Dermatite à Pelodera strongyloides avec une folliculite-furonculose éosinophilique chez 2 jeunes chiens - Le Point Vétérinaire expert canin n° 360 du 01/11/2015
Le Point Vétérinaire expert canin n° 360 du 01/11/2015

DERMATOLOGIE CANINE

Cas clinique

Auteur(s) : Bénédicte Pouleur-Larrat*, Pascale Tonnelle**, Romain Nemoz***, Oscar Fantini****, Didier Pin*****

Fonctions :
*Orbio Laboratoire, 12C,
rue du 35e régiment d’aviation,
BP 78, 69672 Bron Cedex
benedicte.pouleurlarrat@orbio.fr
**Cabinet vétérinaire,
2, av. du 8-Mai-1945, 38450 Vif
veterinaire.vif@gmail.com
***Clinique vétérinaire de Jarlard,
38, rue des Agriculteurs, 81000 Albi
cliniquejarlard@orange.fr
****Unité de dermatologie,
VetAgro Sup, Campus vétérinaire de Lyon,
1, av. Bourgelat, 69280 Marcy-L’Étoile
oscar.fantini@vetagro-sup.fr
*****Unité de dermatologie,
VetAgro Sup, Campus vétérinaire de Lyon,
1, av. Bourgelat, 69280 Marcy-L’Étoile
didier.pin@vetagro-sup.fr

La dermatite à Pelodera strongyloides est rare en France et ne se traduit que par des lésions banales, non spécifiques. Grâce à la description de deux cas, les éléments de suspicion, anamnestiques et cliniques, ainsi que le diagnostic sont détaillés.

Pelodera strongyloides est un nématode rhabditidé saprophyte qui vit dans les matières organiques en décomposition, dans lesquelles il effectue un cycle direct (figure) [7]. C’est un parasite opportuniste des mammifères, chez lesquels il présente un tropisme pour les follicules pileux. Chez le chien, il est responsable d’une dermatite plus ou moins prurigineuse, alopécique et croûteuse.

Deux cas de chiens provenant de milieux de vie différents et atteints de ce parasite sont mis en parallèle dans cet article.

CAS CLINIQUES

1. Présentation du premier cas

Commémoratifs et anamnèse

Un chiot korthals de 6 mois et demi et pesant 17 kg, acquis à l’âge de 2 mois et demi, loge à l’extérieur dans une niche paillée. Il est vacciné correctement, et vermifugé tous les mois avec un antiparasitaire à base de milbémycine-oxime et de praziquantel (Milbemax®) par son vétérinaire traitant. Il n’a effectué aucun séjour à l’étranger ou en dehors de sa région de naissance (sud-ouest de la France) ou de vie actuelle (Grenoble). Le second chien du propriétaire, un teckel à poil dur de 10 ans logé dans les mêmes conditions, est asymptomatique.

Examen clinique

Le chiot est présenté en consultation chez son vétérinaire traitant pour des lésions cutanées chroniques de la face latérale de la cuisse droite.

Les lésions, apparues 6 semaines auparavant, consistent en un érythème et une alopécie d’une zone tuméfiée et suintante, d’environ 3 x 3 cm, sur la face latérale de la cuisse droite. Elles ne semblent pas prurigineuses. Un calque cutané par apposition met en évidence des bactéries coccoïdes et de rares polynucléaires neutrophiles.

Un traitement antibactérien, à base d’acide clavulanique et d’amoxicilline (Kesium® 500), à raison d’un demi-comprimé matin et soir, per os, est mis en place pendant 3 semaines, associé à de la povidone iodée localement deux fois par jour (Bétadine®) diluée à 1 %. Une aggravation étant observée malgré ce traitement, le chien est revu 15 jours plus tard.

L’état général du chiot est très bon. Son embonpoint et sa croissance sont corrects. Sa température rectale est normale. Désormais, la face latérale de la cuisse et de la jambe est atteinte d’un érythème net, avec peu de prurit. Une plaque épaisse occupe toute une partie de la face latérale de la cuisse. À sa surface, des papules centrées sur des pertuis, entourées de liserés rouges, hémorragiques, sont visibles. Un liquide séreux s’écoule à la pression. Trois plaques plus petites sont visibles sur la face latérale de la jambe.

Synthèse clinique et anamnestique

Un jeune chien korthals vivant à l’extérieur, sans antécédent médical, présente une dermatite chronique, multifocale, non prurigineuse, non contagieuse, caractérisée par un érythème, des papules, une alopécie et des croûtes, et localisée à la face latérale du membre postérieur droit, d’aggravation progressive malgré un traitement antibactérien.

2. Présentation du second cas

Commémoratifs et anamnèse

Un jeune chien de type croisé podenco, d’environ 1 an, pesant 15 kg, est recueilli avec son frère dans un refuge de la Société protectrice des animaux (SPA). Aucun élément n’est disponible sur sa vie passée, son lieu de vie ou son statut vaccinal et parasitaire. Il est présenté en consultation pour des lésions podales des quatre membres dès son entrée à la SPA. Son frère ne montre aucune lésion.

Examen clinique

L’état général de l’animal est moyen. Il est maigre mais non cachectique, avec un score corporel évalué à 3/9. Son pelage est terne. La température rectale est normale et l’appétit conservé. Le chien se déplace difficilement en raison de lésions douloureuses aux quatre membres. Des dépilations diffuses, plus nettes sur les faces palmaires que plantaires, intéressent les extrémités distales des membres. Des ulcères suintants siègent sur les coussinets et dans les espaces interdigités (photos 1a à 1e). Les faces ventrales des zones métacarpiennes et métatarsiennes présentent des croûtes, un érythème et un épaississement cutané. Aucun prurit n’est observé. Des calques cutanés révèlent des bactéries coccoïdes, des Malassezia sp. et des cellules inflammatoires. Aucune lésion n’est notée sur le reste du corps.

Synthèse clinique et anamnestique

Un jeune chien croisé podenco présente une dermatite quadripodale douloureuse de durée d’évolution inconnue, qui ne semble pas contagieuse et qui se caractérise par des ulcères, une alopécie diffuse et des croûtes des coussinets et des espaces interdigités.

3. Diagnostic différentiel

Dans les deux cas, le diagnostic différentiel inclut une folliculite bactérienne, démodécique ou fongique, une dermatite de contact, une infestation par Pelodera sp. ou par Strongyloides stercoralis ou Ancylostoma caninum. La distribution lésionnelle, épargnant la tête, permet d’écarter la furonculose éosinophilique de la face.

4. Examens complémentaires

Plusieurs biopsies cutanées, au trépan de 6 mm de diamètre, sont effectuées. Dans le premier cas, elles sont prélevées sur la cuisse et la jambe, sur des pertuis, en zone érythémateuse et à la limite des lésions et de la peau saine, sous forte tranquillisation (butorphanol et médétomidine). Dans le second cas, des biopsies cutanées des zones lésées, à cheval sur la zone de contact entre la peau et les coussinets, sont réalisées sous anesthésie générale en raison de la douleur (médétomidine et kétamine). Des raclages cutanés pour la recherche de Demodex n’ont pas été effectués en raison de la réalisation des biopsies.

De plus, pour le premier animal, en raison de l’absence de réponse au traitement antibactérien initial, des cultures bactériologique et mycologique avec antibiogramme sont demandées sur un écouvillon de la peau alopécique de la cuisse droite. Il est également demandé au propriétaire d’adresser de la litière paillée de la niche au laboratoire.

5. Résultats

Résultats histologiques

Dans les deux cas, l’examen histopathologique des biopsies cutanées révèle un infiltrat inflammatoire péri­annexiel, pyogranulomateux, fortement éosinophilique, et discrètement lymphocytaire et plasmocytaire. Une seule coupe sériée des lames permet de révéler, en profondeur, quelques coupes, transversales et longitudinales, de larves de nématodes, d’environ 20 à 50 µm de diamètre, avec une musculature platymyariane et des ailes latérales disposées par paires (larves de rhabditidés), au sein de lésions de folliculite-furonculose et d’hidrosadénite (photos 2a à 2e).

Résultats bactériologique et mycologique

Pour le premier chien, la culture bactériologique, à partir de la peau lésée, isole de très nombreuses colonies de Staphylococcus pseudintermedius, résistantes à la pénicilline G, à l’amoxicilline et à la tétracycline, mais sensibles aux autres antibiotiques testés. La culture mycosique reste négative après 48 heures d’incubation (absence de Candida et de Malassezia).

Analyse de la paille

La paille est placée dans un récipient et abondamment rincée au tampon phosphate salin (PBS). Elle est ensuite retirée délicatement du récipient et le liquide de rinçage est récupéré dans plusieurs tubes. Ces derniers sont centrifugés 10 minutes à 3 000 tours par minute et le culot est récupéré, réparti sur plusieurs lames de verre et examiné au microscope. Cet examen met en évidence des larves de nématodes, de 650 à 750 µm de longueur, qui possèdent un appareil valvulaire ou rhabditiforme, compatibles avec des larves de Pelodera stongyloides (photos 3a et 3b).

6. Mesures thérapeutiques et évolution

Pour les deux chiens, un traitement est entrepris dès l’obtention des résultats du laboratoire.

Premier cas

Une injection de moxidectine aqueuse peu irritante (Cydectine ovin®) à la dose de 300 µg/kg (soit 1 ml pour 33 kg), par voie sous-cutanée, est pratiquée hors autorisation de mise sur le marché (AMM) avec le consentement du propriétaire.

Localement, un spray à base de chlorhexidine (Douxo Pyo®) est appliqué plusieurs fois par jour. L’infection bactérienne à Staphylococcus pseudintermedius est traitée avec de la marbofloxacine (Marbocyl®) à la dose de 2 mg/kg/j, per os.

Par téléphone, les propriétaires rapportent une amélioration en une dizaine de jours. Au bout de 3 semaines, l’Œdème et l’érythème sont en régression, les pertuis ont disparu. Après 6 semaines, la peau a repris un aspect presque normal. Les poils ont repoussé (photos 4a et 4b). Neuf mois plus tard, la peau est totalement saine et aucune récidive n’est survenue.

Second cas

Une injection unique d’ivermectine (Ivomec Ovin®) à la dose de 0,3 mg/kg est réalisée hors AMM par voie sous-cutanée. Des shampoings à la chlorhexidine et au climbazole (Malaseb®) sont prescrits, trois fois par semaine, pendant 2 semaines, puis une fois par semaine pendant 2 semaines. L’animal est placé sous antibiothérapie : céfalexine (Thérios 300®) à la dose de 20 mg/kg, deux fois par jour, pendant 15 jours.

Un contrôle est prévu 1 mois après le début du traitement. Une mise en quarantaine des 2 animaux de la fratrie est prescrite jusque-là et une désinfection soignée du box, conseillée. Le frère a présenté des lésions identiques 3 semaines après l’examen du premier chien. La même prise en charge thérapeutique a été prescrite sur la base de l’examen clinique.

Lors du contrôle à 1 mois, l’érythème, les ulcères et les croûtes ont disparu (photos 5a à 5e). Les poils commencent à repousser et l’animal présente un meilleur état général. À part le frère, aucun autre animal du chenil n’a présenté ensuite de lésion comparable.

DISCUSSION

1. Une parasitose exceptionnellement diagnostiquée

Les deux cas présentés illustrent les signes cliniques classiques d’une dermatite à P. strongyloides : il s’agit d’une dermatite érythémateuse, papuleuse, alopécique et croûteuse, affectant les parties du corps au contact du sol, c’est-à-dire, le plus souvent, la face latérale des membres, l’abdomen, le périnée et la queue [3].

L’alopécie peut être partielle à totale et le prurit léger à intense. Les papules sont associées à des croûtes et à des squames, et les infections bactériennes secondaires sont fréquentes.

Malgré la grande prévalence des larves dans la matière végétale, les cas d’infestation par Pelodera sp. sont exceptionnellement rapportés, vraisemblablement en raison de l’absence de diagnostic due au caractère discret de certaines infestations [6 cité par 5, 7]. Ainsi, certains auteurs suggèrent la possibilité d’une infestation asymptomatique [5]. Cela serait en accord avec les fluctuations de la gravité des lésions cutanées, pouvant évoluer d’une légère dermatite érythémateuse à une furonculose.

2. Répartition du parasite

Selon Sudhaus et coll., la plupart des cas européens de dermatite à Pelodera sp. surviendraient entre les latitudes 50° et 60°, tandis qu’en Amérique du Nord cette dermatose apparaît plutôt entre les latitudes 40° et 50° [6 cité par 5]. Le parasite a depuis été observé plus au nord, jusqu’en Finlande, entre les latitudes 60° et 70° [5]. La France continentale se situe entre les latitudes 43° (Marseille) et 50° (Lille), ce qui étend la répartition européenne du parasite vers le sud. Jusqu’à présent, un seul cas a été décrit en France en 1984 [1].

3. Facteurs de risque

Les facteurs favorisant cette dermatose, non saisonnière, sont un lieu de couchage humide, à l’extérieur, en présence de végétaux (le plus souvent de la paille ou du foin) en voie de décomposition. Pelodera sp. est un parasite cutané opportuniste. L’inflammation importante associée à la dermatose canine suggère une mauvaise adaptation entre le parasite et son hôte [5]. L’infestation, accidentelle, a lieu lorsque la peau du chien entre en contact prolongé avec l’environnement abritant les larves L3. Dans ce contexte, le lieu de couchage est favorable à une exposition prolongée et les chiens de chenil sont ainsi particulièrement concernés, ce que les deux cas présentés illustrent parfaitement. Là encore, le premier cas rapporté est classique dans sa présentation puisque des larves de rhabditidés, compatibles avec Pelodera sp., ont été retrouvées par l’examen d’un échantillon de paille provenant de la litière du chien. De telles larves étant fréquentes dans les végétaux en décomposition, leur présence permet de corroborer notre hypothèse [6 cité par 5, 7]. Leur absence aurait diminué la probabilité que la dermatose soit liée au lieu de couchage.

L’affection est surtout rapportée chez les jeunes individus, jusqu’à l’âge de 1 an environ [1]. La pénétration cutanée par les larves semble plus aisé chez les races à poils courts que chez celles à poils longs. Ainsi, en Finlande, les chiens courants finlandais sont plus touchés que les chiens d’élan norvégiens gris.

L’homme peut exceptionnellement être atteint lorsqu’il est exposé aux mêmes conditions que le chien [4].

4. Diagnostic

Raclages cutanés

La méthode diagnostique de choix est le raclage cutané : elle est facile, rapide, peu coûteuse et fiable, et ce d’autant plus qu’elle permet d’explorer l’hypothèse de démodécie. Les larves, de plus de 600 µm de longueur (625 à 650 µm de longueur), peuvent être reconnues par leur Œsophage rhabditiforme en trois parties (corps, isthme, bulbe) [3].

Dans les cas présents, les raclages auraient pu à la fois explorer l’hypothèse majeure de démodécie tout comme celle de nématodose cutanée, tout en accélérant le diagnostic. Aucun raclage n’a pour autant été effectué lors de la première visite, car l’hypothèse de folliculite bactérienne semblait la plus probable (compte tenu du résultat de l’examen cytologique du calque). Les biopsies ont ensuite été préférées lors des visites ultérieures.

Examen histopathologique

Les larves et, parfois, les femelles parthénogénétiques présentent un tropisme pour les follicules pileux et sont reconnaissables, notamment grâce à leurs ailes latérales paires [2]. Dans les cas présents, les larves étaient aussi observables dans les glandes sudoripares. L’examen histologique, bien que spécifique, demeure peu sensible car les larves n’apparaissent pas toujours dans les biopsies. Plusieurs sites de prélèvement biopsique ainsi que des coupes histologiques à plusieurs niveaux de profondeur augmentent la probabilité de détecter les parasites au sein des follicules pileux et des pyogranulomes. Le diagnostic de folliculite, de périfolliculite et de furonculose éosinophilique doit inciter à rechercher un parasite sous-jacent. Si la démodécie et la teigne sont les entités les plus fréquemment diagnostiquées, il convient également d’inclure les nématodoses larvaires cutanées dans le diagnostic différentiel, telles que l’ankylostomose (Ankylostoma caninum, A. braziliense, Uncinaria stenocephala), l’anguillulose (Strongyloides stercoralis), celle-ci étant plutôt observée dans les climats chauds, et l’infestation par les larves de Pelodera sp. Ces dernières présentent un tropisme pour les follicules pileux tandis que les autres nématodes sont plutôt responsables de trajets de migration larvaire associés à une dermatite périvasculaire à composante éosinophilique [3]. Toutefois, en médecine humaine, les ankylostomes sont parfois également retrouvés dans les follicules pileux [4].

Les coupes histologiques tangentielles des parasites ne permettent pas toujours de bien distinguer les critères de diagnose parasitaire et les larves de nématodes pourraient être confondues avec des fragments de tige pilaire ou des Demodex, par exemple, soulignant l’intérêt des coupes histologiques sériées.

Culture parasitaire

Les larves de parasites obtenues par raclage cutané peuvent être placées sur des géloses au sang à température ambiante. Les critères morphologiques des adultes ainsi obtenus permettent de confirmer l’espèce précise du parasite impliqué. Il convient d’attendre que la croissance bactérienne, florissante initialement, s’estompe pour que les nouvelles générations de Pelodera sp. colonisent la gélose [5].

5. Prise en charge thérapeutique

La dermatite à Pelodera sp. guérit spontanément si l’exposition au parasite cesse [3]. La mesure principale consiste à empêcher le contact cutané avec les larves. Les recommandations sont les suivantes, classées par ordre d’importance.

Nettoyer le couchage

Il est impératif de nettoyer le site de couchage et d’éliminer les végétaux en décomposition. La paille ou le foin peuvent être remplacés par des copeaux de bois, des tissus ou du papier, en insistant sur l’assèchement des lieux et l’éviction de l’humidité. L’application d’un désinfectant ou d’un antiparasitaire sur les sites de couchage et de transport complète le nettoyage. Certains auteurs conseillent le crésylol (Crésyl®) à des concentrations comprises entre 1 et 5 % dans l’eau [1].

Traitements locaux, voire systémiques

Les soins locaux consistent en des shampoings antiseptiques complétés par l’application d’un hydratant. En cas de prurit intense, la prescription de prednisolone, à la dose de 0,5 mg/kg/j par voie orale, pendant quelques jours, se révèle efficace [3]. Les cas avec infections bactériennes secondaires peuvent requérir une antibiothérapie topique ou systémique, qu’il convient de conduire de manière standard, c’est-à-dire en respectant une prescription raisonnée des antibiotiques telle que recommandée par les conseils scientifiques de dermatologues. Sauf cas particuliers, le premier choix s’oriente vers les antibiotiques de catégorie 1, habituellement efficaces contre les staphylocoques, en les administrant pendant au moins 3 à 4 semaines et en contrôlant leur efficacité à l’aide d’examens cytologiques cutanés répétés. Dans le premier cas présenté ici, le choix du second antibiotique n’est pas approprié en raison de l’absence de bactérie à Gram négatif au calque et de l’âge du chiot, qui est encore en croissance. À réception des résultats de l’antibiogramme, le choix d’une céphalosporine aurait été plus judicieux. Dans le second cas, la durée du traitement de 15 jours est plus courte que ce qui est recommandé, mais il a été prescrit en plus des soins topiques antiseptiques et du traitement de la cause primaire, à savoir l’infestation par Pelodera sp.

Traitement antiparasitaire

L’hygiène environnementale peut éventuellement être complétée par un traitement antiparasitaire à l’aide d’un endectocide ou d’un organophosphoré, même si cette mesure ne paraît pas indispensable. Il n’existe pas, à notre connaissance, de molécule disponible disposant d’une AMM pour l’indication de traitement contre Pelodera, mais l’ivermectine et les organophosphorés sont rapportés comme efficaces par Saari [5]. Dans les deux cas présentés, l’administration par voie sous-cutanée d’une avermectine s’effectue donc hors AMM. Dans le second cas, l’Ivomec Ovin® a été choisi en raison de son faible coût et de sa commodité d’utilisation dans un chenil d’une centaine d’animaux et paraît justifié en l’absence de formulation à base d’ivermectine chez le chien et en l’absence de données concernant les autres avermectines disponibles dans cette espèce. Dans le premier cas, l’utilisation d’une formulation destinée à une autre espèce (Cydectine ovin®) ne respecte pas la cascade puisque des antiparasitaires contenant de la moxidectine (Advocate®) sont disponibles dans l’espèce canine. Toutefois, compte tenu de la très faible efficacité de l’Advocate® envers Demodex spp. [données personnelles, D. Pin] situé, lui aussi, dans le follicule pileux, une autre présentation de moxidectine a été privilégiée.

L’apparition de la dermatite chez le premier chien, correctement déparasité, demeure surprenante et nous permet d’insister sur la mesure primordiale de gestion de cette parasitose, qui est de prévenir l’exposition via le site de couchage. Étant donné l’absence de lésion chez le second chien de la famille, exposé aux mêmes conditions d’environnement, et au vu du caractère fortement éosinophilique de la dermatite, il n’est pas exclu que l’animal affecté présente un terrain hypersensible ayant favorisé une réaction accrue au parasite.

Conclusion

Cet article décrit deux cas typiques de dermatite à P. strongyloides chez de jeunes chiens. Bien que rarement diagnostiquée, cette entité pathologique est présente en France et doit faire partie du diagnostic différentiel des dermatoses inflammatoires acquises des zones corporelles en contact avec le sol ou le couchage. Le diagnostic repose sur la mise en évidence des larves par raclage cutané ou l’examen histopathologique de biopsies cutanées. Ce dernier, bien que spécifique, est peu sensible et requiert des coupes sériées.

Références

  • 1. Bourdeau P. Cas de dermatite à rhabidités (Pelodera strongyloides) chez un chien. Point Vét. 1984;16(80):111-116.
  • 2. Gardiner CH, Poynton SL. An atlas of metazoan parasites in animal tissues. Gurnee, Charles Louis Davis Foundation. 1992:64p.
  • 3. Miller WH, Griffin CE, Campbell KL. Muller and Kirk’s Small animal dermatology, 7th ed. Elsevier, Saint Louis. 2012:289-293.
  • 4. Richey TK, Gentry RH, Fitzpatrick JE et coll. Persistent cutaneous larva migrans due to Ancylostoma species. South Med. J. 1996;89(6):609-611.
  • 5. Saari SAM, Nikander SE. Pelodera (syn. Rhabditis) strongyloides as a cause of dermatitis - a report of 11 dogs from Finland. Acta Vet. Scand. 2006;48(1):18.
  • 6. Sudhaus W, Schulte F. Rhabditis (Pelodera) “strongyloides” (Nematoda) als Verursacher von Dermatitis, mit systematischen und biologischen Bemerkungen über verwandte Arten. Zool. Jahrb. Syst. 1988;115:187-205.
  • 7. Taylor MA, Coop RL, Wall RL. Veterinary parasitology. 3rd ed. Wiley-Blackwell. 2007:874p.

Conflit d’intérêts

Aucun.

Points forts

→ Rare en France, la dermatite à Pelodera sp. fait partie du diagnostic différentiel clinique des dermatoses acquises des zones de contact avec le sol et histopathologique de la folliculite-furonculose éosinophilique, surtout chez un jeune chien.

→ Elle est caractérisée par une alopécie, un érythème, des papules et des croûtes sur les zones en contact avec le sol ou le couchage.

→ Le diagnostic repose sur la mise en évidence des larves dans le produit de raclages cutanés ou lors de l’examen histopathologique de biopsies cutanées.

→ Le traitement de cette dermatose repose sur une bonne hygiène et des soins locaux. L’évolution des conditions d’environnement peut entraîner des guérisons spontanées.

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