Détection clinique d’une lésion méniscale - Le Point Vétérinaire expert canin n° 373 du 01/03/2017
Le Point Vétérinaire expert canin n° 373 du 01/03/2017

CHIRURGIE

Analyse d’article

Auteur(s) : Alexandre Caron

Fonctions : CHV Atlantia,22, rue René-Viviani,44200 Nantes
a.caron@chv-atlantia.com

Chez le chien, la maladie méniscale est souvent associée à une rupture du ligament croisé cranial (RLCCr). Mécaniquement, l’instabilité du grasset entraîne un excès de pression sur les ménisques, à l’origine des déchirures [13]. Ces dernières sont identifiées dans environ un tiers des RLCCr, majoritairement lors de rupture complète (risque multiplié par 9,6 à 12,9) [4, 5, 7, 8].

TESTS CLINIQUES

L’article résumé ici traite d’un sujet souvent oublié en orthopédie : L’examen clinique [18]. Il est ainsi essentiel de déterminer manuellement le plus précisément possible l’affection à l’origine de la boiterie. Une lésion méniscale a un impact certain sur le pronostic fonctionnel à la suite du traitement d’une RLCCr. Elle induit un risque accru d’arthrose, une durée de récupération à court terme prolongée et une boiterie souvent plus marquée dans les semaines qui suivent la chirurgie [6]. Cependant, à moyen terme, il semblerait que son retentissement sur le résultat fonctionnel soit assez faible [6, 14].

Cliniquement, une lésion méniscale est suspectée lors de douleur marquée à la palpation caudo-médiale du grasset et/ou de “clic” audible ou palpable à la mobilisation du grasset. Cette anomalie correspond à la luxation de la partie libre du ménisque lésé selon la pression exercée par le condyle fémoral.

En 2014, une étude prospective a évalué la précision diagnostique de l’examen orthopédique dans la détection de lésions méniscales [4]. Comme dans l’article résumé ici, les auteurs retrouvent une très bonne spécificité (96 %) Du “clic” méniscal, mais une faible sensibilité (31 %) Avec une précision diagnostique globale de 63 % Seulement. En ajoutant à ce test la détection d’une douleur lors de flexion du grasset, la précision augmente à 85 % Avec une bonne sensibilité (85 %) Mais une spécificité diminuée (57 %).

La même année, d’autres auteurs se sont intéressés à la sensibilité du “clic” méniscal [12]. Ils démontrent une très bonne spécificité (94 %), Mais une faible sensibilité (58 % Sous anesthésie générale). Une valeur prédictive positive (VPP) de 87,5 % Est alors calculée, avec une valeur prédictive négative (VPN) de 77 %. Ces valeurs sont associées à une précision diagnostique de 80 %.

Ces deux articles ne détaillent pas le mode d’évaluation clinique des ménisques et l’article résumé ici les complète donc, en précisant les différents tests possibles [18]. Les vpn semblent inférieures à celles rapportées par neal et coll. [12]. C’est une information clinique importante qui signifie qu’en cas de test négatif la probabilité de découvrir une lésion méniscale lors de l’exploration articulaire n’est pas négligeable. L’article résumé relève également une VPP plus faible (67 % Au maximum pour le test du tiroir indirect modifié). Cela indique qu’un test positif est loin d’être associé de manière systématique à la découverte d’une lésion méniscale. Ces trois articles s’accordent pour dire que la positivité de plusieurs tests augmente légèrement la sensibilité.

IMAGERIE DES MÉNISQUES

En raison de la valeur diagnostique limitée des tests cliniques, des examens d’imagerie médicale peuvent être envisagés lorsque l’utilisation de l’arthroscopie reste strictement limitée au traitement des lésions méniscales. Il est néanmoins important de rappeler que cette dernière est considérée comme le gold standard.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM), l’échographie ou le scanner de contraste présentent un intérêt dans l’évaluation méniscale. En médecine humaine, l’irm a démontré une sensibilité et une spécificité élevées, qui en font l’examen non invasif de choix. Trois études ont décrit son utilisation chez le chien et deux d’entre elles ont évalué précisément sa valeur diagnostique [1-3, 9, 11]. La première a rapporté la très grande valeur diagnostique (spécificité de 100 % Et sensibilité de 94 %) D’un examen irm de haut champ (1,5 T) [2]. La seconde a démontré la valeur diagnostique peu intéressante (VPP de 88 % Et VPN de 69 %) D’un examen irm de bas champ (0,5 T), globalement similaire à celle de l’étude clinique de neal et coll. [3, 12].

Plus facilement disponible, un scanner du grasset peut être intéressant. Afin d’obtenir une valeur diagnostique intéressante, une injection intra-articulaire de produit de contraste est cependant nécessaire. Une sensibilité de 71 % Et une spécificité de 100 % Sont rapportées dans une étude de 2009 [17]. La même année, une autre équipe conclut à un intérêt limité de cet examen en raison d’une grande variabilité entre les imageurs (sensibilité de 13 à 73 % Et spécificité de 57 à 100 %) [15]. La qualité technique du scanner utilisé était cependant moins bonne dans cette seconde étude. Une étude cadavérique publiée l’année précédente a rapporté une valeur sensiblement similaire à celle de l’étude clinique de l’équipe londonienne [16].

Pour le chirurgien, une IRM préopératoire serait idéale afin d’évaluer la nécessité ou non d’un traitement arthroscopique. À défaut, le scanner hélicoïdal a démontré son intérêt en sus de l’examen clinique. L’échographie peut également se révéler d’une aide précieuse, mais elle est extrêmement opérateur-dépendante en comparaison avec l’IRM ou le scanner [10].

Conclusion

Les lésions méniscales doivent être recherchées lors de traitement chirurgical d’une RLCCr. L’examen clinique permet au vétérinaire d’appréhender la probabilité de la présence d’une lésion méniscale. Cependant, l’article résumé ici prouve qu’une exploration plus approfondie reste nécessaire en raison des faibles spécificités et sensibilités des tests cliniques.

Références

  • 1. Banfield et coll. Magnetic resonance arthrography of the canine stifle joint: technique and applications in eleven military dogs. Vet. Radiol. Ultrasound. 2000;41(3):200-213.
  • 2. Blond L, Thrall DE, Roe SC et coll. Diagnostic accuracy of magnetic resonance imaging for meniscal tears in dogs affected with naturally occuring cranial cruciate ligament rupture. Vet. Radiol. Ultrasound. 2008;49:425-431.
  • 3. Böttcher P, Brühschwein A, Winkels P et coll. Value of low-field magnetic resonance imaging in diagnosing meniscal tears in the canine stifle: A prospective study evaluating sensitivity and specificity in naturally occurring cranial cruciate ligament deficiency with arthroscopy as the gold standard. Vet. Surg. 2010;39:296-305.
  • 4. Dillon DE, Gordon-Evans WJ, Griffon DJ et coll. Risk factors and diagnostic accuracy of clinical findings for meniscal disease in dogs with cranial cruciate ligament disease. Vet. Surg. 2014;43:446-450.
  • 5. Fitzpatrick N, Solano MA. Predictive variables for complications after TPLO with stifle inspection by arthrotomy in 1 000 consecutive dogs. Vet. Surg. 2010;39:460-474.
  • 6. Franklin SP, Gilley RS, Palmer RH. Meniscal injury in dogs with cranial cruciate ligament rupture. Compend. Contin. Educ. Vet. 2010;32:E1-10-quiz E11.
  • 7. Hayes GM, Langley-Hobbs SJ, Jeffery ND. Risk factors for medial meniscal injury in association with cranial cruciate ligament rupture. J. Small Anim. Pract. 2010;51:630-634.
  • 8. Kalff S, Meachem S, Preston C. Incidence of medial meniscal tears after arthroscopic assisted tibial plateau leveling osteotomy. Vet. Surg. 2011;40:952-956.
  • 9. Konar et coll. Low-field MRI of the canine stifle joint. Part 2: Distribution of pathologic findings and correlation with surgical results. Tierarztl. Prax. K. 2005;33(2):73-83.
  • 10. Mahn MM, Cook JL, Cook CR, Balke MT. Arthroscopic verification of ultrasonographic diagnosis of meniscal pathology in dogs. Vet. Surg. 2005;34:318-323.
  • 11. Martig S, Konar M, Schmökel HG et coll. Low-field MRI and arthroscopy of meniscal lesions in ten dogs with experimentally induced cranial cruciate ligament insufficiency. Vet. Radiol. Ultrasound. 2006;47:515-522.
  • 12. Neal BA, Ting D, Bonczynski JJ, Yasuda K. Evaluation of meniscal click for detecting meniscal tears in stifles with cranial cruciate ligament disease. Vet. Surg. 2014;44:191-194.
  • 13. Pozzi A, Tonks CA, Ling H-Y. Femorotibial contact mechanics and meniscal strain after serial meniscectomy. Vet. Surg. 2010;39:482-488.
  • 14. Ritzo ME, Ritzo BA, Siddens AD et coll. Incidence and type of meniscal injury and associated long-term clinical outcomes in dogs treated surgically for cranial cruciate ligament disease. Vet. Surg. 2014;43:952-958.
  • 15. Samii et coll. Computed tomographic arthrography of the stifle for detection of cranial and caudal cruciate ligament and meniscal tears in dogs. Vet. Radiol. Ultrasound. 2009;50(2):144-150.
  • 16. Tivers MS, Mahoney P, Corr SA. Canine stifle positive contrast computed tomography arthrography for assessment of caudal horn meniscal injury: A cadaver study. Vet. Surg. 2008;37:269-277.
  • 17. Tivers MS, Mahoney PN, Baines EA, Corr SA. Diagnostic accuracy of positive contrast computed tomography arthrography for the detection of injuries to the medial meniscus in dogs with naturally occurring cranial cruciate ligament insufficiency. J. Small Anim. Pract. 2009;50:324-332.
  • 18. Valen S, McCabe C, Maddock E et coll. A modified tibial compression test for the detection of meniscal injury in dogs. J. Small Anim. Pract. 2017;58:109-114.

Conflit d’intérêts

Aucun.

RÉSUMÉ

OBJECTIF

Évaluer l’efficacité clinique d’un test de compression tibial (test du tiroir indirect [TCT]) modifié (mTCT) pour la prédiction d’une lésion méniscale chez des chiens présentant une rupture du ligament croisé cranial (RLCCr). Méthode

MÉTHODE

• Étude prospective. Les chiens pour lesquels un diagnostic clinique de RLCCr est établi sont inclus dans l’étude. Cinq tests cliniques sont réalisés sous anesthésie générale : TCT, mTCT, tiroir direct en flexion (CDTf) et en extension (CDTe) et amplitude articulaire (ROM). Le mTCT correspond à l’ajout d’une force axiale sur le pied lors du TCT. Un test positif est défini par un “clic méniscal” audible ou ressenti. Chaque chien est testé par deux examinateurs : un interne et un chirurgien expérimenté.

• Les résultats de chaque test sont ensuite comparés à ceux de l’exploration chirurgicale afin de calculer leurs sensibilité, spécificité, valeurs prédictives positive (VPP) et négative (VPN).

RÉSULTATS

• 57 chiens sont inclus, dont 47 % présentaient une lésion méniscale. La concordance entre les tests réalisés et les découvertes chirurgicales est de 39,9 % pour le mTCT, de 24,9 % pour la ROM, de 8,1 % pour le CDTe et de 0,8 % pour le TCT pour les internes et de 32,8 %, 16,4 %, 0,4 % pour le mTCT, la ROM et le CDTe respectivement pour les chirurgiens. En combinant les cinq tests, une lésion méniscale a été diagnostiquée chez 24 chiens par un chirurgien.

• La sensibilité du mTCT est de 63 % pour les internes et de 59 % pour les chirurgiens. Elle est de 44 % et 33 % respectivement pour le test ROM. La sensibilité des trois autres tests est de 4 à 11 %.

• La spécificité la plus élevée est de 97 % pour le CDTe et la plus faible de 73 % pour le mTCT.

• Réalisé par un chirurgien expérimenté, le mTCT démontre les VPP et les VPN les plus élevées (67 %). Pour tous les autres tests, les VPN se situent entre 50 et 57 % quel que soit l’examinateur.

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