Que sont les inactivateurs de mycotoxines ?

En ajoutant un inactivateur à l’alimentation des animaux, les effets néfastes potentiels des mycotoxines seront considérablement réduits. Le mécanisme d’inactivation peut se dérouler par adsorption ou par biotransformation (^tableau). En outre, ce produit permet un transfert moindre des mycotoxines dans les produits animaux ou d’origine animale. Ces nouveaux additifs alimentaires présentent donc un intérêt pour l’animal et la santé publique.

La Commission européenne a créé pour ces inactivateurs une nouvelle fonctionnalité (“m”) dans la catégorie “Additifs technologiques” (encadré).

Certains dossiers sont en cours d’évaluation, ce qui laisse espérer l’arrivée prochaine des premiers produits agréés⁽¹⁾.

Ces aspects ont été décrits du point de vue du fabricant d’aliment et du législateur lors d’une récente session de formation des techniciens de l’alimentation animale⁽²⁾.

Ces additifs visant l’agrément en tant qu’inactivateurs de mycotoxines doivent satisfaire les modalités d’enregistrement des additifs (règlement de la Commission (CE) n° 429/2008), être efficaces (in vitro et in vivo) et répondre à des critères particuliers :

– pas d’effet croisé ;

– pas de rôle de “nettoyeur” d’aliment contaminé (c’est-à-dire actifs au-dessous du seuil de toxicité) ;

– pas d’incidence sur les valeurs nutritionnelles (protéines, vitamines, oligo-éléments) ;

– pas de toxicité (pour la catégorie biotransformants).

Parmi la quantité de composés d’ores et déjà commercialisés au niveau mondial comme inactivateurs de mycotoxines,figurent des molécules également connues pour leurs propriétés antidiarrhéiques ou parce qu’ils interviennent dans la physiologie de la digestion (enzymes, composants de la flore gastro-intestinale). Extraits naturels ou issus de la chimie pure, les produits commercialisés n’ont donc pas toujours pour seule propriété un effet antimycotoxines (^photo). Ils sont souvent des cocktails de composés. Nombre d’informations sur leurs effets restent manquantes, sachant qu’il est difficile d’extrapoler (d’une mycotoxine ou d’une espèce à une autre, in vitro/in vivo, à telle ou telle concentration, etc.) (exemple d’un essai comparatif⁽³⁾). L’aspect antimycotoxine des additifs technologiques est plus ou moins mis en avant selon le pays dans lequel ils sont commercialisés (en fonction de la réglementation).

Ainsi Mycofix® de Biomin est bien connu des Américains vis-à-vis des mycotoxines. Le fabricant propose en France un produit similaire sous une autre appellation (Biomin plus®). Ayant déjà un certain succès commercial comme additif technologique sans allégation d’effet antimycotoxine, ce produit contient des levures entières sources d’enzymes. Il sera le candidat Biomin à l’agrément européen Additif technologique fonctionnalité m. Source de confusion, selon les pays, la composition du produit antimycotoxine Biomin peut varier, incluant ou non des bactéries notamment.

Chez Alltech, Mycosorb® est un produit phare au niveau mondial depuis sa création en 1993, grâce à l’effet anti-mycotoxine proclamé (contient des parois de levures modifiées). Or en France, il n’existe pas en tant que tel, mais son jumeau, actuellement baptisé “MTB 100”, attend l’agrément européen pour alléguer cette propriété anti-mycotoxine (et changer de nom).

Plus proche du quotidien du thérapeute, dans le vaste champs des aliments complémentaires, la problématique antimycotoxine tente quelques percées. Des firmes communiquent sur cet aspect comme Vetalis, présent sur les stands commerciaux des journées de formation aux vétérinaires. Pour leur aliment contenant charbon et argile (Phoscargil®), la firme met en avant le charbon choisi : non activé (c’est-à-dire moins chauffé), celui-ci dispose d’une surface d’adsorption moindre et de davantage de macropores. Selon Vetalis, cela permettrait une certaine sélectivité d’adsorption visant les toxines (qu’elles soient bactériennes ou fongiques) plutôt que les molécules “nobles” qu’il s’agit de ne pas perturber sur un animal affecté de diarrhée (électrolytes tels chlore, sodium, potassium, et vitamine A).

Tous les composés revendiquant des propriétés antimycotoxines n’iront pas jusqu’au bout de l’agrément européen “Additif technologique fonctionnalité m”. Certains ne le souhaitent même pas (le charbon de Phoscargil® restera une matière première). Toutefois, dans le foisonnement commercial de produits et d’allégations autour des mycotoxines, ce dispositif pourrait aider à y voir plus clair.