Génotypage des souches de S. aureus par électrophorèse en champ pulsé - Le Point Vétérinaire n° 302 du 01/01/2010
Le Point Vétérinaire n° 302 du 01/01/2010

Mammites chroniques chez la vache laitière

Infos

FOCUS

Auteur(s) : Zoubida Dendani*, Marie-Anne Arcangioli**, Pierre Bézille***, N. Selmi****, R. Ouzrout*****

Fonctions :
*Centre universitaire El Taref
BP73, 36000 Algérie
**Pathologie des ruminants
VETAGRO SUP, campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat, 69280 Marcy-L’Étoile
***Pathologie des ruminants
VETAGRO SUP, campus vétérinaire de Lyon
1, avenue Bourgelat, 69280 Marcy-L’Étoile
****Université Badji Mokhtar
Institut de biologie, Annaba, 23000 Algérie
*****Centre universitaire El Taref
BP73, 36000 Algérie

La caractérisation moléculaire par électrophorèse en champ pulsé de Stapylococcus aureus a permis de déterminer sa source : les pis des vaches à infections mammaires chroniques.

Staphylococcus aureus est l’un des principaux agents étiologiques de la mammite des ruminants [1]. Il a été impliqué dans 7 à 44 % des cas de mammites cliniques [9, 11]. Chez les bovins, la prévalence des mammites cliniques dues à Staphylococcus aureus varie de 5 à 50 % selon les pays [1]. Cet organisme est responsable d’environ 30 à 40 % de tous les cas de mammite [4]. Une variété d’antibiotiques sont utilisés, mais ce traitement se révèle très souvent inefficace [3]. Cela peut être dû à la résistance de S. aureus dans le milieu extérieur, chez les animaux, vis-à-vis des antibiotiques et à sa contagiosité. Les principaux objectifs de cette étude étaient de contribuer à une meilleure compréhension de l’épidémiologie d’une population de Staphylococcus aureus dans les élevages laitiers des monts du Lyonnais et de leur sensibilité aux antibiotiques. L’électrophorèse en champ pulsé (ECP ou PFGE), considérée comme une technique de référence en raison de son excellent pouvoir de discrimination et de sa haute reproductibilité, a été mise en œuvre [2, 10]. Toutefois, son emploi est limité parce qu’elle est techniquement exigeante, lourde, longue et coûteuse, nécessite du matériel et des équipements, plusieurs jours d’analyse et un personnel qualifié [7].

Matériel et méthode

Souches de Staphylococcus aureus

Les souches de Staphylococcus aureus ont été collectées dans le cadre d’une enquête épidémiologique en région Rhône-Alpes en France (collaboration Afssa-ENV de Lyon), à partir d’échantillons de lait de vaches atteintes de mammite clinique, avant administration du traitement antibiotique (tableau 1 complémentaire sur www.WK-Vet.fr). Les prélèvements ont été expédiés au laboratoire, sous couvert du froid. Cette série de prélèvements a été réalisée dans quatre clientèles vétérinaires : I, II, III et IV.

Isolement et identification

Après isolement et identification, les souches ont été conservées en milieu BHI (Bio-Mérieux) à - 20 °C pendant l’étude.

Typage génomique

L’ADN chromosomique a été préparé selon le protocole décrit par Talon et coll., avec quelques modifications [12]. Cette ECP a été réalisée après restriction enzymatique de l’ADN génomique par l’enzyme SmaI (Promega), sur l’appareil Chef DRII (Cotour-Clamped Homogeneous Electric Field Bio Rad) durant 20 heures. La migration est conduite dans les conditions suivantes : voltage de 6 V/cm d’agarose, température à 14 °C, temps de pulse initial de 5 s, temps de pulse final de 35 s et angle de déviation de 120°. Un marqueur de taille de poids moléculaire lambda ladder I (Bio Rad) et la souche de référence (n° ATCC 29213) ont été utilisés comme normes. Après électrophorèse, l’ADN est révélé sous lumière ultraviolette après une coloration de 10 minutes dans une solution de BET à 1 mg/ml et une décoloration de 20 minutes. Les fragments d’ADN séparés ont été évalués et la proximité des souches a été interprétée selon Tenover et coll. [14].

Résultats du typage génétique

Les 22 isolats de Staphylococcus aureus testés ont été distribués dans neuf (09) pulsotypes différents (A, B, C, D, E, F, G, H et I). Les profils ont été désignés selon les critères de Tenover et coll. (tableau 2) [14]. Le pulsotype B est le plus représenté avec neuf isolats (lignes 2, 4, 7, 10, 18, 19, 20, 21 et 26), suivi du pulsotype A avec quatre isolats (lignes 3, 17, 27 et 28), des pulsotypes C et D avec deux isolats chacun (lignes 6 et 29) et (lignes 5 et 24) respectivement et, enfin, des pulsotypes E (ligne 12), F (ligne 14), G (ligne 13), H (ligne 25) et I (ligne 11) qui contiennent chacun un (01) isolat unique (photos 1 et 2).

Un des principaux pulsotypes B a été identifié dans 40 % des isolats et dans les quatre clientèles étudiées : I, II, III, IV. Le profil A est retrouvé dans 18 % des isolats et est présent également dans les quatre clientèles.

Ensemble, les génotypes A et B représentés par treize souches (58 %) et présents dans 64 % des exploitations sont prédominants.

Discussion

Les méthodes de biologie moléculaire, dont l’électrophorèse en champ pulsé, ont révolutionné le typage épidémiologique en apportant un pouvoir discriminant jusqu’alors inconnu. En effet, des difficultés de typabilité, de reproductibilité et de pouvoir discriminant sont associées à la plupart des techniques phénotypiques, et certains marqueurs épidémiologiques classiques (biotypie, antibiotypie, sérotypie, lysotypie, bactériocinotypie) ne sont accessibles qu’à des laboratoires spécialisés. De plus, ces procédures ne permettent pas de différencier des souches à l’intérieur d’une même espèce [13]. La lysotypie a été utilisée pendant 40 ans pour différencier les souches de S. aureus. Cette technique comporte deux faiblesses importantes : elle caractérise les isolats fondés sur un marqueur phénotypique peu reproductible et ne type pas tous les isolats [5]. La PFGE a été choisie en raison de sa grande puissance de discrimination et de son excellent pouvoir de reproductibilité [11]. De plus, elle est la méthode la plus discriminante lorsqu’elle est comparée à d’autres procédés de typage génotypiques ou phénotypiques [9]. Elle est aussi la mieux adaptée pour résoudre les relations clonales [1]. Dans notre étude, la PFGE a démontré que les souches de Staphylococcus aureus isolées de bovins atteints de mammite clinique sont clonales. L’utilisation de ce marqueur génomique par plusieurs études épidémiologiques a confirmé l’existence de souches de S. aureus bovines liées sur un plan épidémiologique [1, 9]. De telles observations ont été effectuées au Brésil. Les auteurs ont montré que deux clones (72 %) spécialisés de S. aureus ont été à l’origine de la majorité des mammites bovines, avec une distribution géographique étendue [10]. Les mêmes constatations ont été rapportées en Norvège et au Canada [8, 11]. Des résultats similaires ont été relevés en France pour les isolats de S. aureus ovins où, bien souvent, un nombre limité de clones qui circulent et largement distribués sont retrouvés [15]. Toutes nos souches ont été typées. L’enzyme de restriction Smal (Promega) à coupure rare est la plus utilisée. Elle nous a permis d’obtenir des profils de restriction hautement reproductibles, montrant typiquement des fragments distincts et bien nets, faciles à lire, de 13 à 17 fragments de 20 à 750 kb [14]. L’excellente reproductibilité de l’électrophorèse en champ pulsé, jointe au faible nombre de fragments d’ADN, nous a permis d’effectuer une distinction intra- et intersérielle de deux pulsotypes à l’œil nu. La variante technique Chef que nous avons mis en œuvre est la plus répandue dans les études épidémiologiques ou diagnostiques, car elle fournit des profils rectilignes faciles à interpréter [6]. Cela indique que la PFGE est une méthode de typage très fiable.

Pour le développement d’une véritable stratégie de lutte contre les mammites, il convient de démontrer les liens génétiques des souches pour la surveillance de leur propagation et l’identification de la source de contamination. Une meilleure connaissance de la distribution de cette source pourrait aider à formuler des stratégies visant à réduire la propagation de l’infection. Pour des fins épidémiologiques, il est très important d’utiliser des méthodes qui ont un puissant pouvoir de discrimination et d’excellentes reproductibilité et typabilité. La caractérisation moléculaire par PFGE a permis une meilleure discrimination de Staphylococcus aureus. Elle nous a permis de déterminer sa source. Le principal gîte pourrait être le pis infecté, car c’est une souche à réservoir mammaire qui survit, se multiplie et persiste essentiellement dans la mamelle et sur la peau des trayons. Les vaches à infections chroniques constituent la principale source d’infection des animaux sains. La transmission entre les vaches en lactation s’effectue essentiellement pendant la traite. Nous espérons que l’identification de clones épidémiques en circulation aide les vétérinaires praticiens et les différents responsables à mieux comprendre et à prévenir la propagation de S. aureus. La PFGE est une technique intéressante. Cependant, elle reste difficile et coûteuse pour une utilisation quotidienne, et un test diagnostique bon marché, moins cher et facile à mettre en œuvre s’impose. Il serait intéressant de retourner dans les élevages pour identifier les animaux qui présentaient ces souches et leur origine en vue d’une étude épidémiologique.

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