Hyperparathyroïdie primaire traitée par chirurgie chez le chien - Le Point Vétérinaire expert canin n° 347 du 01/07/2014
Le Point Vétérinaire expert canin n° 347 du 01/07/2014

ENDOCRINOLOGIE CANINE

Cas clinique

Auteur(s) : Amandine Boisseleau*, Marc Dhumeaux**, Renaud Jossier***, Philippe Haudiquet****

Fonctions :
*Clinique VetRef
7, rue James-Watt
49070 Angers Beaucouzé
**Clinique VetRef
7, rue James-Watt
49070 Angers Beaucouzé
***Clinique VetRef
7, rue James-Watt
49070 Angers Beaucouzé
****Clinique VetRef
7, rue James-Watt
49070 Angers Beaucouzé

Les signes cliniques d’hyperparathyroïdie primaire étant frustes, la réalisation d’examens complémentaires est indispensable pour orienter le diagnostic. Lors de tumeur parathyroïdienne, le tissu hypersécrétant doit être retiré chirurgicalement.

Face à un amaigrissement important sur un animal relativement âgé, il s’est avéré pertinent d’effectuer un dosage de la calcémie qui a permis d’orienter le diagnostic vers une hyperparathyroïdie primaire. Le traitement de cette affection est chirurgical et la stabilisation de la calcémie est un véritable enjeu nécessitant des soins intensifs.

CAS CLINIQUE

Une chienne rottweiler stérilisée âgée de 8,5 ans est présentée pour un amaigrissement chronique.

1. Commémoratifs et anamnèse

La chienne est correctement vaccinée et vermifugée. Elle a présenté un épisode de boiterie du membre postérieur droit 2 semaines auparavant, qui a rétrocédé après 1 semaine de repos. L’animal a perdu 8 kg en 1 mois et n’a pas mangé depuis 4?jours. Il présente des vomissements depuis 1 semaine. Les propriétaires rapportent une polyuro-polydipsie (PUPD).

2. Examen clinique

La chienne est en mauvais état général. Son score d’état corporel est estimé à 2/9. Elle présente une amyotrophie et des tremblements musculaires, notamment sur les membres pelviens. Elle est faible et sa démarche est raide. Une douleur est mise en évidence à la palpation de toutes les articulations et à la flexion latérale droite et gauche du cou. Aucune adénomégalie superficielle n’est palpable. Le reste de l’examen clinique est normal.

3. Hypothèses diagnostiques

Le tableau clinique oriente vers une maladie cachectisante chronique associée à une atteinte ostéo-articulaire diffuse. À ce stade, les hypothèses diagnostiques sont multiples et comportent :

– une affection du tube digestif (gastrite, maladie inflammatoire chronique de l’intestin, néoplasie) ;

– un dysfonctionnement organique (atteinte hépatique, rénale ou pancréatique) ;

– un trouble endocrinien ;

– une arthrite (infectieuse, réactive ou auto-immune) ;

– une maladie musculaire, une polyneuropathie ;

– un syndrome paranéoplasique.

Un bilan sanguin complet, une analyse d’urine, ainsi que des radiographies articulaires et du rachis cervical sont réalisés dans un premier temps.

4. Examens complémentaires

Analyses sanguines

Le bilan biochimique révèle une hypercalcémie sévère, une hypophosphatémie légère, une hypercholestérolémie légère à modérée et une petite augmentation de l’alanine aminotransférase. Les paramètres rénaux (urée et créatinine) sont dans les valeurs usuelles (tableau 1).

Analyse d’urine

Une analyse d’urine est indiquée pour évaluer la fonction rénale, et rechercher une infection urinaire et/ou la présence de cristaux, relativement fréquentes en cas d’hyperparathyroïdie [2].

L’urine est isosthénurique (densité de 1,012). La bandelette urinaire montre des traces de protéines. Aucun élément cellulaire, bactérien ni cristallin n’est visible à l’examen microscopique du culot urinaire.

Imagerie médicale

Les radiographies osseuses des carpes et du rachis cervical sont normales. Aucun signe d’ostéopénie n’est visible, notamment.

En raison de la possibilité d’une hyperparathyroïdie primaire (HPP) à l’origine de l’hypercalcémie, une échographie cervicale est indiquée à la recherche d’une ou de plusieurs glandes parathyroïdes anormales.

L’échographie cervicale met en évidence un nodule parathyroïdien hypoéchogène, homogène et bien délimité, de 4,6 mm de diamètre, situé au pôle cranial de la glande thyroïde gauche (photo 1). Cette image est en faveur d’une tumeur bénigne ou maligne parathyroïdienne. La présence d’une masse potentiellement maligne justifie la réalisation d’un bilan d’extension (radiographies thoraciques, échographie abdominale) qui se révèle négatif.

À ce stade, une hyperparathyroïdie primaire due à la présence d’un nodule parathyroïdien est fortement suspectée. Un échantillon de plasma sur EDTA (acide éthylène diamine tétra-acétique, ethylene diamine tetraacetic acid), un anticoagulant, est envoyé au laboratoire sous couvert du froid pour une mesure de la parathormone (PTH). En raison de l’état critique de la chienne, une exérèse chirurgicale du nodule parathyroïdien a été décidée avant d’obtenir les résultats d’analyses. La concentration en PTH, reçue quelques jours après l’intervention chirurgicale, est supérieure aux valeurs usuelles du laboratoire à 21,22 pmol/l (normal : de 2 à 13 pmol/l), confirmant le diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire.

5. Traitement médical

Une fluidothérapie intraveineuse à 100 ml/kg/h au NaCl 0,9 % est mise en place, permettant une diminution significative de la calcémie (de 230 à 151 mg/l en 3 jours), avant l’ablation du nodule parathyroïdien. Un traitement analgésique (perfusion continue de morphine [Morphine Cooper®(1)] à 0,1 0mg/kg/h) est également instauré contre les douleurs articulaires.

Du calcitriol (Rocaltrol®(1), 0,25 mg à 0,01 mg/kg/j par voie orale) est administré 48 heures avant l’intervention chirurgicale.

6. Traitement chirurgical

Anesthésie

Une prémédication est réalisée à l’aide d’acépromazine (Calmivet®), à la dose de 0,05 mg/kg, et de chlorhydrate de morphine (Morphine Cooper®), à celle de 0,1 mg/kg par voie sous-cutanée. Une antibioprophylaxie à base d’amoxicilline (Clamoxyl®(1)) est mise en place à la dose de 20 mg/kg par voie intraveineuse. Trente minutes plus tard, l’induction est effectuée avec du thiopental (Nesdonal®(1)) à la dose de 10 mg/kg par voie intraveineuse. L’animal est intubé et un relais anesthésique gazeux est instauré à l’aide d’un mélange d’oxygène et d’isoflurane (Forène®(1)).

Intervention chirurgicale

L’intervention chirurgicale consiste à retirer le nodule parathyroïdien sur la glande parathyroïde craniale gauche. La chienne est placée en décubitus dorsal, le cou en extension. Une incision est réalisée dans le plan sagittal, s’étendant du cartilage thyroïde jusqu’au milieu de la trachée cervicale.

Les muscles sterno-hyoïdien et sterno-céphalique sont écartés de la trachée par une dissection fine. La glande thyroïde gauche est repérée et isolée. À l’avant de celle-ci, un gros nodule de couleur plus blanche est mis en évidence (photo 2). Correspondant à l’image échographique, il est identifié comme la glande parathyroïde craniale gauche. Une dissection fine est réalisée autour de ce nodule à l’aide d’un bistouri électronique monopolaire, en préservant au maximum le tissu thyroïdien et sa vascularisation (photo 3). Le nodule est complètement séparé de la glande thyroïde gauche et soumis à une analyse histologique (photo 4).

Les muscles sterno-hyoïdien et sterno-céphalique sont rapprochés et suturés. Deux surjets sont réalisés dans les plans sous-cutané et cutané.

L’analyse histologique du nodule, reçue une semaine après l’intervention chirurgicale, permet d’établir le diagnostic d’adénocarcinome parathyroïdien (photo 5). L’exérèse apparaît histologiquement complète.

7. Évolution postopératoire

État général

Le lendemain de l’intervention chirurgicale, une boiterie du membre postérieur gauche est constatée, avec un déficit proprioceptif marqué, un réflexe de flexion nettement diminué et un réflexe patellaire normal (photo 6). L’examen neurologique est en faveur d’une lésion du nerf sciatique gauche sur son trajet à partir des émergences rachidiennes L6-L7, L7-S1 et S1-S2.

Examen radiographique

Une radiographie du rachis lombo-sacré révèle la présence d’une sclérose des plateaux vertébraux et une lésion de spondylose en regard de l’espace intervertébral L7-S1, sans signe d’ostéopénie. Ces images sont en faveur d’une instabilité lombo-sacrée. Un scanner du rachis lombo-sacré a été recommandé, mais il a été décliné par les propriétaires pour des raisons financières.

Calcémie et phosphatémie

La calcémie et la phosphatémie ont été contrôlées régulièrement pendant et après l’hospitalisation (figure). La calcémie a diminué progressivement jusqu’à être comprise dans les valeurs de référence dès le lendemain de l’intervention chirurgicale. La chienne est très stressée lors de son hospitalisation et un retour sur son lieu de vie a été envisagé 5 jours après l’opération afin d’optimiser son confort et la reprise de l’appétit. Deux jours après la sortie d’hospitalisation, les analyses sanguines ont révélé une hypocalcémie légère (90 mg/l) et une hypophosphatémie sévère (7,79 mg/l). Une supplémentation en calcium (carbonate de calcium 500 mg, 30 mg/kg/j en deux prises par voie orale) et en phosphore (Phosphoneuros®, 50 gouttes par jour par voie orale, soit environ 0,02 mg/kg d’acide phosphorique concentré et 0,02 mg/kg de phosphate disodique) a alors été débutée. La calcémie s’est stabilisée à 90 mg/l et la phosphatémie a augmenté au contrôle réalisé 2?jours après. La supplémentation est poursuivie, tout en conservant l’apport de calcitriol. À ce stade, l’appétit de la chienne est toujours diminué, justifiant l’ajout d’un stimulant de celui-ci (Cyproheptadine® 1 mg/kg/j en deux prises).

La chienne meurt brutalement sur son lieu de vie 3 jours après le dernier contrôle, soit 7 jours après sa sortie d’hospitalisation. La cause de la mort n’a pu être déterminée. Les propriétaires n’ont pas souhaité la réalisation d’une autopsie.

DISCUSSION

1. Étiologie de l’hyperparathyroïdie

L’hyperparathyroïdie primaire est relativement rare chez le chien. Elle est secondaire à une activité endocrinienne anormalement élevée d’une (90 % des cas) ou de plusieurs (10 % des cas) glandes parathyroïdes [11, 16]. Cette sécrétion anormale est secondaire à trois types d’anomalies histologiques : carcinome, adénome ou hyperplasie parathyroïdienne. Le pourcentage exact de chaque type histopathologique lors d’HPP n’est pas connu chez le chien, mais l’adénome est le plus fréquent (environ 90 %) et le carcinome le plus rare [5].

2. Physiopathologie

L’hypersécrétion de PTH augmente de façon directe la résorption osseuse de calcium. Elle active la prolifération des ostéoclastes, à l’origine d’un remodelage osseux [1]. Le tissu osseux peut être remplacé par du tissu fibreux, surtout en regard des os maxillaires et mandibulaires et du rachis. La PTH accroît également la production de calcitriol (forme active de la vitamine D) par le rein, à l’origine de l’augmentation de l’absorption intestinale de calcium [11]. L’élévation de la PTH inhibe aussi la sécrétion calcique par les reins, ce qui aggrave l’hypercalcémie. La PTH joue également un rôle important dans l’excrétion rénale de phosphore. Dans le cas rapporté ici, la phosphatémie était légèrement inférieure à l’intervalle de référence lors de la présentation initiale, ce qui est fréquent lors d’HPP. Cependant, une augmentation de la phosphatémie n’a pas été observée après l’ablation de la masse parathyroïdienne. Une supplémentation en phosphore a même été requise dans les jours qui ont suivi l’intervention chirurgicale.

3. Signes cliniques

Les signes cliniques de l’HPP sont généralement d’évolution lente. Ils sont dus à l’augmentation progressive de la calcémie (tableau 2).

La chienne dont le cas est rapporté ici en présentait quelques-uns, tels qu’une anorexie, un abattement, une perte de poids, une PUPD, des vomissements et des trémulations musculaires, associés à une hypercalcémie sévère (230 mg/l).

Le produit de la calcémie et de la phosphatémie (Ca x P en mg/dl) est un indicateur du risque de minéralisation des tissus mous lors d’hypercalcémie, qui est considéré comme important lorsque ce produit excède 60 à 70 [9]. Or, comme il a été constaté ici, le phosphore a tendance à diminuer en cas d’HPP, minimisant l’augmentation du produit Ca x P. Le risque de minéralisation ectopique est donc moindre lors d’HPP que dans d’autres cas d’hypercalcémie maligne.

4. Diagnostic

Hypercalcémie

Il existe différentes causes d’hypercalcémie chez le chien (tableau 3). Les signes cliniques d’HPP étant souvent frustes et les masses parathyroïdiennes rarement palpables, la réalisation d’examens complémentaires est indispensable pour orienter le diagnostic [1, 11]. En cas d’HPP, le calcium total est systématiquement élevé, et généralement compris entre 120 et 140 mg/l [1]. Dans notre cas, l’hypercalcémie était particulièrement sévère (> 180 mg/l à l’admission). Idéalement, il est préférable de mesurer le calcium ionisé plasmatique qui correspond à la fraction active du calcium total. En effet, dans 27 % des cas, le calcium total n’est pas en adéquation avec le calcium ionisé. Par exemple, en cas d’acidose métabolique, la fraction ionisée du calcium est augmentée, ce qui aggrave l’hypercalcémie. Selon une étude récente, il est déconseillé d’utiliser des formules de correction du calcium total selon la protéinémie ou l’albuminémie. La mesure du calcium ionisé doit être réalisée dans des conditions anaérobies strictes et nécessite généralement un laboratoire spécialisé.

Le phosphore est diminué dans environ 65 % des cas d’HPP, comme chez cette chienne [4].

Lors d’HPP, la radiographie, voire le scanner sont indiqués afin d’évaluer la densité osseuse. Un amincissement des corticales et une diminution diffuse de la densité de la trame osseuse sont alors recherchés, difficilement mis en évidence dans les stades précoces. Dans notre cas, aucun signe d’ostéopénie n’a été visualisé à l’examen radiographique.

Mesure de la PTH

Une mesure de la PTH est requise pour établir le diagnostic définitif d’HPP. Dans les conditions normales, une augmentation de la calcémie provoque une inhibition de la production de PTH par les glandes parathyroïdes, à l’origine d’une concentration plasmatique en PTH basse, voire à peine détectable [4]. En cas d’hypercalcémie, une HPP est donc confirmée lorsque la PTH est supérieure (comme dans notre cas) ou dans les valeurs de référence, c’est-à-dire entre 2 et 13 pmol/l pour la plupart des laboratoires [1, 4]. Dans une étude récente, 73 % des cas d’HPP présentaient une PTH dans les valeurs de référence [4]. Dans les deux cas, cela suppose une production anormalement élevée de cette hormone par les parathyroïdes. En revanche, une concentration en PTH en dessous de l’intervalle de référence permet d’exclure l’HPP du diagnostic différentiel d’hypercalcémie.

Échographie cervicale

L’échographie de la région cervicale permet de détecter une ou plusieurs glandes parathyroïdes de taille augmentée [4]. La sensibilité de cet examen est considérée comme excellente (environ 99 %), mais elle dépend en grande partie de l’expérience de l’échographiste [1]. Dans notre cas, la visualisation d’un nodule parathyroïdien à l’échographie cervicale, associée à l’hypercalcémie, ainsi que le mauvais état général de la chienne ont motivé l’exérèse chirurgicale de ce dernier, avant même de connaître le taux de PTH.

Peptide apparenté à l’hormone parathyroïdienne

Il peut être intéressant de mesurer le taux de peptide apparenté à l’hormone parathyroïdienne (parathyroid hormone-related peptide, PTH-rp) qui permet parfois d’identifier une hypercalcémie d’origine tumorale (encadré 1 complémentaire sur lepointveterinaire.fr). En France, il n’existe pas de dosage spécifique du PTH-rp pour les chiens, lequel peut éventuellement être réalisé à partir d’un kit destiné aux rats.

Analyse histologique

Une analyse histopathologique de la glande après son exérèse est requise pour établir un diagnostic définitif et préciser le pronostic [11].

5. Traitement

En cas de tumeur parathyroïdienne, la prise en charge classique consiste en l’exérèse chirurgicale du tissu hypersécrétant [1]. D’autres traitements moins courants sont possibles dans certains cas (encadré 2).

Avant toute anesthésie, il convient tout d’abord d’éliminer les complications de l’hypercalcémie. Un électrocardiogramme est conseillé afin de pallier d’éventuelles arythmies secondaires. Il est recommandé de perfuser les animaux avec une solution de NaCl à 0,9 %, qui est dépourvu de calcium et qui favorise la calciurèse [15]. Chez cette chienne, la perfusion a permis une diminution significative de la calcémie et une amélioration de l’état général. Lors de crise d’hypercalcémie, une administration du furosémide (2 à 4 mg/kg, toutes les 8 à 12 heures), en association avec la perfusion, est parfois requise afin d’augmenter la calciurèse. D’autres molécules sont susceptibles de diminuer la calcémie : les corticoïdes, la calcitonine, les biphosphonates (clodronate ou pamidronate), qui ont une action inhibitrice sur la fonction et la viabilité des ostéoclastes, et la cimétidine [15].

Gestion postopératoire

La gestion postopératoire inclut un suivi attentif de la calcémie. Il est en effet fréquent qu’une hypocalcémie apparaisse dans les 1 à 6 jours qui suivent l’intervention chirurgicale (dans 37 à 58 % des cas selon les études) [10, 15]. Les glandes parathyroïdes non atteintes sont souvent atrophiées et leur production de PTH en quantité suffisante après l’ablation de la glande hypersécrétante peut prendre quelques jours. Cependant, les signes cliniques d’hypocalcémie sont rares (11 %). La principale expression clinique de celle-ci est la tétanie, mais des symptômes préalables tels que le prurit facial sont parfois remarqués [2]. Il est conseillé de garder l’animal hospitalisé pendant au moins 5 jours après l’intervention chirurgicale pour surveiller la calcémie et limiter son activité.

Le risque d’hypocalcémie postopératoire dépend de la durée et de la sévérité de l’hypercalcémie avant la procédure chirurgicale (encadré 3, tableau 4).

La vitamine D permet l’absorption intestinale du calcium. Son rôle dans la gestion postopératoire de la calcémie est donc primordial. La supplémentation en vitamine D sans supplémentation calcique peut être suffisante lorsque les animaux reçoivent une alimentation contenant une quantité normale de calcium. Une simple supplémentation en calcium par voie orale sans supplémentation en vitamine D pourrait être infructueuse. Dans notre cas, la chienne refusait de s’alimenter de façon suffisante. La supplémentation calcique par voie orale a donc été considérée comme nécessaire.

À mesure que les glandes parathyroïdes restantes prennent le relais dans le contrôle de l’homéostasie calcique, la dose de vitamine D peut être graduellement diminuée et les dosages de calcémie sont espacés sur 2 à 6 mois [1]. La stabilisation de la calcémie peut prendre plusieurs mois à la suite de l’intervention chirurgicale [4].

6. Pronostic

Lors de tumeur bénigne parathyroïdienne

Le pronostic à long terme après le retrait de la tumeur parathyroïdienne est normalement excellent si l’exérèse est complète. L’hypocalcémie postopératoire peut généralement être anticipée, traitée et correctement corrigée. La supplémentation en vitamine D et en calcium permet de prévenir l’apparition des signes cliniques d’une hypocalcémie [4]. Quelle que soit la technique utilisée, la parathyroïdectomie permet un contrôle de la calcémie sur une durée médiane de 561 jours dans plus de 90 % des cas [10].

Lors d’adénocarcinome parathyroïdien

Lors d’adénocarcinome parathyroïdien, le pronostic est en théorie réservé en raison des risques de métastases et de récidive lorsque l’exérèse est incomplète. Cependant, les métastases d’adénocarcinome parathyroïdien sont considérées comme rares. Une étude récente sur 19 chiens a montré que la médiane de survie à 1, 2 et 3 ans à la suite de l’exérèse d’un adénocarcinome parathyroïdien était respectivement de 72 %, 37 % et 30 % [3, 8].

Dans le cas de cette chienne

L’anorexie persistante de la chienne a motivé l’instauration d’un traitement à la cyproheptadine. La mort étant survenue peu de temps après l’introduction de ce médicament, l’implication de celui-ci a été envisagée. Cependant, cette molécule est connue pour la rareté de ses effets secondaires par rapport aux autres anti-histaminiques. Les effets secondaires graves n’apparaîtraient qu’en cas de surdosage sévère, ce qui n’a pas été le cas [8]. De plus, chez l’homme, la cyproheptadine n’a pas d’influence notoire sur la sécrétion de PTH, ni sur les concentrations en calcium, en phosphore et en magnésium [6]. Son imputation est donc peu probable. En revanche, malgré un bilan d’extension négatif, la présence de métastases à distance de l’adénocarcinome parathyroïdien, notamment dans l’encéphale, serait possiblement à l’origine de la mort prématurée de l’animal. L’apparition d’une boiterie du membre pelvien pouvait également être la manifestation de métastases osseuses ou nerveuses, suggérant une généralisation du cancer. Une autopsie aurait été nécessaire pour vérifier ces hypothèses, mais elle n’a pas été souhaitée par les propriétaires.

Conclusion

L’hypercalcémie peut provenir d’affections variées, parmi lesquelles l’HPP. Cette dernière est une maladie endocrinienne dont le traitement est à présent bien connu et qui permet d’obtenir habituellement de très bons résultats. La période postchirurgicale est délicate et requiert un suivi régulier de l’animal pour prévenir ou limiter le risque d’hypocalcémie. Lors de tumeur maligne, le pronostic est plus réservé.

  • (1) Médicament humain.

Références

  • 1. Bonagura JD, Twedt DC. Canine hypercalcemia and primary hyperparathyroidism. In: Kirk’s current veterinary therapy XIV. Elsevier Saunders, St. Louis. 2009:247-251.
  • 2. Ettinger SJ. Evaluation of preoperative serum concentrations of ionized calcium and parathyroid hormone as predictors of hypocalcemia following parathyroidectomy in dogs with primary hyperparathyroidism: 17 cases (2001-2009). J. Am. Vet. Med. Assoc. 2012;241 (2):233-236.
  • 3. Ettinger SJ. Outcome of 19 dogs with parathyroid carcinoma after surgical excision. In: Textbook of veterinary internal medicine. 7th ed. 2010:http://www.expertconsultbook.com.
  • 4. Feldman EC. Disorders of the parathyroid glands. In: Textbook of veterinary internal medicine. 7th ed. Vol. 2. Elsevier Saunders. 2010:1722-1743.
  • 5. Feldman EC, Nelson RW. Hypercalcemia and primary hyperparathyroidism. In: Feldman EC, Nelson RW, eds. Canine and feline endocrinology and reproduction. 3rd ed. WB Saunders, St. Louis. 2004:661-713.
  • 6. Gedik O, Usman A, Telatar F et coll. Failure of cyproheptadine to affect calcium homeostasis and PTH levels in primary hyperparathyroidism. Horm. Metab. Res. 1983;15 (12):616-618.
  • 7. Goldstein RE, Atwater DZ, Cazolli DM et coll. Inheritance, mode of inheritance and candidate genes for primary hyperparathyroidism in keeshonden. J. Vet. Intern. Med. 2007;21 (1):199-203.
  • 8. Hargrove V, Molina DK. A fatality due to cyproheptadine and citalopram. J. Anal. Toxicol. 2009;33 (8):564-567.
  • 9. Morrow CK, Vomer PA. Hypercalcemia, hyperphosphatemia, and soft-tissue mineralization. Comp. Cont. Educ. Pract. 2002;24 (5):380-388.
  • 10. Rasor L, Pollard R, Feldman EC. Retrospective evaluation of three treatment methods for primary hyperparathyroidism in dogs. J. Am. Anim. Hosp. Assoc. 2007;43 (2):70-77.
  • 11. Sakals SA, Gillick MS. Diagnosing the etiology of hypercalcemia in a dog: A case of primary hyperparathyroidism. Vet. Pathol. 2010;47 (3):579-581.
  • 12. Sawyer ES, Northrup NC, Schmiedt CW et coll. Outcome of 19 dogs with parathyroid carcinoma after surgical excision. Vet. Comp. Oncol. 2012;10 (1):57-64.
  • 13. Schenk PA. Electrolytes disorders. In: Textbook of veterinary internal medicine. 7th ed. Vol. 1. Elsevier Saunders. 2010:313.
  • 14. Schenck PA, Chew DJ. Calcium: total or ionized? Vet. Clin. North Am. Small Anim. Pract. 2008;38:497-502.
  • 15. Slatter DH. Textbook of small animal surgery. 3rd ed. Vol. 2. Saunders. 2002:1532-1534.
  • 16. Ward CR. Primary hyperparathyroidism. Standard of care: emergency and critical care medicine. 2006;8 (5):8-11.
  • 17. Withrow SJ, Vail DM, Page R. Withrow’s and MacEwen’s small animal clinical oncology. 4th ed. Elsevier Saunders. 2007:592-595.

Conflit d’intérêts

Aucun

Points forts

→ Le diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire nécessite une méthodologie par étapes face à un tableau clinique peu spécifique.

→ En cas d’hypercalcémie, une concentration en parathormone élevée ou normale permet d’établir le diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire.

→ Un suivi attentif de la calcémie est primordial à la suite de l’exérèse du nodule parathyroïdien.

→ Contrairement aux tumeurs parathyroïdiennes bénignes, l’adénocarcinome parathyroïdien est de pronostic réservé, en raison du risque de métastases et de récidives locales.

ENCADRÉ 2
Traitement non chirurgical des tumeurs parathyroïdiennes

→ Les options non chirurgicales pour le traitement d’une hyperparathyroïdie primaire (HPP) sont l’ablation chimique transcutanée à l’éthanol de la glande affectée ou l’ablation thermique transcutanée échoguidée [11]. La première n’est plus conseillée en raison des risques encourus lors d’extravasation d’éthanol dans les tissus adjacents, pouvant entraîner une paralysie du larynx par lésion du nerf laryngé récurrent.

→ L’ablation thermique de la parathyroïde est considérée comme le traitement de choix par certains auteurs. En effet, l’anesthésie requise est plus courte, la procédure est moins invasive que la chirurgie et une résolution de l’HPP est obtenue dans 92 % des cas [1]. Cependant, cette technique est déconseillée lorsque la masse parathyroïdienne est trop petite pour y insérer une aiguille et que la parathyroïde est trop proche de la carotide [1]. Pour chaque méthode utilisée, la majorité des chiens retrouve une calcémie normale dans les 48 heures qui suivent le traitement [10].

ENCADRÉ 3
Risque d’hypocalcémie en période postopératoire

La valeur de la calcémie avant l’intervention chirurgicale détermine le risque d’hypocalcémie postopératoire.

→ Si la calcémie est inférieure à 140 mg/l avant l’opération, le risque d’hypocalcémie postopératoire est considéré comme faible. La complémentation en vitamine D n’est nécessaire que si la calcémie descend en dessous de 80 mg/l [1].

→ Si la calcémie est supérieure à 180 mg/l avant l’intervention chirurgicale, comme dans le cas de cette chienne, il est conseillé de débuter un traitement à base de vitamine D (calcitriol à la dose de 20 à 30 ng/kg/j) 24 à 36 heures avant l’acte opératoire (l’effet maximal est obtenu après 4 à 7 jours de traitement [4]). Si la calcémie descend en dessous de 80 mg/l, il convient de supplémenter l’animal en calcium.

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