MÉDECINE INTERNE CANINE
Analyse d’article
Auteur(s) : Magalie Decome
Fonctions : Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godard
33300 Bordeaux
La thrombopénie à médiation immune est un trouble hématologique sérieux et relativement commun en médecine vétérinaire. Elle est le résultat de la fixation d’anticorps antiplaquettaires à la surface des plaquettes, initiant leur phagocytose [3]. Des risques d’hémorragie sévère apparaissent lorsque la numération plaquettaire est inférieure à 40 000/µl, et plus particulièrement à moins de 15 000/µl [1, 7]. L’objectif du traitement est d’augmenter le nombre de plaquettes au-delà du seuil de 40 000/µl, et ce rapidement et avec un minimum d’effets secondaires [7].
Une thrombopénie à médiation immune est primaire ou secondaire à un stimulus antigénique connu (néoplasique, infectieux ou médicamenteux) [2, 3]. Les techniques de détection des autoanticorps antiplaquettaires possèdent des sensibilités et des spécificités variables, et sont peu disponibles en pratique, raisons pour lesquelles leur utilisation reste limitée [3]. Les méthodes telles que le test Elisa et la cytométrie de flux sont décrites. Toutefois, la détection de complexes immuns (anticorps-plaquette) permet de déterminer une origine immunitaire, sans qu’elle soit spécifique d’un processus primaire [4].
Le diagnostic de thrombopénie à médiation immune primaire est très souvent un diagnostic d’exclusion et dépend de la réponse au traitement, comme dans l’article étudié.
Les chiens pour lesquels un diagnostic de thrombopénie à médiation immune primaire est suspecté présentent un comptage plaquettaire médian significativement plus bas que les individus atteints d’un processus secondaire [4].
Une numération plaquettaire inférieure à 15 000 à 20 000 plaquettes/µl constitue un critère d’inclusion incontournable pour la plupart des études [1-3, 7].
Afin d’établir un diagnostic de présomption, il convient d’exclure une exposition récente à des médicaments, à des vaccins ou à des toxiques [2, 5]. Un processus néoplasique ou infectieux éventuel doit être écarté. Il est conseillé de procéder à des examens d’imagerie (échographie abdominale et radiographies thoraciques), à des analyses sanguines et urinaires (numération et formule sanguines, profil biochimique, profil de coagulation) et à un myélogramme [1-3, 6, 7]. Les agents pathogènes infectieux (Dirofilaria immitis, Ehrlichia canis, Rickettsia rickettsii, Anaplasma phagocytophilum, Babesia canis, Leishmania infantum, Leptospira spp.) doivent être recherchés de façon appropriée via la réalisation de sérologies ou de PCR (polymerase chain reaction) [1, 2, 7, 8].
Le traitement repose sur la mise en place d’un immunosuppresseur, les principaux étant les glucocorticoïdes. La vincristine est employée occasionnellement en médecine humaine de façon concomitante des corticoïdes dans le traitement de cette maladie [1, 7]. Selon une étude comparant l’utilisation de prednisolone seule à l’association prednisolone (1,5 à 2 mg/kg per os deux fois par jour) et vincristine (dose unique de 0,02 mg/ kg par voie intraveineuse) chez le chien, il semble que l’administration combinée de ces deux molécules entraîne une diminution du temps de renouvellement plaquettaire (4,9 +/- 1,1 jours versus 6,8 +/- 4,5 jours) et une durée d’hospitalisation plus courte (5,4 +/- 0,3 jours versus 7,3 +/- 0,5 jours) [7]. Dans l’article étudié ici, le temps de renouvellement plaquettaire est de 2,5 jours seulement, pour une durée d’hospitalisation moyenne comparable à celle des études précédentes [1]. Le mécanisme d’action de la vincristine dans cette indication est encore peu compris, mais il semble qu’elle stimule la thrombopoïèse en accélérant la fragmentation mégacaryocytaire et diminue la destruction plaquettaire en limitant leur phagocytose. [1, 7].
L’immunoglobuline humaine intraveineuse (hIVIG) correspond à une préparation d’immunoglobulines contenant des IgG et des traces d’IgM, d’IgA, de CD4 et de CD8. Elle est extraite d’un pool de plasma de donneurs sains. L’hIVIG aurait des propriétés anti-inflammatoires. Cette molécule se fixe aux récepteurs Fc des cellules phagocytaires mononucléées, empêchant leur destruction [1-3]. De façon comparable à la vincristine, l’administration combinée d’hIVIG et de prednisolone permet la réduction des temps de renouvellement plaquettaire et d’hospitalisation par rapport à la prednisolone seule [2]. Dans l’article étudié ici, il n’existe pas de différence significative entre l’emploi de vincristine et celui de l’hIVIG en association avec de la prednisolone [1]. L’hIVIG est administrée à des doses de 0,28 à 0,76 g/kg dans les publications et de 0,5 g/kg dans l’article présent [1-3]. Cependant, l’hIVIG est peu disponible et onéreuse. Très peu d’effets indésirables sont décrits concernant la vincristine ou l’hIVIG.
La thrombopénie à médiation immune primaire est une affection qui peut engager le pronostic vital de l’animal. Un temps de renouvellement plaquettaire court est primordial dans la prise en charge des cas sévères. L’utilisation de la vincristine ou de l’hIVIG en association avec de la prednisolone permet de diminuer les temps de renouvellement plaquettaire et d’hospitalisation des animaux de façon significative, bien que les études reposent sur de petits échantillonnages d’individus. Peu de données à long terme sont disponibles actuellement. L’hIVIG, pour son efficacité similaire à la vincristine, est un traitement prometteur, mais peu disponible en pratique.
Aucun.
OBJECTIF
Comparer les effets de l’hIVIG (immunoglobuline humaine intraveineuse) et de la vincristine sur le temps de renouvellement plaquettaire, la durée d’hospitalisation, la nécessité de réaliser une transfusion, les effets secondaires et le devenir à long terme des animaux.
MÉTHODE
• Les animaux inclus font l’objet d’un diagnostic de présomption de thrombopénie à médiation immune primaire avec une numération plaquettaire inférieure à 16 000 plaquettes/ µl.
• Les chiens qui ont présenté une rechute ou atteint d’une anémie hémolytique à médiation immune concomitante sont exclus.
• Les animaux sont traités avec de la prednisolone à la dose de 1,5 à 2 mg/kg, deux fois par jour, ou de la dexaméthasone à celle de 0,2 à 0,3 mg/kg/j. De la doxycycline est administrée à 10 mg/kg/j jusqu’à l’obtention des résultats des tests sérologiques. Les chiens sont transfusés si nécessaire. Une dose unique d’hIVIG à 0,5 g/kg ou de vincristine à 0,02 mg/kg est administrée dans les 24 heures qui suivent la présentation de l’animal, une fois le diagnostic de thrombopénie à médiation immune primaire établi.
• La réponse au traitement est considérée comme positive lorsque la numération plaquettaire atteint le seuil de 40 000 plaquettes/µl et l’hospitalisation de l’animal prend fin.
RÉSULTATS
Aucune différence significative n’est mise en évidence. Le temps médian de renouvellement plaquettaire est de 2,5 jours, pour un temps d’hospitalisation moyen de 4 jours. Aucun effet secondaire aux traitements n’a été observé.
Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »
L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.
En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire
Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.
Découvrez en avant-première chaque mois le sommaire du Point Vétérinaire.
Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire