ÉTAPE 7 : Examen de la cornée - Le Point Vétérinaire n° 360 du 01/11/2015
Le Point Vétérinaire n° 360 du 01/11/2015

EN 10 ÉTAPES

Auteur(s) : Guillaume Payen

Fonctions : CHV Frégis
43, avenue Aristide-Briand
94110 Arcueil

Les affections de la cornée doivent rapidement être prises en charge pour éviter de grave séquelles. Un examen avec un transillumateur permet un diagnostic précis dans la plupart des cas.

La cornée est normalement lisse, brillante et transparente (photo 1, encadré 1 complémentaire sur www.lepointveterinaire.fr).

Les affections de la cornée se traduisent fréquemment par une modification de son aspect, généralement remarquable pour les propriétaires, sous la forme d’un voile ou d’une opacification (photo 2). La prise en charge des affections de la cornée est fondamentale chez les carnivores domestiques pour plusieurs raisons :

– il s’agit probablement du tissu le plus fréquemment atteint et à l’origine du plus grand nombre de consultations en ophtalmologie vétérinaire ;

– sa transparence est le garant de la qualité de la vision ;

– la rupture de son intégrité (assez fréquente chez les carnivores domestiques) peut aboutir à une perforation et parfois à une perte du globe oculaire ;

– ce tissu est richement innervé par des terminaisons nerveuses issues du nerf trijumeau et la plupart des affections, ulcératives notamment, le concernant sont responsables d’une douleur vive.

OUTILS DU DIAGNOSTIC

→ L’examen de la cornée nécessite une source de lumière plus ou moins assistée d’un système grossissant particulier. Néanmoins, il est très intéressant d’examiner auparavant le reflet d’une source de lumière diffuse telle que celle du plafonnier sur la surface de la cornée. Ce reflet doit être lisse et brillant. Sinon, cela traduit une irrégularité de la surface de l’épithélium telle que celle rencontrée dans le cadre d’une kératite chronique.

→ Le premier outil à utiliser est le trans­illuminateur de Finoff. Cette source de lumière focalisée et puissante permet d’établir un diagnostic lésionnel relativement précis de la plupart des affections de cornée. Afin de préciser le bilan lésionnel, l’utilisation de la lampe à fente est préconisée. En éclairage diffus, le système grossissant (de 10 à 16 fois) permet de préciser la nature de certaines lésions et, parfois, de mettre en évidence une néovascularisation très grêle que le transilluminateur de Finoff n’a pas pu révéler. En éclairage en fente, l’examen permet soit de déterminer la localisation dans l’épaisseur de la cornée d’une lésion ou d’une opacité, soit d’évaluer la profondeur de façon semi-quantitative d’un ulcère de cornée. Par exemple, établir que la localisation d’opacités ponctiformes est endothéliale est une indication de la présence de précipités kératiques pathognomoniques de la progression d’une uvéite.

→ Les tests au collyre revêtent une importance fondamentale dans l’examen de la cornée. En raison de la possible fixation de ce produit sur la cornée, il convient de les effectuer à la fin de l’examen ophtalmologique pour ne pas occulter l’examen des structures intra-oculaires. Le premier test est celui à la fluorescéine. En raison du caractère hydrophobe de l’épithélium, cette solution aqueuse n’adhère pas sur une surface cornéenne intègre. À l’inverse, le stroma étant hydrophile, le colorant se fixe sur ce dernier en cas de rupture de l’intégrité de l’épithélium cornéen, ce qui permet de diagnostiquer des ulcères de cornée. Pour révéler le test à la fluorescéine, il convient de se placer dans l’obscurité et d’utiliser un filtre bleu cobalt disponible sur les lampes à fente et l’ophtalmoscope direct. En effet, cette lumière va exciter le pic de fluorescence de la fluorescéine, donc permettre de mieux contraster la prise du colorant. En cas de kératite chronique à l’origine d’une atteinte épithéliale, il est possible, à l’aide d’un filtre bleu cobalt, de mettre en évidence une rétention diffuse peu prononcée du colorant sur la surface de la cornée. Afin de révéler ce même type de lésions (abrasion ou atteinte épithéliale associée, par exemple, à un syndrome de l’œil sec), le test au rose Bengale peut être intéressant : le colorant se fixe sur une surface épithéliale “souffrante” sans ulcération (photo 3) [4].

PERTES DE TRANS­PARENCE DE LA CORNÉE

1. œdème de cornée

→ L’œdème de cornée est d’aspect bleuté. Il peut être secondaire à des lésions superficielles de cornée telles que des ulcères superficiels et des kératites. Dans ce cas, l’œdème est peu intense et localisé autour de la lésion. Il provient de l’imbibition du stroma superficiel à partir des larmes, lors de rupture de continuité de l’épithélium (ulcère cornéen), ou bien de la diffusion à partir de la néovascularisation superficielle de la cornée, en cas de kératite. La mise en évidence d’un œdème de ce type doit donc faire rechercher les lésions correspondantes.

→ Lorsque l’œdème est plus diffus sur l’ensemble de la cornée et aussi plus intense (aspect discrètement marbré), il est d’origine endothéliale, c’est-à-dire qu’il correspond à une imbibition du stroma hydrophile (photo 4). Les affections responsables de ce type d’œdème incluent l’hypertension oculaire (glaucome), la dégénérescence sénile de l’endothélium cornéen, des kératites profondes (comme en cas d’abcès cornéen ou d’ulcère cornéen profond surinfecté), certaines uvéites antérieures et, enfin, les luxations antérieures du cristallin. Ainsi, en cas d’ulcère cornéen, la mise en évidence d’un œdème cornéen diffus et intense doit faire penser à une surinfection du lit d’un ulcère cornéen ou à un autre type d’ulcère cornéen “complexe”.

2. Fibrose du stroma

La fibrose du stroma est souvent secondaire à des processus cicatriciels ou inflammatoires de la cornée, et est caractérisée par un aspect blanc-gris en regard de la lésion (photo 5). La fibrose est fréquemment associée à une néovascularisation puisqu’elle est fréquemment rencontrée dans le cadre des processus cicatriciels de la cornée ou des lésions de kératite chronique. La fibrose est parfois difficile à distinguer d’un œdème cornéen.

3. Pigmentation cornéenne

La pigmentation mélanique des couches superficielles de la cornée est secondaire à la progression de lésions de kératite chronique ou au retard de cicatrisation d’un ulcère cornée (photos 6 et 7). Le terme de kératite pigmentaire ne correspond donc pas à une affection spécifique, puisque toute inflammation chronique de la cornée, caractérisée par une néovascularisation, peut aboutir à une pigmentation mélanique en regard des sites de kératite. En effet, la progression des pigments de mélanine provient généralement de la néovascularisation cornéenne dans le stroma superficiel. Néanmoins, la propension de la cornée à accumuler de la mélanine en cas de néovascularisation et d’inflammation chronique est variable d’une race et d’un individu à l’autre. Les cas les plus fréquemment observés sont probablement liés à la progression de lésions de kératite superficielle chronique du berger allemand ou encore à la pigmentation du quadrant nasal de la cornée chez certains chiens de race brachycéphale en réponse au frottement de cils ou de poils sur cette dernière et à son exposition importante [1].

4. Néovascularisation cornéenne

Chez le chien plus que chez le chat, il est possible de distinguer deux types de néovascularisation cornéenne. La première forme, superficielle, peut être longue, souvent arborisée et rejoint habituellement avec le temps l’épicentre de la lésion cornéenne, tel un ulcère superficiel de cornée (photo 8). Dans la mesure où ce type de néovascularisation n’apparaît pas avant 4 jours après la survenue d’un ulcère superficiel, la mise en évidence de néovaisseaux permet presque de diagnostiquer un retard de cicatrisation, comme en cas d’ulcère induit par une malimplantation ciliaire, un entropion ou un ulcère “à bords décollés”. La néovascularisation profonde prend un aspect de brosse courte en région périlimbique (photo 9). Habituellement, la proportion de circonférence limbique à partir de laquelle elle se développe est importante. Ces vaisseaux ne dépassent généralement pas quelques millimètres. Ce type de néovascularisation est associé à des ulcères cornéens complexes, surinfectés, profonds, à des lésions d’uvéite antérieure, et, enfin, à des lésions d’épisclérite ou de sclérite. Chez le chat, la néovascularisation répond peu au schéma décrit chez le chien. La néovascularisation adopte une configuration relativement homogène, mais en se développant à la profondeur de la lésion.

5. Infiltrats cellulaires

Un infiltrat cellulaire est parfois spectaculaire au cours de l’évolution de certaines kératites, comme la kératite éosinophilique féline où l’infiltrat apparaît sous la forme d’une plaque rose à blanchâtre, souvent localisée et en relief (photo 10). En cas de retard de cicatrisation d’un ulcère cornéen superficiel (comme l’ulcère à bords décollés), la densité de l’infiltrat cellulaire en regard de la lésion peut également être importante et en relief, sous l’aspect d’un pseudo-granulome de couleur rose à rouge. Enfin, les lésions de kératite chronique sont aussi responsables d’un infiltrat cellulaire, comme la kératite superficielle chronique du berger allemand.

6. Dépôts cristallins intrastromaux

Les dépôts lipidiques et/ ou calciques apparaissent sous la forme de ponctuations cristallines coalescentes très réfringentes. Ces dernières sont observées, tout d’abord, dans les cas de dystrophie stromale. Elles surviennent alors chez un jeune chien, et les plages sont bilatérales et relativement symétriques, centrales et non inflammatoires (photos 11 et 12). Elles peuvent aussi représenter une forme de dégénérescence du stroma secondaire à un processus inflammatoire chronique ou cicatriciel. Dans ce cas, les dépôts sont irréguliers et fréquemment associés à une néovascularisation. Ils peuvent alors être de natures lipidique et/ou calcique. Enfin, rarement, les dépôts lipidiques de cholestérol sont la conséquence d’une hypercholestérolémie, dont l’hypothyroïdie représente probablement la première cause. Dans ce dernier cas, les dépôts sont périphériques et associés à une néovascularisation [2].

7. Précipités kératiques

Les opacités cornéennes peuvent être la conséquence de précipités kératiques se développant généralement sur le quadrant ventral de la cornée, et secondaires à l’évolution ou aux séquelles d’une uvéite antérieure (photo 13). Dans ce cas, l’examen à la lampe à fente permet de confirmer la localisation (endothéliale) de ces précipités plus ou moins ponctiformes gris terne.

FOCUS SUR LES ULCÈRES CORNÉENS

1. Définition

→ Un ulcère cornéen est une rupture de continuité de l’épithélium, exposant ainsi le stroma sous-jacent. Les signes fonctionnels associés sont un larmoiement, un blépharospasme, une photophobie, une hyperémie conjonctivale et un œdème cornéen. Parfois, un myosis et un effet Tyndall sont présents. L’examen de l’œil indique une irrégularité de la surface cornéenne, avec un œdème ou une opalescence autour de la lésion. Dans le cas d’une lésion ancienne, la cornée est vascularisée à partir du limbe dans les 3 à 6 jours suivant l’ulcération.

→ Les ulcères cornéens superficiels non compliqués cicatrisent habituellement rapidement, sans laisser de trace (encadré 2 complémentaire sur www.lepointveterinaire.fr). Les ulcères profonds compliqués, comme dans le cadre d’une surinfection microbienne, peuvent aboutir à une cécité en raison d’une opacification cicatricielle de la cornée, ou, en cas de perforation, par la formation de synéchies antérieures, par exemple. Certains ulcères provoquent même la perte du globe à la suite d’une perforation, entraînant par exemple le développement d’une endophtalmie, d’un glaucome ou d’une phtyse bulbaire.

→ Les ulcères cornéens peuvent être classés par leur profondeur (superficiel, stromal, stromal profond et descemétocèle) et leur origine (bactérienne, fongique, traumatique, à médiation immune, ulcère indolent, etc.).

→ Face à un ulcère de cornée, le clinicien doit, au-delà de la caractérisation des lésions qu’il met en évidence, se poser deux questions :

– quelle est la cause la plus probable de l’ulcère cornéen ?

– existe-t-il un retard ou une complication à la cicatrisation de la cornée ?

2. Diagnostic

Le diagnostic d’un ulcère cornéen repose sur la mise en évidence des signes cliniques précédemment décrits et la fixation par le stroma de la fluorescéine appliquée sur la cornée. Les ulcères peuvent être plus ou moins profonds. Le fond de l’ulcère devient transparent et ne fixe plus la fluorescéine lorsque celui-ci atteint la membrane de Descemet. La perforation de la cornée peut s’accompagner d’une hernie de l’iris (staphylome irien), avec la production d’un bouchon de fibrine parfois très important. Si, malgré une modification importante d’aspect, la fluorescéine ne fixe pas la lésion, c’est que l’ulcère est réépithélialisé.

3. Gestion des kératites ulcératives

Ulcères superficiels

→ Les ulcères superficiels d’origine traumatique externe doivent cicatriser rapidement. Le traitement fait appel à l’utilisation d’antibiotiques localement trois ou quatre fois par jour afin de prévenir une surinfection bactérienne. Une association d’antibiotiques topiques à large spectre représente un choix thérapeutique satisfaisant. Un substitut de larmes peut également être prescrit (traitement lacrymomimétique) afin de limiter l’exposition des récepteurs nociceptifs répartis dans la partie superficielle du stroma et responsables de manifestations externes généralement importantes de douleur oculaire (blépharospasme, larmoiement). Les substituts de larmes permettent aussi de lubrifier le contact entre le bord palpébral et le site ulcéré, dont l’effet est susceptible de limiter la progression de la réépithélialisation. Enfin, il est également possible d’adjoindre des anti-inflammatoires non stéroïdiens par voie orale en cas de douleur vive. Pour ce type d’ulcères cornéens, le recours à l’atropine collyre n’est pas indispensable car celle-ci a peu d’effet antalgique dans la mesure où la douleur provient de la surface oculaire et n’a généralement pas de composante intra-oculaire, comme c’est parfois le cas avec les ulcères stromaux. Le port d’une collerette est préconisé. L’ulcère doit alors cicatriser en 2 à 6 jours. Si ce n’est pas le cas, l’œil concerné est réexaminé afin de rechercher une cause sous-jacente au retard constaté.

→ Les ulcères superficiels d’origine traumatique associés à une malposition palpébrale ou à une malimplantation ciliaire sont la conséquence d’un frottement récurrent de cils ou de poils sur la cornée.

En plus du traitement topique décrit pour les ulcères superficiels, il convient de traiter la cause de la kératite traumatique.

→ Appelés également ulcères indolents, ulcères cornéens réfractaires, ulcères récurrents, ulcères du boxer, les ulcères superficiels à bords décollés ne se résolvent pas par des processus de cicatrisation classiques. En l’absence de traitement adéquat, ce type d’ulcère peut persister plusieurs mois. Il s’agit probablement de la première cause de retard de cicatrisation d’un ulcère superficiel chez le chien (photo 14).

Un ulcère cornéen à bords décollés doit être envisagé chez tout chien d’âge moyen présentant un ulcère superficiel non cicatrisé en 1 à 2 semaines. L’aspect clinique de ce type d’ulcère est assez caractéristique : un anneau d’épithélium retroussé et surélevé entoure l’ulcère. La prise de fluorescéine ne s’interrompt pas brusquement mais progressivement, en raison d’une diffusion du colorant sous les marges apparentes de l’ulcère. Il est indispensable d’informer les propriétaires que plusieurs types de traitement sont parfois nécessaires et que des ulcères peuvent récidiver après cicatrisation (notamment sur l’autre œil). Cette communication permet d’augmenter significativement le taux de satisfaction des propriétaires, mais aussi l’observance au traitement.

Différentes options thérapeutiques existent. Avec tous les types de traitement, il convient d’appliquer localement des antibiotiques de manière préventive, toutes les 8 heures. La prise en charge la plus courante actuellement est la désépithélialisation, seule ou en association avec d’autres traitements chirurgicaux. La désépithélialisation peut être pratiquée sous anesthésie locale ou générale à l’aide de cotons-tiges ou de spatules, d’une lame de bistouri ou d’une petite fraise spécifique. Elle s’effectue de façon centripète jusqu’à ce que l’épithélium restant soit fermement adhérent. Il arrive ainsi parfois que 90 % de la surface cornéenne soit désépithélialisée. Le taux de succès global de la désépithélialisation seule est estimé à 50 %. La réalisation d’un recouvrement par la membrane nictitante (sous anesthésie générale) et d’une kératotomie (ponctuée ou en grille) élève ce pourcentage global à plus de 80 % à 2 semaines.

Enfin, la kératectomie superficielle offre une cicatrisation dans 100 % des cas selon différentes études, et ce en un temps relativement bref [3]. En enlevant la partie superficielle du stroma, cette technique permet la formation de nouveaux complexes d’adhésion entre le stroma et l’épithélium. En raison des risques d’opacification cicatricielle en regard du site chirurgical, elle n’est généralement pas utilisée en première intention.

Ulcères stromaux

→ Tout ulcère stromal peut être considéré comme un ulcère initialement superficiel qui est ou qui a été surinfecté (photos 15 et 16). Les chiens brachycéphales présentent un risque plus important de développer de telles complications infectieuses. Pour cette raison, tout ulcère, même superficiel, chez un brachycéphale doit être envisagé, avec les spécificités du suivi et du traitement médical associés aux ulcères stromaux. Celui-ci doit inclure un antibiotique dont le spectre est orienté vers les bacilles à Gram négatif, telle la tobramycine a minima six à huit fois par jour, en association avec un collyre à activité anticollagénases, comme la N-acétylcystéine ou du sérum autologue à la même fréquence pendant 48 heures. Un anti-inflammatoire non stéroïdien par voie orale est également préconisé en raison du spasme du muscle ciliaire.

L’utilisation d’un agent mydriatique (atropine collyre à 1 % chez le chien et à 0,3 % chez le chat) est recommandée deux fois par jour. L’atropine va, en effet, lever le spasme douloureux du muscle ciliaire. Elle a donc une action antalgique sur l’origine intra-oculaire de la douleur associée à ce type d’ulcère. Un suivi de 2 à 4 jours et le port d’une collerette sont recommandés. Lorsque la perte de substance ne dépasse pas 30 à 50 % de l’épaisseur stromale, et pour les ulcères peu étendus et périphériques, le traitement médical peut être suffisant, à condition de bien contrôler la réépithélialisation du site ulcéré à court terme.

En cas de progression très rapide d’un ulcère infecté, il s’agit d’un ulcère à collagénases dont la gestion est particulière (photo 17, encadré 3 complémentaire sur wwww.lepointveterinaire.fr).

→ Lorsque la perte de substance dépasse 50 % de l’épaisseur de la cornée, notamment pour des ulcères centraux et notamment chez les brachycéphales, des procédures chirurgicales sont préconisées. Elles le sont en cas de descemétocèle en raison du fort risque de perforation à très court terme.

Les techniques chirurgicales employées correspondent à des procédures de greffe lamellaire ou kératoplastie. Différents matériaux peuvent être utilisés : la conjonctive (et notamment la greffe pédiculée de conjonctive), la membrane amniotique, la cornée lamellaire congelée et des biomatériaux comme le Vetbiosis®. Ce dernier biomatériau correspond à une trame de collagène contenant des facteurs de croissance, issue de la sous-muqueuse d’intestin de porc, et se présentant sous la forme d’une feuille de 0,1 à 0,4 mm d’épaisseur. Ces techniques doivent être envisagées, dans la mesure où l’intégrité mécanique de la cornée ne risque pas d’être compromise à très court terme, sur un lit d’ulcère “propre”, c’est-à-dire ne montrant pas de signe actif de kératomalacie.

Comment gérer une perforation cornéenne

→ Les perforations de la cornée peuvent être la conséquence soit de la perforation d’un ulcère cornéen dont le lit a été le siège d’une surinfection bactérienne, soit d’une plaie de lacération (souvent par une griffure de chat) (photos 18 et 19).

→ La gestion médicale est fondamentale et conditionne le pronostic visuel. Dans ce cas, la perforation doit être considérée comme un type particulier d’uvéite avec un risque important d’endophtalmie. Le traitement médical doit donc inclure de l’atropine en collyre toutes les heures, des anti-inflammatoires par voie parentérale, des antibiotiques par voie parentérale et une collerette. L’utilisation d’atropine collyre à haute fréquence d’instillation est indispensable pour le pronostic visuel afin de limiter le risque de formation de synéchies postérieures et antérieures, donc d’opacification irréversible de l’ouverture pupillaire. Il n’est pas indispensable d’employer des antibiotiques locaux. En effet, leur pénétration intra-oculaire est relativement limitée et, de plus, manipuler de tels globes oculaires majore la douleur et augmente le risque de reperforation d’un site bien souvent étanchéifié (sommairement) par un bouchon fibrino-hémorragique.

→ La gestion chirurgicale diffère selon qu’il s’agit d’un ulcère perforant ou d’une plaie de lacération. Les ulcères perforants sont souvent localisés au centre de la cornée. En cas d’endophtalmie ou de collapsus de la chambre antérieure, l’indication chirurgicale doit être considérée avec précaution. Dans ces cas de figure, le réflexe de clignement à l’éclair lumineux sur l’œil atteint, le réflexe photomoteur indirect en stimulant celui-ci, de même que l’échographie oculaire sont des aides précieuses à la décision opératoire. L’échographie peut être effectuée en période préopératoire immédiate, sous anesthésie générale afin de ne pas léser le site perforé, pour vérifier l’intégrité du segment postérieur. Dans le cas où ce dernier présente des lésions évidentes, une chirurgie conservatrice complexe n’est pas toujours indiquée. Pour les perforations de petite taille, différentes techniques de kératoplastie sont envisageables : greffes de conjonctive pédiculée, de Vetbiosis®, de membrane amniotique ou encore de cornée congelée. Pour les perforations dépassant 5 mm de diamètre, une procédure de kératoplastie transfixiante est nécessaire, ainsi que le recours à une greffe de cornée (congelée en général) pour restaurer les propriétés tectoniques de la cornée.

Souvent, les plaies de lacération sont responsables de déchirures linéaires. Si elles sont prises en charge dans des délais inférieurs à 24 heures, une suture bord à bord avec un parage a minima des berges de la plaie peut être satisfaisante.

Conclusion

Un examen satisfaisant de la cornée peut être effectué avec une bonne source lumineuse telle que celle d’un transilluminateur. L’examen au biomicroscope a pour objectif de préciser la localisation d’une opacité dans la cornée ou encore d’évaluer la profondeur d’un ulcère cornéen. Toutefois, une atteinte stromale en cas d’ulcère cornéen est détectable au transilluminateur.

Références

  • 1. Gelatt, KN. Vital staining of the canine cornea and conjunctiva with fluorescein and rose Bengal. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 1972;8:17-22.
  • 2. Maggs DJ. Basic diagnostic techniques. In: Slatter’s fundamentals of veterinary ophthalmology . Eds. Maggs DJ, Miller PE, Ofri R. 4th ed. Saunders, Elsevier, St Louis. 2008.
  • 3. Ledbetter EC, Gilger BC. Diseases and surgery of the canine cornea and sclera. In: Veterinary ophthalmology . 5th ed. Ed. Gelatt KN. John Wiley and sons, Inc., Ames. 2013.
  • 4. Ollivier FJ et coll. Ophthalmic examination and diagnostics. Part 1: the eye examination and diagnostic procedures. In: Veterinary ophthalmology . 4th ed. Ed. Gelatt KN. Ed. Blackwell Publishing, Ames. 2007.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ Un examen de cornée satisfaisant requiert a minima l’emploi d’une source lumineuse forte, de fluorescéine et d’une lumière munie d’un filtre bleu cobalt.

→ L’utilisation du biomicroscope (lampe à fente) permet de préciser la profondeur d’un ulcère et la localisation d’une opacité dans l’épaisseur de la cornée.

→ Un examen au transilluminateur de finoff permet de distinguer un ulcère superficiel (épithélial) d’un ulcère atteignant le stroma cornéen.

→ Un ulcère cornéen superficiel d’origine traumatique doit cicatriser, en l’absence de complication, en moins de 4 jours.

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