Comment accéder et utiliser légalement les anticancéreux de chimiothérapie - Le Point Vétérinaire n° 301 du 01/12/2009
Le Point Vétérinaire n° 301 du 01/12/2009

MÉDICAMENTS HOSPITALIERS

Infos

FOCUS

Auteur(s) : Éric Vandaële

Fonctions : 4, square de Tourville 44470 Carquefou

Le praticien doit s’engager auprès de l’Ordre des vétérinaires à respecter des bonnes pratiques d’emploi et notamment hospitaliser les animaux au moins 24 heures.

Une nouvelle réglementation permet désormais aux vétérinaires d’acquérier légalement une panoplie d’anticancéreux, mais les oblige, entre autres, à hospitaliser au moins une journée les animaux traités.

Quelles sont les bases réglementaires ?

Un décret daté du 18 juin a introduit un nouvel article dans le cadre de santé publique, l’article R. 5141-112-3, qui autorise et encadre l’emploi de la chimiothérapie anticancéreuse chez l’animal, c’est-à-dire l’emploi de substances vénéneuses dites CMR : cancérogène, mutagène ou reprotoxique.

Ces bonnes pratiques font l’objet d’un arrêté spécifique daté, comme le décret, du 18 juin et publié au même Journal officiel du 20 juin 2009.

Un second arrêté daté du 29 octobre (JO du 6 novembre 2009) a allongé la liste des médicaments humains à prescrition restreintes (dits hospitaliers) accessibles aux vétérinaires en y ajoutant une panoplie assez large d’anticancéreux : dix molécules dont neuf sous forme injectable et une gélule (la lomustine). Toutefois, les bonnes pratiques d’emploi des anticancéreux concernent tous les cytostatiques, ceux, peu nombreux, qui étaient déjà disponibles en officine et ceux réservés à l’usage hospitalier.

Quels sont les médicaments hospitaliers accessibles aux vétérinaires ?

Le nouvel arrêté « médicaments hospitaliers » ne contient pas que des anticancéreux, mais également 31 autres substances actives rentrant dans la composition de médicaments à prescription restreinte (médicaments dits hospitaliers) (tableau et tableau complémentaire sur www.WK-Vet.fr).

Les médicaments hospitaliers (anticancéreux ou non) ne peuvent être administrés que par les vétérinaires eux-mêmes, et seulement à des animaux de compagnie ou de sport exclus de la consommation humaine : chiens, chats, chevaux. Toutefois, les bonnes pratiques d’emploi des anticancéreux apparaissent assez peu compatibles avec leur emploi chez les équidés.

Comment un vétérinaire peut-il se procurer les médicaments hospitaliers ?

Les vétérinaires ne peuvent pas acquérir les médicaments auprès d’une pharmacie (hospitalière ou de ville), ni auprès de leurs centrales vétérinaires (qui ne référencent aucun médicament humain).

Ils doivent adresser leurs commandes par écrit auprès des laboratoires pharmaceutiques « humains » qui les commercialisent auprès des hôpitaux. Il est préférable de les appeler au préalable pour connaître leurs tarifs et leurs procédures. Devant la méconnaissance, voire la réticence de certains de ces laboratoires (pas de tous), il est parfois nécessaire de leur rappeler l’article R. 5124-44 qui leur permet explicitement de livrer à des vétérinaires ces quelques médicaments hospitaliers. D’autres laboratoires, bien informés, ne font, à l’inverse, aucune difficulté, voire adaptent leurs conditionnements aux demandes particulières des vétérinaires.

Les anticancéreux sont-ils accessibles à tous les vétérinaires ?

Les anticancéreux ne sont accessibles qu’aux vétérinaires exerçant dans les cliniques et ou les centres hospitaliers vétérinaires (CHV), ainsi que dans les ENV.

En outre, pour tous les médicaments de chimiothérapie, qu’ils soient ou non réservés à l’usage hospitalier, les vétérinaires doivent avoir au préalable déclaré auprès de l’Ordre régional leur intention de les utiliser et s’être ainsi engagé à respecter les bonnes pratiques d’emploi de ces molécules chez l’animal fixées par l’arrêté du 18 juin 2009 (figure complémentaire 1 sur www.WK-Vet.fr). Les vétérinaires des cliniques et des CHV, déclarés à titre personnel auprès de l’Ordre, doivent alors désigner parmi eux un vétérinaire référent en charge de la mise en place des bonnes pratiques, notamment du système d’assurance qualité et de la formation ou de l’information du personnel (y compris le personnel de ménage en contact avec les déchets).

Les bonnes pratiques sont-elles obligatoires ?

Les bonnes pratiques, publiées sur neuf pages de Journal officiel, ont un caractère contraignant ou opposable, pour tous les cytotoxiques qu’ils soient accessibles en officine ou « à usage hospitalier ». Les vétérinaires ne sont pas dans l’obligation d’employer ni même de proposer des anticancéreux. Mais, s’ils le font, le respect des bonnes pratiques revêt un caractère obligatoire et leur non-respect est susceptible d’être sanctionné.

Les bonnes pratiques visent à éviter la contamination de l’entourage et de l’environnement. En outre, l’Ordre des vétérinaires diffuse sur son site Internet des fiches techniques qui peuvent servir de procédures types pour le système d’assurance qualité à mettre en place. Ces fiches peuvent toutefois être adaptées aux structures.

Le vétérinaire doit-il toujours proposer de traiter un animal cancéreux ?

Face au client, la première obligation du vétérinaire consiste aussi à tenir compte du « contexte » : à « évaluer la pertinence d’un tel traitement, non seulement pour l’animal, mais aussi en tenant compte des risques pour le propriétaire et son entourage ». Si le traitement est pertinent, le propriétaire est informé des risques, notamment pour les femmes enceintes, les enfants et les personnes immunodéprimés de l’entourage. Son consentement éclairé est exigé par écrit (figure complémentaire 2 sur www.WK-Vet.fr).

L’animal est-il obligatoirement hospitalisé ?

Pour le client comme pour le vétérinaire, la principale contrainte est sans doute l’hospitalisation des animaux au minimum 24 heures (selon le temps d’élimination des cytotoxiques). L’animal doit être gardé dans une cage isolée de ces congénères. Durant cette période, il n’en sort pas pour faire ses besoins pour éviter de contaminer l’environnement.

Quels sont les anticancéreux les moins risqués pour l’entourage ?

Pour éviter les contaminations, les anticancéreux injectables prêts à l’emploi sont à privilégier sur ceux à reconstituer, en préférant les flacons aux ampoules, et les solutions prêtes à l’emploi sur les poudres à reconstituer. Les formes orales sont à éviter. Le recours à des matières premières (sans AMM) est interdit. Toutefois, les préparations magistrales (sans AMM) préparés à partir de médicaments humains avec AMM sont tolérées « à titre exceptionnel ». Il est alors recommandé aux vétérinaires de faire réaliser ces préparations par un pharmacien d’officine (ou par le laboratoire fabricant lorsqu’il l’accepte comme c’est le cas pour Teva).

Quelles sont les règles de stockage, d’emploi des anticancéreux ?

Les anticancéreux, identifiés comme tels, sont stockés séparément des autres produits. Si une préparation est nécessaire (reconstitution ou dilution), celle-ci est réalisée par le vétérinaire dans un local réservé à cette manipulation. Un dispositif de transfert clos et à usage unique (comme Tevadaptor®, Teva) est obligatoire. De ce fait, la hotte à flux laminaire vertical n’est pas exigée sauf « lorsque l’importance de l’activité le nécessite ». La pièce de préparation est identifiée, isolée, non ventilée pendant la préparation (fenêtre et portes fermées). Son accès est interdit pendant une phase de manipulation. Le matériel utilisé est évidemment à usage unique. Un point d’eau est nécessaire pour se laver les mains avant et après la manipulation. Un dispositif de recueil des déchets est prévu. Les mêmes dispositions s’appliquent au local d’administration sur l’animal. Un système clos est aussi exigé pour l’administration. En outre, le port des vêtements de protection à usage unique est obligatoire : blouse, gants, masque, lunettes, etc. pour la manipulation et l’administration.

Une feuille de préparation est rédigée préalablement par le vétérinaire à chaque préparation et contrôlée par un autre vétérinaire (ou à défaut un membre du personnel). Toutes les étapes de préparation et d’administration sont obligatoirement réalisées par un vétérinaire (dans le respect des procédures ou des fiches technique écrites). Les femmes enceintes, les personnes mineures (stagiaires) ou immunodéprimées ne peuvent pas manipuler ces produits. Tous les locaux de préparation, d’administration sont considérés comme contaminés et doivent être nettoyés et décontaminés.

Comment éliminer les déchets dangereux ?

Tous les déchets contaminés, les reliquats de produits, les emballages, les déchets de soins (perfuseurs, aiguilles, seringues, flacons, compresses, etc.), les gants, les lunettes, les blouses utilisés pour la préparation, les excrétas (fèces, vomitats, urines, salive), les ustensiles servant au nettoyage des locaux, du matériel, de l’animal ou au ramassage des excrétas (papier absorbant), la litière ou le coussin du chien ou de chat et ses jouets sont considérés comme des déchets dangereux et éliminés comme tels. Les sociétés qui collectent déjà dans les cliniques certains déchets de soins à risque infectieux (DASRI dans les conteneurs jaunes) sont agréées pour la collecte de ces matières dangereuses (dans des conteneurs noirs).

EN SAVOIR PLUS

Voir le site de l’Ordre des vétérinaires : veterinaire.fr, rubrique vetopratique.

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