lors de la réalisation du nœud à la fin du surjet. Les sutures sont effectuées avec un fil résorbable [6].

Une fois la suture terminée, les aiguilles de rétention ainsi que le tube sont retirés avant de remettre en place le rectum.

Le rectum est réintégré délicatement au travers de l’anus et maintenu en place par une suture en bourse positionnée autour de l’anus.

Cette technique, bien que longue et invasive, engendre moins de complications et permet une guérison plus rapide que l’amputation [6].

Amputation par nécrose

Il s’agit de la plus simple et de la plus économique des techniques d’amputation. Le prolapsus est éliminé sans réduction préalable.

Un tube de plastique rigide ouvert de part et d’autre est inséré dans la lumière rectale de la partie prolabée. S’il présente un sillon en son milieu, celui-ci doit être positionné juste cranialement à la partie à amputer.

Si le chirurgien utilise une bande ombilicale ou un élastique, la bande ou l’élastique est placé autour du prolapsus rectal en regard de l’encoche du tube. La bande est serrée de façon à écraser la muqueuse contre l’encoche. Le tube inséré dans la lumière du prolapsus permet de conserver une béance de celle-ci pour permettre la défécation. La bande ombilicale serrée induit une nécrose ischémique de la partie distale du prolapsus par défaut de vascularisation de la portion caudale prolabée.

Si le chirurgien utilise un fil de nylon, il est possible d’ancrer le tube en plastique à la muqueuse. Pour cela, il peut être intéressant que celui-ci présente des trous. Ainsi, le fil est passé au travers de la muqueuse, puis par un trou du tube, ressort par le trou adjacent et est noué à l’extérieur. Un point équivalent est réalisé du côté diamétralement opposé. Puis, sans couper les chefs, le fil fait un tour complet autour du prolapsus. Le chirurgien doit alors nouer le fil serré contre la muqueuse pour provoquer une nécrose ischémique de la partie distale du prolapsus (figure 5).

Le tube et la partie prolabée du rectum tombent après 7 à 14 jours. Avant cela, les berges proximales de la section cicatrisent entre elles de façon à former une continuité de la muqueuse rectale [13].

Dans les conditions idéales, la partie nécrotique et le tube tombent en laissant une plaie déjà bien cicatrisée et le risque d’infection est minimal. En revanche, en cas de chute trop précoce, une infection peut survenir, ce qui assombrit fortement le pronostic de guérison.

Amputation par présuture

L’amputation par présuture consiste à suturer les berges saines du prolapsus avant d’effectuer son amputation. L’hémorragie qui peut survenir lors de la section des tissus peut être limitée par compression des vaisseaux à l’aide de points déjà placés [13].

La préparation est la même que pour la résection de la muqueuse, avec un tube et des aiguilles de rétention.

Une fois qu’une légère traction est exercée sur la partie prolabée, le chirurgien effectue des points en “U” verticaux sur toute la circonférence du prolapsus, un peu cranialement à la partie à amputer. Pour cela, l’aiguille traverse la muqueuse puis les couches sous-jacentes, jusqu’à atteindre la lumière centrale. Si un tube n’a pas été inséré dans le rectum prolabé, le chirurgien peut utiliser son doigt en le positionnant dans la lumière du prolapsus pour savoir si l’aiguille a bien traversé toutes les couches et pour l’arrêter avant qu’elle traverse la paroi opposée. Une fois l’aiguille dans la lumière, le chirurgien lui fait faire demi-tour et traverser à nouveau toutes les épaisseurs pour revenir à la surface. Le point est alors serré (figure 6). Une fois tous les points placés, la partie extériorisée du rectum peut être amputée par incision de toutes les épaisseurs distalement aux points et proches de ceux-ci [13]. En plaçant des points en U sur toute l’épaisseur de la paroi du rectum, les vaisseaux sont oblitérés, ce qui permet de limiter les saignements au moment de l’amputation de la partie distale du prolapsus [13].

La guérison peut être un peu plus lente qu’en cas de résection au niveau de la sous-muqueuse, mais le pronostic de guérison reste bon si l’animal est en bon état général. En l’absence de complications, la défécation normale reprend rapidement. Mais il est important d’arriver à contrôler le ténesme pour éviter toute récidive du prolapsus [3].

Amputation suivie de suture

La technique d’amputation suivie de suture consiste à réaliser une anastomose du rectum à la suite d’une amputation d’une portion de ce dernier. Cette méthode doit être employée en cas de lésion sévère localisée des tissus prolabés et permet de s’assurer qu’il n’existe aucune anse intestinale invaginée dans le prolapsus avant de réaliser la suture [13].

La préparation est la même que pour la résection de la muqueuse, avec un tube et des aiguilles de rétention. Le prolapsus est amputé entre le sphincter et la partie nécrotique (figure 7). Le chirurgien doit essayer de sauver un maximum de tissu sain en amputant le plus près possible du segment nécrotique, tout en laissant si possible au moins 1 cm entre l’incision et la limite cutanéo-muqueuse. Les muqueuses interne et externe sont rapprochées bord à bord par quatre points simples équidistants, puis les quatre quadrants sont apposés par un surjet simple. Ce surjet est arrêté au moins une fois pour éviter un effet d’étranglement de la lumière au moment de serrer les points [13].

La guérison peut être un peu plus lente qu’en cas de résection de la muqueuse [13].

Amputation dite “en escalier”

L’amputation dite “en escalier” consiste à retirer l’ensemble du rectum prolabé. Cependant, dans cette technique, les différentes couches constituant le prolapsus ne sont pas incisées à la même longueur de façon à pouvoir recouvrir les plus internes par les plus externes, ce qui permet de limiter les tensions sur les sutures [6, 13].

La préparation est la même que pour la résection de la muqueuse, avec un tube et des aiguilles de rétention. Une première incision est réalisée cranialement à la partie nécrotique. La profondeur recommandée n’est pas la même selon les auteurs. Pour Fubini et Ducharme, l’incision doit concerner toutes les couches à l’exception de la muqueuse interne et d’une partie de la sous-muqueuse interne [6]. Par une dissection mousse, le chirurgien crée ensuite un plan de clivage au niveau de la sous-muqueuse interne. En revanche, pour Welker et Modransky, l’incision doit impliquer la muqueuse externe, la sous-muqueuse et la musculeuse [13]. Le chirurgien doit identifier ensuite le plan existant entre les deux segments télescopés.

Le segment externe distal est tiré caudalement et le segment interne est incisé à son tour de façon à lui être 2 à 3 centimètres plus long [13].

Ainsi, la couche de muqueuse est plus longue que la couche musculo-séreuse et peut la recouvrir. Quatre points simples permettent de rapprocher les berges interne et externe de la muqueuse. Les quatre quadrants font ensuite l’objet chacun d’un surjet simple (figure 8) [6]. L’amputation se termine aussi par une suture en bourse.

La guérison peut être un peu plus lente qu’en cas de résection de la muqueuse car, en incisant la sous-muqueuse, le chirurgien porte atteinte à la vascularisation. Toutefois, le pronostic de guérison est normalement bon en l’absence de complications [6, 13].

En cas de prolapsus de types III et IV, l’intervention est beaucoup plus invasive : il s’agit d’une laparotomie suivie d’une entérectomie. Cette méthode est beaucoup plus délicate, et rarement nécessaire (en raison du rapport coût/bénéfice).

Conclusion

Trouver l’origine du prolapsus est essentiel, en particulier lorsqu’il s’agit d’une affection touchant plusieurs animaux du troupeau. De plus, une intervention précoce est utile pour limiter les complications et les risques pour l’animal. En général, lors d’intervention précoce, la résection au niveau de la sous-muqueuse est possible, avec un pronostic plutôt favorable, d’où l’intérêt de sensibiliser l’éleveur à prévenir rapidement son vétérinaire.

Références

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Points forts

→ La recherche de l’origine du prolapsus est indispensable pour prévenir les récidives à l’échelle individuelle et les récurrences dans le troupeau.

→ La technique chirurgicale est choisie en tenant compte du grade du prolapsus, de son ancienneté et des particularités de chaque nouveau cas.

→ Le diagnostic doit être le plus précoce possible.

→ Le chirurgien ne doit utiliser que des techniques qu’ils maîtrisent.

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