Avancées majeures dans le domaine du médicament vétérinaire au cours des 40 dernières années - Le Point Vétérinaire n° 340 du 01/11/2013
Le Point Vétérinaire n° 340 du 01/11/2013

THÉRAPEUTIQUE

Dossier

Auteur(s) : Yassine Mallem*, Arlette Laval**, Jean-Claude Desfontis***, Hervé Pouliquen****, Jean-Dominique Puyt*****

Fonctions :
*Unité de pharmacologie et de toxicologie
École nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3
**Unité de pharmacologie et de toxicologie
École nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3
***Unité de pharmacologie et de toxicologie
École nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3
****Unité de pharmacologie et de toxicologie
École nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3
*****Unité de pharmacologie et de toxicologie
École nationale vétérinaire, agroalimentaire
et de l’alimentation de Nantes Atlantique-Oniris
Atlanpôle La Chantrerie
BP 40706, 44307 Nantes Cedex 3

Les avancées majeures des médicaments vétérinaires ont couvert de nombreuses aires thérapeutiques, mais l’essentiel des progrès observés durant 40 ans s’est concentré sur le traitement des maladies infectieuses et parasitaires, ainsi que sur l’enrichissement de l’arsenal vaccinal.

Les 40 dernières années ont été marquées par de grandes découvertes médicamenteuses qui ont constitué des avancées remarquables dans de nombreux domaines thérapeutiques pour toutes les espèces animales. Cependant, les orientations prioritaires de la recherche pharmaceutique se sont concentrées sur trois domaines majeurs : les médicaments anti-infectieux, les antiparasitaires et les vaccins. Ainsi, plus de 1 800 autorisations de mise sur le marché (AMM) ont été accordées à ces trois catégories de médicaments sur la période allant de 1979 à 2013 (figure 1).

1 Innovations du médicament vétérinaire

Les avancées majeures des médicaments vétérinaires portent sur les innovations aussi bien pharmaceutiques que pharmacologiques (pharmacocinétique pharmacodynamique), qui sont source de progrès grâce à une activité nouvelle, à de meilleurs modes d’administration et/ou protocole thérapeutique, et surtout à une tolérance augmentée ou à une efficacité plus importante. Excepté les vaccins, l’industrie pharmaceutique vétérinaire par elle-même a généré peu de nouvelles molécules originales ou classes pharmacologiques. La plupart des spécialités sont des retombées de la pharmacie humaine (médicaments fonctionnels) ou de la recherche phytopharmaceutique (antiparasitaires). Néanmoins, le principal apport de l’industrie vétérinaire concerne des innovations galéniques originales.

Avancées galéniques et pharmacocinétiques

Les principales innovations concernent des formes pharmaceutiques permettant de délivrer le principe actif dans les meilleures conditions d’efficacité et de sécurité, dont certaines sont propres à la médecine vétérinaire. Il s’agit de formulations pour un relargage contrôlé répété ou prolongé, de l’optimisation de protocoles thérapeutiques fondés sur des études de pharmacocinétique/pharmacodynamie (PK/PD) et de l’amélioration de la prise des médicaments.

Ainsi, la mise au point des solutions antiparasitaires “spot on” et “pour on” a remarquablement amélioré le traitement de certaines maladies parasitaires grâce à leur action prolongée. De même, la détermination de la dose de certains médicaments (Prilactone®) fondée sur la modélisation PK/ PD ou la fabrication d’antibiotiques plus appétents (Clavaseptin®), acceptés comme une friandise par les carnivores, illustrent bien les progrès de la pharmacocinétique et de la pharmacie galénique qui ont été réalisés au service de l’efficacité et du bon usage du médicament vétérinaire.

Avancées pharmacodynamiques

L’enrichissement des connaissances en physiopathologie et l’intégration des concepts de la biologie moléculaire et cellulaire dans la recherche pharmacologique ont permis de développer des molécules douées d’effets de plus en plus spécifiques, plus efficaces et mieux tolérées par les animaux. La principale avancée dans ce domaine a porté sur l’apparition de nouveaux principes actifs possédant un mécanisme d’action innovant. Ainsi, la dernière décennie aura vu naître le premier médicament (trilostane) contre l’hypercorticisme canin, dont le bénéfice est lié à l’inhibition de la 3b-HSD. Ont aussi fait leur apparition les premières molécules “ciblées” (masitinib et tocéranib) contre les mastocytomes chez le chien, dont le mode d’action repose sur l’inhibition compétitive des tyrosines-kinases.

Efficacité et innocuité cliniques du médicament vétérinaire

Le progrès apporté par un médicament vétérinaire n’est pas lié à ses seules innovations pharmaceutique et/ou pharmacologique. Son intérêt doit toujours être apprécié par rapport à son efficacité et à sa tolérance cliniques dans les conditions prévues pour son utilisation. Ainsi, un nouveau mécanisme d’action n’est pas en soi un progrès thérapeutique si aucun bénéfice clinique n’est constaté chez l’animal. À titre d’exemple, la nouveauté des coxibs repose sur un nouveau mode d’action, celui de l’inhibition sélective des cyclo-oxygénases 2. Mais ce choix de sélectivité a apporté très peu d’amélioration en termes de tolérance du médicament ou de réduction des effets indésirables. La mise sur le marché très récente du citrate de fentanyl, dans sa formulation injectable, a optimisé la prise en charge de la douleur chez le chien grâce à une efficacité plus importante et surtout à une meilleure tolérance, due à son action moins dépressive sur les fonctions cardiovasculaire et respiratoire.

L’appréciation de la performance clinique d’un médicament peut aussi être fonction de la gravité de la maladie traitée, et un progrès est parfois jugé important même si l’effet obtenu est modeste. Ainsi, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, qui ne sont pas des molécules originales propres à la médecine vétérinaire, ont considérablement allongé la survie des chiens insuffisants cardiaques.

2 Exemples de progrès de quelques classes thérapeutiques

Médicaments antiparasitaires et antiinfectieux

ANTIBIOTIQUES

Les avancées dans le domaine de l’antibiothérapie sont très limitées quant à la découverte de nouvelles molécules. En revanche, elles sont beaucoup plus importantes dans le secteur de la galénique.

La découverte des principales classes d’antibiotiques utilisées aussi bien en médecine vétérinaire qu’en médecine humaine s’est achevée à la fin des années 1970. On a alors assisté à un essoufflement de l’efficacité de la recherche de nouvelles molécules. Aucune nouvelle classe majeure n’a été découverte après les années 1970. Néanmoins, une avancée majeure a été faite dans les années 1980 avec l’introduction des fluoroquinolones de deuxième génération en 1986, puis, quelques années plus tard, de celles de troisième génération, avec principalement, en médecine vétérinaire, l’enrofloxacine, la marbofloxacine et la danofloxacine (figure 2).

Le succès immédiat de cette classe, surtout des fluoroquinolones de troisième génération, tient à ce que ce sont les seuls agents antibactériens efficaces par voie orale dans le traitement d’infections graves provoquées par des bactéries à Gram négatif, et notamment Pseudomonas aeruginosa. Ces molécules se sont très vite imposées en une dizaine d’années comme une classe majeure d’agents antibactériens. Leur puissance d’activité se traduit par des concentrations minimales inhibitrices (CMI) environ 10 fois plus faibles pour les fluoroquinolones de deuxième génération et 100 fois plus faibles pour celles de troisième génération, par rapport à celles de première génération. Leur marge de sécurité est exceptionnelle (index de sécurité élevé) et leurs effets secondaires sont réduits, à l’exception de dégénérescences réversibles des cartilages de conjugaison. Leur spectre antibactérien s’étend aux bactéries à Gram positif, notamment Staphylococcus, ainsi qu’aux mycoplasmes, et, pendant une trentaine d’années, il n’existait pratiquement pas de résistances plasmidiques. Tout cela explique leurs indications très vastes en médecine vétérinaire tant chez les carnivores domestiques (staphylococcies cutanées du chien) que chez les animaux de production (colibacilloses digestives, infections pulmonaires, mycoplasmoses).

Mais le revers de la médaille est là. L’absence de nouvelles classes majeures d’antibiotiques après les fluoroquinolones a fait prendre conscience progressivement, et aujourd’hui de manière dramatique, qu’il fallait apprendre à gérer l’arsenal antibiotique existant, d’autant plus que le développement d’antibiorésistances est un effet secondaire obligatoire inhérent à ce type de traitement. C’est une adaptation des bactéries à l’environnement qu’elles rencontrent. Ainsi, dans le cadre du Plan national de réduction des risques d’antibiorésistance en médecine vétérinaire lancé en 2011 par le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Pêche, lequel vise une diminution de 25 % de l’usage des antibiotiques sur 5 ans, les fluoroquinolones figurent, avec les céphalosporines de troisième et quatrième générations, sur la liste des antibiotiques “critiques”, dont il convient de préserver l’efficacité prioritairement pour l’homme.

Ces 40 dernières années ont également vu l’essor des céphalosporines de troisième (ceftiofur, céfopérazone) et quatrième générations (cefquinome), avec des activités de plus en plus marquées au fil des générations sur les bactéries à Gram négatif responsables d’infections graves en médecine humaine, d’où leur classement parmi les antibiotiques critiques. Parmi elles, la céfovécine présente une particularité, un temps de demi-vie très long, 133 heures chez le chien. L’originalité de cette spécialité est la couverture complète du traitement pendant une douzaine de jours par une seule administration. Classiquement, la durée d’action d’un médicament est obtenue par des artifices galéniques destinés à étaler et à retarder son action, des formes dites à effet retard. Ici, la durée d’action est obtenue, inversement, par une élimination urinaire particulièrement lente du principe actif. Une autre avancée majeure concerne la classe des macrolides avec la découverte du sous-groupe des azalides. Leurs représentants en médecine vétérinaire sont la tulathromycine et la gamithromycine. L’originalité de ces molécules est tout d’abord pharmacocinétique avec, là encore, des demi-vies d’élimination très longues, de l’ordre de près de 4 jours chez les bovins pour la tulathromycine et de plus de 2 jours pour la gamithromycine. Ainsi, une seule injection de tulathromycine maintient des teneurs efficaces dans les poumons pendant une quinzaine de jours chez les bovins et les porcins.

De plus, la dernière décennie a vu l’essor des études PK/PD qui s’intéressent aux propriétés pharmacodynamiques ou, éventuellement, toxiques du médicament, en tenant compte de la décroissance des concentrations actives dans le temps. Ces travaux ont permis d’établir des paramètres d’efficacité de certains antibiotiques, notamment le rapport de l’aire sous la courbe inhibitrice à la CMI, le quotient inhibiteur et le temps pendant lequel la concentration de l’antibiotique se situe au-delà de la CMI.

ANTIPARASITAIRES

Les 40 dernières années ont vu l’essor de médicaments antiparasitaires aussi bien internes qu’externes à la fois efficaces et plutôt inoffensifs pour le patient. Cette recherche particulièrement fructueuse est, pour une partie non négligeable, la retombée de la recherche phytopharmaceutique d’antiparasitaires destinés à la protection des végétaux. Le Régent® (fipronil) et le Gaucho® (imidaclopride) en sont les plus brillants représentants (photo 1).

Dans le domaine des antiparasitaires internes, après la découverte exceptionnelle des benzimidazoles dans les années 1960, le laboratoire Merck Sharp & Dohme (MSD) fait une nouvelle avancée révolutionnaire au début des années 1980 avec la mise au point des macrolides antiparasitaires, plus connus sous le terme d’endectocides. Ces antiparasitaires sont en effet capables d’agir, à la même dose, à la fois sur certains parasites internes (nématodes) et externes (Hypoderma bovis, gales, puces, poux, etc.).

Pour ce qui est des antiparasitaires externes, des classes de molécules très innovantes ont détrôné les organophosphorés et les pyréthrinoïdes avec des cibles d’action plus spécifiques des insectes et par conséquent douées d’une innocuité élevée pour l’animal. Ainsi ont été développées les phénylpyrazoles (fipronil, pyriprole), les néonicotinoïdes (imidaclopride, nitenpyram), les semi-carbazones (métaflumizone) et très récemment les spinosoïdes (spinosad).

Les régulateurs de la croissance des insectes ont ouvert de nouvelles perspectives thérapeutiques, non pas curatives, mais préventives. Les principaux sont des inhibiteurs la synthèse de la chitine (lufénuron) ou des analogues de l’hormone juvénile qui bloquent la mue des insectes (pyriproxyphène, méthoprène). Grâce à leur cible d’action inexistante chez les mammifères, ils présentent une innocuité totale.

Un autre aspect essentiel du progrès des antiparasitaires dans le domaine vétérinaire est la mise au point de formes galéniques qui facilitent la prise du médicament (pâtes antiparasitaires) ou qui procurent un effet retard important. Certaines formes ont des durées d’action de plusieurs semaines ou de plusieurs mois, ce qui permet d’assurer la totalité du traitement par une seule application : solutions spot on et pour on (durée d’action de 6 à 8 semaines), (dispositifs intraruminaux à libération programmée).

Vaccins

Des vaccins adaptés à l’évolution des infections, plus efficaces et mieux tolérés ont été mis au point en médecine vétérinaire.

À partir de préparations simples, du type culture bactérienne ou virale inactivée et adjuvée avec de l’hydroxyde d’aluminium ou de simples émulsions eau dans l’huile plus ou moins bien tolérées, l’évolution des vaccins a été spectaculaire dans la plupart des espèces animales.

L’identification de nouvelles maladies a été rapidement suivie de l’isolement des agents infectieux, puis de la préparation de vaccins. La mondialisation conduisant à l’expansion rapide des infections et les situations panzootiques ont accéléré la recherche et la mise au point de produits efficaces, disponibles dans la plupart des pays du monde. Chez les bovins, le contrôle de nombreuses maladies digestives et respiratoires a été révolutionné par des vaccins : la maladie des muqueuses, le virus respiratoires syncytial, la rhinotrachéite infectieuse. Lors de l’apparition de la fièvre catarrhale maligne, la vaccination a rapidement été possible, chaque fois adaptée au sérotype viral circulant, limitant pertes et difficultés commerciales. Chez le porc, les ravages occasionnés par les mycoplasmoses, l’actinobacillose, et surtout les infections virales : peste porcine classique, maladie d’Aujeszky, syndrome dysgénésique respiratoire porcin (SDRP), porcin de type 2 (PCV2), grippes aviaires, ont rapidement pu être contrôlés. C’est d’ailleurs bien la vaccination qui a permis l’éradication de la peste porcine et de la maladie d’Aujeszky. Chez les volailles, de nouvelles infections comme la maladie de Gumboro, ou, plus récemment, le pneumovirus aviaire du syndrome infectieux de la grosse tête ont pu être efficacement contrôlées. La très menaçante grippe aviaire a été rapidement contrecarrée par des vaccins préparés en urgence, disponibles sous forme d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU). Chez les animaux de compagnie, les avancées les plus intéressantes concernent l’herpèsvirus du chien et la leucose féline. Maladie émergente, l’infection du cheval par le virus West Nile peut désormais être maîtrisée par la vaccination. Les ravages occasionnés par la meurtrière maladie hémorragique virale du lapin ont cessé dès la mise au point d’un vaccin.

Les avancées portent aussi sur les méthodes de préparation des antigènes vaccinaux. De nombreux vaccins sont encore préparés par inactivation à l’aide du formol et de la chaleur, mais le génie génétique permet de produire les antigènes les plus intéressants pour la protection en quantité importante, pour un coût raisonnable en s’affranchissant de la culture classique. Ainsi, le virus de la variole du pigeon est utilisé pour préparer les vaccins contre le virus West Nile, des Escherichia coli recombinants pour le vaccin contre la leucose féline ou pour produire en quantité des toxines importantes pour la protection vaccinale. L’élaboration de chimères, dont le meilleur exemple concerne le PCV2 du porc, chimère entre le PCV1 facile à cultiver et les antigènes les plus intéressants du PCV2, dont la production industrielle est compliquée et de surcroît brevetée.

C’est également le génie génétique qui a permis l’élaboration de souches virales dépourvues d’un ou de plusieurs antigènes mineurs et la mise au point de tests sérologiques permettant ensuite de différencier les animaux vaccinés de ceux qui sont infectés par un virus sauvage. Cette stratégie dite “DIVA” (Differentiating Infection in Vaccinated Animals) a été décisive en particulier pour l’éradication de la maladie d’Aujeszky. Il a aussi permis la préparation de spécialités utilisables par voie orale, inoffensives pour l’environnement, comme l’est le vaccin antirabique utilisé pour l’éradication de la rage chez le renard.

Les progrès portent aussi sur l’innocuité des préparations. Les garanties actuellement offertes sur le contrôle des contaminations des vaccins vivants permettent de les utiliser chez les femelles en gestation, sans redouter les très inopportunes infections transplacentaires connues dans les années 1980 avec les pestivirus. La nature des huiles et le type d’émulsion utilisés comme adjuvants apportent désormais les meilleures garanties en termes de tolérance locale et générale, tout en assurant une stimulation optimale de la réponse immunitaire, qu’il est possible d’orienter vers la voie humorale ou cellulaire selon l’infection ciblée.

Les travaux ont également porté sur la mise au point de vaccins multivalents, et/ou ne nécessitant qu’une injection, de façon à limiter le nombre des interventions nécessaires. La durée de l’immunité est également allongée pour beaucoup de valences vaccinales et une seule injection de vaccin peut désormais protéger pendant plusieurs années. Les vétérinaires doivent donc désormais s’interroger sur l’opportunité de maintenir les rappels annuels de toutes les valences vaccinales chez les animaux de compagnie. Enfin, de nombreux vaccins contribuent à la réduction de l’usage des antibiotiques, notamment en production animale.

Leur effet bénéfique a été particulièrement évident chez le porc, avec en particulier les vaccinations contre Mycoplasmahyopneumoniae, le PCV2 et le SDRP, qui, tout en réduisant la mortalité et les retards de croissance, ont rapidement permis de réduire les traitements en engraissement. Sur le plan digestif, le vaccin contre Lawsonia intracellularis, l’agent de l’iléite hémorragique également impliqué dans les diarrhées grises, représente aussi une avancée décisive.

Médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens

Durant les dernières décennies, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont connu un développement considérable en thérapeutique vétérinaire, lié, entre autres, à une meilleure prise en charge de la douleur chez l’animal, à l’instar de ce qui se passe en médecine humaine.

Dans les années 1970, seule l’aspirine était commercialisée. Le nombre de spécialités s’est ensuite considérablement enrichi en partie en raison des effets indésirables des corticoïdes associés à un usage inapproprié. Mais les AINS ont aussi révélé une toxicité aiguë, notamment digestive et rénale chez les carnivores, ce qui a contraint l’industrie pharmaceutique vétérinaire à sélectionner des molécules de caractéristiques pharmacocinétiques compatibles avec une utilisation chez le chien et le chat.

Les années 1980 ont vu l’arrivée de la flunixine et de l’acide tolfénamique, puis du kétoprofène au début des années 1990. Dans les années 2000, une révolution a été annoncée par les laboratoires avec la mise au point des coxibs (firocoxib en 2004 chez le chien, puis chez le cheval en 2007) doués d’une action plus sélective sur la cyclo-oxygénase de type 2. De nombreux espoirs ont été portés par cette nouvelle classe de molécules. La réduction des effets indésirables n’a pas été aussi prometteuse qu’il était permis d’espérer. En revanche, une des dernières innovations pharmacocinétiques concerne l’augmentation importante de la demi-vie plasmatique du mavacoxib (2 à 3 semaines) qui permet de n’administrer qu’une fois par mois cet anti-inflammatoire chez le chien. Toutefois, le recul est encore limité avec cette nouvelle modalité d’administration qui risque de se heurter à un surdosage et à des effets indésirables lors de réadministration inopportune.

Médicaments du système hormonal

Les avancées pharmacologiques les plus importantes ont concerné le système reproducteur et certaines affections endocriniennes.

Un des progrès les plus importants qui a marqué les années 1980 dans le domaine de la reproduction animale est incontestablement l’arrivée sur le marché des prostaglandines. Leur utilisation pour l’induction des avortements, la synchronisation des chaleurs, le traitement des endométrites et l’induction de la mise bas chez les ruminants, les équins et les porcins, a permis une meilleure maîtrise de la fertilité. Plus tard, les années 1990 ont vu naître le premier antiprogestérone vétérinaire, l’aglépristone qui a constitué une véritable avancée pharmacodynamique dans le traitement du pyomètre ou le déclenchement thérapeutique de la mise bas ou l’interruption de la gestation chez la chienne. Contrairement aux prostaglandines, son principal succès est dû à la quasi-absence d’effets secondaires et à ses indications plus nombreuses. Aussi, l’apparition des agonistes de la GnRH (desloréline) en 2007, utilisés sous forme d’implants sous-cutanés, a marqué une étape clé, notamment dans l’induction de l’ovulation chez la jument et la castration chimique chez le chien.

Les médicaments administrés lors de dysendocrinies ont également pris place dans les avancées pharmacologiques, mais seulement au cours des 15 dernières années. La mise sur le marché du trilostane et du pergolide pour le traitement de la maladie de Cushing chez le chien et le cheval, ainsi que le méthimazole et le carbimazole pour le traitement de l’hyperthyroïdie féline, sont des exemples illustrant la récompense des efforts de la recherche pharmaceutique en endocrinologie vétérinaire. Mais le progrès le plus marquant dans ce domaine serait l’amélioration de la prise en charge du diabète de type 1 chez les carnivores, grâce à la mise à disposition par les laboratoires Intervet de la première insuline vétérinaire d’origine porcine (Caninsulin®) en 1999.

Médicaments du système cardiovasculaire

La cardiologie vétérinaire a connu elle aussi quelques avancées qui ont surtout concerné le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive chez les carnivores. Jusqu’au début des années 1980, les hétérosides cardiotoniques et les diurétiques avaient prouvé tout leur intérêt dans la réduction de la morbi-mortalité cardiaque chez le chien. Depuis, l’arsenal thérapeutique vétérinaire s’est remarquablement enrichi avec la mise sur le marché dans les années 1990, puis les années 2000, des inhibiteurs de l’enzyme de conversion qui ont amélioré considérablement la qualité de vie des chiens insuffisants cardiaques, grâce à leurs effets vasodilatateurs et cardioprotecteurs. Et les inodilatateurs (pimobendane), grâce à leur double propriété inotrope et vasodilatatrice, ont marqué une étape nouvelle dans le contrôle de l’insuffisance cardiaque chez le chien. Puis, au cours de la dernière décennie, de nouvelles classes de médicaments ont vu le jour, les inhibiteurs de l’aldostérone surtout par leur action antifibrotique.

Médicaments du système nerveux

Parmi les médicaments neurotropes, de nombreux progrès en matière d’anesthésie et d’analgésie dans toutes les espèces animales, ainsi que dans la maîtrise des crises épileptiques ont été constatés.

Jusque dans les années 1975, les barbituriques étaient presque les seuls produits utilisés, mais avec des index de sécurité très faibles. L’arrivée dans les années 1980 des sédatifs analgésiques (xylazine), des anesthésiques dissociatifs (kétamine), ainsi que des neuroleptiques (acépromazine), de l’anesthésie volatile (halothane) dans les années 2000, puis des nouveaux anesthésiques volatils (sévoflurane, isoflurane) en 2010 a permis de réaliser des protocoles d’anesthésie et de neuroleptanalgésie avec une bien meilleure sécurité anesthésique.

Dans l’esprit de la pratique de l’anesthésie volatile avec sa réversibilité rapide, l’anesthésie à objectif de dose en perfusion continue du propofol n’en est qu’à ses débuts. Parmi les médicaments analgésiques centraux apparaissent en médecine vétérinaire des agonistes partiels (butorphanol et buprénorphine), qui présentent l’avantage d’être déclassés de la catégorie des stupéfiants et adaptés pour les douleurs de paliers 1 et 2. Avec l’arrivée très récente des morphiniques agonistes entiers (méthadone et fentanyl), il sera maintenant plus souple, pour le vétérinaire, de prendre en charge les douleurs de forte intensité de palier 3 (photo 2).

L’arrivée récente des morphiniques agonistes entiers (méthadone et fentanyl) sur le marché du médicament vétérinaire a considérablement amélioré la prise en charge de la douleur chez les carnivores. Il convient d’espérer que ces molécules ne subiront pas le même sort que la phénopéridine (R 1406) commercialisée vers 1975 et délaissée par la profession vétérinaire en raison de contraintes réglementaires.

Conclusion

De très nombreuses avancées médicamenteuses ont donc marqué la thérapeutique vétérinaire au cours des 40 années écoulées. L’essentiel des progrès réalisés par les industriels du médicament a concerné particulièrement trois domaines : les anti-infectieux, les antiparasitaires et les vaccins. Des avancées tout à fait notables ont aussi concerné les autres classes thérapeutiques aussi bien dans le domaine de la pharmacologie que la galénique dans toutes les espèces animales.

REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient les professeurs B. Siliart (Oniris, LDHVet) et J.-F. Bruyas (Oniris, Unité de biotechnologies et pathologie de la reproduction) pour la relecture d’une partie du manuscrit, et le docteur L. Moallic (Agence nationale du médicament vétérinaire) pour avoir fourni la liste de toutes les spécialités vétérinaires.

Conflit d’intérêts

Aucun.

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