DERMATOLOGIE FÉLINE
Article d’article
Auteur(s) : Catherine Laffort
Fonctions : Clinique vétérinaire Alliance
8, boulevard Godard
33300 Bordeaux
L’équivalent félin de la dermatite atopique canine ou humaine est une entité encore mal comprise et mal définie. Les présentations cliniques et les images histologiques associées sont différentes de ce qui est observé chez l’homme et le chien [10].
Le rôle des immunoglobulines E (IgE) dans la pathogénie des réactions d’hypersensibilité n’est pas parfaitement établi. Ces éléments conduisent certains auteurs à ne pas recommander l’utilisation du terme de dermatite atopique féline et à lui préférer celui plus générique de dermatite par hypersensibilité [2]. D’autres lui associent une définition beaucoup plus restrictive, et la décrivent comme une entité clinique prurigineuse et corticosensible, caractérisée par un érythème facial et podal touchant de jeunes chats [4]. Les auteurs de l’article résumé se rapprochent de ce dernier point de vue en proposant des critères d’inclusion stricts (anamnèse et signes cliniques non saisonniers compatibles [prurit, alopécie auto-induite, alopécie auto-induite et dermatite, prurit cervico-facial] associés à des réactions positives lors de test intradermique ou de dosages sérologiques d’IgE spécifiques), ainsi que des critères de jugement de l’efficacité de l’intervention (diminution du score de prurit et du score lésionnel d’au moins 50 %) qui ont déjà été utilisés et validés chez le chien, mais pas dans l’espèce féline [8]. Ainsi, les auteurs n’ont pas employé comme score clinique le Scorfad (scoring feline allergic dermatitis) qui a été validé récemment chez le chat lors de dermatoses par hypersensibilité, pour l’évaluation de la sévérité de l’atteinte clinique et de la réponse aux interventions thérapeutiques testées au cours d’essais cliniques [14].
Le contrôle symptomatique des signes cliniques et du prurit lors de dermatite atopique chez le chat fait appel aux glucocorticoïdes, à la ciclosporine, à la désensibilisation, aux acides gras essentiels et/ou aux antihistaminiques [7].
Le rôle de l’histamine dans le prurit associé à la dermatite atopique n’est pas totalement élucidé. Cependant, les antihistaminiques H1 oraux sont prescrits depuis de nombreuses années dans le traitement de la dermatite atopique humaine [1]. Il est possible qu’ils aient été utilisés principalement pour leur action sédative, avec des antihistaminiques fortement sédatifs, comme la chlorphéniramine et l’hydroxyzine. Une revue systématique récente a recherché des preuves de l’effet et de l’innocuité des antihistaminiques oraux en monothérapie dans le traitement de la dermatite atopique chez l’homme. Pas une seule étude satisfaisant à tous les critères de sélection n’a pu être identifiée, et les auteurs de cette revue en concluent qu’il n’existe actuellement aucun élément de haut niveau pour étayer ou récuser l’efficacité ou l’innocuité des antihistaminiques H1 oraux en monothérapie de l’eczéma [1]. En dermatologie vétérinaire, seul un petit nombre d’essais cliniques se sont intéressés à l’efficacité des antihistaminiques dans la gestion des dermatoses par hypersensibilité chez le chat. Ces travaux ont montré une réduction du prurit pour 50 %, 45 %, 77 % et 50 % des chats traités respectivement à l’aide de clémastine, de cyproheptadine, de chlorphéniramine et d’oxatomide [5, 6, 11, 13].
La cétirizine est un antagoniste de seconde génération des récepteurs H1 de l’histamine, commercialisée sous forme de dichlorhydrate de cétirizine. C’est un métabolite actif de l’hydroxyzine, et son effet sédatif est moins important que celui de la molécule mère en raison de l’absence de passage à travers la membrane hémato-méningée, en particulier dans l’espèce féline [9]. Ce médicament possède la propriété d’inhiber la migration des éosinophiles au cours de la réaction allergique. Or les éosinophiles semblent jouer un rôle important dans les dermatites allergiques du chat [7]. De plus, la cétirizine est bien tolérée dans cette espèce et sa demi-vie est de 10 heures, ce qui autorise une seule administration quotidienne [9].
Une étude ouverte sur l’efficacité de la cétirizine à la dose de 5 mg/j et par individu pour le contrôle du prurit allergique chez 32 chats a récemment été publiée. Le prurit a été diminué chez 13 chats (41 %) [3]. A contrario, un autre essai ouvert s’intéressant à l’efficacité de cette molécule sur l’inflammation éosinophilique des voies respiratoires a montré son absence d’effet [12]. L’essai choisi est la première étude contrôlée contre placebo sur l’utilisation de la cétirizine en dermatologie féline. Ses résultats semblent en contradiction avec ceux de l’étude ouverte citée ci-dessus puisqu’il n’a pas été possible ici de mettre en évidence une différence statistiquement significative des scores cliniques entre les chats traités avec le placebo et ceux qui ont reçu de la cétirizine [13]. La nature ouverte de l’étude précédente a potentiellement introduit des biais dans l’interprétation des résultats par les propriétaires et a conduit à une surestimation des effets positifs de l’administration de cétirizine. De plus, les critères de jugement de l’efficacité de cet antihistaminique était beaucoup plus sévères dans l’étude contre placebo (amélioration d’au moins 50 % des scores cliniques et de prurit) que dans l’essai ouvert (amélioration d’au moins 25 % du score de prurit). Si un même seuil (50 %) est utilisé, alors, même dans l’étude ouverte, une amélioration n’est observée que dans 12 % des cas. Cette valeur est compatible avec les données présentées dans l’étude contre placebo.
Les résultats de cette étude montrent que la cétirizine n’est pas intéressante en monothérapie pour le contrôle du prurit lors de dermatite allergique chez le chat. Cela ne signifie pas que cette molécule et les antihistaminiques en général ne puissent être utiles comme médicaments d’appoint aux principaux traitements, tels les corticostéroïdes topiques ou systémiques, ou bien en prévention des rechutes. D’autres essais randomisés en double aveugle sont requis avant de formuler de nouvelles recommandations.
Aucun.
OBJECTIF
Évaluer l’efficacité clinique de la cétirizine pour le contrôle du prurit et des lésions associés à la dermatite atopique chez le chat.
MÉTHODE
Dans cet essai transversal aléatoire à double insu contrôlé contre placebo, 21 chats présentant une dermatite atopique d’intensité légère à modérée ont été distribués au hasard en deux groupes. Dans chaque groupe, les chats ont reçu de la cétirizine à la dose de 1 mg/kg ou un placebo une fois par jour pendant 28 jours. Cette première phase a été suivie d’une période sans traitement de 14 jours, puis les groupes ont été permutés et les chats ont reçu le placebo ou de la cétirizine pendant 28 jours supplémentaires. Les propriétaires ont noté l’intensité du prurit sur une échelle de sévérité avant l’inclusion, puis chaque semaine tout au long de l’essai. Les lésions ont été évaluées par le clinicien selon un score clinique validé chez le chien et adapté au chat (Canine Atopic Dermatitis Extent and Severity Index [Cadesi]-03) le jour de l’inclusion et à J28 pour chaque traitement.
RÉSULTATS
Dix-neuf chats ont terminé l’essai. Chez les animaux traités avec de la cétirizine, les scores de prurit et Cadesi-03 modifié ont diminué d’au moins 50 % pour 2 chats sur 19 (10,5 %) pour les deux scores. Une amélioration des deux scores a été observée chez 1 chat. Aucune différence statistiquement significative des scores cliniques n’a pu être mise en évidence entre les chats traités avec le placebo et ceux qui ont reçu de la cétirizine.
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