Le mastocytome cutané félin : une étude rétrospective fondée sur des cas provenant du Royaume-Uni - Le Point Vétérinaire expert canin n° 357 du 01/07/2015
Le Point Vétérinaire expert canin n° 357 du 01/07/2015

ONCOLOGIE FÉLINE

Analyse d’article

Auteur(s) : Charline Pressanti

Fonctions : Praticien hospitalier en dermatologie
INP-ENVT, 23, chemin des Capelles
31076 Toulouse Cedex

Le mastocytome cutané félin est une des tumeurs cutanées les plus fréquemment rencontrées et représente jusqu’à 21 % des tumeurs de la peau dans cette espèce [2, 5]. Souvent diagnostiquée chez des animaux âgés, cette tumeur peut toutefois être détectée chez des individus plus jeunes. Les causes précises du mastocytome ne sont pas réellement connues, en revanche, une prédisposition pour la race siamoise a été rapportée [1].

DONNÉES ACTUELLES SUR LE MASTOCYTOME FÉLIN

Chez le chat, il n’existe pas de grading histologique permettant d’établir un pronostic précis. Les tumeurs sont divisées en trois types : la première forme, bien différenciée, est mastocytaire, la deuxième, pléomorphe et mastocytaire, la dernière, dite atypique ou histiocytaire [3, 4, 6].

Bien que la première forme, bien différenciée, soit souvent guérie après une exérèse chirurgicale large, une faible proportion de ces masses peut avoir un comportement biologique agressif se traduisant par une rechute locale et une extension à distance.

Microscopiquement, le meilleur indicateur pronostic est l’index mitotique histologique. Plus celui-ci est élevé, moins l’évolution est favorable [4, 6]. Toutefois, l’index seul n’est pas obligatoirement suffisant et, dans ce cas, il doit être complété par l’évaluation de la forme clinique, la présence éventuelle de récidives et le bilan d’extension.

DONNÉES ISSUES DE L’ÉTUDE RÉTROSPECTIVE

Éléments épidémiologiques

Cette étude confirme l’apparition des mastocytomes cutanés majoritairement chez des animaux âgés. Le plus souvent, ils étaient situés sur la face et le cou en incluant les pavillons auriculaires. La race siamoise était surreprésentée. D’autres races, non encore mentionnées dans les publications scientifiques, étaient également rapportées dans cette étude rétrospective : il s’agissait du sacré de birmanie, du bleu russe et du ragdoll. Les chats de race semblaient prédisposés à développer un mastocytome plus précocement que les animaux âgés, mais la maladie n’était pas plus agressive.

L’âge moyen d’apparition rapporté dans les publications varie entre 8 et 10,5 ans. Dans cette étude, l’âge moyen était de 10,4 ans. L’âge moyen des chats présentant une forme agressive était plus élevé, ce qui correspondait aux données rapportées.

Éléments microscopiques

La grande majorité des mastocytomes inclus dans cette étude rétrospective était des formes mastocytaires bien différenciées. La forme non différenciée, pléomorphe représentait 20 % des tumeurs rapportées et les formes atypiques correspondaient à 8 % des cas. Ce pourcentage est inférieur aux données publiées précédemment (11 à 26 %), ce qui peut s’expliquer par le caractère rétrospectif de l’étude. Les formes histiocytaires ont pu être mal orientées, expliquant ainsi leur sous-estimation.

Un nouveau sous-type histologique a été établi dans cette étude. En effet, les auteurs ont décrit une forme bien différenciée présentant des cellules multinucléées. Celles-ci, ayant deux noyaux au moins, étaient surtout présentes en marge de la tumeur. Ce sous-type survenait chez des animaux âgés, parfois avec d’autres types histologiques. Parmi les 5 chats touchés par cette forme, 2 sont morts des suites de la tumeur dans les 2 années qui ont suivi le diagnostic et pour les 3 restant, les données n’ont pas été suffisamment exhaustives pour établir un lien entre le pronostic et le type histologique. La relation qui existe entre cet aspect histologique et l’évolution de la maladie nécessiterait des études plus poussées.

Dans une précédente publication, l’ensemble des mastocytomes agressifs étaient pléomorphes ou atypiques [6]. Cependant dans l’étude détaillée ici, aucune relation statistique n’a été notée entre le type histologique et l’évolution de l’affection suggérant que le mastocytome félin possède un comportement biologique variable et difficile à prédire. De nombreuses études ont suggéré qu’il existait une corrélation entre l’index mitotique et le pronostic [3, 6, 7]. Ce dernier élément a été confirmé ici. En effet, l’index mitotique était significativement plus élevé chez les animaux présentant une forme cliniquement agressive. Toutefois, les index étaient souvent superposés entre les groupes de chats, ainsi, cet index seul ne pouvait être utilisé pour établir définitivement le comportement tumoral.

LIMITES DE L’ÉTUDE

La nature rétrospective de l’étude a généré de nombreux biais. En effet, les données cliniques et l’évolution sont parfois imprécises et de nombreux cas n’ont pas pu être inclus par manque d’informations. Parmi les 287 tumeurs incluses initialement dans cette étude, seules 86 ont pu être finalement exploitées.

Conclusion

Cette étude confirme la difficulté rencontrée par les cliniciens pour prévoir le comportement biologique d’un mastocytome cutané félin. Bien que rétrospective, cette étude apporte la confirmation de l’intérêt de l’index mitotique et décrit un nouveau sous-type histologique au sein du groupe des mastocytomes différenciés, qui nécessiterait des essais plus approfondis.

Références

  • 1. Blackwood L, Murphy S, Buracco P et coll. European consensus document on mast cell tumours in dogs and cats. Vet. Comp. Oncol. 2012;10(3):e1-e29.
  • 2. Henry C, Herrera C. Mast cell tumors in cats: clinical update and possible new treatment avenues. J. Feline Med. Surg. 2013;15(1):41-47.
  • 3. Johnson TO, Schulman FY, Lipscomb TP, Yantis LD. Histopathology and biologic behavior of pleomorphic cutaneous mast cell tumors in fifteen cats. Vet. Pathol. 2002;39(4):452-457.
  • 4. Litster AL, Sorenmo KU. Characterisation of the signalment, clinical and survival characteristics of 41 cats with mast cell neoplasia. J. Feline Med. Surg. 2006;8(3):177-183.
  • 5. Miller MA, Nelson SL, Turk JR et coll. Cutaneous neoplasia in 340 cats. Vet. Pathol. 1991;28(5):389-395.
  • 6. Sabattini S, Bettini G. Prognostic value of histologic and immunohistochemical features in feline cutaneous mast cell tumors. Vet. Pathol. 2010;47(4):643-653.
  • 7. Sabattini S, Guadagni Frizzon M, Gentilini F et coll. Prognostic significance of kit receptor tyrosine kinase dysregulations in feline cutaneous mast cell tumors. Vet. Pathol. 2013;50(5):797-805.

Conflit d’intérêts

Aucun.

RÉSUMÉ

CONTEXTE

Le mastocytome cutané félin est la seconde tumeur cutanée la plus fréquente chez le chat. Dans cette espèce, il n’existe pas de critères cliniques et/ou histologiques précis permettant d’établir l’évolution de la tumeur.

OBJECTIF

L’objectif de cette étude rétrospective était d’analyser les données cliniques et microscopiques des chats atteints de mastocytome, afin de dégager des éléments permettant d’affiner le pronostic.

MÉTHODES

Les tumeurs ont été sélectionnées au sein d’un laboratoire d’anatomie pathologique du Royaume-Uni entre 2006 et 2011. Pour chacun des cas sélectionnés, les données anamnestiques ont été recueillies ainsi que l’évolution sur une durée de 2 ans au moins après le diagnostic.

RÉSULTATS

• 86 tumeurs de 69 animaux ont été rapportées.

• Parmi ces cas, 17,4 % sont morts des suites du mastocytome.

• L’âge moyen au moment du diagnostic était de 11 ans. Aucune prédisposition de sexe n’a été établie.

• Certaines races étaient plus souvent rapportées : le siamois, le sacré de birmanie, le bleu russe et le ragdoll.

• La tête était plus souvent touchée chez les jeunes alors qu’il s’agissait du tronc chez les chats âgés.

• Le nombre de tumeurs n’influençait pas le devenir de l’animal.

• Lors de l’analyse histologique, 66 % des tumeurs étaient classées comme bien différenciées. Au sein de cette catégorie, un sous-groupe a été identifié présentant des cellules multinucléées sans autre atypie majeure. 5,8 % des tumeurs présentaient ces caractéristiques. 19,8 % étaient pléomorphes et 8,1 % atypiques.

CONCLUSION

Cette étude confirme la difficulté d’établir un pronostic chez le chat à partir des données cliniques et microscopiques.

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