Hernie discale thoraco-lombaire chez le chien - Le Point Vétérinaire expert rural n° 332 du 01/01/2013
Le Point Vétérinaire expert rural n° 332 du 01/01/2013

CHIRURGIE DU RACHIS

Dossier

Auteur(s) : Chantal Ragetly*, Guillaume Ragetly**

Fonctions :
*Clinique vétérinaire Évolia
43, avenue du Chemin-Vert
95290 L’Isle-Adam
cragetly@yahoo.fr
**Centre hospitalier vétérinaire Frégis
43, Avenue Aristide-Briand
94110 Arcueil
gragetly@yahoo.fr

Les hernies discales les plus fréquentes sont thoraco-lombaires. Certaines races sont prédisposées. La correction est une décompression médullaire (hémilaminectomie en général), les taux de récupération atteignent 96 % si le diagnostic est précis et l’intervention rapide.

La hernie discale thoraco-lombaire est le motif de consultation le plus commun en neurologie vétérinaire canine. L’examen neurologique doit être complet et la confirmation du diagnostic est réalisée par l’imagerie. Selon la sévérité de l’atteinte, un traitement médical ou chirurgical est prescrit avec un très bon pronostic tant que la nociception profonde est conservée.

1 Signalement

Les hernies discales thoraco-lombaires constituent environ 85 % des hernies discales avec une prédisposition marquée des races chondrodystrophiques, notamment les bouledogues français et les teckels [12, 19]. Les teckels sont réputés présenter 10 à 12 fois plus de risque de développer ce type de hernies que toutes les autres races confondues. Ces chiffres ne sont pas disponibles pour les bouledogues français mais ils sont probablement similaires. Environ 75 % des extrusions discales thoraco-lombaires surviennent chez les animaux entre 3 et 6 ans. L’obésité et la conformation anatomique (longueur de la colonne vertébrale et distance entre le tendon patellaire et le calcanéum) ont été identifiées comme facteurs de risque. Les hernies discales sont très rares chez le chat, le plus souvent à la suite d’un traumatisme.

2 Examen clinique

Signes cliniques

Par opposition à la hernie discale cervicale(1),la hernie discale thoraco-lombaire est moins douloureuse mais entraîne un déficit moteur très important. Ce dernier est cantonné aux membres postérieurs, allant de la para-parésie à la paraplégie.

Chez les animaux concernés, une atteinte motrice est mise en évidence, marquée aux membres postérieurs avec des déficits proprioceptifs précoces et une altération tardive, mais péjorative, de la nociception profonde. Une douleur thoraco-lombaire est presque toujours présente. Elle provient des dommages causés à l’anneau fibreux, au ligament longitudinal dorsal, aux racines nerveuses et aux méninges par l’extrusion ou la protrusion discale(2). L’atteinte neurologique est d’ordinaire mesurée sur une échelle de 1 à 5. Le stade 1 correspond à un animal chez lequel seule une hyperesthésie de la colonne vertébrale est présente ; celle-ci peut être intermittente ou permanente, s’accompagner d’une voussure du dos et d’un abdomen tendu. Il n’est pas rare que ce premier stade soit confondu avec un abdomen aigu. Lors de stade 2, une légère ataxie ambulatoire est observée. L’animal parvient à se lever seul et à effectuer quelques pas, avec une incoordination motrice des membres postérieurs qui se croisent et manifestent chacun des troubles proprioceptifs. Les individus qui présentent un stade 3 sont non ambulatoires par atteinte du tonus musculaire avec une ataxie sévère. Ceux qui se trouvent aux stades 2 et 3, encore capables de mouvements volontaires, sont dits paraparétiques. Lors de stade 4, la fonction motrice volontaire est abolie. L’animal est paralysé ou paraplégique, avec une sensation de la douleur profonde (photo 1). Enfin, la sensation de douleur profonde est absente lors de stade 5 (encadré).

Dans la plupart des cas, un motoneurone central est présent (myélopathie T3-L3) avec le plus souvent une lésion située entre T12 et T13, T13 et L1 ou L1 et L2 (au milieu du dos, à la charnière entre la colonne vertébrale thoracique très rigide en raison des côtes [et de leurs ligaments intercapitaux] et la colonne vertébrale lombaire, plus mobile). Cependant, 10 à 15 % des chiens présentent une lésion localisée entre L3 et L7 avec des signes cliniques compatibles avec un motoneurone périphérique (diminution ou perte du réflexe rotulien indiquant une atteinte du segment L4-L6 de la moelle épinière, généralement due à une extrusion du disque intervertébral situé entre les vertèbres L3 et L4, soit 64 % des cas) [7].

Les troubles vésicaux associés aux hernies discales peuvent être liés à une atteinte de la moelle épinière proximale, des segments médullaires sacraux (motoneurone central), des racines nerveuses ou des segments médullaires sacraux (motoneurone périphérique). Lors d’atteinte de type motoneurone central, le muscle détrusor est paralysé et la vessie n’est pas vidangée, sauf lorsque la pression intravésicale est supérieure à celle du sphincter urétral. Dans certains cas, un réflexe de vidange peut se développer après plusieurs semaines. Lors d’atteinte de type motoneurone périphérique, le tonus sphinctérien est diminué et l’urine s’écoule constamment surtout en cas de dépression même modérée sur la vessie.

Démarche diagnostique

Un examen clinique complet doit être réalisé pour déterminer si l’animal est atteint d’un trouble neurologique, localiser le segment concerné et évaluer la gravité de l’atteinte.

La première étape consiste à s’assurer que l’affection est d’origine neurologique. La présence de réactions posturales diminuées ou absentes (placer proprioceptif, sautillements, déplacements latéraux et brouette) et d’une ataxie (perte de la coordination motrice) signe une origine neurologique du trouble de la démarche. Il convient de ne pas confondre un trouble neurologique avec une atteinte orthopédique bilatérale, qui peut mimer, dans certains cas, une myélopathie (par exemple une rupture bilatérale du ligament croisé antérieur ou une dysplasie coxo-fémorale bilatérale).

La deuxième étape consiste à différencier une atteinte neurologique périphérique d’une atteinte axiale (cerveau-moelle épinière). Lors de hernie discale thoraco-lombaire, les signes cliniques sont bilatéraux (symétriques ou asymétriques), ce qui plaide pour une atteinte du système nerveux axial.

Puis il convient de distinguer une atteinte axiale touchant la moelle épinière d’une atteinte du cerveau. Lors d’atteinte de la moelle, l’examen des nerfs crâniens est normal et il n’existe pas de déficit du niveau de conscience, notamment.

L’étape suivante est de déterminer si c’est la moelle cervicale ou thoraco-lombaire qui est touchée. En cas de hernie discale thoraco-lombaire, seuls les membres postérieurs sont atteints et une absence de cervicalgie est notée. Ensuite le clinicien doit distinguer un motoneurone périphérique (atteinte lombo-sacrée, L4-sacrum) d’un motoneurone central (atteinte thoraco-lombaire, T3-L3). Les réflexes médullaires sur les membres postérieurs (retrait postérieur, réflexe patellaire, réflexe tibial cranial, stimulation du nerf sciatique) sont normaux à augmentés lors de trouble du segment T3-L3, alors qu’ils sont diminués à absents lors d’atteinte lombo-sacrée.

Enfin pour déterminer la gravité de l’atteinte, le stade neurologique doit être déterminé. Si l’animal est paralysé, la nociception profonde doit être testée pour différencier le stade 4 du stade 5. Son existence est confirmée si l’animal a une réaction physiologique à la douleur (tourne la tête, se plaint, son rythme cardiaque s’accélère, etc.). Une simple flexion de membre ne signifie pas que la nociception profonde est intacte (réflexe).

3 Imagerie

Le diagnostic définitif de hernie discale, la localisation longitudinale et la latéralisation du matériel discal hernié sont effectués par myélographie, tomodensitométrie avec ou sans contraste (scanner ou myéloscanner) ou imagerie par résonance magnétique (IRM)(3).

4 Traitement des hernies discales thoraco-lombaires

Lors de hernie discale thoraco-lombaire, les options thérapeutiques sont chirurgicales ou médicales. Les critères de choix sont, en priorité, le stade de l’atteinte, puis l’éventuelle non-réponse au traitement médical et l’attente des propriétaires.

Traitement médical

Les chiens atteints aux stades 1 et 2 sont considérés comme candidats pour le traitement médical. Celui-ci est constitué d’une association de repos strict (cageothérapie), d’administration d’anti-inflammatoires, d’analgésiques, et, éventuellement, de relaxants musculaires [9]. Le confinement strict en cage pour une durée de 6 semaines est recommandé pour permettre la résolution de l’inflammation du disque intervertébral et de la moelle épinière, pour favoriser une certaine diminution de la compression médullaire (probable étalement spontané du matériel hernié dans l’espace canalaire extradural et résorption de l’hématome) et promouvoir une fibrose au niveau de la rupture de l’anneau fibreux.

Les corticostéroïdes ont été largement utilisés pour traiter les traumatismes de la moelle épinière. Les mécanismes thérapeutiques recherchés sont la réduction de l’œdème de la moelle épinière, l’inhibition de la réponse inflammatoire et l’amélioration du flux sanguin dans le canal médullaire. Cependant, les effets secondaires dévastateurs (hémorragie gastro-intestinale, pancréatite, ulcération et perforation du côlon) des doses très élevées de méthylprednisolone, qui ont été recommandées jusqu’à il y a quelques années (30 mg/kg), ont conduit à reconsidérer son utilisation en se limitant à des doses anti-inflammatoires (0,5 à 1 mg/kg/j). D’après deux études récentes, les chiens traités avec des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou de la méthylprednisolone présentaient moins de risque de développer une récidive ou des complications telles qu’une infection urinaire ou une diarrhée que les animaux qui reçoivent de la dexaméthasone [14, 15]. De plus, l’administration de glucocorticoïdes a récemment été corrélée avec un effet négatif sur les chances de succès et la qualité de vie, alors que les chiens recevant des AINS sont davantage susceptibles d’obtenir un meilleur résultat [13].

Le débat persiste au sein des neurologues sur la classe d’anti-inflammatoires à utiliser, mais tous s’accordent sur les risques importants lors d’utilisation de doses trop élevées. Si des anti-inflammatoires stéroïdiens sont employés, ce sont des doses anti-inflammatoires qui doivent être administrées.

En cas de douleur importante (fréquence cardiaque élevée, prostration, gémissements, etc.), des analgésiques doivent être administrés par voie injectable ou orale (tramadol 2 à 5 mg/kg deux ou trois fois par jour) en plus des AINS.

L’électro-acupuncture a été une option envisagée, surtout chez les chiens atteints d’un stade 5 depuis plus de 48 heures, mais les effets positifs semblent très limités, la seule étude complète sur le sujet comportant de nombreux biais [10].

Le taux de réussite du traitement médical, réservé aux stades 1 et 2, se situe autour de 55 à 100 %. Une récidive des signes cliniques est observée chez 31 à 50 % des chiens et 14,4 % des cas sont en échec thérapeutique, avec une détérioration continue ou une absence d’amélioration de l’état neurologique.

Traitement chirurgical

Les animaux à un stade de dégradation neurologique égal ou supérieur à 3 et ceux aux stades 1 et 2 qui ne répondent pas au traitement conservateur sont considérés comme des candidats pour un traitement chirurgical. Ce dernier consiste à décomprimer la moelle épinière et/ou les racines nerveuses au niveau des espaces intervertébraux touchés. En cas d’extrusion discale, le matériel hernié responsable de la compression médullaire se trouve dans le canal rachidien. Il convient donc de pénétrer ce canal pour l’en extraire.

La laminectomie dorsale est la technique originellement décrite pour le traitement chirurgical de la hernie discale thoraco-lombaire. Elle consiste à décomprimer la moelle dorsalement en retirant le plafond vertébral (lame et pédicules) avec deux variantes (dites Funkquist 1 et 2 selon le degré d’ablation pédiculaire). Cependant, elle est tombée en désuétude car elle ne permet pas une gestion chirurgicale correcte de la hernie discale. De nombreux cas de compression médullaire persistante ou récidivante à la suite de la formation de membrane cicatricielle et de l’impossibilité de retirer complètement le matériel discal hernié ont été décrits. Cette technique peut produire une déstabilisation importante de la colonne vertébrale.

L’hémilaminectomie est la technique de choix car elle permet un meilleur accès à la région ventrale et ventro-latérale de la moelle épinière (figure 1). Elle est considérée comme l’approche standard des hernies discales thoraco-lombaires (photos 2 et 3). Il est impératif que la localisation avec latéralisation précise de la lésion soit déterminée avant l’intervention chirurgicale(3). L’accès à une extrusion discale située du côté controlatéral à l’approche d’hémilaminectomie est contre-indiqué car il est difficile sans une manipulation excessive de la moelle épinière. Si une myélographie est réalisée et ne permet pas d’établir la latéralisation du matériel hernié, un scanner ou une IRM sont alors nécessaires. Le matériel hernié est délicatement retiré à l’aide d’instruments appropriés (photo 4). La moelle reprend alors une configuration normale (plus de déplacement dorsal ou dorso-latéral) (photo 5). Une durotomie (incision de la dure-mère) n’est pas réalisée, sauf en cas d’évidence d’un hématome sous-dural, mais cette technique est controversée. Une greffe de tissu graisseux, ou une éponge de gélatine (Pangen®(4), Gelfoam®(4)) peut être placée au-dessus du site d’hémilaminectomie pour tenter de le protéger [6].

La mini-hémilaminectomie constituée par une pédiculectomie partielle ou totale est une variante mini-invasive de l’hémilaminectomie qui préserve les facettes articulaires. Cette technique est moins déstabilisante biomécaniquement que les précédentes, mais nécessite une localisation très précise du matériel discal hernié par imagerie médicale moderne (scanner, myéloscanner ou IRM).

Dans le cadre des hernies discales chroniques, et notamment des protrusions discales chez les chiens de race de grand format, aucune extrusion du noyau pulpeux du disque n’est notée dans le canal, mais il existe un bombement du disque par hypertrophie de la portion dorsale de l’anneau fibreux. Dans un tel cas, l’hémilaminectomie est peu décompressive. Une corpectomie latérale partielle peut être réalisée pour cette indication (figure 2). Le corps vertébral est partiellement retiré à l’aide d’une fraise pneumatique afin d’accéder au canal vertébral ventral, de part et d’autre de la portion dorsale du disque [16].

La fenestration du disque intervertébral opéré ou des disques adjacents peut également être nécessaire au moment de l’intervention. Elle est préconisée comme mesure prophylactique pour prévenir l’extrusion de matériel discal dégénéré au niveau des espaces intervertébraux chirurgicalement décompressés et des espaces adjacents qui semblent prédisposés à une future hernie (noyau déjà minéralisé ou protrusion/extrusion déjà suspectée) [4]. Elle consiste à inciser l’anneau fibreux par abord latéral et à retirer le plus possible de noyau pulpeux afin de limiter les futures extrusions du noyau. Cela crée une zone de fragilité permettant de faciliter une extrusion latérale (sans compression de la moelle épinière) plutôt que dorsale (avec compression de la moelle épinière). L’approche latérale est plus efficace et permet de retirer plus de matière que les approches dorsale et dorso-latérale. Des solutions alternatives à la fenestration chirurgicale existent : ablation discale percutanée au laser ou discectomie percutanée partielle sous fluoroscopie [1, 11].

5 Pronostic

Le pronostic des hernies discales traitées chirurgicalement ou médicalement est le sujet de la plupart des études récentes [2-4, 7, 17]. La présence de la sensation de douleur profonde et la durée de son absence semblent être les facteurs pronostiques les plus importants. Lors d’extrusion discale thoraco-lombaire, les chiens dont la sensation de douleur profonde est préservée ont un taux de récupération de l’ordre de 80 à 96 % après la décompression chirurgicale. En l’absence de sensation de douleur profonde, le pronostic de rétablissement postopératoire chute à 29 à 76 %, voire moins de 5 % si la douleur profonde est absente depuis plus de 48 heures. D’après Olby et coll., 58 % des chiens sans douleur profonde ont retrouvé cette sensation et la capacité de marcher et 11 % la capacité de marcher sans récupération de la sensation. Dans cette étude, la sensation de douleur profonde est revenue dans les 2 semaines suivant la chirurgie chez 78 % des chiens [17].

La rapidité d’apparition des signes cliniques est aussi un facteur pronostique : 70 % des chiens devenus paraplégiques (stade 4) en moins de 2 heures ont récupéré en phase postopératoire contre 100 % des chiens devenus paraplégiques en plus de 2 heures, mais moins de 2 jours [8]. La gravité de la souffrance médullaire semble liée à la vitesse d’éjection du disque. Si la hernie est “explosive”, la moelle souffre deux fois, en raison d’une part du volume du matériel qui la comprime et, d’autre part, de la contusion liée à l’impact du matériel hernié très rapidement. De plus, les chiens présentant des signes cliniques pendant plus de 6 jours ont pris en moyenne 4,5 jours supplémentaires pour retrouver la capacité à marcher. Enfin, il n’existe pas de différence en termes de pronostic entre les chiens atteints d’une lésion caudale lombaire (motoneurone périphérique) et ceux qui présentent une lésion thoraco-lombaire (motoneurone central).

L’utilisation de la durotomie pour décomprimer la moelle et évaluer directement celle-ci, afin d’établir un pronostic de récupération, est controversée. Aucun bénéfice de cette technique n’a été démontré sur le flux sanguin [2]. Seulement 10 % des axones (situés dans la substance blanche) sont nécessaires pour qu’un individu puisse marcher. L’euthanasie, sur les constats de la durotomie, peut être prématurée, sauf en cas d’absence de récupération dans les 4 semaines suivant une chirurgie ou si un développement de myélomalacie(2) ascendante et descendante est observé.

Lorsqu’un animal est atteint de hernie discale thoraco-lombaire, le risque de récidive est de 2,7 à 41,7 % [3]. Aucune modification de l’activité n’a pu être mise en relation avec une diminution de ce risque. En revanche, le risque de rechute à un espace non fenestré est six fois plus grand que pour un espace traité et la fenestration prophylactique réduit le risque global de récidive d’extrusion discale (de 18 à 7,5 %) [4]. La fenestration reste cependant controversée car elle pourrait augmenter le risque de récidive sur les espaces adjacents (effet domino), sachant qu’il n’est pas possible de fenestrer tous les disques et que ces espaces non fenestrés peuvent être plus délicats à traiter (racines nerveuses au niveau des intumescences brachiale et lombo-sacrée).

Enfin, en cas d’absence d’amélioration clinique ou de détérioration de l’état neurologique à court terme après une hémilaminectomie, il convient de refaire un examen d’imagerie car une compression résiduelle de la moelle épinière peut subsister. Le plus souvent, le chirurgien a laissé du matériel.

6 Suivi, soins postopératoires

En phase postopératoire, la gestion de la douleur est un facteur important. Des dérivés morphiniques injectables (morphine, 0,1 à 0,2 mg/kg, voire 0,4, par voie intraveineuse [IV] ; fentanyl à 5 µg/kg/h en IV) sont conseillés dans les premiers jours, associés à un AINS (sauf si l’animal a reçu des corticoïdes). Les corticoïes sont aussi utilisés aux doses classiques (à condition de ne pas les ajouter aux AINS). Ensuite, un relais (AINS et tramadol, 5 mg/kg deux à trois fois par jour par voie orale) est institué pour une durée de 10 à 15 jours en fonction de l’état de l’animal.

L’animal doit être gardé au repos strict pendant une durée minimale de 1 mois, puis une reprise progressive de l’activité peut être envisagée. L’utilisation d’une cage est recommandée, laquelle doit être propre, sèche et munie d’un matelas épais pour prévenir la formation d’escarres. Pendant cette période, la rééducation fonctionnelle peut être commencée. Des exercices tels que massages, flexion-extension des membres, position debout ou marche assistée sont recommandés (photo 6). L’utilisation d’un tapis roulant immergé est extrêmement bénéfique pour ces animaux (photo 7).

Tant que les déficits de la motricité sont importants, l’animal ne peut uriner par lui-même. Il va parfois uriner dans sa cage par trop-plein. Ainsi, il convient toujours de bien surveiller la taille de la vessie pour confirmer l’absence de stase urinaire lorsque les mouvements moteurs sont faibles ou absents. Par conséquent, une vidange vésicale doit être réalisée deux à quatre fois par jour par le personnel médical ou les propriétaires. Plusieurs méthodes sont employées : le sondage urinaire in-ter-mittent ou continu, ou la vidange manuelle de la vessie par taxis externe (photo 8) [5]. Si le tonus du sphincter urétral est très important et empêche une vidange vésicale aisée, une prescription de diazépam (Valium®, 0,2 mg/kg per os trois fois par jour) ou d’alfuzosine (Xatral®, 0,01 à 0,1 mg/kg per os deux ou trois fois par jour) peut être envisagée. Puis, lorsque la motricité réapparaît, il convient de laisser à l’animal l’opportunité d’uriner par lui-même.

Enfin, 38 % des chiens développent une infection urinaire dans les 3 mois après l’intervention, dont 60 % d’infections occultes [18]. Des cultures urinaires doivent être réalisées à intervalles réguliers et un traitement résultant de l’antibiogramme est prescrit.

Conclusion

Lors de suspicion clinique de hernie discale thoraco-lombaire, un traitement médical est prescrit chez les chiens ambulatoires (stades 1 et 2). Lors d’atteinte plus sévère ou de non-réponse au traitement médical, une approche chirurgicale est nécessaire. Elle est fondée sur un examen d’imagerie qui confirme la suspicion clinique et précise la localisation de la lésion. Le pronostic est très bon, avec une récupération fonctionnelle, dans la plupart des cas où la sensation de douleur profonde est conservée. La gestion postopératoire contribue largement à une récupération optimale. Bien que rare, les hernies discales peuvent être rencontrées chez le chat. Leur gestion diagnostique et thérapeutique est similaire à celle du chien.

  • (1) Voir l’article “Hernie discale cervicale chez le chien” de G. Ragetly et coll., dans ce numéro.

  • (2) Voir l’article “Pathogénie de la hernie discale chez le chien” de J. Carayol et coll., dans ce numéro.

  • (3) Voir l’article “L’imagerie au service du diagnostic de hernie discale” de G. Ragetly et coll., dans ce numéro.

  • (4) Médicament à usage humain.

Références

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ENCADRÉ
Évaluation de la nociception

→ Technique

Pincement d’un doigt à l’aide d’un clamp ou grattage du périoste du doigt avec une aiguille.

→ Réponse de l’animal

Il tourne la tête, essaie de mordre, se plaint. Sa fréquence cardiaque ou respiratoire augmente.

Le fait que l’animal fléchisse le membre postérieur ne relève pas de la sensibilité profonde, mais est un réflexe de flexion positif.

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